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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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27 septembre 2019

Ouest du bois en Hache, 25 septembre 1915 (5ème partie).

Officiers du 2e bataillon du 149e R

Le 25 septembre 1915, le 2e bataillon du 149e R.I., qui fait partie de la réserve de la 43e D.I., arrive avec beaucoup de retard sur ses positions de 1ère ligne pour soutenir correctement le 1er B.C.P. dans son opération offensive.

Des explications sont exigées par le responsable du 149e R.I. qui doit rendre compte à sa hiérarchie. Celle-ci cherche à savoir si les compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. sont responsables ou non de l’échec de l’offensive qui a eu lieu ce jour-là dans le secteur d’attaque du 1er B.C.P..

Le 7 octobre 1915, des rapports circonstanciés sont rédigés par les chefs des 7e et 8e compagnies du 149e R.I.. Les capitaines Guilleminot et Jeské donnent leur version des faits.

Rapport du capitaine Pierre Guilleminot de la 7e compagnie du 149e R.I. :

« Les dispositions initiales pour le 25 septembre 1915 étaient les suivantes :

Les 5e et 8e compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. sont dans la place d’armes CD.

Les 6e et 7e compagnies sont installées dans la T.D.A.. La 6e au nord du boyau Defrasse la 7e au sud.

Leur mission était de suivre étroitement le mouvement des compagnies de 1ère ligne du bataillon en passant par le boyau Defrasse.

À 12 h 25, heure de l’attaque, la compagnie est à la T.D.A.. À ce moment, le renseignement parvient de l’avant selon lequel la 5e compagnie, 6e en tête, commence à progresser. La 8e la suit. La 7e avance à son tour par le boyau Defrasse et rencontre la queue de la 8e, dans le boyau Moreau. Il est, à ce moment, environ 13 h 15.

La progression qui avait été assez rapide jusque-là va être considérablement ralentie. La compagnie suit le dernier peloton de la 8e qui progresse par Defrasse vers la sape 4. Le boyau est encombré de blessés qui reviennent. La marche est excessivement lente. Vers 14 h 00, nous pouvons arriver lentement à la sape 4.

Là, le mouvement est complètement arrêté. Dans la sape 4, il y a un peloton de la 8e du 149e R.I., mélangé à une section de mitrailleuses de chasseurs qui arrête tout mouvement dans la sape elle-même et dans le chemin creux en faisant de multiples mouvements d’aller et retour. J’en ai compté jusqu’à cinq.

Impossible d’aller à droite ou à gauche, dans le chemin creux, il est rempli de chasseurs du 1er bataillon qui ne bougent pas, la 1ère ligne ne dégageant pas.

Au moment de la contre-attaque allemande de 16 h 30, je tente d’envoyer un peloton par la sape 4’, pour aider la 5e compagnie du 149e R.I.. Le peloton ne peut avancer, car le chemin creux est archi bondé de chasseurs.

Ce n’est qu’à la nuit, et assez tard, vers 20 h 00 ou 21 h 00, que les chasseurs dégagèrent un peu le chemin creux, que je parviens à gagner, avec mille difficultés, par la sape 4 et la tranchée de départ. Cette dernière était d’ailleurs encore occupée par des éléments des chasseurs. »

Rapport du capitaine Martin Jeské de la 8e compagnie du 149e R.I. :

«  Le 25 septembre 1915, la 8e compagnie occupait les places d’armes C.D.. À 12 h 25, la compagnie a quitté les places d’armes pour se porter vers la 1ère ligne suivant les boyaux Cordonnier, Moreau et Defrasse. La compagnie a suivi étroitement la 5e compagnie du 149e R.I..

Les boyaux Moreau et Defrasse ont été encombrés par des fractions du 1er bataillon de chasseurs à pied, qui occupaient les boyaux. La progression a été très lente vu que les fractions du 1er B.C.P. n’avançaient pas. Après de très grandes difficultés, la compagnie a réussi à atteindre la sape 4 à 13 h 15. Vers 13 h 30, une section et demie de ma compagnie a été placée dans la parallèle de départ entre les sapes 4 et 3 bis ; le restant de ma compagnie est obligé de rester dans la sape 4. La parallèle au nord de la sape 3 bis était encore occupée par des fractions du 1er bataillon de chasseurs à pied. Le terrain, en avant de cette parallèle, était très battu par des mitrailleuses ennemies, ce qui, très probablement, a arrêté l’attaque de cette partie du 1er B.C.P.. ».

Ces deux rapports sont rapidement remis à leur commandant pour qu’il puisse, à son tour, écrire le sien.

Carte 1 journee du 25 septembre 1915 (5e partie)

Legende carte 1 journee du 25 septembre 1915 (5e partie)

Rapport du commandant Schalck du 2e bataillon du 149e R.I. :

« Il ressort des rapports ci-joints des capitaines commandants les 7e et 8e compagnies, que la progression des unités du 2e bataillon du 149e R.I. dans l’attaque du 25 septembre dernier a été arrêtée et considérablement retardée par des éléments du 1er B.C.P. qui stationnait dans le chemin creux et dans la sape 4.

Ces éléments comprenaient deux sections de mitrailleuses et des sections de la compagnie de chasseurs placée avant l’attaque, dans le boyau Moreau.

La 5e compagnie du 149e R.I. et une partie seulement de la 8e compagnie ont pu les dépasser, alors qu’elles auraient dû les suivre. Le reste de la 8e (2 sections ½) et la 7e compagnie qui marchait exactement dans ses traces, furent non seulement arrêtés par ces éléments, mais encore refoulés vers l’arrière par les deux sections de mitrailleuses de chasseurs, ainsi que l’avait déjà signalé le chef de bataillon Schalck dans son rapport.

