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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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27 mars 2015

Les premiers mois de l'année 1918 sur le front des Vosges (1ère partie)

Le_Violu_1

 

Le 149e R.I et toutes les unités de la 43e D.I. viennent de quitter le département du Doubs. Les premiers éléments de la division, qui ont commencé à se mettre en mouvement à partir du 17 janvier, sont transportés par voie de chemin de fer dans la région vosgienne de Bruyères-Corcieux. Les unités de la division du général Camille Michel doivent se tenir prêtes à relever celles de la 166e D.I. qui sont installées entre le col du Bonhomme et Provenchères-sur-Fave.

 

Dans ce secteur, qu’une poignée d’anciens, toujours présents au 149e R.I. connaissent bien, le front est resté, à peu de chose près, identique à celui de 1914. Seuls quelques villages sont « passés » du côté allemand.

 

La zone dans laquelle va s’installer la 43e D.I. est réputée pour être difficile d’accès. Ici, personne n’aurait l’idée de lancer une offensive de vaste envergure. Cette ligne de front bénéficie depuis plusieurs mois d’une sorte d’immunité qui la protège de toute agression massive. Les attaques françaises de 1915 et de 1916, visant à faire progresser l’infanterie dans les Vosges et en Alsace, ont fait rentrer quelques noms dans la mémoire collective. Périodiquement, les communiqués officiels rappellent certains d’entre eux : l’Hartmannswillerkopf, le Linge, le Violu, et le Ban de Sapt. En dehors de ces lieux, le coin est réputé pour être calme.

 

Il est important de signaler que, même si un secteur est donné comme étant une zone calme, cela ne veut pas dire qu’il y fait bon vivre. Des coups de mains réguliers, des patrouilles quasi journalières pour essayer de savoir ce qui se passe du côté de l’ennemi, de rudes et pénibles travaux effectués par les hommes en première ligne, des bombardements très localisés, parfois d’une extrême violence, sont le lot quotidien vécu par les hommes, au cours de cette période hivernale.

 

Installation du 149e R.I. en Lorraine 

 

18 janvier 1918 

 

Les premiers éléments du 149e R.I. viennent s’installer dans le secteur de Corcieux. Les mouvements de la 43e D.I. se poursuivent tout au long de la journée.

 

19 janvier 1918 

Les ordres de relève en première ligne commencent à être donnés aux officiers concernés. Les éléments de la 166e D.I. qui occupent le secteur depuis le mois de juillet 1917 vont bientôt être remplacés par ceux de la 43e D.I..

 

20 janvier 1918 

 

Carte_1_Vosges_janvier_1918

 

En attendant de rejoindre ses nouveaux emplacements, le 149e R.I. a pris position dans les villages suivants :

 

E.M. à Corcieux

 

C.H.R. dans les baraquements du camp de Corcieux et de Ruxurieux

 

1er bataillon à Ruxurieux, Mariemont et Arrentès-de-Corcieux

 

2e  bataillon à Neune, Vienville et Thiriville

 

3e bataillon à Bellegoutte, Rambaville, la Charmelle, le Haut-de-Bémont, la Vichibure et le Chenet

 

21 janvier 1918

 

Le 149e R.I. quitte les lieux occupés la veille. Il doit se rapprocher de la zone de front. Dans la soirée, les 3 bataillons du régiment cantonnent dans les communes suivantes :

 

1er bataillon à Clefcy

 

2e bataillon à Fraize

 

3e bataillon à Plainfaing

 

Carte_2_Vosges_janvier_1918

 

Louis Cretin évoque cette période dans son témoignage :

 

« … Après un repos excellent dans le Doubs à Hérimoncourt et Seloncourt, nous cantonnons à Corcieux le 18 janvier 1918, après notre arrivée par le train à Laveline-devant-Bruyère. Le 19, repos, le 20, nous partons à pied, nous traversons le col du « plafond » Anould et nous venons cantonner à Fraize où nous demeurons jusqu’au 23. »

 

Au cours de cette journée, une compagnie de mitrailleuses du 31e B.C.P. est mise à la disposition du 149e R.I. pour remplacer la C.M. 1 du 149e R.I. qui est toujours détachée au cours de tir indirect, au fort du Rudolphe. Il est prévu que cette compagnie rentre aux alentours du 31 janvier.

 

Le secteur 

 

L’auteur de l’ouvrage « La 43e Division pendant la campagne de 1918 » nous donne quelques précisions sur la situation du secteur.

