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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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24 mai 2011

Capitaine Pierre Grüneissen (1878-1915).

                  Pierre_Gruneissen

 Pierre Grüneissen est né le 16 septembre 1878 à Mantoche, commune se trouvant dans la Haute-Saône. Il est le fils de François Grüneissen et de Marguerite Blanchot. À sa naissance, son père exerçait la profession de cordonnier.

En octobre 1896, Pierre Grüneissen décide de signer un engagement volontaire pour une durée de 4 ans à la mairie de Besançon. Il  commence sa formation militaire comme simple soldat au 60e R.I. de Besançon. Poursuivant sa carrière, il signe plusieurs contrats d’engagement successifs, tout en restant au 60e R.I.. Nommé sous-lieutenant, en janvier 1911, il est muté au 149e R.I. à Épinal. Au début de la guerre, il est lieutenant à la 1ère compagnie. Pierre Grüneissen est  blessé le 25 août 1914 au combat de Mesnil. Après avoir été soigné, il rejoint son régiment qui est en Belgique au début du mois de novembre. À la fin de ce même mois, il est nommé capitaine à titre temporaire. Il trouvera la mort  à la tête de la 12e compagnie, lors de l’attaque du 9 mai 1915 à Aix-Noulette.

 

Citation à l’ordre de l’armée le 10 juin 1915.

« Dans l’attaque du 9 mai, a entraîné sa compagnie à l’assaut d’une position ennemie avec un courage et une énergie remarquables. Déjà blessé une première fois au cours de la campagne a été frappé mortellement au cours de cet assaut (J.O. du 31 juillet 1915).

 

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Le portrait du capitaine  Pierre Grüneissen provient du tableau d’honneur de la guerre 14-18 publié par la revue « l'illustration ».

La photo représentant une ruine sur le montage montre l’ancien « hôtel » des officiers du 3e bataillon du 149e R.I. avant l’attaque du 9 mai 1915. Elle a été réalisée en août 1915.

 

Un grand merci à M. Bordes, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

17 mai 2011

Printemps 1915, du courrier en partance pour le Manitoba.

                   Corinne_et_Lucien_Kern

De nouveau je viens remercier Suzanne Martel et toute sa famille pour leurs autorisations de publier ici de larges passages de deux lettres qui ont été écrites par Lucien Kern juste après les combats du 9 mai 1915 et des jours suivants.

 Extrait d’une lettre de Lucien Kern écrite le 15 mai 1915.

 

Ma chère bonne maman, chère sœur et beau-frère,

Je m’empresse de vous donner de mes nouvelles, sachant que si vous avez reçu ma dernière lettre vous devez être très inquiets. Je suis en bonne santé, mais fatigué et hébété par les terribles assauts livrés par nous depuis dimanche matin 9 mai à 10 h 00. Les  combats furent acharnés, continus et épouvantables… La bataille, vous ne pourrez jamais vous en faire une idée, il faut l’entendre et la voir, pour la comprendre. Après 6 jours de luttes terribles, sans sommeil, avec des attaques à la baïonnette sous un feu d’artillerie et de mitrailleuses intense, nous avons subi beaucoup de pertes, c’est forcé. Pauvres soldats tués, massacrés par les obus. Quelle boucherie et quelle horreur sans nom.

La bataille a commencé dimanche à 10 h 00… Il faut assister à des tueries, foncer sur l’ennemi sous le feu. Il faut se cacher, se terrer comme des taupes dans des trous pratiqués dans la terre. Il faut se protéger contre les gros obus qui ne cessent de tomber avec un fracas assourdissant, tuant et blessant…

 Pendant le bombardement, nous restons terrés. Défense de sortir et malheur à celui qui sort, car les obus ne pardonnent pas. Nous les entendons venir en sifflant, nous nous serrons contre le talus…

