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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.

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27 mars 2015

Les premiers mois de l'année 1918 sur le front des Vosges (1ère partie)

Le_Violu_1

 

Le 149e R.I et toutes les unités de la 43e D.I. viennent de quitter le département du Doubs. Les premiers éléments de la division, qui ont commencé à se mettre en mouvement à partir du 17 janvier, sont transportés par voie de chemin de fer dans la région vosgienne de Bruyères-Corcieux. Les unités de la division du général Camille Michel doivent se tenir prêtes à relever celles de la 166e D.I. qui sont installées entre le col du Bonhomme et Provenchères-sur-Fave.

 

Dans ce secteur, qu’une poignée d’anciens, toujours présents au 149e R.I. connaissent bien, le front est resté, à peu de chose près, identique à celui de 1914. Seuls quelques villages sont « passés » du côté allemand.

 

La zone dans laquelle va s’installer la 43e D.I. est réputée pour être difficile d’accès. Ici, personne n’aurait l’idée de lancer une offensive de vaste envergure. Cette ligne de front bénéficie depuis plusieurs mois d’une sorte d’immunité qui la protège de toute agression massive. Les attaques françaises de 1915 et de 1916, visant à faire progresser l’infanterie dans les Vosges et en Alsace, ont fait rentrer quelques noms dans la mémoire collective. Périodiquement, les communiqués officiels rappellent certains d’entre eux : l’Hartmannswillerkopf, le Linge, le Violu, et le Ban de Sapt. En dehors de ces lieux, le coin est réputé pour être calme.

 

Il est important de signaler que, même si un secteur est donné comme étant une zone calme, cela ne veut pas dire qu’il y fait bon vivre. Des coups de mains réguliers, des patrouilles quasi journalières pour essayer de savoir ce qui se passe du côté de l’ennemi, de rudes et pénibles travaux effectués par les hommes en première ligne, des bombardements très localisés, parfois d’une extrême violence, sont le lot quotidien vécu par les hommes, au cours de cette période hivernale.

 

Installation du 149e R.I. en Lorraine 

 

18 janvier 1918 

 

Les premiers éléments du 149e R.I. viennent s’installer dans le secteur de Corcieux. Les mouvements de la 43e D.I. se poursuivent tout au long de la journée.

 

19 janvier 1918 

Les ordres de relève en première ligne commencent à être donnés aux officiers concernés. Les éléments de la 166e D.I. qui occupent le secteur depuis le mois de juillet 1917 vont bientôt être remplacés par ceux de la 43e D.I..

 

20 janvier 1918 

 

Carte_1_Vosges_janvier_1918

 

En attendant de rejoindre ses nouveaux emplacements, le 149e R.I. a pris position dans les villages suivants :

 

E.M. à Corcieux

 

C.H.R. dans les baraquements du camp de Corcieux et de Ruxurieux

 

1er bataillon à Ruxurieux, Mariemont et Arrentès-de-Corcieux

 

2e  bataillon à Neune, Vienville et Thiriville

 

3e bataillon à Bellegoutte, Rambaville, la Charmelle, le Haut-de-Bémont, la Vichibure et le Chenet

 

21 janvier 1918

 

Le 149e R.I. quitte les lieux occupés la veille. Il doit se rapprocher de la zone de front. Dans la soirée, les 3 bataillons du régiment cantonnent dans les communes suivantes :

 

1er bataillon à Clefcy

 

2e bataillon à Fraize

 

3e bataillon à Plainfaing

 

Carte_2_Vosges_janvier_1918

 

Louis Cretin évoque cette période dans son témoignage :

 

« … Après un repos excellent dans le Doubs à Hérimoncourt et Seloncourt, nous cantonnons à Corcieux le 18 janvier 1918, après notre arrivée par le train à Laveline-devant-Bruyère. Le 19, repos, le 20, nous partons à pied, nous traversons le col du « plafond » Anould et nous venons cantonner à Fraize où nous demeurons jusqu’au 23. »

 

Au cours de cette journée, une compagnie de mitrailleuses du 31e B.C.P. est mise à la disposition du 149e R.I. pour remplacer la C.M. 1 du 149e R.I. qui est toujours détachée au cours de tir indirect, au fort du Rudolphe. Il est prévu que cette compagnie rentre aux alentours du 31 janvier.

 

Le secteur 

 

L’auteur de l’ouvrage « La 43e Division pendant la campagne de 1918 » nous donne quelques précisions sur la situation du secteur.

 

Les premières positions ne sont vraiment pas fameuses, leurs lignes successives sont très mal protégées et les réseaux de fils de fer sont particulièrement clairsemés. Du fait qu’il n’y ait jamais eu de grandes offensives dans cette zone depuis quatre ans, personne n’a jamais pris ni la peine, ni le temps de faire construire de robustes abris. Les hommes vivent en toute tranquillité dans des baraquements fabriqués à partir de simples planches et qui sont livrés à la seule défense de la forêt.

 

Depuis longtemps, les deux antagonistes cherchent à faire d’importantes économies d’effectifs. La densité des troupes d’occupation est donc réduite à son minimum. Le secteur est très peu garni en largeur, il ne l’est pas davantage en profondeur. Les réserves au niveau des divers échelons du commandement sont quasiment inexistantes.

 

Répartition des unités de la 43e D.I. 

 

Du fait de la grande surface à couvrir le commandement de la division est organisé de la manière suivante :

 

L’échelon de l’infanterie divisionnaire est purement et simplement supprimé. C’est depuis Saint-Dié que le général Camille Michel commande directement les trois sous-secteurs occupés par sa division.

 

Le premier sous-secteur, qui se trouve à gauche, est pris en charge par les bataillons de chasseurs. Les 1er et 31e B.C.P., qui se sont installés dans la vallée de la Fave, tiennent au nord de la rivière, les pentes de l’Ormont et au sud la croupe du Camp Romain. Le deuxième sous-secteur qui se trouve au centre du dispositif est protégé par le 158e R.I. renforcé par un bataillon du 143e R.I.T. Tous ses hommes sont à cheval sur la route du col de Sainte-Marie. Le 149e R.I. prend place dans le troisième sous-secteur avec un détachement de cavaliers à pied. Les trois bataillons du régiment sont échelonnés sur les hauteurs boisées de la Cude, du Violu et du Rocher du Coq de Bruyère. Le colonel Boigues s’installe dans le P.C. Brial.

 

Au jour le jour 

 

Le_Violu_2

 

23 janvier 1918

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. relève un bataillon du 294e R.I. à la Grande Goutte, celle-ci se passe sans incident.

 

24 janvier 1918

 

Le colonel Boigues du 149e R.I. prend le commandement du sous-secteur A à partir de 8 h 00.

 

25 janvier 1918

 

Le 3e bataillon du 149e R.I. quitte Plainfaing pour venir relever un bataillon du 294e R.I. qui se trouve au C.R. Violu.

 

26 janvier 1918

 

Dans la nuit du 25 au 26, le 1er bataillon du 149e R.I. et la C.M. 2 du 1er B.C.P. de Clefcy relèvent un bataillon du 294e R.I. au C.R. de la Cude.

 

Carte_3_Vosges_janvier_1918

 

27 janvier 1918

 

Des officiers allemands sont aperçus dans la tranchée de Constantinople vers 9 h 15, mais il ne se passe rien de plus. Plusieurs patrouilles sont envoyées pour vérifier le réseau de fils de fer.  

 

28 janvier 1918

 

Le colonel Boigues est informé que la C.M.1 de son régiment vient de terminer les cours de tir indirect de Belfort. Cette compagnie doit débarquer le 29 janvier à Corcieux-Vanémont puis cantonner jusqu’au lendemain à Vanémont.

 

Quelques tirs de harcèlement ont lieu sur tout le secteur, mais la journée reste calme dans l’ensemble. 

 

Une patrouille est envoyée dans le secteur occupé par le 3e bataillon du 149e R.I. Elle doit effectuer une mission de reconnaissance, et vérifier l’état des réseaux de barbelés. Une partie du secteur T 31, situé dans un espace de 50 à 80 m de large est visité. Dans la zone qui fait face à une tranchée entre T 31 et T 32, les hommes constatent trois brèches de 5 m de longueur, qui sont espacées d’une distance de cinquante mètres les unes des autres. Le réseau français qui se trouve en face est intact.

 

Les fermes Gretschy et Wustenloch qui se trouvent en face du 2e bataillon du 149e R.I. sont inoccupées par l’ennemi.

 

Poste_de_commandement_la_Cude

 

Tout au long de la journée, des travaux d’amélioration sont effectués dans les abris, dans les tranchées et dans les boyaux. Il est demandé aux hommes d’accorder une attention toute particulière au camouflage. La pose de fil de fer reste l’activité principale du fantassin.

 

Un boyau de jonction entre le P.C. combat et le boyau du soldat Servant est en cours de construction dans le C.R. de la Cude.

 

29 janvier 1918

 

La journée est calme. Il y a simplement une faible activité d’artillerie de part et d’autre. Une patrouille allemande est repoussée à coup de grenades devant le Violu.

 

30 janvier 1918

 

À 0 h 30, une patrouille ennemie constituée de 12 hommes s’approche à 150 m de P.P.6. Celle-ci est accueillie par le feu nourri d’un F.M. et par le jet d’une vingtaine de grenades. Elle se retire aussitôt.

 

Une patrouille française est envoyée vers 7 h 00, celle-ci constate que les réseaux ont été endommagés. Les hommes découvrent également un cadavre, des armes et des équipements qui ont été abandonnés sur place. Deux heures plus tard, une quinzaine d’Allemands sont vus en train d’examiner nos lignes.

 

Vers 13 h 15, l’ennemi effectue quelques tirs de mitrailleuses sur le C.R. de la Cude à partir du château de Fête. À 22 h 45, des mitrailleuses ennemies arrosent le secteur du ravin de la Cude.     

 

La_Cude_1

 

Des travaux de pose de réseaux sont effectués. Des abris de mitrailleuses et des emplacements de F.M. sont également aménagés.

