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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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28 avril 2023

8 et 9 novembre 1916

Du cote de Deniecourt-novembre 1916

 

8 novembre 1916

 

Les conditions météorologiques se sont à nouveau dégradées. Il est impossible de poursuivre l’offensive dans ce contexte. L’ordre donné par le général Guillemot concernant la reprise de l’attaque commencée la veille est donc annulé.

 

Chacun doit maintenant se concentrer sur les positions conquises pour les sécuriser au mieux.

 

La partie de la tranchée Couverte, enlevée à l’ennemi par le 149e R.I., est rebaptisée tranchée Poncelet, en hommage au lieutenant Poncelet tué la veille devant Geniecourt.

 

Le dépôt de grenades du 149e R.I., placé en 1ère ligne, a explosé. Les compagnies du commandant Schalck sont presque à court de ce précieux projectile fort utile ; ces compagnies sont en effet dans un secteur où la boue a pratiquement rendu impossible l’utilisation des armes traditionnelles.

 

Une corvée d’une soixantaine de chasseurs est demandée dans la matinée pour réapprovisionner les compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. en grenades.

 

Carte 1 journee du 8 novembre 1916

 

 

À 13 h 45,  le lieutenant-colonel Pineau rédige, depuis le P.C. Valet, un compte-rendu d’opération adressé au responsable de la 85e brigade, le général Guillemot :

 

« Une compagnie du 2e bataillon du 149e R.I. a essayé ce matin à 9 h 45 de s’emparer des points 916 j et 916 k.

 

L’opération a été menée comme suit : deux escouades de grenadiers avaient pour objectif le point 916 j. L’une empruntant le prolongement vers l’ouest du boyau Couvert, l’autre se dirigeant nord-sud, le long de la tranchée Pêle-Mêle.

 

Par la tranchée Pêle-Mêle, la progression a réussi jusqu’à 50 m environ.

 

L’avancée a dû se faire en terrain découvert. Elle a été arrêtée nette par des feux de flancs tirés de la tranchée des Germains entre 916 i et 916 h et par une mitrailleuse placée à 920.

 

On a réussi à pousser une sape à quelques mètres au sud de la jonction de la nouvelle tranchée faite cette nuit avec la tranchée Pêle-Mêle.

 

Ci-joint un croquis indiquant en ce point la situation exacte du 2e bataillon du 149e R.I..

 

Croquis qui accompagne le rapport du lieutenant-colonel Pineau

 

Conformément à l’ordre reçu à 10 h 45 annulant les ordres précédents, j’ai suspendu toute nouvelle tentative sur ce point.

 

Toutes les sapes marquées sur le croquis seront terminées ce soir. »

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. s’efforce de réparer les éléments de tranchées récemment pris aux Allemands. Ces tranchées sont, pour la plupart, remplies d’eau. La terre est tellement détrempée qu’elles s’effondrent en de nombreux endroits. Il faut impérativement commencer les travaux de terrassement.

 

Le boyau entre le bois Bauer et la tranchée Poncelet 6187-915 est terminé à 1,60 m de hauteur sur toute sa longueur. Il est occupé face à l’est vers 915.

 

Plusieurs patrouilles d’observation et de liaison sont expédiées dans le no man’s land.

 

L’aviation ennemie s’est montrée très active tout au long de la journée. Quelques drachens surveillent le secteur de la 43e D.I..

 

L’artillerie française exécute de nouveaux tirs de réglage. Les 75 se livrent à leur mission habituelle.

 

Dans la soirée, l’artillerie allemande effectue des bombardements violents sur les lignes conquises par le 149e R.I.. À la fin du jour, les canons ennemis réalisent un premier tir de barrage, avec des obus de gros calibre. Un second tir de barrage a  lieu aux alentours de 20 h 30.

 

La commune d’Harbonnières est bombardée à plusieurs reprises dans la soirée et dans la nuit.

 

L’aviation allemande effectue des vols de nuit. Les mitrailleuses françaises tirent plusieurs rafales dans leur direction.