Depuis dimanche matin jusqu’à vendredi soir, nous avons fait 4500 prisonniers, pris 12 canons, 50 mitrailleuses et d’autres butins. Les Allemands fichaient le camp à notre approche. Après des bombardements pareils, nous devenions presque fous, toc, toc. Si vous voyiez et entendiez cela, ma bonne maman, c’est horrible…

Avant-hier, j’étais dans une petite cachette en terre, creusée sous un hêtre. Un gros obus vint tomber sur elle avec un bruit terrible, me soulevant et me jetant à terre violemment, par le déplacement d’air. Je fus assourdi, couvert de terre sous des débris de bois. Ah ! J’eus peur, car à ce moment-là, l’on ne rit pas du tout…

Votre fils et votre frère qui pense constamment à vous,

Lucien Kern.

 

Extrait d’une lettre de Lucien Kern écrite le 5 juin 1915.

 

Chers sœurs et beaux-frères,

C’est avec plaisir que j’ai reçu votre lettre, datée du 13 mai. Je suis heureux de constater que tout va bien là-bas. Je suis en bonne santé quoique fatigué par les durs combats que nous avons livrés du 9 au 15 mai…

Nous avons subi des pertes assez élevées, malheureusement. C’est dur et meurtrier, une charge à la baïonnette, contre un ennemi caché sous terre comme des taupes…

 C’est la guerre la plus fatigante et la plus déprimante qui n’ait jamais existé sur terre. C’est trop long et trop sanglant avec des armes pareilles. Les Allemands se servent de gaz asphyxiants…

 Il fait une terrible chaleur, pas de pluie, l’odeur est atroce, les morts sont horribles à regarder et nous voyons ceci à chaque pas, n’importe où, où nous tournons la tête. Ah ! L’appétit est loin. Dieu qu’ils sont vilains et affreux, et dire que l’on dort dessus, comme moi, l’autre jour, ou à côté. Il y a des endroits où les cadavres servent de parapets aux tranchées…

Je vous envoie aujourd’hui avec cette lettre un petit paquet contenant quelques souvenirs de guerre, que j’ai trouvés dans la tranchée conquise par nous le 9 mai. Il y a d’abord deux chapeaux ou parachutes qui servent à maintenir le plus longtemps possible les fusées éclairantes, la nuit. Elles sont en soie blanche. Ce sont des françaises que j’ai trouvées, échouées sur les tranchées. Ensuite, il ya un aigle impérial allemand que j’ai arraché sur un casque à pointe du 111e bataillon d’infanterie badois. Régiment que nous avons battu le 9 mai…

Je vous enverrai bientôt une bague en aluminium provenant d’une fusée percutante d’obus allemand. C’est moi qui l’ai faite avec l’aide d’un camarade.

 Bien le bonjour à toutes les personnes qui s’intéressent à moi. Je vous quitte en vous embrassant bien fort.

Votre frère qui vous aime,

Lucien Kern.

 

Référence bibliographique :

« Lettres de tranchées » correspondance de guerre de Lucien, Eugène et Aimé Kern, trois frères manitobains, soldats de l’armée française durant la Première Guerre. Éditions du blé. Saint-Boniface (Manitoba) Canada.2007.

 

Un très chaleureux  merci à Suzanne et Denise Martel et à Roselyne Duclos.

9 mai 2011

Sous-lieutenant Gaston Thiriat (1893-1915).

                Montage_Gaston_Thiriat 

Natif de la Dordogne, Gaston Thiriat est né le 15 octobre 1893 dans la commune de Menesplet. Il est le fils d’Alphonse Thiriat et de Marie Demange. Ce jeune homme exerce la profession de typographe à Épinal avant de commencer sa carrière militaire. Engagé volontaire pour une durée de trois ans, il franchit les portes de la caserne Courcy les derniers jours du mois de septembre 1912. Il ne quittera plus le 149e R.I. jusqu’à la fin de sa courte vie. Parti en campagne le 2 août 1914 comme sergent, il est rapidement nommé adjudant, puis sous-lieutenant à titre temporaire le 30 novembre 1914. Gaston Thiriat ne portera les galons de ce grade que durant quelques mois, puisqu’il trouvera la mort au cours de l’attaque du 9 mai 1915 à la tête d’une section qui appartient à la 1ère compagnie.