De plus, la 5e compagnie du 149e R.I. et la fraction de la 8e compagnie qui ont pu atteindre la parallèle de départ au nord et au sud de la sape 4 l’ont trouvé remplie de chasseurs, ce qui prouve péremptoirement que les différentes vagues que devait lancer le 1er B.C.P. n’avaient pu toutes sortir de la parallèle.

Le 2e bataillon qui devait suivre le débouché des chasseurs ne peut donc être incriminé en rien de la non-réussite de l’attaque dans cette partie du secteur, battu de front et d’enfilade par un tir intense d’artillerie et de mitrailleuses et dont les défenses accessoires ennemies étaient presque intactes.

Au moment de la contre-attaque allemande, vers 16 h 30, ce sont des unités du 149e R.I. qui avaient pu réussir à prendre place dans la parallèle de départ où se trouvait le chef de bataillon. C'est-à-dire la 5e compagnie et la section de la 8e compagnie qui sont sorties de la tranchée sur l’ordre de leur chef de bataillon et ont refoulé l’ennemi, laissant 4 officiers et environ 100 hommes sur le terrain. »

À la lecture de ce rapport, il est clairement établi que le 2e bataillon du 149e R.I. ne fut en aucun cas responsable de l’échec de l’attaque du 25 septembre 1915 vis-à-vis de la tâche qui lui avait été donnée.

Il est intéressant d’aller faire un tour du côté du J.M.O. du 1er B.C.P. pour savoir ce qui est écrit à propos de ces évènements. Le bataillon de Chasseurs ne s’attribue pas les torts. Seul l’état des boyaux est rendu responsable du retard  du bataillon Schalck.

« Le bataillon du 149e R.I., retardé dans sa marche par l’état des boyaux, n’arrive dans la parallèle de départ que vers 15 h 30. »

Le J.M.O. de la 85e brigade ne reprend qu’une seule phrase qui résume de manière très imprécise la réalité du terrain évoquée par les deux officiers du 149e R.I.. Ce J.M.O. ne fait que la synthèse des informations pour les unités qui la composent, sans chercher à donner le détail de chaque étape des combats.

« A 15 h 00, le colonel du 149e R.I. rend compte que le bataillon Schalck  a déjà été engagé par le commandant du 1er B.C.P. et que sur la demande du commandant du 31e B.C.P.. Il engage le bataillon Chevassu pour appuyer l’action du 31e B.C.P.. »

En finissant avec celui de la 43e D.I., le 149e R.I. est juste en soutien, aucun rôle majeur pour lui ! Il s’agit pour le J.M.O. de donner une vision d’ensemble des gains et des grands moments  sans entrer dans les détails.

« Au nord, le 1er B.C.P. résistait énergiquement aux contre-attaques ennemies et se maintenait en g11 g12. Il avait été renforcé à sa gauche par un bataillon du 149e R.I.. »

Que peut en apprendre la population dans la transcription qui lui est faite, du résumé du 25 septembre 1915 dans la presse nationale ? Rien de précis. Pourtant la journée fut dure  pour le 149e R.I..

Les rapports rédigés par les officiers présents sur le terrain sont incomparablement plus riches et donnent une vision de la réalité de la guerre à des années lumières de la presse où même des J.M.O. des niveaux supérieurs.

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/4

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.

J.M.O. du 1er B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/2.

Fond de carte du secteur de Noulette construit par V. le Calvez.

La carte qui indique les emplacements et les mouvements des compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. a été construite à partir de la lecture des trois rapports rédigés par les officiers du bataillon. Cette carte ne doit avoir qu’une valeur indicative.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

20 septembre 2019

Pierre Fernand Bonnet-Casson (1887-1916).

Pierre Fernand Bonnet-Casson

Natif du département de l’Isère, Pierre Fernand Bonnet-Casson voit le jour le 17 février 1887 dans la commune de Vienne.

Sa mère, Louise Rolland, est âgée de 25 ans lorsqu’elle lui donne vie. Elle exerce le métier de femme de ménage.

Son père se prénomme Marie Joseph François Fernand. Il travaille comme laveur de laine dans une entreprise de la région. C’est un homme âgé de 29 ans. Lorsqu’il se rend à la mairie pour signer le registre d’état civil, il est accompagné des deux témoins, Michel Magrand et Charles Plantier. Le premier est tonnelier, le second négociant.

Quelques années plus tard, le jeune Fernand quitte l’école communale en sachant lire, écrire et compter. Sa fiche signalétique et des services nous apprend qu’il possède un degré d’instruction de niveau 3 et qu’il a été formé au métier de coiffeur, peut-être par son oncle maternel, Jean Rolland.

Doué pour le vélo et sportif de bon niveau, Fernand s’inscrit à plusieurs courses en tant qu’amateur.

En 1907, il termine 9e du Paris-Amiens. L’année suivante, il finit 2e du Paris-Amiens, 2e du Paris-Auxerre, et 1er du Paris-Évreux.

1908 est aussi l’année où il est appelé sous les drapeaux. Fernand Bonnet-Casson doit se rendre à Épinal pour accomplir ses devoirs militaires dans une des compagnies du 149e R.I.. Il arrive au corps le 8 octobre.

Un peu moins de deux ans plus tard, le 25 septembre 1910, le soldat Bonnet-Casson est envoyé dans la disponibilité de l’armée active avec l’obtention de son certificat de bonne conduite. Six jours plus tard, il passe dans la réserve de l’armée active.

Installé au numéro 4 de la rue Saint Vincent de Paul à Paris, Fernand partage à nouveau son temps entre son métier de coiffeur et ses courses de vélo. Il est devenu coureur indépendant. Toutes les épreuves auxquelles il participe sont courues dans cette catégorie.