 

Une recherche réalisée sur le fichier « mémoire des Hommes » a permis d’identifier 5 hommes tués au cours de cette journée au 149e R.I. ; mais le décompte des pertes est chiffré à 14 tués, 16 blessés et 31 disparus. Sont comptabilisé ici un certain nombre de tués, de blessés et de disparus du 7 novembre non signalés par le régiment et dont le sort a pu être déterminé entre temps.

 

                                Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 8 novembre 1916

 

Du chiffre des disparus, il faut également déduire les tués restés entre les lignes ou ensevelis par les divers bombardements et les blessés passés par les P.S. des corps voisins (pour ces deux catégories le nombre n’a pas pu être établi).

 

Deux officiers allemands blessés du 20e I.R. sont transportés par les soins du 149e R.I..

 

Dans la nuit du 8 au 9, le 1er bataillon du 149e R.I., sous les ordres du capitaine de Chomereau, relève le bataillon Schalck en 1ère ligne.

 

9 novembre 1916

 

L’activité de l’artillerie allemande reste moyenne durant toute la matinée.

 

Six avions ennemis volant à très basse altitude ont été obligés de faire demi-tour après avoir essuyé les tirs de barrage des mitrailleuses françaises.

 

L’activité de l’artillerie allemande est plus marquée l’après-midi. Plusieurs drachens sont aperçus dans le ciel.

 

La réfection de tranchées se poursuit. Les voies de communication s’améliorent au fil des heures, mais l’état du terrain ne permet toujours pas de circuler dans les boyaux. Seules quelques parties sont praticables. Les hommes poursuivent la pause des caillebotis.

 

Une tranchée allant de la corne sud-est du bois Bauer à l’ancienne 1ère ligne allemande à l’ouest de 915 c (direction générale nord-sud) est en cours de construction.

 

Les hommes attendent. Ils n'ont entendu de rumeurs ni sur une éventuelle relève, ni sur une reprise de l'attaque.

 

                                  Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 9 novembre 1916

 

Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

 

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 819/5.

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

21 avril 2023

Charles Élie Marcel Depierre (1892-1916)

Charles Elie Marcel Depierre

 

Charles Élie Marcel Depierre est né le 14 août 1892, aux Granges Michel, un hameau dépendant de la commune de Verrières-de-Joux, dans le département du Doubs. Élie est le 6e enfant d’une fratrie composée de 4 filles et de 5 garçons.

 

Son père, Louis Narcisse, 38 ans, et sa mère, Marie Philomène Myotte, 29 ans, exercent tous les deux le métier de cultivateur.

 

La fiche matricule d’Élie Depierre mentionne un degré d’instruction de niveau 2, ce qui laisse supposer une maîtrise moyenne de la lecture, de l’écriture et de l’arithmétique.

 

Ce degré d’instruction est probablement dû à des périodes d’absentéismes prolongés, liées aux travaux agricoles. Élie devait régulièrement aider sa famille avant même la fin de ses obligations scolaires.

 

Une fois sa scolarité terminée, Élie est contraint d’aller gagner sa vie malgré son jeune âge. Tout comme ses parents, il rejoint le milieu agricole pour aller travailler la terre. Élie pratiquera ce métier difficile jusqu'à son départ pour la conscription.

 

Solide comme un roc, il est déclaré « bon pour le service armé » par le conseil de révision du canton d’Ornans, qui l’inscrit dans la 1ère partie de la liste de l’année 1913.

 

Le 10 octobre, Élie Depierre intègre les effectifs de la 4e compagnie du 149e R.I., un régiment qui tient garnison à Épinal.

 

Sa section se fait photographier avec l’ensemble de ses cadres, peu de temps après son arrivée dans cette unité.

 

Une section de la 4e compagnie du 149e R

 

Le 30 octobre 1913, le conscrit Depierre donne des nouvelles à ses parents.

 

Texte rédigé par Elie Depierre

 

Élie Depierre porte toujours l’uniforme lorsque l’Allemagne entre en conflit avec la France en août 1914. Son régiment, qui fait partie de la réserve des troupes de couverture, doit gagner la frontière dès le 31 juillet.

 

Le 9 août, c’est le baptême du feu pour le 149e R.I.. L’attaque a lieu au Renclos des Vaches près de Wisembach. La 4e compagnie, sous les ordres du capitaine Altairac, est une des toutes premières à être engagée. Le soldat Depierre est touché par une balle à la jambe droite. Il doit être évacué vers l’arrière.