 

De très nombreux tirs d’artillerie sont échangés tout le long de la journée et tard dans la soirée.

 

Peu avant 23 h 00, l’artillerie allemande effectue des tirs violents sur les premières lignes françaises du côté du P.A. du Ravin, du P.A. Regnault, de la Rotonde et sur l’observatoire Pacchiodo.

 

La compagnie de mitrailleuses du 1er bataillon du 149e R.I. doit se mettre en route pour venir s’installer à Verpellière en fin de journée. Elle suit l’itinéraire Corcieux, Anould, Fraize, la Croix-aux-Mines.

 

Les problèmes de relève de la C.M.2 du 1er B.C.P. par la C.M.1 du 149e R.I., doivent être réglés par le colonel qui commande l’I.D..

 

Carte_4_Vosges_janvier_1918

 

Quatre soldats du 149e R.I. sont blessés au cours de la journée.

 

31 janvier 1918

 

La nuit du 30 au 31 est marquée par une tentative de coup de main réalisé par les Allemands sur la région nord du C.R. la Cude. L’affaire a débuté à 22 h 40, avec un violent tir de minen et d’artillerie sur les organisations du P.A. Regnault. Les communications subissent également des tirs de mitrailleuses.

 

Des fantassins ennemis attaquent en même temps les P.P. des Ta 46, Ta 48 et Ta 50.  Après une âpre lutte à la grenade et conformément aux ordres reçus les Français se replient rapidement, sur une ligne de résistance pour s’y reformer en groupe de combat.

 

Le barrage et le tir de contre-préparation, en partenariat avec l’artillerie de la 167e D.I., se déclenchent dans des conditions satisfaisantes. Les P.P. ont été réoccupés peu après minuit lorsque le calme est revenu, le P. P. 50, lui, l’a été à la suite d’un rapide engagement à la grenade. La tentative de l’adversaire a ainsi complètement échoué.

 

Le sergent Louis Perein de la 2e compagnie du 149e R.I. est tué, il y a également sept blessés au régiment pour cette journée.

 

Durant les semaines qui vont suivre, le 149e R.I. et les autres éléments de la division vont s’efforcer d’améliorer leurs conditions de vie qui restent particulièrement fragiles et défectueuses sur le terrain.

 

Sources :

 

J.M.O. du 174e R.I. S.H.D. de Vincennes Réf : 26 N 710/6

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes Réf : 26 N 344/7

 

Historique du 149e Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

« La 43e Division pendant la campagne de 1918 » Mayence grande imprimerie moderne. 1922.

 

La  carte donnant les positions des trois bataillons du 149e R.I. a été réalisée simplement à partir des indications données dans le J.M.O. de la 43e D.I. qui est cité dans les sources. La marge d’erreur des positions des bataillons risque d’être assez importante. Cette carte n’est donc là que pour se faire une idée vraiment très approximative des positions occupées par les trois bataillons du régiment pour la période du mois de janvier 1918.

 

Le fond de carte utilisé provient du J.M.O. du 112e R.I.T.. Elle peut se consulter sur le site « Mémoire des Hommes ». Référence du J.M.O. du 112e R.I.T. : 26 N 796/15. 

 

Un grand merci à  M. Bordes, à A. Carobbi,  à É. Mansuy et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

20 mars 2015

À bicyclette du côté de la frontière suisse.

Raymond_Bonnefous_janvier_1918

Une nouvelle fois un très grand merci à N. Bauer pour son autorisation de publier ici une autre partie du  témoignage laissé par son grand-père, Raymond Bonnefous.

À la mi-décembre 1917, le médecin sous-aide-major Raymond Bonnefous est installé à Pont-de-Roide. Il est responsable d’une infirmerie située à l’intérieur de l’Hôpital Hélène Peugeot. La veille de Noël 1917, il apprend sa mutation au 149e R.I..

16 décembre 1917

C’est dimanche, mais je ne peux ni me changer, ni aller à la messe. J’habite à l’extrémité du patelin, et Adam n’a pas pu me trouver encore. Toute la journée, je fais des courses pour le cantonnement.

17 décembre 1917

Il faut installer une infirmerie de cantonnement. Nous allons visiter l’hôpital Peugeot, où on nous abandonne une aile de bâtiment : 4 pièces meublées avec électricité et chauffage central. Nous y installons aussitôt ma salle de visite et le cabinet dentaire. L’après-midi se passe à la pâtisserie, aux cafés, aux docks.

18 décembre 1917

La pâtissière, chez qui j’ai logé Collard, nous invite à goûter l’eau-de-vie de prunes qu’elle vient de distiller, et nous fait manger quelques bons chaussons, quoique ce soit jour sans gâteaux. Nous allons ensuite à notre P.C. de l’hôpital Peugeot, où la clientèle civile commence à rappliquer chez le dentiste.

Le soir, le médecin-chef nous rejoint, rentrant de permission.

H_pital_Peugeot

19 décembre 1917

Nous allons voir la coulée de la fonte à l’usine de Fourneau. Le matériel est un peu ancien, mais c’est intéressant tout de même.

20 décembre 1917

Avec le médecin-chef et l’abbé Bruneau, nous grimpons à la batterie des Roches. C’est un ouvrage qui domine Pont-de-Roide et la vallée du Doubs, et qui fait partie du fort du Lomont. On aurait, sans la brume,un coup d’œil splendide.

21 décembre 1917

Avec Papot, nous filons en auto sanitaire à Montbéliard, puis en vélo nous pédalons jusqu’à Sochaux pour voir nos anciens logeurs et nous rentrons à Pont-de-Roide pour dîner.

22 décembre 1917

Le patron nous entraîne avec Chenu sur la route de Porrentruy dans une ballade monotone et sans intérêt.

Eglise_de_Pont_de_Roide

23 décembre 1917

C’est dimanche. À 9 h 30, grande messe solennelle. La population est très religieuse, et l’église est bondée de monde. Le père Bruneau nous place dans les stalles du chœur, en face du général et de son État-major. Musique agréable. Nous tuons l’après-midi au cinéma d’abord, puis au café.

24 décembre 1917

En revenant de l’hôpital passer ma visite, je rencontre Pierrot, un sous-aide-major du 12e d’Artillerie, qui m’aborde pour me demander quel jour je compte rejoindre mon nouveau poste au 149e.

Je suis tout ahuri de cette nouvelle, mais Pierrot m’exhibe la circulaire, où je lis en effet ma mutation avec Lebranchu du 1er bataillon au 149e. Je fais une grande sensation à table en annonçant cette nouvelle qui fait s’exclamer tout le monde. L’après-midi, nous allons avec le médecin-chef en prendre confirmation chez le médecin divisionnaire ; à la réflexion, je regrette bien de quitter le groupe, mais je ne suis pas fâché de passer enfin dans un corps de troupe, et surtout au 149e, où je retrouverai M. Rouquié.

25 décembre 1917

Après une messe de minuit remarquable où, grâce au père Bruneau, nous avons un bout de banc dans le chœur, un réveillon fantastique se prolonge à la popote jusqu’à 5 h 00. On boit, on chante, on s’amuse, et le père Bruneau est endiablé. Le soir, à dîner, de nouveau champagne et plats fins : de nouveau, piano mécanique et chansons.

26 décembre 1917

On hospitalise Calippe dans mon service ; il traîne la patte de plus en plus et m’avoue aussi une autre petite misère. On soignera le tout à la fois. D’ailleurs, il ne s’ennuie pas pour la première journée. Deux clientes assidues de Collard, des dactylos de Peugeot,viennent lui tenir compagnie, et de plus en plus, je passe tout mon temps dans mon service confortable ; j’aide Collard à soigner ses gentilles clientes.

Le patron décide de me garder jusqu’après le jour de l’An et me fait écrire en ce sens à M. Rouquié et à Lebranchu.

27 décembre 1917

Il a été décidé hier, au cabinet de Collard, qu’on prendrait ce soir le thé chez moi. À 17 h 00, tout est prêt ; de bons gâteaux reçus de la maison sont sur la table, le feu chauffe bien, mais… nous passons jusqu’à 7 h 00 sans voir venir nos invités.

28 décembre 1917

Nous faisons d’amers reproches à l’hôpital à M… et à A… pour leur lapin d’hier soir et passons avec eux une bonne soirée. La neige a cessé ; il fait un clair de lune splendide et l’effet sur la neige est vraiment très joli. Le thermomètre est à – 16°, et le Doubs est entièrement pris. D’ailleurs, on ne voit plus circuler que des traîneaux.

29 décembre 1917

Avec le médecin-chef et M. Jourdan, nous faisons une nouvelle ascension dans la neige à la batterie des Roches et je rentre vite chez moi à 17 h 00. Cette fois, les invités sont exacts au rendez-vous et nous passons une soirée agréable.

30 décembre 1917

Hier, j’ai reçu une lettre de Lebranchu disant qu’il m’attendait le 29. Je décide d’aller m’entendre avec lui, et par ce bel après-midi de dimanche, je file en vélo par Mattay, Mandeure, Valentigney et Seloncourt. À Seloncourt, je m’arrête à l’infirmerie du régiment, où on m’apprend que M. Rouquié est absent depuis 3 ou 4 jours ; je monte jusqu’à Vaudoncourt, village de cultivateurs. Lebranchu  ne fait aucune difficulté pour m’attendre jusqu’au 3 ; il me présente à l’aide-major, M. Richard, un jeune homme qui semble très doux et très sympathique et je fais demi-tour pour arriver à Pont-de-Roide  à la nuit noire. Il gèle toujours très fort, aussi j’ai rencontré dans toutes les descentes quantité de lugeurs et lugeuses.

Carte journee du 30 aout 1917

31 décembre 1917

Le dernier jour de l’année s’écoule bien tranquillement. Le soir, on lunche à 18 h 00 ; on joue au baccarat jusqu’à 22 h 00, puis dîner somptueux, champagne, laïus du patron, réponse de Jourdan, piano mécanique et chansons. 1917 est enterré. Que sera 1918 ??????