En 1911, il termine 3e de la boucle Paris-Château-Thierry-Paris.

Cette année-là, Fernand Bonnet-Casson prend également part au tour de France des indépendants. Il doit également faire sa 1ère période d’exercice au 149e R.I. entre le 22 novembre et le 14 décembre.

Le 26 décembre, il épouse Marie Thérèse Soulhac à la mairie du 10e arrondissement. À cette période de sa vie, son père habite Lyon où il travaille comme conducteur de fiacre. Sa mère n’est plus de ce monde et son frère Étienne, alors âgé de 23 ans, est sous les drapeaux comme soldat au 60e R.I. de Besançon.

En 1912, Fernand Bonnet-Casson gagne le Paris-Honfleur.

L’année suivante, il est 11e du Paris-Roubaix, 3e du Paris-Beaugency puis 1er du grand prix de Juvisy.

Le 1er mars 1914, Marie Thérèse donne naissance à une petite fille qui est prénommée Jeannine Antoinette Fernande. Le couple Bonnet-Casson vit au numéro 17 de la rue de l’Aqueduc. Cette année-là, les courses s’enchaînent pour Fernand. Il finit 2e du Paris-Gaillon, 13e du Paris-Nancy, 17e du grand prix de Touraine, 10e du Paris-Châteauroux, 3e du Paris-Roubaix, 1er du Paris-Calais et 3e du championnat national.

La saison n’est pas tout à fait terminée qu’il faut y mettre fin. Fernand ne sait pas encore que le monde est à la veille d’un grand cataclysme humain. Comme des dizaines de milliers d’hommes, il est rappelé par ordre de mobilisation générale. L’Allemagne et la France sont sur le point de se déclarer la guerre. En tant que réserviste, Fernand doit rejoindre la caserne Coursy à Épinal le 4 août 1914. Dès son arrivée au dépôt, il est affecté à la 10e compagnie. Le soldat Bonnet-Casson tombe rapidement malade.

Il est impossible de savoir ce qui lui est arrivé au sein du régiment. Son registre matricule est insuffisamment détaillé pour nous puissions être bien renseignés sur son parcours de combattant. À quelles attaques menées ou subites par le 149e R.I. a-t-il participé ? Quand est-il tombé malade ? Combien de temps est-il resté à l’arrière avant d’être obligé de retourner dans la zone des armées ? Où a-t-il été soigné ? Pour l’instant, il n’y a pas de réponses satisfaisantes à donner à toutes ces questions.

Cependant, grâce à la lecture d’un article de presse publié quelques jours après sa mort, nous pouvons tout de même obtenir quelques détails sur sa vie de soldat. L’article nous informe qu’il est tombé rapidement malade après avoir revêtu son uniforme de combattant. Fernand Bonnet Casson est ensuite devenu infirmier à l’hôpital où il fut soigné, avant d’être obligé de repartir dans la zone des armées pour y réintégrer son ancienne unité.

En mars 1916, nous le retrouvons dans le secteur de Verdun. Le 3e bataillon du 149e R.I., sous les ordres du commandant de Witkowski, est en réserve du côté du village de Fleury-devant-Douaumont. La 10e compagnie est commandée par le capitaine Gérard. Elle est placée dans un secteur régulièrement bombardé. Le 10 mars, Fernand est mortellement blessé, il décède le lendemain.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Carte journee du 12 mars 1916 a1

Le soldat Bonnet-Casson est dans un premier temps enterré dans le cimetière militaire de Souville. Son lieu de sépulture actuel reste inconnu.

Le journal sportif parisien « l’auto » dirigé par Henri Desgranges lui rend hommage dans son édition du 22 mars 1916 :

« C’est un de nos plus modestes, mais un de nos meilleurs champions indépendants Fernand Bonnet que nous pleurons aujourd’hui. Son frère Étienne, glorieux mutilé de cette guerre, également très bon coureur indépendant, nous en apporta hier, la triste nouvelle. Le 11 mars dernier, mortellement frappé de plusieurs balles, il survécut quelques heures encore, le temps de confier à un camarade ses volontés in extremis pour être transmises à sa jeune femme. Né à Vienne (Isère), le brave Bonnet était âgé de 29 ans. Il débuta dans les courses cyclistes en 1907. Coiffeur de son état, il était un des fidèles de notre annuel championnat de la coiffure et c’est dans une de ces épreuves qu’il fit ses premiers pas sportifs. C’était un concurrent d’une loyauté absolue qui jouissait de l’estime de tous ses camarades. D’abord membre de feue la société athlétique de Montrouge, puis du club athlétique de la société générale, le vaillant champion était inscrit, avant la guerre, au vélo-club de Levallois. C’est sous les couleurs de ce dernier qu’il gagna, en 1913,  Paris-Calais, Paris-Honfleur et le grand prix de Juvisy.

À la mobilisation, Fernand Bonnet fut intégré à la 10e compagnie du 149e R.I. comme cycliste. Il tomba bientôt malade et fut évacué sur un hôpital du front où on le soigna pour une crise d’entérite.

Lors de sa convalescence, il vint nous rendre visite et nous fit part de son intention de solliciter son passage dans l’aviation. En attendant, il fut nommé infirmier à l’hôpital même où il avait été soigné. Mais une commission de majors le déclara de nouveau apte au service armé et Bonnet fut versé dans une formation d’infanterie sur le front. »

Décoration obtenue :

Citation à l’ordre de la brigade n° 36 du 24 mars 1916.

« Très bon soldat, a fait preuve de calme et de bravoure au combat du 10 mars 1916, a été mortellement blessé au cours de l’action. »

Son épouse, Marie Thérèse Soulhac, se remarie le 29 octobre 1932.

Sources :

La fiche signalétique et des services de Fernand Bonnet-Casson a été consultée sur le site des  archives départementales du Rhône.