 

Cité à l’ordre du régiment le 30 janvier 1915 :

« N’a pas hésité à sauter dans une tête de sape ennemie, occupée par un petit poste allemand et a ensuite travaillé toute la nuit sous le feu des bombes allemandes pour relier cette tête de sape à nos tranchées de 1ère ligne. »

 

Cité à l’ordre de l’armée le 7 février 1915 :

« A fait preuve de courage en enlevant une tête de sape allemande et en se maintenant sur le terrain conquis, malgré le feu très meurtrier de l’ennemi. »

 

Cité à l’ordre de la X e   Armée le 10 juin 1915 :

« Le 9 mai 1915, à entraîné brillamment sa section à l’attaque des pentes de Notre-Dame-de-Lorette, ayant escaladé le parapet d’une tranchée, à un point où se trouvait une mitrailleuse ennemie, a été tué alors qu’il déchargeait son révolver sur les servants de cette mitrailleuse. »

 

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Le portrait du sous-lieutenant Gaston Thiriat provient du tableau d’honneur de la guerre 14-18 publié par la revue « l'illustration ».

 

Un grand merci à M. Bordes, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

3 mai 2011

9 mai 1915 (suite). Le ciel du pauvre biffin n'est jamais bleu...

                 journee_du_9_mai_1915

                                     legende_carte_9_mai_1915

L’offensive se déclenche…

 

Le ciel est clair, peu avant 10 h 00, débute l’attaque que doivent mener les 1ère et 3e compagnies. Franchissant le parapet, elles sortent des tranchées des bois 7 et 8. Cette attaque est soutenue par les 2e et 4e compagnies qui sont en arrière. Les éléments proches du 149e R.I. qui  appartiennent à la 13e D.I. ne parviennent pas à progresser en même temps qu’elles. Ces compagnies ont été prises d’enfilade par un barrage d’artillerie très violent et par le feu d’une section de mitrailleuses allemandes qui sont installées à la borne nord-est du bois. La progression se retrouve enrayée un moment de ce côté.

Vers la gauche, le 3e bataillon sort en même temps de la parallèle 5-7 du bois 5 et se porte à l’attaque du chemin des Vaches, de la haie IV et de la sape en Y. Il l’occupe, d’un seul bond malgré le feu terrible d’artillerie lourde allemande. L’artillerie française  tarde un peu à allonger son tir. Les éléments de la 13e D.I. font une avancée nouvelle…

 

10 H 30 : Le 1er bataillon subit de fortes pertes. Le capitaine Prunier, le sous-lieutenant Letourney, l’adjudant de bataillon Gabarre sont blessés. La compagnie de droite du 2e bataillon (5e compagnie) est poussée jusqu’au chemin des Vaches pour appuyer le 1er bataillon.

10 H 45 : Sous la poussée de cette compagnie et probablement en raison des quelques progrès de la 13e D.I., cette droite parvient à atteindre la sape I et la parallèle nord, pendant que les compagnies du centre remontent la haie II et le boyau partant de la haie G.

Le 3e bataillon quant à lui, progresse dans la haie 3 et les sapes T2 et T3.

11 h 20 : Toute la ligne d’attaque occupe l’ancienne 1ère ligne allemande. Elle va du point V à la sape T3. Le 3e bataillon en arrivant à l’angle formé par la sape T3 et cette ancienne 1ère ligne allemande est pris d’enfilade par un barrage d’artillerie lourde et par une section de mitrailleuses placée vers le point h2. En quelques minutes, le capitaine Panchaud qui commande le 3e bataillon, son adjudant de bataillon et un certain nombre de sous-officiers et d’hommes de troupe de la compagnie de gauche sont fauchés. Un ordre est donné au peloton de réserve du bois 6 de se porter à la lisière est du bois 5 pour renforcer le 3e bataillon. Des renforts allemands importants sont signalés au bois Carré.