1er janvier 1918

Nous commençons l’année par une grande messe solennelle ; l’église de Pont-de-Roide est aussi pleine que le jour de Noël. L’après-midi, nous courons à un concert offert aux Rudipontains par les ambulances et l’artillerie de tranchées. Il a lieu dans une grande salle de l’usine Peugeot. Le tout Pont-de-Roide s’y est donné rendez-vous et bien avant l’heure, la salle regorge de monde. Nous arrivons à temps pour pouvoir choisir nos places et… nos voisins. Je m’installe confortablement derrière A... et à côté de madame la pharmacienne, une jeune dame très musicienne et fort aimable. Le concert est dans le style de tous les concerts offerts par les poilus, plutôt salé. Le temps ne me semble pas long, mais il fait un froid terrible, et les pieds sont glacés. Heureusement, A… a apporté une précieuse bouillotte que je réussis à partager un instant avec ma voisine.

À la sortie, nous allons finir la soirée à l’hôpital avec ce pauvre Calippe, qui s’ennuie désespérément.

2 janvier 1918

C’est la journée des paquets et des adieux. A… et M… viennent me voir le matin à l’hôpital. Toute l’après-midi, je n’ai pas une minute à moi. Je cours de l’hôpital chez Ducuing, de chez Ducuing à chez moi,pour revenir à 18  h 00 à l’hôpital, ce qui représente un certain nombre de km.  A… et M… sont chez Collard, tandis que Jourdan et autres encombrent la chambre de Calippe. On s’isole sans eux.

À 19  h 00, on se retrouve réunis pour la dernière fois à la popote. Le médecin-chef est vraiment charmant pour moi ; depuis hier, ma popote est à son compte ; ce soir, c’est lui qui fait les frais du dîner, et quel dîner ! Vins fins du commencement à la fin, champagne à flots, et pour finir speech tout à fait aimable du patron qui m’accable de compliments et de confusion. Collard et Morise, d’ailleurs un peu noirs, ont les yeux pleins de larmes, et quand je veux répondre au patron, je suis moi-même tellement ému qu’au bout de quelques mots je ne peux plus articuler… Mais avec les chansons, la gaieté reprend le dessus et M. Bruneau entraîne les rires de l’assemblée.

Vraiment, c’est au moment de la séparation qu’on mesure surtout le degré de sympathie et d’affection qui vous unit aux camarades, et je ne m’étais pas rendu compte de l’attachement que j’avais pour le groupe.

3 janvier 1918

Passage au 149e R.I.

 Après avoir bouclé mes cantines, je cours à l’hôpital. De l’usine Peugeot, A… me guettait à mon passage sur le pont pour me faire ses adieux. Je vais vite serrer la main à Calippe, aux infirmiers, et je file à la popote, où je déjeune en vitesse, et après avoir fait mes adieux aux camarades, je monte en traîneau avec un conducteur. On m’a donné un bon trotteur, et j’arrive rapidement à Seloncourt où M. Rouquié me souhaite la bienvenue. Je suis à Vaudoncourt à 14 h 00. et Lebranchu reprend mon traîneau. M. Richard me présente à 17 h 00 au commandant de Chomereau, qui me fait un accueil très affable ; à 18 h 30, réunion à la popote ; M. Richard me présente successivement au capitaine adjudant-major Guilleminot, au capitaine Quinot, commandant la 1ère compagnie, à Roncin, un de ses sous-lieutenants, au lieutenant de Parseval, commandant la 1ère C.M., un bébé à qui on donnerait 15 ans et qui est de la classe 16, à son sous-lieutenant Lesserteur, un bon gros qui a l’air brave type. La 2e et la 3e compagnie ne sont pas là. La 3e est à la Cité du Val, un petit village à 2 km d’ici, et où je dois aller demain passer la visite.

La première impression est assez bonne, mais on sent nettement qu’il n’y a pas là l’homogénéité du G.B.D. et qu’on rencontre un peu de tout.  Après dîner, je regagne vite ma chambre, où m’attend un bon feu. J’ai pris l’ordonnance de Lebranchu, un Vosgien, qui a l’air bien stylé et répond au nom de Bolot.

4 janvier 1918

À 8 h 00, je pars à la Cité du Val, accompagné d’un brancardier. Après la visite, je vais me présenter au capitaine commandant la 3e Cie, le capitaine Liétout, un grand blond maigre, élégant et froid ;  je fais connaissance avec son sous-lieutenant Viard, un blond, joli garçon et qui a l’air de le savoir.

En rentrant, je passe à l’infirmerie ; le personnel infirmier et brancardier me fait très bonne impression ; ils sont tous polis et bien disciplinés. Je fais plus ample connaissance avec M. Richard, décidément tout à fait chic, bon garçon, avec qui, j’espère, je m’entendrai très bien.

À table, à 11 h 00, on me présente à 2 sous-lieutenants qui d’ailleurs sont mes voisins de chambre (ils étaient hier à Montbéliard) Boudène, un jeune décoré de la classe 15 de la 2e compagnie et Loubignac, de la 1ère.

Après déjeuner, on va tous ensemble au pont Sarrazin, un pont naturel franchissant un ravin sous bois, où M. Richard nous photographie. La musique du régiment vient jouer ensuite à Vaudoncourt ; on se gèle  à l’écouter, mais il faut faire acte de présence.

5 janvier 1918

Avec M. Richard, nous allons à Beaucourt, la capitale des Japy, gros bourg usinier sans intérêt, où se trouve en ce moment le Q.G. du 40e C.A., auquel nous sommes momentanément rattachés pour les travaux.

6 janvier 1918

Nous devons partir demain pour nous rapprocher encore de la frontière et des chantiers où travaillent les compagnies. C’est dimanche. Le caporal infirmier Leclerc, qui est prêtre, dit la messe au bureau de bataillon. L’après-midi, je prends le vélo du cycliste de l’infirmerie et je descends à Hérimoncourt, où est cantonné le 1er B.C.P.. Je serre la main de Penet et de quelques officiers qui écoutent la fanfare et je rentre avant la nuit.

7 janvier 1918

Grandvillars_au_bon_marche

À 9 h 00, le bataillon quitte Vaudoncourt. Le mouvement se fait par compagnies, aussi nous partons à part par les sentiers sous bois. Il dégèle et on patauge. Nous arrivons à 10 h 30 à Saint-Dizier, un village tout en longueur, perché sur un plateau. Nous retrouvons là la 2e Compagnie  commandée par le lieutenant Robinet, et la 3e qui est venue de la Cité du Val. Voilà donc le bataillon au complet, et on est 14 à table. L’officier de cantonnement m’a logé dans la maison de la popote, au 2e dans une petite chambre. J’ai donc un lit, c’est tout ce qu’il me faut.

Carte_journee_du_7_janvier_1918

Legende_carte_journee_du_7_janvier_1918

Pour notre début dans le patelin, nous avons une histoire : le lieutenant Robinet s’est battu la nuit dernière avec un homme du 109e, cantonné dans le village, et l’a blessé. Je lui propose d’aller à Morvillars prendre de ses nouvelles ; il accepte avec joie, et je file avec la boue, la pluie et le vent ! Une longue descente m’amène à Léhétain ; puis je traverse Delle et je prends la route de Morvillars, qui m’est familière ; à Grandvillars, je stoppe au « Bon Marché » où on me demande des nouvelles des dentistes ; puis je passe au débit de tabac, où Mlle Fernande me sort d’une cachette 2 paquets de cigarettes Maryland. À Morvillars, je vais prendre des nouvelles du blessé, qui n’a qu’une écorchure ; puis je passe chez les Juillet, où on me fait un bon thé à la crème et je repars, le vent dans le nez. Je suis à Delle où la nuit est noire ; je souffle un moment à la pâtisserie, puis je repars pour arriver péniblement à la popote juste à l’heure du dîner.

8 janvier 1918

La neige tombe serrée toute la journée et nous bloque à la popote.

9 janvier  1918

Encore la neige ! Impossible de sortir.

10 janvier 1918

toute la nuit, un vent violent a amoncelé la neige par endroits, et les compagnies travaillent toute la journée à frayer un passage au ravitaillement et à dégager en particulier la route de Croix, où des fourgons de douaniers sont bloqués par la neige. Je vais faire un tour de ce côté là, et par endroits, j’enfonce jusqu’au-dessus des genoux. Je pousse néanmoins jusqu’à Croix où je rencontre le lieutenant Jeand’heur qui m’offre à sa popote un petit verre de bon kirsch !

11 janvier 1918

Après midi, je prends mon courage à deux mains et je pars à pied pour Hérimoncourt. Dans le bois d’Holaud, la piste est encore mal faite. Après la traversée d’Abbevillers, ça va mieux, et une longue descente en lacets m’amène à Hérimoncourt où je passe un moment avec Penet. Au retour après Abbevillers, Jeand’heur me rattrape en traîneau et me porte jusqu’au carrefour de la Croix.

12 janvier 1918

Il fait beau, mais l’après-midi, M. Richard s’absente et je suis donc obligé de rester au cantonnement. Les jeunes filles de la popote me tiennent compagnie, et le soir tous ensemble, après dîner, on joue avec elles à la bague et au furet. Dans l’après-midi, une tuile. M. Richard soignait ces jours-ci un gosse atteint d’une méningite tuberculeuse. Pendant son absence, on m’appelle vite, et j’arrive pour voir mourir le gosse dans une dernière convulsion.

13 janvier 1918

C’est dimanche. Il fait un temps affreux : pluie ininterrompue qui fait sur la neige un mélange glissant. Le caporal Leclerc chante la grand-messe à l’église. Toute la journée, le mauvais temps nous bloque à la popote, où on bâille à s’en décrocher la mâchoire.