 

Les premières positions ne sont vraiment pas fameuses, leurs lignes successives sont très mal protégées et les réseaux de fils de fer sont particulièrement clairsemés. Du fait qu’il n’y ait jamais eu de grandes offensives dans cette zone depuis quatre ans, personne n’a jamais pris ni la peine, ni le temps de faire construire de robustes abris. Les hommes vivent en toute tranquillité dans des baraquements fabriqués à partir de simples planches et qui sont livrés à la seule défense de la forêt.

 

Depuis longtemps, les deux antagonistes cherchent à faire d’importantes économies d’effectifs. La densité des troupes d’occupation est donc réduite à son minimum. Le secteur est très peu garni en largeur, il ne l’est pas davantage en profondeur. Les réserves au niveau des divers échelons du commandement sont quasiment inexistantes.

 

Répartition des unités de la 43e D.I. 

 

Du fait de la grande surface à couvrir le commandement de la division est organisé de la manière suivante :

 

L’échelon de l’infanterie divisionnaire est purement et simplement supprimé. C’est depuis Saint-Dié que le général Camille Michel commande directement les trois sous-secteurs occupés par sa division.

 

Le premier sous-secteur, qui se trouve à gauche, est pris en charge par les bataillons de chasseurs. Les 1er et 31e B.C.P., qui se sont installés dans la vallée de la Fave, tiennent au nord de la rivière, les pentes de l’Ormont et au sud la croupe du Camp Romain. Le deuxième sous-secteur qui se trouve au centre du dispositif est protégé par le 158e R.I. renforcé par un bataillon du 143e R.I.T. Tous ses hommes sont à cheval sur la route du col de Sainte-Marie. Le 149e R.I. prend place dans le troisième sous-secteur avec un détachement de cavaliers à pied. Les trois bataillons du régiment sont échelonnés sur les hauteurs boisées de la Cude, du Violu et du Rocher du Coq de Bruyère. Le colonel Boigues s’installe dans le P.C. Brial.

 

Au jour le jour 

 

Le_Violu_2

 

23 janvier 1918

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. relève un bataillon du 294e R.I. à la Grande Goutte, celle-ci se passe sans incident.

 

24 janvier 1918

 

Le colonel Boigues du 149e R.I. prend le commandement du sous-secteur A à partir de 8 h 00.

 

25 janvier 1918

 

Le 3e bataillon du 149e R.I. quitte Plainfaing pour venir relever un bataillon du 294e R.I. qui se trouve au C.R. Violu.

 

26 janvier 1918

 

Dans la nuit du 25 au 26, le 1er bataillon du 149e R.I. et la C.M. 2 du 1er B.C.P. de Clefcy relèvent un bataillon du 294e R.I. au C.R. de la Cude.

 

Carte_3_Vosges_janvier_1918

 

27 janvier 1918

 

Des officiers allemands sont aperçus dans la tranchée de Constantinople vers 9 h 15, mais il ne se passe rien de plus. Plusieurs patrouilles sont envoyées pour vérifier le réseau de fils de fer.  

 

28 janvier 1918

 

Le colonel Boigues est informé que la C.M.1 de son régiment vient de terminer les cours de tir indirect de Belfort. Cette compagnie doit débarquer le 29 janvier à Corcieux-Vanémont puis cantonner jusqu’au lendemain à Vanémont.

 

Quelques tirs de harcèlement ont lieu sur tout le secteur, mais la journée reste calme dans l’ensemble. 

 

Une patrouille est envoyée dans le secteur occupé par le 3e bataillon du 149e R.I. Elle doit effectuer une mission de reconnaissance, et vérifier l’état des réseaux de barbelés. Une partie du secteur T 31, situé dans un espace de 50 à 80 m de large est visité. Dans la zone qui fait face à une tranchée entre T 31 et T 32, les hommes constatent trois brèches de 5 m de longueur, qui sont espacées d’une distance de cinquante mètres les unes des autres. Le réseau français qui se trouve en face est intact.

 

Les fermes Gretschy et Wustenloch qui se trouvent en face du 2e bataillon du 149e R.I. sont inoccupées par l’ennemi.

 

Poste_de_commandement_la_Cude

 

Tout au long de la journée, des travaux d’amélioration sont effectués dans les abris, dans les tranchées et dans les boyaux. Il est demandé aux hommes d’accorder une attention toute particulière au camouflage. La pose de fil de fer reste l’activité principale du fantassin.

 

Un boyau de jonction entre le P.C. combat et le boyau du soldat Servant est en cours de construction dans le C.R. de la Cude.