 

La période et le lieu où il est soigné ne sont pas connus. Il en est de même pour la date de son retour au sein du 149e R.I.. Sa fiche matricule indique simplement qu’il a été de nouveau blessé au cours de l’offensive allemande du 3 mars 1915, dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette. Cette fois-ci, c’est un éclat d’obus qui lui a généré une plaie dans la région pectorale droite.

 

Une nouvelle fois, sa fiche signalétique et des services ne mentionne pas la date et le lieu concernant sa prise en charge médicale. Il est donc impossible de dire à quel moment le soldat Depierre a rejoint son unité après sa période de convalescence.

 

A-t-il participé aux combats de mai, de juin et de septembre 1915 ? A-t-il pris part à la bataille de Verdun en mars-avril 1916 ? Il est difficile de l’affirmer avec aussi peu d’informations à disposition.

 

Début septembre 1916, le 149e R.I. est engagé dans le département de la Somme. Le 4, il doit prendre le village de Soyécourt. L’attaque est une réussite totale. Le mois suivant, le régiment contrôle une zone comprise entre la sucrerie d’Ablaincourt et le bois Bauer. C’est un secteur particulièrement dangereux. Chaque imprudence peut-être fatale.

 

Une offensive prévue depuis le 24 octobre 1916 débute le 7 novembre. Ce jour-là, Élie Depierre, devenu pionnier à la C.H.R., meurt suite à ses blessures (il n’est fait aucune mention des circonstances de sa mort sur son acte de décès).

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte journée du 7 novembre 1916

 

Le soldat Depierre repose actuellement dans la nécropole nationale de Maucourt. Sa tombe porte le n° 1564.

 

 

Son acte de décès a été transcrit à la mairie de Voires le 25 février 1919.

 

Charles Élie Marcel Depierre ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Son nom a été gravé sur le monument aux morts de la commune de Durnes.

 

Pour consulter la généalogie de la famille Depierre, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

log geneanet

 

Le pionnier Depierre a été décoré de la croix de guerre avec deux étoiles de bronze.

 

Citation à l’ordre du régiment n° 107 en date du 10 mai 1916

 

« Très bon soldat courageux et discipliné. Deux blessures. »

 

Citation à l’ordre du régiment n° 28 en date du 1 décembre 1916

 

« Pionnier d’une grande bravoure, d’un zèle et d’un dévouement à toute épreuve. Blessé le 7 novembre 1916 à Gomiécourt, plaies multiples par éclat d’obus. »

 

 Il a reçu la Médaille militaire à titre posthume (J.O. du 4 septembre 1920).

 

« Pionnier d’une bravoure, d’un zèle et d’un dévouement à toute épreuve. Tué glorieusement, le 7 novembre 1916, à Gomiécourt, en s’élançant à l’attaque des positions ennemies malgré une vive fusillade. A été cité. »

 

Sources :

 

Les informations concernant ce soldat sont extraites de sa fiche matricule consultée sur le site des archives départementales du Doubs et de sa fiche individuelle lue sur le site « Mémoire des Hommes ».

 

La photographie de sa sépulture a été réalisée par B. Étévé.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à B. Étévé, à T. Vallé, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales du département du Gard.

14 avril 2023

Témoignage de Paul Portier : sucrerie de Génermont et bois des Satyres (octobre – novembre 1916)

Paul Portier temoignage octobre-novembre 1916

 

Le 12 octobre 1916, la 1ère compagnie de mitrailleuses du 149e R.I. remonte en 1ère ligne, dans la Somme. Elle vient de bénéficier d’un temps de repos dans le département de l’Oise.

 

Un de ses soldats, Paul Portier, connaît bien le secteur de Soyécourt et d’Ablaincourt. Il y a combattu en septembre. Il évoque ses souvenirs dans son témoignage réalisé après le conflit.

 

« Le repos de Velennes a pris fin le 12 octobre. Nous avons embarqué en automobiles pour revenir dans le secteur de Soyécourt-Ablaincourt. Notre débarquement s’est fait dans la nuit à Harbonnières, que nous commençons à bien connaître.