Les sites « Gallica » et « mémoire des hommes » ont également été visités pour réaliser cette petite notice biographique.

Le portrait de Fernand Bonnet-Casson est extrait de la revue l'auto-vélo du 13 juillet 1914  publié sur « Gallica ».

Le palmarès de ce coureur cycliste a été trouvé sur le site suivant :

Logo du site cyclistes dans la Grande Guerre

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carrobi et aux archives départementales du Rhône.

13 septembre 2019

Ouest du bois en Hache, 25 septembre 1915 (4ème partie).

Officiers_du_3e_bataillon_du_149e_R

Le 25 septembre 1915, le 149e R.I. forme la réserve d’offensive de la 43e D.I... Les compagnies du 3e bataillon du régiment quittent leurs positions initiales pour aller soutenir le 31e B.C.P. dans son attaque. Le bataillon du commandant Chevassu reste immobilisé un long moment dans les boyaux lorsqu’il monte en 1ère ligne. Bloqué par un bataillon du 158e R.I., il prend beaucoup de retard.

Les 9e, 10e, 11e et 12e compagnies du 149e R.I. furent dans l’incapacité d’épauler correctement le 31e B.C.P. alors que celui-ci était dans la demande.

Après les combats des 25, 26 et 27 septembre 1915, des rapports écrits sont demandés au sous-lieutenant Delaval, au commandant Chevassu et au capitaine Jean, pour tenter de comprendre ce qui s’est passé.

Compte-rendu du sous-lieutenant Delaval de la 11e compagnie du 149e R.I. :

« La 11e compagnie a quitté la tranchée en V à 12 h 30. Elle a suivi le boyau Helmer jusqu’à son intersection avec le boyau Goiran. Cette 1ère partie du mouvement s’est effectuée normalement, la compagnie n’a rencontré que quelques isolés, blessés ou agents de liaison qui ont peu gêné sa marche.

Arrivée au boyau Goiran, la compagnie sur ordre du lieutenant Prenez a occupé ce boyau. La 1ère section, commandée par le sous-lieutenant Delaval, avait ordre de gagner f7 et de s’y arrêter en attendant de nouveaux ordres. Il pouvait être à ce moment 13 h 00 à 14 h 00 environ. Le lieutenant Prenez est passé en tête de la compagnie et l’a engagée dans le boyau Coquelet.

C’est là que la 1ère compagnie s’est heurtée à la queue de la 9e compagnie qui était arrêtée dans le boyau.

Le lieutenant Prenez s’est porté en avant pour connaître les raisons de cet encombrement. Dix minutes après,  la 9e compagnie se remettait en marche et le sous-lieutenant Delaval recevait l’ordre du lieutenant Prenez de suivre ce mouvement.

Seule la 1ère section a pu exécuter cet ordre et gagner son emplacement.

À partir de ce moment, le sous-lieutenant Delaval ignore ce qui s’est passé pour le reste de la compagnie. À 16 h 00, le lieutenant Prenez a rejoint la 1ère section, avec le reste de la compagnie qu’il n’avait pas réussi à faire progresser.

Ceux des agents de liaison qui étaient avec lui et qui n’ont pas été blessés par la suite peuvent, seuls, donner des renseignements sur les éléments qui obstruaient le boyau.

D’après le soldat Bernardon, ces éléments appartenaient à la 10e compagnie du 149e R.I. et devaient se trouver, eux-mêmes, gênés par d’autres fractions dont il ignore la nature.

L’autre témoin, le soldat Champenier, est actuellement planton auprès du colonel.

À 17 h 00, la compagnie a pu se porter sur l’emplacement de la 1ère tranchée allemande conquise, pour étayer cette ligne et l’organiser. »

Le 30 septembre 1915, le commandant Chevassu fait son rapport pour l’ensemble de son bataillon.

« Le 25 septembre 1915, le 3e bataillon était disposé depuis la nuit du 24 au 25 de la manière suivante :

La 11e compagnie dans la tranchée en V

La 12e compagnie dans la tranchée des Saules.

Les 9e et 10e compagnies, avec le chef de bataillon, dans le fossé aux Loups.

Le 3e bataillon devait se tenir en liaison avec le 31e B.C.P. et opérer dans ses traces.

La liaison était réalisée par un officier, le sous-lieutenant Mouren, de la 9e compagnie, accompagné d’agents de liaison, en place depuis 8 h 00.

Le sous-lieutenant Mouren avait ordre de transmettre toutes indications sur le placement du 31e B.C.P. et sur le moment du déplacement des derniers éléments de ce B.C.P. par téléphone, depuis le P.C.2 et par postes de correspondance reliant le P.C.2, au fossé aux Loups.

Pour plus de précautions, le sous-lieutenant Mouren devait aviser, simultanément, les 11e et 12e compagnies plus avancées et destinées à prendre la tête et le chef de bataillon placé au fossé aux Loups.

C’est à dessein que cette mission importante avait été confiée à un officier. Monsieur Mourens avait reconnu les éléments de queue du 31e B.C.P. dans le boyau Goiran et, lorsque ces éléments furent sur le point de s’ébranler pour se porter en avant, il transmit l’indication par ses agents de liaison, n’ayant pu se servir du téléphone en permanence occupé.

Les itinéraires avaient été étudiés, reconnus et fixés à l’avance, les 11e et 12e compagnies par le boyau Helmer, les 9e et 10e compagnies par les boyaux Madelin et Coquelet.

Les deux groupes de compagnie se mirent en marche immédiatement à 12 h 45.

Deux itinéraires avaient été donnés pour permettre un débit plus rapide.