14 janvier 1918

Je me lève de bonne heure par un temps sec et radieux. À 9 h 00, je pars en vélo, et malgré les difficultés que j’éprouve jusqu’à Vaudoncourt pour traverser les amoncellements de neige gelée, et descendre les côtes lisses et glissantes, je suis à 11 h 00 à Pont-de-Roide. Après déjeuner, je vais voir à l’hôpital ce pauvre Calippe, qui a eu ces jours-ci d’abondantes hémoptysies et dont le pied ne s’améliore pas ; je lui tiens compagnie pendant une heure, puis je vais passer un moment à la pharmacie, et comme j’en sors avec Collard, nous nous trouvons nez à nez avec A… et M… ; pendant une heure on se promène le long du Doubs ; ensemble, on retourne à l’hôpital et après des adieux émus à Calippe, que je ne reverrai sans doute jamais, je prends le chemin du retour ; à Seloncourt, où je m’arrête un moment chez le médecin-chef, je me laisse surprendre par la nuit et je rentre avec un gros retard à cause de l’état de la route.

15 janvier 1918

Malgré un vent furieux, je descends jusqu’à Delle faire des emplettes en vue du départ qu’on annonce pour vendredi.

16 janvier 1918

Du vent et de la pluie. J’en profite pour mettre à jour ma correspondance.

17 janvier 1918

Veille de départ. Je retourne à Delle compléter mes achats.

18 janvier 1918

Carte_journee_du_18_janvier_1918

 Lever à 3 h 30. Départ dans la nuit à 4 h 30 par Dasle, Audincourt, jusqu’à Voujeaucourt, soit 19 km. On déjeune avant d’embarquer à l’Hôtel de la Gare et vers midi le train démarre, emportant avec lui le bataillon et la Cie 21/2 du Génie. Heureusement, le voyage ne sera pas long, car on est très serré… Le Doubs que nous franchissons a largement débordé et complètement submergé une route qui le borde… Dans le compartiment, on chante à tue-tête. Nous traversons successivement Belfort, Lure, Luxeuil, Épinal, le dépôt du régiment, où personne n’est venu le voir passer et Bruyères.

19 janvier 1918

À 1 h 30 du matin, on nous débarque à la Chapelle, et le bataillon prend la route de Corcieux.

Carte_journee_du_19_janvier_1918

Legende_carte_journee_du_19_janvier_1918

 L’étape est pénible, car nous avons à peine dormi la nuit précédente, pas du tout celle-ci, et les jambes sont raides après ce trajet en chemin de fer, succédant à une étape de 20 km. À Corcieux, nous laissons le commandant, la 1ère Cie et M. Richard. Je continue avec les 2e et 3e et le service médical. Le jour se lève et nous grimpons une côte interminable ; chaque lacet de la route nous montre un nouveau lacet plus haut ; les hommes sont vannés, et la file des traînards s’allonge, s’allonge. Enfin, voilà le sommet et le village des Arrentès, où je dois cantonner avec la 3e Cie. Après avoir installé l’infirmerie à la mairie, je me couche à 20 h 00 dans une très modeste chambre au-dessus d’une auberge et je dors profondément dans un mauvais lit jusqu’à 23 h 00. Je fais popote avec le capitaine Liétout et Viard et les repas dans la chambre du capitaine sont plutôt silencieux.

Sources :

Toutes les informations présentées dans cette petite notice m’ont été données par N. Bauer, la petite-fille de Raymond Bonnefous.

Pour en savoir plus sur Raymond Bonnefous il suffit de cliquer sur l’image suivante :

Raymond_Bonnefous__Arcy_Sainte_Restitue_

L’histoire de Raymond Bonnefous durant la Grande Guerre peut se lire dans le roman de N. Bauer « Des garçons d’avenir » publié en 2011 aux Éditions Philippe Rey.

Des_gar_ons_d_avenir__couverture__

Un grand merci à N. Bauer à M. Bordes et à A. Carobbi.

13 mars 2015

Dans le département du Doubs, du côté de la frontière suisse...

Herimoncourt

Après avoir effectué plusieurs jours de marche, le 149e R.I. prend ses nouveaux quartiers à proximité de la frontière suisse, à la mi-décembre 1917.

Le 15 au soir, deux compagnies du 1er bataillon cantonnent à Vaudoncourt, la compagnie restante du bataillon s’est installée à Montbouton. Les hommes du 2e bataillon posent le sac à dos à Dasle. Quant au 3e bataillon, il s’établit à Hérimoncourt avec l’E.M. et la C.H.R. du régiment. Tous les hommes sont confortablement logés.

Carte_1_frontiere_suisse

Durant toute cette période, le régiment va effectuer de nombreux travaux pour le compte du 40e C.A.. Il doit participer à l’organisation défensive du territoire tout en contribuant à l’amélioration des voies de communication et  à l’aménagement des cantonnements.

Pas de repos dominical pour les hommes qui doivent travailler les dimanches 23 et 30 décembre. En revanche, la troupe peut se détendre le 25 décembre et le 1er janvier.

La formation théorique n’est pas oubliée. Celle-ci  occasionne quelques changements dans l’organisation de la vie quotidienne. Le lendemain de Noël, les éléments du régiment qui partent à l’instruction sont relevés par des unités qui sont affectées aux travaux. Le stationnement du 149e R.I. est légèrement modifié. L’E.M., la C.H.R. et le 3e bataillon du régiment viennent s’installer à Seloncourt.

Carte_2_frontiere_suisse

Les chutes de neige sont abondantes. Depuis le 28 décembre, les unités chargées des travaux sont employées,en partie ou en totalité, au déblaiement des routes dans la zone de leurs cantonnements. Les travaux « ordinaires » qui sont assignés initialement aux différents groupes sont suspendus, au moins jusqu’au 30, en attendant le retour d’une météo plus clémente.

1er janvier 1918 

Une équipe du peloton des canons de 37 mm du 149e R.I. se met en route, pour suivre le cours spécial d’obusier stokes qui doit se dérouler dans la ville de Belfort.

2 janvier 1918 

Le déblaiement de la neige est dorénavant effectué dans la zone concernée par des détachements, qui sont prélevés sur les unités stationnées dans les régions les plus voisines. Le lieutenant Lobjoy du 149e R.I. cantonné à Montbouton est chargé de la surveillance de ce travail.

Le commandant du D.T. /43  vient faire une conférence sur l’emploi de la T.P.S. et de la T.S.F., aux hommes qui ne manient pas la pelle et la pioche.

4 janvier 1918 

Le 1er bataillon du 149e R.I., installé à Vaudoncourt, envoie chaque matin un nombre important de soldats, pour aller travailler à Saint-Dizier.

5 janvier 1918 

Les mouvements nécessités par la relève des bataillons à l’instruction par les bataillons aux travaux s’exécutent dans la journée. Le 2e bataillon quitte Dasle pour venir à Seloncourt. Il permute avec le 3e bataillon. La 10e compagnie prend la direction de à Vaudoncourt.

Carte_3_frontiere_suisse

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Albert Marquand évoque ce quotidien dans un courrier adressé à sa famille :

« … Pour moi, rien de neuf, sinon que nous changeons encore une fois de cantonnement. Oh, le nouveau n’est qu’à 4 km de Dasle. Seulement, nous voilà retournés dans les villages, et ce ne sera plus la propreté et les coquets intérieurs des ouvriers de la vallée…

… là-bas, nous recommencerons les travaux à 7 km de distance, ce qui fait 14 km par jours ! Il continue de faire un froid sibérien. La nuit, le thermomètre descend à -20° ! Les traîneaux attelés font fureur… »

Frontiere_suisse_pr_s_d_Herimoncourt

7 janvier 1918 

Les compagnies du 1er bataillon du 149e R.I. qui sont cantonnées à Vaudoncourt, et qui travaillent depuis plusieurs jours à Saint-Dizier viennent s’installer dans cette commune. Elles sont accompagnées par 120 travailleurs d’artillerie qui occupaient le village de Dasles. Le bataillon prend également à sa charge l’organisation du P.A. de Villars-le-Sec.

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Albert Marquand raconte dans deux autres lettres…

9 janvier 1918

«… Nous avons encore changé de cantonnement à deux kilomètres du précédent. La compagnie seule s’y trouve. Ce qui fait que nous jouissons d’une tranquillité relative du point de vue du service. Seulement, voilà le hic, pour aller travailler à la frontière,  nous devons toujours faire 7 kmaller et autant retour. Avec les glaciers qui coupent les routes actuellement, cela n’a rien d’intéressant !... »

10 janvier 1918 

« … La température change. Maintenant, il y a 50 cm de neige et les travaux sont suspendus jusqu’à nouvel ordre… »

Un exercice de liaison a lieu dans la région englobant les communes de Beaucourt, de Montbouton, de Dasle, de Vaudoncourt, et de Seloncourt. Cet entraînement se fait sous la direction du colonel commandant le 149e R.I..

11 janvier 1918 

La compagnie de mitrailleuses du 1er bataillon du 149e R.I. est désignée pour aller suivre le cours de tir indirect du fort la Rudolphe, près de Belfort.

13 janvier 1918 

Les unités de la 43e D.I. sont informées qu’elles seront bientôt enlevées par voie de chemin de fer pour être acheminées dans une nouvelle région.

14 janvier 1918 

La 1ère compagnie de mitrailleuses du 149e R.I. fait mouvement pour aller cantonner à Morvillars le 14, au fort du Rudolphe le 15, pour ensuite suivre le cours de tir indirect.

15 janvier 1918 

Les unités de travail de la 43e D.I. cessent tous les chantiers engagés dans la soirée.

16 janvier 1918 

La 43e D.I. s’apprête à quitter le secteur occupé depuis la mi-décembre. Toute la journée est consacrée aux préparatifs de départ. Il faut rassembler le matériel, verser les outils au génie et mettre de l’ordre dans les cantonnements.

Malgré tous ces dispositifs, certains ordres sont maintenus. Le sergent Boisset, un caporal et 8 hommes du peloton de bombardiers du 149e R.I. devront se mettre en route le lendemain pour rejoindre la caserne Bougerel de Belfort. Ils ont tous été désignés pour suivre les cours sur l’utilisation des lance-flammes.