 

29 janvier 1918

 

La journée est calme. Il y a simplement une faible activité d’artillerie de part et d’autre. Une patrouille allemande est repoussée à coup de grenades devant le Violu.

 

30 janvier 1918

 

À 0 h 30, une patrouille ennemie constituée de 12 hommes s’approche à 150 m de P.P.6. Celle-ci est accueillie par le feu nourri d’un F.M. et par le jet d’une vingtaine de grenades. Elle se retire aussitôt.

 

Une patrouille française est envoyée vers 7 h 00, celle-ci constate que les réseaux ont été endommagés. Les hommes découvrent également un cadavre, des armes et des équipements qui ont été abandonnés sur place. Deux heures plus tard, une quinzaine d’Allemands sont vus en train d’examiner nos lignes.

 

Vers 13 h 15, l’ennemi effectue quelques tirs de mitrailleuses sur le C.R. de la Cude à partir du château de Fête. À 22 h 45, des mitrailleuses ennemies arrosent le secteur du ravin de la Cude.     

 

La_Cude_1

 

Des travaux de pose de réseaux sont effectués. Des abris de mitrailleuses et des emplacements de F.M. sont également aménagés.

 

De très nombreux tirs d’artillerie sont échangés tout le long de la journée et tard dans la soirée.

 

Peu avant 23 h 00, l’artillerie allemande effectue des tirs violents sur les premières lignes françaises du côté du P.A. du Ravin, du P.A. Regnault, de la Rotonde et sur l’observatoire Pacchiodo.

 

La compagnie de mitrailleuses du 1er bataillon du 149e R.I. doit se mettre en route pour venir s’installer à Verpellière en fin de journée. Elle suit l’itinéraire Corcieux, Anould, Fraize, la Croix-aux-Mines.

 

Les problèmes de relève de la C.M.2 du 1er B.C.P. par la C.M.1 du 149e R.I., doivent être réglés par le colonel qui commande l’I.D..

 

Carte_4_Vosges_janvier_1918

 

Quatre soldats du 149e R.I. sont blessés au cours de la journée.

 

31 janvier 1918

 

La nuit du 30 au 31 est marquée par une tentative de coup de main réalisé par les Allemands sur la région nord du C.R. la Cude. L’affaire a débuté à 22 h 40, avec un violent tir de minen et d’artillerie sur les organisations du P.A. Regnault. Les communications subissent également des tirs de mitrailleuses.

 

Des fantassins ennemis attaquent en même temps les P.P. des Ta 46, Ta 48 et Ta 50.  Après une âpre lutte à la grenade et conformément aux ordres reçus les Français se replient rapidement, sur une ligne de résistance pour s’y reformer en groupe de combat.

 

Le barrage et le tir de contre-préparation, en partenariat avec l’artillerie de la 167e D.I., se déclenchent dans des conditions satisfaisantes. Les P.P. ont été réoccupés peu après minuit lorsque le calme est revenu, le P. P. 50, lui, l’a été à la suite d’un rapide engagement à la grenade. La tentative de l’adversaire a ainsi complètement échoué.

 

Le sergent Louis Perein de la 2e compagnie du 149e R.I. est tué, il y a également sept blessés au régiment pour cette journée.

 

Durant les semaines qui vont suivre, le 149e R.I. et les autres éléments de la division vont s’efforcer d’améliorer leurs conditions de vie qui restent particulièrement fragiles et défectueuses sur le terrain.

 

Sources :

 

J.M.O. du 174e R.I. S.H.D. de Vincennes Réf : 26 N 710/6

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes Réf : 26 N 344/7

 

Historique du 149e Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

« La 43e Division pendant la campagne de 1918 » Mayence grande imprimerie moderne. 1922.

 

La  carte donnant les positions des trois bataillons du 149e R.I. a été réalisée simplement à partir des indications données dans le J.M.O. de la 43e D.I. qui est cité dans les sources. La marge d’erreur des positions des bataillons risque d’être assez importante. Cette carte n’est donc là que pour se faire une idée vraiment très approximative des positions occupées par les trois bataillons du régiment pour la période du mois de janvier 1918.

 

Le fond de carte utilisé provient du J.M.O. du 112e R.I.T.. Elle peut se consulter sur le site « Mémoire des Hommes ». Référence du J.M.O. du 112e R.I.T. : 26 N 796/15. 

 

Un grand merci à  M. Bordes, à A. Carobbi,  à É. Mansuy et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

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