Mais la rapidité de marche fut très inégale. Les 11e et 12e compagnies marquèrent un arrêt à hauteur du boyau Goiran et y furent rapidement coincées, par des détachements de prisonniers, ramenés par le boyau Helmer, sous l’escorte de chasseurs du 31e B.C.P., des blessés et des éléments du 158e R.I. qui refluaient du chemin creux.

Les 9e et 10e compagnies arrivèrent au contraire jusque à f7 sans être gênées autrement que par les blessés et un détachement de prisonniers vers 14 h 00.

C’est surtout à hauteur des débouchés sur la 1ère ligne (chemin creux, extrémité du boyau Coquelet et f8) que se produisit l’encombrement. Le chemin creux subissait, d’ailleurs, un bombardement d’une extrême violence. Il était bouleversé et encombré, ainsi que les sapes, par de nombreux morts et blessés sur lesquels il fallait marcher pour passer.

La 9e compagnie reçut l’ordre de prendre la tête du mouvement par la sape 4’ et opéra sa jonction avec des fractions du 31e B.C.P. qui tenaient la parallèle de départ.

La 11e compagnie, arrivée sur ces entrefaites (14 h 45) fut également portée par la sape 5, vers la parallèle de départ.

Mis aux ordres du chef de bataillon, commandant le 31e B.C.P., le commandant du 3e bataillon s’était immédiatement renseigné sur la situation et tenu à la disposition du commandant du 31e B.C.P..

Au moment où la 11e compagnie du 149e R.I. allait déboucher, des flottements se produisaient dans les troupes engagées en avant, vers 16 h 00.

La 11e compagnie fut portée sur l’emplacement de la 1ère tranchée allemande conquise pour étayer cette ligne, tandis que la 9e compagnie se portait à gauche en contre-attaque, de la contre-attaque allemande qui se dessinait vers 17 h 00.

Les 10e et 12e compagnies se serraient dans les sapes au prix des plus grandes difficultés vers 17 h 30.

À la nuit, la 11e compagnie organisa de toutes pièces la tranchée conquise.

Le mélange des unités était tel que l’on dut se contenter de l’avance acquise, bien que les ordres eussent été déjà donnés pour la continuation de l’attaque.

En résumé, pour le 3e bataillon du 149e R.I., les difficultés provinrent de l’entassement des unités dans le chemin creux et les sapes, prises sous un feu d’artillerie très repéré et très violent, qui avait comblé, en partie, les passages d’éboulement des blessés et des morts. Malgré les difficultés, la liaison avec le 31e B.C.P. a été réalisée à hauteur du chemin creux et constamment maintenue par la suite. »

Carte_1_journee_du_25_septembre_1915__4e_partie_

Legende_carte_1_journee_du_25_septembre_1915__partie_4_

Le 10 octobre 1915, le capitaine Jean qui commande la 9e compagnie du 149e R.I. écrit à son tour un rapport.

« En réponse à la note ci-jointe du chef du 3e bataillon, le capitaine Jean, commandant la 9e compagnie, a l’honneur de donner les précisions suivantes :

Le 25 septembre, la 9e compagnie avait mission de partir de la fosse aux Loups, dès l’ordre donné par le chef du 3e bataillon et de se porter en avant par le boyau Madelin et le boyau Coquelet vers la sape 5. Elle devait, en route, souder sa tête à la gauche de la 12e compagnie, laquelle, placée à la tranchée des Saules, devait se souder à la 11e compagnie, compagnie de tête, partant de la tranchée en V.

Dès l’ordre reçu par le chef de bataillon, la 9e compagnie s’est mise en mouvement.

Toujours en exécution des ordres reçus, la 1ère section marchait en avant, commandée par le sous-lieutenant Chauffenne. Le commandant de compagnie avait l’ordre de marcher à 25 pas derrière sa 1ère section suivi des 3 autres. Le chef de bataillon, avec sa liaison, prit place dans la colonne derrière la 1ère section de la 9e compagnie, en avant du commandant de compagnie.

La colonne suivit ainsi, sans obstacle autre que des blessés, un détachement de prisonniers et les troupes de la T.D.A. dans le boyau Madelin et le boyau Coquelet où le sous-lieutenant Chauffenne s’engagea pour aller à la sape 5. 

Le commandant de compagnie, parvenu au chemin creux, reçut l’ordre du chef de bataillon de se porter vers la sape 4et d’y rester en liaison avec les éléments qu’il trouverait du 31e B.C.P..

La 11e et la 12e compagnie ayant été retardées dans leur itinéraire, la 9e compagnie se trouva en tête de bataillon, à l’extrémité du boyau Coquelet vers 14 h 30. Elle était partie du fossé aux Loups à 12 h 50 pour parvenir au chemin creux en 1 h 30 environ.

Plus exactement, une section de la 11e compagnie, la section Delaval, se trouvait en tête, engagée dans le chemin creux entre la sape 5 et sape 4.

Elle reçut l’ordre de passer à la droite de la 9e compagnie pour se ressouder à la 11e compagnie. Dès lors, le commandant de la 9e compagnie se trouva en liaison avec le 31e B.C.P..

Cette liaison fut gardée étroitement et la progression des 3 sections de la 9e compagnie qui suivaient le commandant de compagnie, sans la section Chauffenne qui est restée dans la sape 5, où elle était en avant de la 10e compagnie, se fit en contact constant avec le 31e B.C.P., vers la parallèle de départ.

Cette liaison fut assurée par un sergent sous le contrôle constant du sous-lieutenant Gindre, chef de la 2e section et commandant de compagnie.

La tête de la 9e compagnie déboucha ainsi dans la parallèle de départ où elle prit place entre le 31e B.C.P. à sa droite et le 2e bataillon du 149e R.I. à sa gauche.