Les bataillons du 149e R.I. s’apprêtent à boucler les sacs à dos. Ils doivent se tenir prêts à rejoindre les quais de gare où les attendent les trains qui vont les acheminer vers une région qu’ils connaissent bien. Direction les Vosges…

Sources bibliographiques :

J.M.O. de la 43e D.I. : S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/7.

J.M.O. du 1er B.C.P. : S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/4

J.M.O. du 31e B.C.P. : S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 826/28.

J.M.O. du 158e R.I. : S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 700/14.

« Et le temps à nous, est compté. » Lettres de guerre (1914-1919) d’Albert Marquand. Présenté par Francis Barbe, avec une postface du général André Bach. Éditions « C’est-à-dire ».2011.

« Souvenirs de Louis Cretin soldat musicien au 149e Régiment d’infanterie. »

Pour en savoir plus sur le sergent Albert Marquand il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante :

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Pour en savoir plus sur le brancardier Louis Cretin, il suffit de cliquer sur l’image suivante :   

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Un grand merci à M. Bordes, à R. Mioque, à F. Barbe, à D. Browarski, à T. Cornet et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

6 mars 2015

De la Malmaison à la frontière suisse (novembre-décembre 1917).

Photographie_de_groupe_avec_Albert_Marquand

Fin octobre 1917, le 149e R.I. et les autres unités de la 43e D.I. mènent une attaque dans le secteur de La Malmaison. À la suite de ces combats, les 2 régiments d’infanterie et les 2 bataillons de chasseurs qui composent cette division, se retirent vers l’arrière pour gagner des zones de repos situées à l’ouest de Montmirail.

L’absence du J.M.O. du 149e R.I. ne permet pas de localiser précisément les communes qui l’accueillent au cours de cette période.

Carte_region_de_Montmirail

Legende_carte_du_31_octobre_au_5_decembre_1917

Les hommes du 149e R.I. sont installés dans des hameaux situés près de Viels-Maisons. Dans ce secteur, il n’y a pas de villes importantes. Les distractions se font rares pour les officiers et pour la troupe. Pour couronner le tout, le temps est à l’humide, le froid est au rendez-vous et le ciel est constamment gris. Des compagnies entières sont installées dans de vastes fermes. Le chauffage est défectueux. Les journées s’enchaînent… Mis à part les exercices et les corvées, aucun évènement marquant ne vient « éclaircir » la vie des hommes durant cette période. À la nuit tombante, les hommes avalent en hâte leur dîner avant de se réfugier dans la paille des granges pour de longues heures de nuit.

Le 1er décembre 1917, le colonel Boigues, qui commande le 149e R.I., est avisé du départ imminent de son régiment. Celui-ci va bientôt être transporté par voie ferrée dans la région de Vesoul.

Tous les transports des éléments de la 43e D.I  s’effectuent entre le 6 et le 8 décembre 1917. Une partie des unités du 149e R.I. monte dans les trains qui lui ont été réservés, dans la station d’Artonges. Le 2e bataillon du commandant Schalk débarque sur les quais de la gare de Vesoul. L’état-major du régiment, le 1er bataillon du commandant de Chomereau de Saint-André et le 3e bataillon du commandant Fournier, descendent des wagons à Genevreuille.

Gare_de_debarquement_entre_les_6_et_8_decembre_1917

Le brancardier Louis Cretin évoque cet évènement dans son témoignage :

« … En récompense de notre brillante attaque au  chemin des Dames, les hommes partent en permission de 12 jours en deux périodes… Je quitte chez moi le 7 novembre et viens retrouver les camarades à leur cantonnement de la Celle, près de Montmirail, où nous restons jusqu’au 5 décembre, date à laquelle nous embarquons à Artonge dans la nuit. Nous passons à Château-Thierry, Langres et nous débarquons le 6 au soir à Genevreuille, près de Lure, dans la Haute-Saône. Nous cantonnons à Mollans… »

Gare_de_Genevreuille_

Comme le fait remarquer l’auteur dans son récit à propos des permissions, le quota de ces dernières a été augmenté après leur suspension probable au cours des opérations et pour aider la troupe à se remettre.

Le 149e R.I. s’établit dans les villages avoisinants la commune de Mollans. De nouveau, les hommes sont installés dans des cantonnements de qualité médiocre, mais ils ne vont pas rester bien longtemps dans cette région. Le 9 décembre, le général Camille Michel qui commande la division reçoit un préavis lui annonçant un mouvement par voie de terre, qui devra s’effectuer dans les jours suivants.

Le 10 décembre, de nombreux ordres sont envoyés aux diverses unités de la 43e D.I..Ceux-ci permettent d’affiner l’organisation et la mise en place des futurs mouvements qui vont commencer dès le lendemain.

La 43e D.I. est mise à la disposition du 40e C.A., un corps d’armée qui n’a pas de composition organique, positionné près de la frontière suisse. Les hommes du général Michel vont devoir participer à l’organisation défensive de ce secteur. Les unités doivent se préparer pour plusieurs jours de marche. Heureusement, malgré le froid, le beau temps est au rendez-vous. Les routes qui sont gelées vont tout de même donner bien de la peine aux différents équipages.

Le mouvement du 149e R.I. commence le matin du 11 décembre 1917. Dans la soirée, le régiment va s’installer à Cubry, à Cubrial et à la ferme Grande Fontaine. L’état-major du colonel Boigues prend ses quartiers à Abbenans.

Carte_du_11_decembre_1917

Après une nouvelle journée de marche, les bataillons du 149e R.I. prennent positions le soir du 12 décembre dans les villages suivants :

Le 1er bataillon à l’Isle-sur- le-Doubs.

Le 2e bataillon à Appenans.

Le 3e bataillon à Médière.

Carte_journee_du_12_decembre_1917

Le 149e R.I. poursuit sa route, le soir du 13 décembre, les hommes passent la nuit dans les communes suivantes :

Les 1er et 3e bataillons à Mathay.

Le 2e bataillon à Maudeure.

Le lendemain, le régiment arrive à destination. Tous les éléments de la 43e D.I. sont mis à la disposition du 40e C.A. qui est commandé par le général Paulinier.

Carte_journees_des_13_et_14_decembre_1917

Legende_carte_journee_des_13_et_14_decembre__1917

Le 14 décembre au soir, le  149e R.I. cantonne comme suit :

L’E.M. et le 3e bataillon à Hérimoncourt.

Le 1er bataillon à Vaudoncourt.

Le 2e bataillon à Dasle.

Les hommes sont cordialement accueillis et trouvent partout des installations confortables.

Dans un courrier envoyé à sa famille datant du 20 décembre 1917, le sergent Albert Marquand évoque la vie quotidienne à Hérimoncourt. Voici ce qu’il nous dit :

« Ici rien de bien sensationnel. Les habitants se montrent d’une gentillesse à nulle autre pareille, et partout les militaires du régiment sont traités comme des membres de la famille… Nous allons travailler tous les jours à proximité de la frontière. Départ : matin 7 h 30, travail jusqu’à 11 h 00, soupe. Reprise jusqu’à 15 h 00 et rentrée. Ce n’est guère pénible pour nous, mais on se gèle terriblement. Aussi, on a sorti toute la grande collection d’hiver. Je ne puis m’approfondir sur le travail, vous devez comprendre pourquoi. Je suis allé voir la Suisse à distance respectable… »

Les travaux dans ce secteur sont bien réglés, ils intéressent les cadres et la troupe sans les surmener. Le pays est pittoresque avec ses vallées profondes et ses vastes plateaux couverts de forêts givrées par le froid.

Sources bibliographiques :

J.M.O. de la 43e D.I. :

J.M.O. du 1er B.C.P. :

J.M.O. du 31e B.C.P. :

J.M.O. du 158e R.I. :

 « Et le temps à nous, est compté. » Lettres de guerre (1914-1919) d’Albert Marquand. Présenté par Francis Barbe, avec une postface du général André Bach. Éditions C’est-à-dire.2011.

La photo de groupe a été envoyée par Francis Barbe, elle provient de la collection de Renée Mioque.

Albert Marquand se trouve au 2e rang (4e à partir de la droite). Jean Baptiste Goudon se trouve au 1er rang (1er à partir de la droite).

« Souvenirs de Louis Cretin soldat musicien au 149e Régiment d’infanterie. »

Pour en savoir plus sur les sergents Albert Marquand et Jean Baptiste Goudon, il suffit de cliquer une fois sur les deux images suivantes :

Albert_Marquand

Jean_Baptiste_Goudon

Pour en savoir plus sur le brancardier Louis Cretin, il suffit de cliquer sur l’image suivante :

Louis_Cretin

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à R. Mioque, à F. Barbe, à D. Browarski, à T. Cornet et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

27 février 2015

Louis Dubois (1893-1914).

Louis_Dubois

Louis Henri Dubois voit le jour le 3 août 1893, dans le lieu-dit « chez Cartier » près du petit village des Fins, dans le département du Doubs. Son père, qui exerce la profession d’agriculteur, se prénomme Jules Cyprien, sa mère se nomme Marie Pourchet.

Sa fiche signalétique et des services lui donne un niveau 3 pour son degré d’instruction ; cet homme sait donc lire écrire et compter. Une fois sa scolarité terminée, Louis devient agriculteur tout comme son père.

L’année 1913 arrive, il est temps pour lui d’effectuer son service militaire. Classé n° 1 sur la liste du canton de Morteau, Louis Dubois est inscrit sous le numéro 43. Le jeune homme est incorporé le 26 novembre 1913 comme soldat de 2e classe. Il doit rejoindre la ville d’Épinal pour intégrer le 149e R.I..

Au début du mois d’août 1914, il sert dans la 11e compagnie du 149e R.I. sous les ordres du capitaine Erhard. Sa participation à la campagne contre l’Allemagne est brève…

Le soldat Dubois est inscrit dans la liste des disparus du J.M.O. du régiment à la date du 21 août 1914. Ce n’est que le 2 mai 1918 que sa mort est véritablement officialisée, suite à un jugement rendu par le tribunal de Pontarlier.