 

En ces jours d’automne, tout est baigné de tristesse. Le paysage n’a rien d’enchanteur et c’est sans enthousiasme que nous revenons ici. La saison des pluies va commencer et nous la détestons plus que le froid surtout dans ces terrains qui se transforment en 24 heures en océan de boue.

 

Le secteur paraît plus calme, ce qui ne veut pas dire que nous allons y vivre comme des rois. Nous ignorons d’ailleurs si ne nous participerons pas encore à des opérations offensives.

 

Le 14, nous nous portons au bois des Satyres, près du village d’Estrées, dans ce bois, les Boches, alors qu’ils l’occupaient, avaient construit des abris très confortables, en particulier, ceux qui s’enfoncent profondément sous la route de Saint-Quentin, et nous en profitons maintenant.

 

Le 16, dans la nuit, nous relevons la 2e compagnie de mitrailleuses du 17e Régiment d’Infanterie, près de la sucrerie de Génermont, relève assez mouvementée et très pénible.

 

sucrerie de Genermont

 

Pendant la nuit du 16 au 17, le 1er bataillon du 149e R.I., en ligne depuis la veille, effectue dans la direction du bois Bauer, une avance de 400 mètres sans rencontrer de résistance.

 

La journée du 17 est assez calme.

 

Pendant la journée du 18, l’artillerie allemande bombarde assez sérieusement la sucrerie et ses abords.

 

Le 19, il pleut sans arrêt et nos tranchées sont dans un état lamentable. Ce temps épouvantable n’arrête cependant pas l’artillerie ennemie, qui continue son marmitage et il en est ainsi le 20.

 

Le 22, à 4 h 00, je descends chercher la relève de la 2e compagnie de mitrailleuses qui se trouvait au bois des Satyres. La relève s’effectue dans d’assez bonnes conditions malgré le mauvais état des boyaux. Nous descendons en soutien dans les abris de la tranchée du Biniou.

 

Tranchee du Biniou-tranchee Sans-Gene

 

Le 23, pendant la journée, notre artillerie se montre très active. Au cours de la nuit, nous recevons l’ordre de nous tenir prêts à monter en ligne d’un moment à l’autre.

 

Je me rends au poste de commandement du 1er bataillon où je reçois un contre-ordre. Les opérations sont retardées de 24 heures.

 

Le 24, journée calme, il pleut de nouveau. Ce mauvais temps paraît être la cause des multiples ordres et contre-ordres qui nous parviennent à chaque instant. Nous passons notre temps à nous promener à droite et à gauche dans les boyaux.

Je descends reconnaître des emplacements au bois des Satyres où nous nous portons le 25 à 6 h 00.

 

Le 26, j’effectue une reconnaissance à la tranchée Sans-Gêne, où nous devons prendre position en cas d’alerte.

 

Le 27, activité de notre artillerie, nous nous attendons à monter à la tranchée Sans-Gêne pendant la nuit de 27 au 28, mais à 17 h 00, nous recevons un contre-ordre et nous passons réserve de D.I. à Foucaucourt. Toutes ces promenades sont éreintantes et nous aimerions en finir au plus vite.

 

En arrivant à Foucaucourt, nous ne trouvons aucun cantonnement disponible. Nous devons aller chercher asile à un kilomètre, dans des abris du boyau de la Boulangerie.

 

Le 28, à 16 h 00, nous revenons à Foucaucourt où nous cantonnons dans une cave. À la tombée de la nuit, il y a une vive activité des deux artilleries due à une attaque allemande.

 

Le 29, à 2 h 00, réveil en sursaut. Nous allons prendre place dans la tranchée Sans-Gêne. Une attaque de chez nous devant se déclencher dans la journée. Mais à 12 h 30, nous recevons déjà un contre-ordre. L’attaque est retardée de 24 h 00. La pluie persistante gêne sérieusement les opérations.

 

En fin de compte, au début de l’après-midi, nous quittons encore une fois nos emplacements de la tranchée Sans-Gêne pour revenir à la tranchée du Biniou et à 18 h 00, nous sommes à nouveau à Foucaucourt.