Les souvenirs du capitaine commandant de compagnie ne lui permettent pas de préciser l’heure exacte à laquelle la 9e compagnie a débouché dans la parallèle de départ.

La nuit ne vint qu’assez longtemps après l’occupation par la 9e compagnie du secteur de 1ère ligne. Il pouvait être environ 16 h 00.

La position des 3 sections de la 9e compagnie était alors la suivante : une section dans la parallèle de départ, à cheval sur l’extrémité de la sape 4’, les deux autres sections dans la sape 4, où le sous-lieutenant Gindre prit contact avec un officier du 31e B.C.P. à notre droite.

Le commandant de compagnie prit contact, à gauche, avec le capitaine Guilleminot et le commandant Schalck.

La nuit venue, trois patrouilles furent lancées en avant par la 9e compagnie. La 1ère, commandée par le sergent Frémiot, qui part à droite, ne rapporta aucun renseignement intéressant. La 2e, commandée par le sous-lieutenant Gindre, se porte en avant du front même occupé par la compagnie. Elle rencontra, dans un trou d’obus, à la distance d’environ 80 mètres, un adjudant du 31e B.C.P. avec 9 hommes, dont un blessé.

Une 3e patrouille conduite par l’adjudant Vitre s’est portée à droite. Elle a fait liaison, en avant de la sape 5 avec le sous-lieutenant Chauffenne. »

Dans la soirée du 25 septembre 1915, la 11e compagnie du 149e R.I., de concert avec le groupement Chauveau, réorganise l’ancienne tranchée allemande à la lisière du bois en Hache, la gauche du 158e R.I. étant à 40 mètres environ. Les sapeurs du génie et une autre compagnie du 149e R.I. prolongent les sapes 5 et 6 jusqu’à l’ancienne tranchée allemande.

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

Fond de carte du secteur de Noulette construit par V. le Calvez.

La carte, qui indique les emplacements et les mouvements des compagnies du 3e bataillon du 149e R.I., a été construite à partir de la lecture des trois rapports rédigés par les officiers Chevassu, Jean et Delaval. Cette carte ne doit avoir qu’une valeur indicative.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

6 septembre 2019

Louis Clovis Giray (1879-1962)

Louis_Clovis_Giray

 

Les années de jeunesse

 

Louis Clovis Giray naît le 12 décembre 1879 dans le 3e arrondissement lyonnais. Son père, Pierre Clovis, est un homme de 29 ans qui travaille comme épicier. Sa mère, Adèle Walter, est une jeune femme âgée de 22 ans. Le couple parental vit au numéro 124 de la rue Montesquieu.

 

Louis est l'aîné d’une fratrie composée de deux garçons et de deux filles.

 

Genealogie famille Giray

 

Louis Giray achève une scolarité primaire supérieure en sachant très bien lire, écrire et compter.

 

Le père décède le 13 septembre 1894. Le plus âgé de ses enfants n’a pas encore fêté ses 16 ans.

 

Jean, le frère du père, devient le subrogé-tuteur de ses neveux et nièces. Adèle Walter épouse en secondes noces François Bassons.

 

Louis Giray travaille comme confiseur avant de s’orienter vers une carrière militaire.

 

Le 19 janvier 1898, il prend la décision d’aller à la mairie de Villeurbanne pour y signer un engagement volontaire de quatre ans. Il choisit L’Afrique. Prend-il cette décision par rêverie exotique ? Par désir d’aventure ? Sa situation familiale s’est-elle complexifiée après le décès de son père au point de vouloir fuir le plus loin possible de son beau-père et de sa mère ? Il est difficile de le savoir.

 

Au 4e régiment de Zouaves

 

Après avoir traversé la Méditerranée, Louis Giray arrive au dépôt de son régiment à Tunis le 27 janvier 1898. L’histoire ne nous dit pas dans quelles casernes du 4e zouave il fut affecté durant l’intégralité de son engagement africain.

 

Le soldat Giray est nommé caporal le 16 octobre 1898 puis sergent le 16 février 1900. À partir de cette date, il occupe les fonctions de sergent fourrier. Un an plus tard, il devient responsable de deux escouades de compagnie. Cette charge ne semble pas lui convenir puisqu’il retourne à ses crayons et à ses registres de comptabilité le 23 juin 1900.

 

Durant ces quatre années chez les zouaves, Louis Giray est sanctionné à de nombreuses reprises. La 1ère année sous l’uniforme est particulièrement difficile. La discipline est un sujet délicat et les motifs à punitions ne manquent vraiment pas. Souvent consigné au quartier, parfois en salle de police, il n’est mis seulement qu’une fois aux arrêts simples, mais jamais en cellule. 

 

 

 

Le 19 janvier 1902, Louis passe dans la réserve de l’armée active. Son contrat est arrivé à échéance. Il peut maintenant regagner le continent français.

 

Au 11e B.C.A.

 

L’existence civile ne semble finalement pas lui convenir. Ce changement radical de style de vie a peut-être été trop compliqué à assumer. Louis ne parvient pas à trouver de nouvelles marques. Le 17 mars 1902, il finit par signer un contrat de deux ans avec l’armée. Cette fois-ci, il choisit le 11e B.C.A.. Sa nouvelle tenue revêtue, il reprend ses fonctions de sergent fourrier.

 

Le 1er février 1903, il passe sergent-major poursuivant ainsi ses missions purement administratives.

 

Les contrats militaires s’enchaînent. Un premier rengagement de trois ans est signé le 4 avril 1903 ; celui-ci doit prendre effet à compter du 17 mars 1904.  Un second rengagement d’un an est contracté le 1er mars 1907, à compter du 17 mars 1907.

 

Le troisième est bien plus long. À cette occasion, il en reprend pour cinq ans. Signé le 2 mars 1908, ce nouveau contrat prend effet à la fin du précédent.