Louis Dubois pourrait reposer dans le cimetière national mixte « la Valette » d’Abreschviller. Son nom, accompagné du n° du régiment d’appartenance,est inscrit sur la plaque de l’ossuaire n° 1.

Ossuaire_Abreschviller___Louis_Dubois_

Concernant les circonstances de son décès, une autre version des faits est enregistrée sur sa fiche signalétique et des services.

« Décédé le 20 janvier 1915 des suites de ses blessures de guerre et inhumé à Strasbourg, par les autorités allemandes. »

Une source à ne pas oublier en cas de disparition d’un soldat… Il ne faut pas hésiter à consulter le site du Comité International de la Croix Rouge. En effet, les familles ont souvent fait des recherches pour essayer de retrouver la trace des leurs, ce qui est le cas pour Louis Dubois.

Fiche_C

Toutefois, le nom de cet homme ne figure pas dans une liste de prisonniers, ce qui laisse à penser qu'il est peut-être effectivement tombé le 21 août et non mort des suites de ses blessures. Mais les deux hypothèses sont impossibles à départager avec les sources disponibles.

Son nom est inscrit sur le monument aux morts de la commune des Fins.

Le portrait de Louis Dubois est fixé sur le monument aux morts des Fins qui se trouve sur la place du 8 mai, juste en contrebas de l’église de ce village.

Sources :

La fiche signalétique et des services Louis Dubois a été consultée sur le site des archives départementales du Doubs.

Les photographies du monument des Fins et du portrait du soldat Dubois ont été réalisées par G.Tisserand.

La fiche de Louis Dubois provient du site du Comité International de la Croix Rouge.

Croix_Rouge__logo_

Un grand merci à M. Bordes, à A. Marguet,  à A. Carobbi et à G. Tisserand.

20 février 2015

Témoignage de Louis Cretin : du col de Saales à Val-et-Chatillon...

Louis_Cretin__Abreschviller_

Tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet qui me permettent  de retranscrire sur ce blog le passage suivant du témoignage de Louis Cretin qui a été à la C.H.R. du 149e R.I. du début à la fin du conflit.

Le 14 août, réveil à deux heures du matin, et c’est la marche en avant. Nous traversons la frontière au col de Saales. Les Allemands avaient incendié le poste de douanes, la poste ainsi que les deux ou trois maisons qui forment le village de Saales français. Aussitôt la frontière passée, le jour s’étant levé, le combat s’engage. Les Allemands sont solidement retranchés et nous attendent. Leurs obus de 77 fusants éclatent sans discontinuer. Heureusement qu’ils font plus de bruit que de mal. Des chevaux ont peur des éclatements et versent leur convoi dans le fossé. Nous en remettons plusieurs sur la route en passant. Toute la journée, la bataille fait rage, mais, sur le soir, les Allemands battus abandonnent leurs positions et les nôtres les poursuivent. La nuit, nos avant-postes nous protègent, nous couchons au village de Saint-Blaise-la-Roche.

Le lendemain, à 15 h 00, défilent plusieurs centaines de prisonniers, des convois, des canons, des mitrailleuses et le drapeau du 99e régiment allemand, pris dans la bataille par le 1er B.C.P.. Notre victoire était belle.

Le 16, nous progressons et nous allons cantonner dans un hameau du champ du Feu. C’est là qu’étaient les positions d’artillerie allemande et leurs réserves. Nos 75 avaient fait merveille, les tranchées et les emplacements de leur batterie étaient jonchés de débris. En parcourant le champ de bataille, nous glanons toutes sortes de choses, cartouches, bidons, équipement. Nous sommes cantonnés chez un bon vieux qui cause très bien le français. Grisés par notre victoire, nous nous voyons déjà à Mutzig, à Strasbourg et au bord du Rhin. Mais il refroidit notre ardeur par des paroles plutôt graves. C’est ainsi qu’il nous dit : « Une bataille gagnée n’est pas toute une campagne. Méfiez-vous des Allemands. Ils sont très forts. En 1870, j’ai fait campagne dans l’armée française, nous avons été battus. Croyez-moi, ils sont encore plus à craindre. Ils sont nombreux, ils ont beaucoup d’hommes « Nous aussi ! », beaucoup de mitrailleuses et de canons « Peuh ! Ils ne font que du bruit ! » Ils ont surtout de grosses pièces « Nos 75 les démoliront ». La guerre durera plus longtemps que vous ne pensez «  Nous lui rions au nez. » Bref, un tas d’objections qui nous le faisait prendre pour un fou.

Le lendemain 18 août, nous quittons notre cantonnement de grand matin. Le vieux « dingo » vint nous serrer la main à tous. « Bonne chance mes enfants » nous dit-il. Puis, comme nous partions, il écrasa une larme sur sa joue parcheminée. Il s’adressa à sa digne compagne. « Ces pauvres enfants, combien reviendront-ils ? Dieu seul le sait, mais moi, jamais je ne les reverrais. » Ses mains se tendirent vers nous en signe d’adieu. Les premiers instants de notre marche, nous ne parlions que du vieux « Père la défaite ». Non mais ! Tu as entendu le grand-père avec ses boniments à la noix. Nous nous moquâmes de lui copieusement. Nous étions ignorants de ce qui se passait en Belgique et sur les autres parties du front. Nous pensions être vainqueurs partout. Hélas !

Plus tard, les paroles du soldat de 1870 devaient nous revenir à la mémoire. En conscience, nous devions reconnaitre qu’il avait été bon prophète.

Nous traversons les petites villes de Rothau et de Schirmeck au pas cadencé. Quelques drapeaux tricolores flottent sur les édifices. Puis nous quittons la vallée de la Bruche. Au lieu de continuer en direction de l’est, nous remontons franchement au nord et escaladons le massif du Donon.

Nous pénétrons en Lorraine. Le soir, épuisés par cette marche forcée de 40 kilomètres, nous bivouaquons dans un bois près du village de Saint-Quirin. Après quelques heures de repos (nous avons dormi le sac au dos), le 19 à l’aube, nous arrivons à Abreschviller où le régiment prend sa formation de combat. Des compagnies partent sur la verrerie de Vallerysthal. Le reste va prendre position sur la droite de Sarrebourg. Pour la première fois, nous voyons des aéroplanes allemands qui viennent nous survoler. Ils laissent tomber des fusées lumineuses. Quelques instants plus tard, les 105 fusants éclatent au-dessus de nous. La bataille s’engage, violente… Des coloniaux blessés, en position sur notre gauche, reviennent des lignes fort démoralisés… Ils racontent que les leurs se sont fait massacrer par les mitrailleuses allemandes, en chargeant à découvert, sur plus de 400 mètres. Un vrai carnage ! ajoutent-ils. Nous marchons un peu au hasard, à la recherche de nos blessés. Durant deux jours, nous bivouaquons dans des champs de blé.

Le 21, de grand matin, un bombardement intense tombe sur nos lignes. Des « marmites » font leur apparition. Des 105 et 130 fusants et percutants se succèdent par rafales sans interruption. Nous maintenons nos positions, une partie de la journée, mais nous sommes débordés sur la droite et la gauche. Nous sommes obligés de battre en retraite. En traversant la gare d’Abreschviller, les éclats d’obus résonnaient d’une façon lugubre sur les wagons. Le pont sur la rivière était très dangereux à franchir. Nous préférons traverser la rivière à pied. Pendant ce temps, nos batteries d’artillerie usent leurs munitions et débouchent à zéro, sur les vagues d’infanterie allemande, avant de se replier. Les artilleurs se joignent à nos arrière-gardes, ils font le coup de feu avec leur mousqueton. Peu de pièces furent sauvées ! Les attelages décimés par les balles ou la mitraille, tombaient en entrainant la perte de la pièce. Les Allemands nous poursuivent à marche forcée. Le Donon est déjà entre leurs mains, nous ne pouvons pas retraiter par là. C’est sur Cirey-sur-Vezouze que nous repassons la frontière. Le soir nous sommes à Val-et-Chatillon… Quelques heures de repos… Nous sommes exténués par notre marche avec les obus qui nous pourchassaient constamment.

Sources :

Témoignage de Louis Cretin.

Un grand merci à M. Bordes,  à D. Browarsky et à T. Cornet.

13 février 2015

Victor Mathieu (1881-1914).

Victor_Mathieu

Victor Mathieu voit le jour le 24 février 1881 à Raon-aux-bois, une petite commune située dans le département des Vosges. À sa naissance, son père Auguste, âgé de 27 ans, exerce la profession de manœuvre. Sa mère, Marie Augustine Grosjean est une manouvrière âgée de 20 ans.

Ce jeune homme gagne sa vie durant plusieurs années en travaillant à la blanchisserie-tannerie de Thaon-les-Vosges. Dans l’après-midi du 1er août 1914, le tocsin de l’église du village se fait entendre. La menace de guerre contre l’Allemagne se profile. Une partie des réservistes va devoir rallier son régiment d’affectation dans les jours à venir. Victor Mathieu, maintenant âgé de 33 ans, fait partie du nombre.

N’ayant pas eu accès à sa fiche signalétique et des services, il est impossible de savoir la date exacte où Victor Mathieu rejoint le dépôt du 149e R.I. à Épinal.

Ce soldat de la classe 1901 est incorporé à la 10e compagnie du régiment, une unité du 3e bataillon qui se trouve sous l’autorité du capitaine Laure. Peu de temps après avoir endossé la tenue de fantassin, le 21 août 1914, le soldat Victor Mathieu est tué dans le secteur de la Valette, près du bois de Voyer, au nord d’Abreschviller, un petit village du sud mosellan situé dans le massif du Donon.

Sa compagnie, commandée par le lieutenant Marcel Michelin, a reçu l’ordre de protéger le repli du 3e bataillon du régiment qui se trouve en très mauvaise posture, suite à une attaque allemande.

Victor Mathieu est inscrit dans la liste des blessés du J.M.O. du régiment à la date du 21 août 1914. Ce n’est que le 11 février 1920 que sa mort est véritablement officialisée suite à un jugement rendu par le tribunal d’Épinal.