 

Le 30, le temps ne s’améliore pas, vent et pluie. Des bruits circulent que nous devons monter le soir en ligne. Activité d’artillerie.

 

Le 31, les Boches envoient quelques obus sur Foucaucourt, au croisement des routes de Saint-Quentin à Amiens et de Vermandovillers ; pas de tués, mais quelques blessés. À 19 h 00, nous montons en ligne, à la tranchée des Germains où nous relevons la 2e compagnie de mitrailleuses. La relève s’effectue à découvert, les boyaux étant impraticables.

 

La journée du 1er novembre est assez calme, mais le 2, le marmitage de nos tranchées devient plus violent.

 

Le 3 novembre, je descends à 4 h 00 reconnaître des cantonnements à Foucaucourt où ma compagnie doit revenir dans la nuit du 3 au 4.

 

Le soir, à 17 h 00, l’artillerie redouble part et d’autre et nos pertes sont assez sérieuses. La relève prévue s’effectue néanmoins sans trop de difficultés.

 

Les journées des 4 et 5 sont relativement calmes.

 

Le 6, pendant la soirée, activité de notre artillerie. Vers 21 h 00, explosion du dépôt de munitions de Bayonvillers.

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. monte en ligne pendant la nuit. Il doit attaquer le 7 avec le 3e bataillon en soutien. Nous demeurons à Foucaucourt, en réserve de C.A.. »

 

Sources :

 

Témoignage inédit de Paul Portier

 

Le fond de carte cartes est extrait du J.M.O. de la 25e brigade.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et à la mairie de Vienne, sans qui l’auteur de ce témoignage n’aurait jamais pu être identifié. 

7 avril 2023

Georges Poncelet (1892-1916)

Georges Poncelet

 

Georges Poncelet naît « au hasard des garnisons » le 18 février 1892 à Vendôme, dans le département du Loir-et-Cher.

 

Son père, Louis Jules, 47 ans, est officier de cavalerie au 7e régiment de Chasseurs. Sa mère, Marie Marguerite Dumont, 35 ans, n’exerce pas d’activité professionnelle.

 

Georges est le neuvième enfant du couple. Paul, le benjamin de la fratrie, voit le jour l’année suivante.

 

Genealogie famille Poncelet

 

Attiré très tôt par les chevaux et probablement initié aux bases de l’équitation, Georges ne rêve que d’une chose, s’engager dans un régiment de cavalerie.

 

Sa fiche matricule indique un degré d’instruction de niveau 3, ce qui est une erreur. En effet, le jeune Poncelet a passé le concours d’entrée de l’école de Saint-Cyr, ce qui implique qu’il a obligatoirement suivi un enseignement secondaire complet avec obtention du baccalauréat.

 

Georges Poncelet est reçu à l’école spéciale militaire, mais il ne fait pas partie des meilleurs admis. Son numéro d’entrée ne lui laisse aucun espoir pour une intégration dans un régiment de cavalerie. Il préfère démissionner plutôt que de se former dans l’infanterie.

 

Toujours dans l’idée de servir dans un régiment de cavalerie, Georges Poncelet se rend à la mairie de Château-Thierry, le 11 octobre 1911, pour y signer un engagement volontaire de trois ans.

 

Trois jours plus tard, il intègre, comme simple cavalier, le 6e régiment de cuirassiers, une unité qui tient garnison à Sainte-Menehould. Son instruction militaire débute le 15 octobre 1911. Elle s’achève le 14 août 1912.

 

Sainte-Menehould - entrée du quartier du 6e Cuirassier

 

Son niveau d’études et son statut d’engagé volontaire lui permettent d’accéder rapidement aux premiers grades de sous-officier. Il est nommé brigadier le 22 février 1912 puis maréchal des Logis le 27 septembre.

 

Deux petits accrocs au règlement en lien avec du matériel militaire lui valent 6 jours d’arrêts simples en décembre 1912.

 

 

Les manquements à la discipline sont un peu plus nombreux l’année suivante.

 

 

Le 5 décembre 1913, le maréchal des logis Poncelet signe un nouveau contrat d’une durée d’un an. Cet engagement prendra effet à compter du 11 octobre 1914,  lorsque le précédent arrivera à échéance.