 

Le fait d’avoir troqué la chéchia du zouave contre le béret du chasseur ne change rien à ses manquements à la discipline. Ses démêlés avec l’autorité militaire sont toujours aussi nombreux. Plusieurs motifs sont inscrits dans son relevé de punitions.

 

 

Le 16 décembre, c’est sa dernière punition ! Le sergent-major Giray ne sera plus jamais pris en faute durant tout le reste de son activité professionnelle.

 

Au total, il aura tout de même fait 40 jours de consigne, 12 jours de salle de police et 34 jours d’arrêt simple. Ces trois mois de punitions ne lui porteront absolument pas préjudice pour la suite de sa carrière.

 

Le 28 décembre 1908, il épouse Françoise Miguet à Echenebex, une petite commune du département de l’Ain.

 

Louis est promu adjudant le 8 avril 1911, puis adjudant de bataillon le 25 juin de l’année suivante. À partir de cette date, il est chargé du casernement. L’adjudant occupe aussi le poste de secrétaire du chef de corps.

 

Le 25 septembre 1913, Louis Giray quitte le 11e bataillon de Chasseurs alpins comme adjudant commissionné, après avoir accompli quinze années et demie de services militaires.

 

Période avant-guerre

 

Considéré comme retraité, il est rayé du contrôle du corps à l’âge de 34 ans. Ayant trouvé un emploi de régisseur au domaine de Ripaille, il se retire à Thonon, en Haute-Savoie.

 

Chateau_de_Ripaille

 

Un décret et une décision ministérielle du 14 juillet 1914 lui permettent d’être nommé au grade de sous-lieutenant de réserve. Il est rattaché au 97e R.I..

 

Début du conflit

 

Mobilisé le 2 août 1914, pour cause de guerre, Louis Giray laisse son emploi de régisseur pour rejoindre le dépôt de son régiment à Chambéry.

 

Ses fonctions exactes au sein du régiment alpin ne sont pas connues pour toute la période où il est resté dans cette unité. Son nom ne figure pas dans les effectifs du début de campagne inscrits dans le J..M.O. du 97e R.I..

 

Le sous-lieutenant Giray est ensuite affecté au bataillon de marche du 17e R.I. à la date du 2 février 1915.

 

Au 149e R.I.

 

Louis est muté au 149e R.I. le 13 mars 1915. Ce régiment est engagé dans le département du Pas-de-Calais près d’Aix-Noulette, depuis la fin du mois de décembre 1914. Les hommes du lieutenant-colonel Gothié se remettent d’une violente attaque allemande qui a eu lieu dix jours auparavant. Il a fallu contenir l’offensive ennemie coûte que coûte et les pertes furent importantes.

 

Le responsable du régiment spinalien affecte Louis au commandement d’une des sections de sa 7e compagnie, sous les ordres du capitaine Guilleminot.

 

Le sous-lieutenant Giray participe à tous les évènements dans lesquels sa section est impliquée jusqu’à sa blessure reçue le 9 mai 1915. Ce jour-là, une balle lui traverse la joue droite au cours d’une attaque qui s’est déroulée dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

carte_journee_du_9_mai_1915

 

Rapidement évacué vers l’arrière pour y subir les soins nécessaires,  il retrouve le 149e R.I. le 5 juin 1915. Cette fois-ci, il est envoyé à la 8e compagnie du régiment sous les ordres directs du capitaine Jeské. Louis Giray a tout juste une dizaine de jours pour prendre en main cette nouvelle section qu’il va devoir mener au feu durant les combats des 16, 17 et 18 juin 1915.

 

Le 25 septembre 1915, il conduit un peloton de sa compagnie, en association avec la 5e compagnie du régiment, pour répondre en urgence à une contre-attaque allemande à l’ouest du bois en Hache. Un sifflement, une détonation et Louis se retrouve grièvement blessé au visage par un éclat d’obus.

 

L’intervention des brancardiers est rapide, mais il faut du temps pour rejoindre le 1er poste de secours du régiment. Pour aller à l’arrière, c’est encore plus long. Les boyaux sont détrempés par la pluie, encombrés de blessés qui peuvent marcher et de brancardiers qui croisent en permanence les hommes qui montent en 1ère  ligne.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte_journee_du_25_septembre_1915

 

Le 30 septembre 1915, le sous-lieutenant Giray est déposé à l’hôpital bénévole le Français, à Amiens.

 

De séjours hospitaliers en séjours hospitaliers

 

Il s’ensuit alors un très long parcours de soins. Le sous-lieutenant Giray apprend qu’il va devoir subir plusieurs interventions chirurgicales de réparation faciale pour sa fracture compliquée du maxillaire gauche et pour son gros détachement du visage.

 

Louis quitte l’établissement d’Amiens le 7 octobre 1915 pour rejoindre l’hôpital complémentaire n° 137  Rollin, à Paris où il arrive le lendemain. Sorti le 30 octobre de cet établissement, il entre le jour même à l’hôpital parisien de la Jonquière où il reste jusqu’au 14 janvier 1916.

 

Louis Giray est ensuite pris en charge par les médecins de l’hôpital Chaptal dans le 20e arrondissement.

 

Sorti le 8 mai, toujours en cours de traitement, il peut aller en convalescence d’un mois avant de revenir à Chaptal pour y subir une nouvelle intervention. Cette convalescence commence officiellement à partir du 15 mai. Il part en repos chez lui, à Thonon-les-Bains.

 

Le 16 juin 1916, il est de retour à l’hôpital complémentaire Chaptal pour une reconstruction de la pyramide nasale et de la branche montante du maxillaire supérieur gauche.