Victor a obtenu la croix de guerre avec étoile de bronze. Sa Citation est publiée dans le Journal officiel du 9 septembre 1920.

« Soldat brave et dévoué. Tombé en résistant à une attaque ennemie, le 21 août 1914, à Abreschviller.»

Victor Mathieu repose actuellement dans l’ossuaire n° 2 du cimetière national mixte « la Valette » d’Abreschviller.

Ossuaire_n_2_Abreschviller

Son nom est inscrit sur le monument aux morts de la commune de Thaon-les-Vosges.

Sources :

Le portrait de Victor Mathieu est extrait du livre d’or des membres du personnel de la blanchisserie et teinturerie de Thaon, mort pour la France au cours de la guerre 1914-1918.

L’acte de naissance de Victor Mathieu a été consulté sur le site des archives départementales des Vosges.

La citation obtenue par le soldat Mathieu a été trouvée sur le site de la bibliothèque virtuelle « Gallica ».

La photographie de l’ossuaire n° 2 du cimetière national mixte « la Valette » d’Abreschviller a été réalisée par J.C. Balla.

Un grand merci à M. Bordes, à J.C. Balla et à A. Carobbi.

6 février 2015

Robert Petermann (1893-1914).

Robert_Petermann

Robert Georges Pierre Petermann est un Monbéliardais né le 24 juillet 1893, au domicile de ses parents, rue de l’Hôtel de Ville. Son père, Charles Adolphe dirige à cette époque « le Quatorze Juillet », un journal local qui est publié deux fois par semaine. Sa mère, Blanche Rosalie Robert-Tissot, âgée de 28 ans, n’exerce pas de profession. Un peu moins d’un an plus tard, elle donne naissance au frère cadet de Robert, celui-ci est prénommé Pierre.

Une fois ses études supérieures terminées, le jeune Robert décide de se lancer dans une carrière d’officier. Il vient d’être admis à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr par décision ministérielle du 23 septembre 1913.

Le 7 novembre 1913, Robert Petermann se rend à la mairie de Lons-le-Saulnier pour venir y signer un engagement volontaire d’une durée de 8 ans.

Au cours de cette période, ses parents demeurent à Belfort. Plus tard, ils franchiront la Méditerranée pour venir s’installer à Casablanca.

Robert Petermann intègre la promotion saint-cyrienne dite « la Croix du Drapeau ». Il est loin de s’imaginer que ses études vont devoir s’arrêter bien avant la fin de sa formation ! En effet, neuf mois plus tard, les élèves de cette promotion s’apprêtent à quitter Saint-Cyr à cause de la guerre. À la fin du mois de juillet 1914, les tensions internationales sont à leur maximum, le commandement de l’école vient de recevoir l’ordre de suspendre les cours. Les élèves des promotions Montmirail et de la Croix du drapeau doivent rejoindre leurs nouvelles affectations au plus vite.

Robert Petermann, muté au 149e R.I., arrive au corps le 3 août 1914. Il est nommé sous-lieutenant trois jours plus tard. Le jeune saint-cyrien fraîchement promu arrive sur le front le 16 août pour être affecté à la 5e compagnie. Il doit aussitôt se mettre sous les ordres du capitaine Micard. Robert Petermann a à peine le temps de faire connaissance avec les sous-officiers qui se retrouvent sous son commandement. Le 21 août 1914, il est tué d’une balle dans la tête, au tout début des combats qui se sont déroulés près de la Valette, un petit hameau situé au nord d’Abreschviller. Il a à peine 21 ans.

Le sous-lieutenant Petermann est inhumé avec plusieurs hommes de son régiment et quelques soldats allemands, dans une tombe commune à l’ombre des arbres de la forêt de Voyer. Tous ces hommes n’ont pu être mis en terre, que le 24 août, par la population civile des environs.

Peu avant le deuxième anniversaire de l’armistice une commission d’exhumation fait rassembler les corps des Français qui ont été enterrés dans le secteur d’Abreschviller. Le 15 septembre 1920, la tombe commune dans laquelle repose le sous-lieutenant Petermann est ouverte par les fossoyeurs sous le regard attentif du sergent Arcabusquey et du secrétaire Manière. Une lettre est trouvée dans l’une des poches de la vareuse de l’officier. L’écriture est encore bien visible sur le papier malgré les six années passées sous terre. Robert Petermann demande à reposer à l’endroit exact où il aura trouvé la mort. Ses dernières volontés vont être respectées. Sa mère, devenue veuve en 1915, vit toujours au Maroc. Elle est informée de la situation.

Sepulture Robert Petermann

Il y a de fortes probabilités pour que cet officier ait honoré le serment prononcé le soir du 30 juillet 1914 par tous les camarades saint-cyriens des promotions Montmirail et la Croix du Drapeau. Ce serment engageait chacun d’entre eux à aller au feu, la première fois, en « casoars et gants blancs ». Sur son compte-rendu d’exhumation, il est stipulé que des « boutons de Saint-Cyr » ont été retrouvés sur lui.

Actuellement, Robert Petermann repose toujours sur le même lieu.

Citation à l’ordre n° 44 de la Xe  l’armée en date du 11 janvier 1915 :

« Saint-Cyrien nouvellement promu, a été tué le 21 août à la tête de sa section qu’il entraînait au-devant d’une attaque ennemie débouchant à très courte distance »

Chevalier de la Légion d’honneur (J.O. du 25 janvier 1920).

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

« Commémoration à la tombe du sous-lieutenant Petermann, le 24 août 2008 à Voyer ». Fascicule réalisé par la mairie de Voyer.

La photographie de la sépulture du sous-lieutenant Petermann à été réalisée par Y. Willaume.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à Éric Mansuy, à M. Porcher, à Y. Willaume et au Service Historique de la Défense de Vincennes et à la mairie de Voyer.

30 janvier 2015

Albert Dargent (1886-1914).

Albert_Dargent

Albert Dargent est né le 20 février 1886 dans la petite commune vosgienne de Bulgnéville. À sa naissance, son père Nicolas, un ancien militaire, est  âgé de 48 ans qui exerce la profession de percepteur ; sa mère, Angéline Bourgeois, est âgée de 29 ans.

La fratrie est composée d’Albert, d’un frère qui deviendra pharmacien et d’une sœur qui épousera un officier de réserve.

À 18 ans, il signe un contrat de 3 ans avec l’armée à la mairie d’Épinal. Ce jeune homme doit se rendre à la caserne Courcy pour intégrer le 149e R.I. après avoir apposé sa signature sur son acte d’engagement. Nous sommes au tout début du mois de mars de l’année 1904.

Le soldat Dargent devient caporal le 22 septembre de la même année. Il est, à ce moment-là, dans la 11e compagnie. Un an plus tard, il obtient ses galons de sergent. Le 17 avril 1906, il doit renouveler son contrat. Cette fois-ci c’est pour une durée de deux ans. Cet engagement prend effet à compter du 29 février 1907. Par la suite, il signe systématiquement pour des périodes beaucoup plus courtes, périodes qui correspondent à une année et où il se doit d’assumer son rôle de sous-officier.

Albert Dargent exerce les fonctions de sergent-fourrier à deux reprises. Une première fois du 1er février au 1er juin 1907, une seconde fois du 10 mai 1912 au 2 janvier 1913.

Tout au long de sa carrière de soldat, ce jeune homme est confronté régulièrement à l’autorité de ses supérieurs, par des manquements à la discipline. Souvent consigné au quartier, il se retrouve parfois aux arrêts simples, parfois à faire des séjours en salle de police. Et oui, la discipline c’est vraiment du sérieux !

1904 

1er Octobre 

15 jours de salle de police donnés par le colonel :

Motif : Malgré les ordres donnés et renouvelés, s’est désintéressé de l’état de son poste à l’arrivée et y a laissé faire des dégradations.

1905

9 Avril

4 jours de consigne au quartier donnés par le sergent de garde :

« Étant de semaine, est venu en retard répondre à l’appel des punis et sans savoir qu’il avait des punis à présenter.

15 mai

4 jours de consigne au quartier donnés par un sergent :

« N’a pas désigné d’homme de corvée, pour aller chercher le café des hommes de son escouade et par suite de retard apporté par ce fait, n’a pas fait préparer ses hommes pour le rassemblement de la compagnie. »

Le capitaine  transforme cette punition en 2 jours de salle de police.

16 décembre 

4 jours de consigne au quartier donnés par l’adjudant de semaine :

« Malgré trois sonneries successives, n’a pas rassemblé à l’heure prescrite, une corvée qui lui avait été commandée la veille. Cette corvée est partie avec un retard de 25 minutes. »

1906

6 septembre

4 jours de salle de police donnés par un capitaine :

« S’est présenté à l’inspection de cet officier avec des vêtements qui n’avaient pas été brossés depuis le tir et s’est complètement désintéressé de sa section pendant tout l’après-midi. »

22 septembre

3 jours de consigne au quartier donnés par l’adjudant :

« Malgré une consigne écrite et affichée au poste, a  remis à un caporal, un homme puni de prison, sans l’autorisation de ses sous-officiers. Cet homme puni a manqué pendant une heure au peloton des punitions.»

Le lieutenant-colonel du régiment transforme cette punition en 4 jours de salle de police.

13 octobre

4 jours de consigne au quartier donnés par l’adjudant de semaine :

« S’est désintéressé du rassemblement des réservistes devant partir à 11 h 20 et a obligé ce sous-officier à l’envoyer chercher. »

Le lieutenant-colonel du régiment transforme cette punition en 4 jours de salle de police.

1907

7 mai

4 jours de consigne au quartier donnés par l’adjudant de semaine :

« N’étant pas venu à la sonnerie de son grade, a obligé ce sous-officier à l’envoyer chercher et a répondu sur un ton élevé à l’observation qui lui était adressée à ce sujet. »

24 juin

4 jours de consigne au quartier donnés par le lieutenant :

« Il n’a pas assuré la communication des ordres à cet officier. »

1er août

4 jours de consigne au quartier donnés par l’adjudant-vaguemestre :

« Étant de jour, s’est complètement désintéressé du courrier de sa compagnie.»