12 h 30 : Arrivée du sous-lieutenant Jauffret du 3e bataillon qui rend compte de la mort du capitaine Gruneissen. Il signale également  la blessure du lieutenant Wichard. Il fait savoir l’état des pertes qui sont considérables. Le bataillon est pris d’enfilade à la sape T3 par les Allemands du bois 10 et de la tranchée intermédiaire h1 h2.

12 h 45 : Le capitaine Gérardin de la compagnie de mitrailleuses doit prendre le commandement de ce bataillon. Il doit  remettre de l’ordre dans les unités et organiser solidement les tranchées conquises.

13 h 20 : Un reçu provenant du commandant  du 1er bataillon fait avis que l’ancienne tranchée de 1ère ligne allemande est tenue solidement. Il fait savoir qu’il est en liaison avec des sections du 21e B.C.P. vers la parallèle Bruckert. Mais il n’a aucune autre nouvelle de la 13e D.I. et il n’est pas fixé sur ce qui se passe sur sa droite.

13 h 40 : Le commandant Bichat rend compte par téléphone qu’il est en liaison à sa droite avec 1 ½  du 21e B.C.P. mais que ceux-ci n’ont pas encore retrouvé la liaison avec la 13e D.I.. Il y a donc un trou sérieux à notre droite.

14 h 05 : Le commandant du 1er bataillon rend compte que les fractions qui avaient pu descendre dans le fond de Buval n’ont pu s’y maintenir, qu’il ne peut pour le moment que se fortifier dans les tranchées conquises. Le terrain est complètement bouleversé et les tranchées sont à refaire.

15 H 05 : Les Allemands tiennent encore T1 et T3.

15 h 30 : Le 149e R.I. stoppe son avance et s’organise sur sa position avant de se lancer dans une 2e attaque.

19 h 00 : La 2e phase de l’opération est reportée.

22 h 00 : La division transmet l’ordre aux unités engagées de s’organiser solidement sur les positions conquises.

 

Les pertes pour cette journée sont de 111 tués au combat et de décédés des suites de leurs blessures, de 277 blessés et de 3 disparus.

 

 

                                        Tableau des tués pour la journée du 9 mai 1915 

 

                        Tableau des blessés et des disparus pour la journée du 9 mai 1915

 

 

Graphiques et brefs commentaires.

 

                 Graphique__des_tues_journee_du_9_mai_1915

           

 La compagnie hors rang (C.H.R.), les compagnies de mitrailleuses (C.M.) et le 2e bataillon (symbolisé par la couleur verte) ne sont pas vraiment exposés, il y a peu de tués et de blessés.  Il n’en est pas de même pour le  1er bataillon (couleur rouge) et  le 3e bataillon (couleur bleue) qui  lancent  l’attaque du 9 mai 1915. Les pertes  les plus importantes sont  au 1er bataillon.

 

                 Graphique__des_bless_s_journee_du_9_mai_1915

          

 

Références bibliographiques :

Les archives du S.H.D. ont été consultées, ainsi que le J.M.O. de la 85e brigade, série 26 N 520/10.

Historique du régiment « 149e Régiment d’infanterie » Epinal. Imprimerie Klein, 1919.

Pour en savoir plus :

« Les combats de Lorette » du Capitaine J.Joubert. Éditions Payot. Paris, 1939.

« Lorette. Une bataille de 12 mois » d’Henri René. Éditions Perrin et Cie. Paris, 1919.

 

Un très grand merci à M. Bordes, à  A. Carobbi, à V. Le Calvez, à T. Cornet, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

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