 

Le sous-lieutenant Giray est promu au grade de lieutenant de réserve à titre définitif, par décret du 20 juillet 1916, pour prendre rang le 14 juillet 1916 au titre du 97e R.I. ; il figure toujours sur le contrôle de l’administration centrale de ce régiment.

 

Le 7 août 1916, avec ses nouveaux galons de lieutenant, il est envoyé en convalescence pour une période d’un mois. De nouveau à l’hôpital Chaptal il n’en sort que le 21 avril 1917.

 

Le 17 mai 1917, il revient dans cette structure hospitalière pour en sortir le 26 juin 1917. Le jour même, il est évacué sur le C.R. de Clignancourt où il est proposé pour une convalescence d’un mois avec retour. Il quitte ce service le lendemain.

 

En fait, il vient de bénéficier de 45 jours de convalescence qui le mènent une fois de plus à Thonon-les-Bains. Ce repos médical est prolongé de 45 jours à dater du 17 juin 1917.

 

Le 26 juillet 1917, il entre à l’hôpital Desgenettes à Lyon pour une plaie profonde du nez. Louis part de cet établissement le 6 août 1917.  Il est de nouveau en convalescence d’un mois à Thonon-les-Bains. Le 7 septembre 1917, il est encore soigné à l’hôpital complémentaire du collège Chaptal pour un effondrement du nez.

 

Le 5 février 1918, il est toujours pris en charge à l’hôpital Chaptal, au numéro 73 de la rue de Rome à Paris. Le lieutenant Giray fait une demande écrite au ministre de la Guerre pour être affecté au 11e B.C.A., corps auquel il a appartenu durant onze ans, entre mars 1902 et septembre 1913, pour lui permettre, à sa sortie de l’hôpital, de demander un emploi de l’intérieur dans la 14e région où habite sa famille.

 

Le 8 mars, Louis obtient une réponse favorable de ses supérieurs. Il est affecté au 11e B.C.A.. Le lieutenant est proposé pour une pension de retraite de 5e classe ; une invalidité de 70 % lui est accordée par la commission de réforme de Chambéry qui s’est réunie le 20 octobre 1918.

 

Les années après-guerre

 

Le 31 juillet 1919, Louis Giray est rayé des contrôles des cadres du 11e B.C.A.. Son chef de corps, le commandant Lambert le propose, avec avis favorable, pour l’honorariat du grade de lieutenant.

 

L’ancien officier se retire à Thonon-les-Bains, au château de Ripaille.

 

Il perd son épouse en février 1919. Deux ans plus tard, il se remarie à Lausanne, avec Élise Charlotte Wulliens, une Suissesse qui est originaire de l’Isle.

 

Louis est maintenant titulaire d’une pension d’invalidité à 100 % avec le statut d’invalide de guerre 1914-1918.

 

En 1926, Louis Giray est domicilié au numéro 19 de la rue de la Rivière à Lutterbach, dans le Haut-Rhin. Il y fait sa demande de carte d’ancien combattant. L’ancien régisseur du château de Ripaille est maintenant employé aux usines Dolfuss, Mieg et Cie de Mulhouse.

 

Dans les années cinquante, il se retire au Péage-de-Roussillon, la commune où vivait son oncle Jean.

 

La_terrible_blessure_du_sous_lieutenant_Giray

 

Si son visage est terriblement marqué par sa blessure, les photographies ne montrent pas la somme des difficultés permanentes qui lui sont liées.

 

Afin de faire valoir ses droits, il fait lister huit conséquences de sa blessure, outre la défiguration : larmoiement constant à gauche, des séquelles rhinologiques, port d’une prothèse pour obturer la voûte palatine. Ce ne sont qu’une partie des conséquences laissées par l’éclat d’obus qui le marquèrent à vie.

 

La pose de sa prothèse conduisit à l’enlèvement de dents supplémentaires. On comprend la virulence de sa demande de reconnaissance de son invalidité, d’autant que ses difficultés auditives sont réelles, bien qu’invisibles (bourdonnements constants, hyperacousie, mais aussi incapacité de comprendre certaines discussions à de petites distances)

 

En mars 1955, la commission de réforme de Lyon fait une demande pour qu’il puisse obtenir un taux de 100 % + 13 % d’invalidité. Cette requête fut homologuée.

 

Louis décède le 28 février 1962 à  au Péage-de-Roussillon sans laisser de descendance.

 

Décorations obtenues :

 

Croix de guerre avec palme.

 

Citation  à l’ordre du corps d’armée du 26 octobre 1915 :

 

« Le 25 septembre devant Angres a entraîné brillamment son peloton au-devant d’une contre-attaque allemande. A été blessé pendant l’engagement ».

 

Chevalier de la Légion d’honneur pour prendre rang du 16 mars 1916 (journal officiel du 13 avril 1916).

 

« Officier d’une bravoure et d’un sang-froid à toute épreuve. Le 25 septembre 1915, pendant un violent bombardement, a réuni à sa section des éléments de différents corps qui se trouvaient à proximité, les a entraînés brillamment au-devant d’une contre-attaque allemande menaçante, et a contribué puissamment à la repousser. Au cours de la charge, a été grièvement blessé par un éclat d’obus. »

 

Louis Giray a été fait officier de la Légion d’Honneur le 21 mai 1952 puis commandeur de la Légion d’Honneur le 16 juin 1959.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Les recherches effectuées sur les sites des archives municipales de Lyon et des archives départementales du Rhône ont permis la reconstruction d’une partie de la généalogie du lieutenant Giray.

 

Les photographies de cet officier sont extraites de son dossier individuel qui se trouve au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Le lieutenant Giray possède également un dossier individuel sur le site la Base Léonore. Pour le lire, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Site_base_Leonore

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à T. Cornet, à  M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes, aux archives municipales de Lyon et aux archives départementales du Rhône.

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