3 septembre

4 jours de salle de police donnés par le sergent :

« Ne s’est pas assuré si les hommes de sa section avaient de l’eau dans leurs bidons, au départ du cantonnement. »

Même jour, 4 jours de salle de police supplémentaires donnés par le chef de bataillon.

« A déclaré à cet officier supérieur qu’il ne s’était pas occupé d’assurer que sa section avait réalisé l’exécution des ordres donnés pour la préparation du café. »

6 septembre

4 jours de consigne au quartier donnés par le capitaine de la compagnie :

« N’a pas fait raser tous les hommes de sa section pour la revue du capitaine. »

9 novembre

4 jours de salle de police donnés par l’adjudant :

« Ayant reçu l’ordre pendant le défilé de suivre les sections correspondantes de la compagnie précédente, a  dit à haute voix et sur un ton arrogant, « On pourrait commander changement de direction, c’est épatant ça ! »

20 novembre

4 jours de consigne au quartier donnés par le capitaine :

« Étant de semaine, n’a pas accompagné le sergent-major à l’appel du soir et s’est désintéressé du rassemblement de la compagnie le lendemain matin.

Punition réduite à trois jours par le même capitaine. »

1908

15 février

4 jours de consigne au quartier donnés par le lieutenant :

« Est arrivé en cours de mathématique avec 55 minutes de retard. »

2 septembre

4 jours de consigne au quartier donnés par le lieutenant :

« Commandait un détachement, est passé devant cet officier sans le saluer.»

1909

16 avril

4 jours de salle de police donnés par le capitaine :

« A dépassé de 4 heures la rentrée des sous-officiers.»

1910

3 février

4 jours de salle de police donnés par le capitaine :

«  Étant malade à la chambre, est sorti en ville sans autorisation, pour se faire couper les cheveux. »

24 février

4 jours de salle de police donnés par l’adjudant :

« S’est complètement désintéressé de la propreté des chambres de sa section (effets en désordre sur les lits, locaux malpropres) et a manifesté de la mauvaise humeur. »

18 mars

4 jours de salle de police donnés par le capitaine :

« Avant son départ pour Corcieux, a remis à son successeur un registre de tir mal tenu et non à jour. »

2 avril

4 jours de consigne au quartier donnés par le capitaine de tir :

« N’a pas accompagné au champ de tir la voiture transportant les cartouches et n’a pas rendu compte que la caisse  les contenant avait été cassée. »

16 octobre

2 jours de salle de police donnés par le chef de bataillon :

« Est sorti en ville sans arme après deux heures de l’après-midi. »

1911

20 mars

 2 jours de salle de police donnés par le capitaine :

« Ayant reçu l’ordre de prendre le sac pour exécuter un tir d’application dans la position couchée, avait mis sac au dos sans en boucler les bretelles. »

1912

30 septembre

2 jours de salle de police donnés par l’adjudant de bataillon, chef de groupe de service :

« Appelé à la salle de police comme agent de liaison de sa compagnie, a manqué de déférence à l’égard de l’adjudant de service pour une attitude négligée et des réponses faites avec une indifférence affectée. »

Cette punition est transformée en 6 jours de salle de police.

1913

26 février

2 jours de salle de police donnés par le chef de bataillon :

« N’a pas commandé le caporal faisant partie du cadre des exercices physiques des services auxiliaires malgré une note dictée à la compagnie. »

17 mai

1 jour de salle de police donnés par le par le chef de bataillon :

 « Négligence dans le port du sabre au défilé malgré des observations préalables.»

Début septembre 1913, il accède au grade d’aspirant. Il vient tout juste de réussir le concours d’entrée qui va lui permettre de suivre les cours de l’école militaire d’infanterie de Saint-Maixent. Il intègre la 34e  promotion de l’école qui porte le nom de promotion de la Mobilisation. 

Les punitions continuent de tomber….

4 décembre

4 jours de salle de police donnés par le capitaine : 

«Causait à très haute voix et sans nécessité aucune pendant la manœuvre.»

Le 30 décembre, cet officier reçoit une lettre du ministre de la guerre qui vient le féliciter pour le zèle et le dévouement dont il a fait preuve dans l’organisation et le fonctionnement des œuvres coopératives de la troupe.

1914

7 mars

12 jours de salle de police donnés par le capitaine : 

« Étant chef de chambrée, comme un de ses camarades lui faisait remarquer à haute voix qu’il manquait encore de la graisse d’armes dans la chambrée, a répondu à tue-tête et bien tu m’emm… !

Cette punition est augmentée de 3 jours par le lieutenant-colonel de l’école. »

3 juin

2 jours de salle de police donnés par le capitaine 

« A fait une réflexion déplacée à une question que lui posait le lieutenant instructeur au moment de la désignation de son cheval.»

Cette punition est augmentée de 4 jours par le lieutenant-colonel de l’école.»

Une fois sa formation d’officier achevée, Albert Dargent qui vient tout juste d’être promu sous-lieutenant doit retrouver son ancienne unité. Le 4 août 1914 au soir, il rejoint, avec plusieurs autres officiers, le cantonnement du 149e R.I. qui se trouve dans le secteur de Vanémont. Le lendemain, le colonel Menvielle lui donne l’ordre d’intégrer la 8e compagnie pour prendre le commandement d’une section. Cette compagnie se trouve à ce moment-là sous l’autorité du capitaine de Chomereau de Saint-André.

Le sous-lieutenant Dargent participe aux combats qui se déroulent près de Wisembach. Sa carrière d’officier sera très brève puisqu’il trouve la mort, le 21 août 1914 dans le secteur d’Abreschviller. Il est, dans un premier temps, inhumé près de Voyer à 600 m de la ferme de La Valette, dans une tombe collective, avec 21 soldats français et sept soldats allemands.

En octobre 1920, la famille est informée du transfert de son corps dans le cimetière militaire d’Abrechvillers. Sa sépulture individuelle porte le n° 293.

Le sous-lieutenant Dargent a obtenu la citation suivante :

Citation à l’ordre n° 44 de la X e armée du 11 janvier 1915 :

« A été tué le 21 août  à la tête de sa section qu’il entraînait au-devant d’une forte attaque ennemie débouchant à courte distance. »

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Le portrait du sous-lieutenant Albert Dargent provient du tableau d’honneur de la guerre 14-18 publié par la revue illustration.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

23 janvier 2015

André Fèvre (1895-1914).

Andre_fevre

Natif de la Côte d'Or, André Charles Robert Benjamin Fèvre voit le jour le 27 mars 1895 dans la ville de Dijon. À sa naissance, son père, Alphonse Nicolas, lieutenant du 8e train des équipages est âgé de 37 ans. Sa mère, Marie Amélie Humbert, est âgée de 23 ans. André est élève au lycée de Buffon dans le XVe arrondissement de Paris.

Il est admis comme élève à l’école spéciale militaire par décision ministérielle du 23 septembre 1913.

À peine âgé de 18 ans, le jeune André signe un acte d’engagement spécial aux jeunes gens reçus à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr, le 29 octobre 1913, pour une durée de 8 ans. Encore mineur, son père est obligé de venir donner son consentement pour officialiser cet acte.

André Fèvre intègre la promotion de la Croix du Drapeau. Il est nommé aspirant le 8 novembre 1913.

Cette promotion ne terminera pas sa formation complètement. Quelques jours après la déclaration de la guerre avec l’Allemagne il est promu sous-lieutenant le 6 août 1914. Le 15 août 1914, il est affecté au 149e R.I.. Il arrive sur le front le 16 août 1914 pour intégrer la 11e compagnie. La période durant laquelle le sous-lieutenant Fèvre est engagé contre l’ennemi sera très brève. Il décède à Strasbourg le 21 août 1914, cinq jours après son arrivée au régiment !

Dans un premier temps, il est considéré comme disparu. Les autorités allemandes feront parvenir, par l’intermédiaire de la croix rouge internationale, des informations détaillées qui confirmeront le décès du sous-lieutenant Fèvre.

Personne n’a assisté le défunt durant ses derniers moments. Les morts sont restés 2 jours étendus sur le terrain avant qu’il soit possible de les inhumer. L’inhumation a lieu le dimanche 23 août dans l’après-midi entre 16 h 00 et 15 h 00 par les soins des habitants. Le sous-lieutenant Fèvre est enterré dans la fosse commune n° 3 au Freiwald, qui se trouve sur le territoire de Biberkirch, avec 27 autres soldats. La somme de 366 francs en billets et en or et un petit carnet de notes sont trouvés dans ses effets.

Après de nombreuses procédures administratives,son décès est officialisé en 1920.

Jusqu’en 1925, André Fèvre est enterré dans le cimetière provisoire d’Abreschviller. Le 3 juin 1925, son corps est exhumé d’une tombe qui porte le n° 400 ; celui-ci est déposé dans le cimetière national mixte « La Valette » d’Abreschviller où il repose sous la sépulture n° 36.

Actuellement, le sous-lieutenant Fèvre repose toujours dans ce cimetière. Sa sépulture porte le n° 36.

Sepulture_Andre_Fevre

Il est décoré de la croix de guerre avec une palme.

Citation  à l’ordre n° 70 de la Xe  armée en date du 31 mai 1915 :

« A été blessé mortellement au combat du 21 août 1914 à Abreschviller en se tenant debout au milieu de sa section pour inspirer confiance à ses hommes tandis qu’une très violente attaque ennemie tendait à ébranler leur moral. »

Son nom est inscrit sur une plaque commémorative qui se trouve à l’intérieur de l’église Saint-Pierre de Montrouge. Une église qui est située dans le 14e arrondissement de Paris.

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Le portrait du sous-lieutenant Fèvre provient du tableau d’honneur de la guerre 1914-1918 publié par la revue « l’illustration ».

La photo de la sépulture du sous-lieutenant Fèvre a été réalisée par J. C. Balla.

Un grand merci à M. Bordes, à J.C. Balla, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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