 

Georges Poncelet occupe les fonctions maréchal des logis fourrier du 1er octobre 1913 au 6 mai 1914. Le jeune homme continue de se former avec tout ce qui lui est proposé au sein de la caserne.

 

Son livret matricule d’homme de troupe indique un brevet de maître de gymnastique et mentionne des épinglettes d’honneur ; celles-ci ont probablement été obtenues grâce à d’excellentes performances au tir.

 

Le maréchal des logis Poncelet prend part aux grandes manœuvres de la 4e D.I. de cavalerie entre le 29 août et le 15 septembre 1913.

 

Le 21 décembre, il obtient son brevet d’aptitude à l’emploi de chef de peloton.

 

Un dernier manquement à la discipline lui vaut 3 jours d’arrêts simples en février 1914.

 

 

Le 7 avril 1914, Georges Poncelet se rend à Verdun pour passer les épreuves écrites du concours d’admission à l’école d’application de cavalerie de Saumur. C’est une nouvelle chance de devenir officier.

 

Reçu, il n’aura malheureusement pas la possibilité de suivre la formation. Cette fois-ci, il est rattrapé par les évènements internationaux. Un conflit armé contre l’Allemagne est sur le point de commencer. Le maréchal des logis Poncelet entre en campagne contre l’Allemagne et l’Autriche dès le 31 juillet 1914.

 

Son régiment est envoyé au sud de Montmédy en tant que troupe de couverture. Il fait partie des unités qui doivent assurer la protection frontalière le temps que la nation termine la mobilisation de ses troupes.

 

Le 6e régiment de cuirassiers prend part à la bataille des Ardennes, du côté de Neufchâteau et d’Étalle en Belgique. Georges Poncelet est nommé aspirant le 10 août 1914. Fin août, son régiment protège la retraite de l’armée française près de Vervins.

 

Descendu jusqu’aux environs de Provins, le régiment de l’aspirant Poncelet participe à la bataille de la Marne. En octobre, il prend la direction de Lens avant de se diriger sur Béthume.

 

Fin 1914, la ligne de front se stabilise. La majorité des régiments de cavalerie abandonne ses chevaux devenus inutiles. Le 6e régiment de cuirassiers met pied à terre pour aller combattre dans les tranchées des Flandres, à Nieuport.

 

Début 1915, le 6e régiment de cuirassiers  est en Artois dans le secteur d’Arras.

 

Le 24 mars 1915, Georges Poncelet est nommé sous-lieutenant à titre temporaire. Il est enfin devenu officier.

 

Ce changement de statut entraîne aussitôt son affectation au 149e R.I.. Ce régiment combat du côté d’Aix-Noulette. Le chef de corps de cette unité lui confie le commandement d’une section de la 6e compagnie.

 

Le 4 mai 1915, le lieutenant-colonel Gothié lui inflige 8 jours d’arrêts simples pour le motif suivant : « Chargé de diriger une corvée de travailleurs au boyau de Saint-Nazaire, a quitté son poste sans motif et n’a pu arrêter une panique momentanée parmi ses hommes qui se sont réfugiés dans les tranchées de 1ère ligne. Le travail a été repris une heure après. Cette punition commencera le 4 mai. ». Ce sera sa dernière punition.

 

Le sous-lieutenant Poncelet participe aux attaques de mai, de juin et de septembre 1915 sur le front d’Artois.

Le 18 octobre, il est cité à l’ordre du 21e C.A. pour avoir assumé le commandement de sa compagnie après la mort de son supérieur, le lieutenant Damideau,  tué au cours d’une attaque menée le 26 septembre.

 

Le 6 janvier 1916, le chef de corps du 149e R.I. rédige la note suivante dans le feuillet individuel de Georges Poncelet : «  Sous-lieutenant à titre temporaire provenant des sous-officiers de cavalerie ancien démissionnaire à Saint-Cyr. Officier très sérieux, admissible à Saumur en 1914, ayant bien commandé une section et même une compagnie. Proposé pour le maintien à titre définitif. »

 

Suite à une décision prise par le général commandant en chef du 8 avril 1916, le sous-lieutenant Poncelet est promu lieutenant à titre temporaire. Cette nomination est ratifiée par une décision ministérielle du 15 avril. Georges Poncelet est en même temps nommé sous-lieutenant à titre définitif dans la cavalerie (J.O. du 17 avril 1916).

 

Le lieutenant Poncelet a été photographié à Somme-Tourbe, le 21 mai 1916. Il partage sa chambre avec le sous-lieutenant Robinet.

 

 

Début septembre 1916, le 149e R.I. est engagé dans le département de la Somme, au sud-est de Péronne. Le 4, il attaque le village de Soyécourt. Le lieutenant Poncelet est cité à l’ordre de la division pour ses actions.

 

Le 149e R.I. occupe ensuite un secteur de 1ère ligne allant de la sucrerie d’Ablaincourt au bois Bauer par roulement de bataillons.

 

Les conditions de vie sont très dures. La zone occupée est sans cesse bombardée par les Allemands et les conditions météorologiques sont particulièrement exécrables.

 

Le 7 novembre, une attaque prévue depuis le 24 octobre est sur le point d’être déclenchée. Les hommes du 2e bataillon du 149e R.I. se préparent à partir à l’assaut. L’artillerie fait rage. Le lieutenant Poncelet est déchiqueté par l’explosion d’un obus sur la parallèle du départ où sa compagnie est installée.

 

Trois heures plus tard la 6e compagnie, sous les ordres du sous-lieutenant Kolb passe à l’attaque. Elle sera citée à l’ordre de l’armée.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

Carte 1 journée du 7 novembre 1916

 

Georges Poncelet est inhumé dans un premier temps à Harbonnières. Sa tombe portait le numéro 1644.

 

Il n’existe pas de sépulture individuelle militaire portant son  nom. Le corps de cet officier a probablement été restitué à la famille dans les années 20.

 

Décorations obtenues :

 

Croix de guerre avec une palme, une étoile de vermeil et une étoile d’argent

 

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 63 en date du 18 octobre 1915. 

 

« Le 26 septembre devant Angres, a entraîné brillamment sa section à l’attaque des tranchées ennemies sous un bombardement et une fusillade des plus violents, son commandant de compagnie ayant été mortellement frappé, a maintenu sa compagnie sous le feu en donnant l’exemple du plus grand calme. Officier d’une bravoure, d’un entrain, d’un sang-froid remarquables, s’est toujours signalé par sa belle attitude dans toutes les actions auxquelles il a pris part. »

 

Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 155 en date du 10 septembre 1916 :

 

« A commandé sa compagnie avec beaucoup de sang froid et d’énergie pendant les attaques des 4, 5, 6 septembre 1916, tenant des positions de soutien successives sous des tirs de barrage des plus violents et faisant preuve des plus belles qualités de commandement.  »

 

Citation à l’ordre de la Xe Armée  n° 242 en date du 3 décembre 1916 :

 

« Commandant de compagnie de premier ordre, officier brillant, d’une conscience, d’un entrain et d’un courage merveilleux. Calme et réfléchi dans le danger, a donné dans toutes les actions auxquelles il a participé sans interruption d’avril 1915 à novembre 1916, la plus haute mesure de sa valeur et de ses qualités militaires.

 

Mortellement frappé le matin du 7 novembre 1916 alors qu’il parcourait la parallèle du départ où il avait installé sa compagnie en premier élément d’assaut (était titulaire de deux citations). »

 

Légion d’honneur à titre posthume avec le même texte que sa citation à l’ordre de l’Armée (publication dans le J.O. du 25 janvier 1920).

 

Le nom de cet homme est gravé sur le monument aux morts, sur une des plaques commémoratives de l’Hôtel de Ville et sur le tableau commémoratif de l’église Saint-Crépin de la ville de Château-Thierry.

 

Georges Poncelet ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Fiche matricule lue sur le site des archives départementales de l’Aisne.

 

La photographie présentée dans le montage est légendée : « chambre d’officiers - Poncelet et Rob - Somme-Tourbe – 21 mai 1916. »

 

Un grand merci à M. Bordes, à N. Tricat, à A. Carobbi, à M. Porcher à T. Vallé, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales de l’Aisne.

149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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