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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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6 septembre 2019

Louis Clovis Giray (1879-1962)

Louis_Clovis_Giray

 

Les années de jeunesse

 

Louis Clovis Giray naît le 12 décembre 1879 dans le 3e arrondissement lyonnais. Son père, Pierre Clovis, est un homme de 29 ans qui travaille comme épicier. Sa mère, Adèle Walter, est une jeune femme âgée de 22 ans. Le couple parental vit au numéro 124 de la rue Montesquieu.

 

Louis est l'aîné d’une fratrie composée de deux garçons et de deux filles.

 

Genealogie famille Giray

 

Louis Giray achève une scolarité primaire supérieure en sachant très bien lire, écrire et compter.

 

Le père décède le 13 septembre 1894. Le plus âgé de ses enfants n’a pas encore fêté ses 16 ans.

 

Jean, le frère du père, devient le subrogé-tuteur de ses neveux et nièces. Adèle Walter épouse en secondes noces François Bassons.

 

Louis Giray travaille comme confiseur avant de s’orienter vers une carrière militaire.

 

Le 19 janvier 1898, il prend la décision d’aller à la mairie de Villeurbanne pour y signer un engagement volontaire de quatre ans. Il choisit L’Afrique. Prend-il cette décision par rêverie exotique ? Par désir d’aventure ? Sa situation familiale s’est-elle complexifiée après le décès de son père au point de vouloir fuir le plus loin possible de son beau-père et de sa mère ? Il est difficile de le savoir.

 

Au 4e régiment de Zouaves

 

Après avoir traversé la Méditerranée, Louis Giray arrive au dépôt de son régiment à Tunis le 27 janvier 1898. L’histoire ne nous dit pas dans quelles casernes du 4e zouave il fut affecté durant l’intégralité de son engagement africain.

 

Le soldat Giray est nommé caporal le 16 octobre 1898 puis sergent le 16 février 1900. À partir de cette date, il occupe les fonctions de sergent fourrier. Un an plus tard, il devient responsable de deux escouades de compagnie. Cette charge ne semble pas lui convenir puisqu’il retourne à ses crayons et à ses registres de comptabilité le 23 juin 1900.

 

Durant ces quatre années chez les zouaves, Louis Giray est sanctionné à de nombreuses reprises. La 1ère année sous l’uniforme est particulièrement difficile. La discipline est un sujet délicat et les motifs à punitions ne manquent vraiment pas. Souvent consigné au quartier, parfois en salle de police, il n’est mis seulement qu’une fois aux arrêts simples, mais jamais en cellule. 

 

 

 

Le 19 janvier 1902, Louis passe dans la réserve de l’armée active. Son contrat est arrivé à échéance. Il peut maintenant regagner le continent français.

 

Au 11e B.C.A.

 

L’existence civile ne semble finalement pas lui convenir. Ce changement radical de style de vie a peut-être été trop compliqué à assumer. Louis ne parvient pas à trouver de nouvelles marques. Le 17 mars 1902, il finit par signer un contrat de deux ans avec l’armée. Cette fois-ci, il choisit le 11e B.C.A.. Sa nouvelle tenue revêtue, il reprend ses fonctions de sergent fourrier.

 

Le 1er février 1903, il passe sergent-major poursuivant ainsi ses missions purement administratives.

 

Les contrats militaires s’enchaînent. Un premier rengagement de trois ans est signé le 4 avril 1903 ; celui-ci doit prendre effet à compter du 17 mars 1904.  Un second rengagement d’un an est contracté le 1er mars 1907, à compter du 17 mars 1907.

 

Le troisième est bien plus long. À cette occasion, il en reprend pour cinq ans. Signé le 2 mars 1908, ce nouveau contrat prend effet à la fin du précédent.

 

Le fait d’avoir troqué la chéchia du zouave contre le béret du chasseur ne change rien à ses manquements à la discipline. Ses démêlés avec l’autorité militaire sont toujours aussi nombreux. Plusieurs motifs sont inscrits dans son relevé de punitions.

 

 

Le 16 décembre, c’est sa dernière punition ! Le sergent-major Giray ne sera plus jamais pris en faute durant tout le reste de son activité professionnelle.

 

Au total, il aura tout de même fait 40 jours de consigne, 12 jours de salle de police et 34 jours d’arrêt simple. Ces trois mois de punitions ne lui porteront absolument pas préjudice pour la suite de sa carrière.

 

Le 28 décembre 1908, il épouse Françoise Miguet à Echenebex, une petite commune du département de l’Ain.

 

Louis est promu adjudant le 8 avril 1911, puis adjudant de bataillon le 25 juin de l’année suivante. À partir de cette date, il est chargé du casernement. L’adjudant occupe aussi le poste de secrétaire du chef de corps.

 

Le 25 septembre 1913, Louis Giray quitte le 11e bataillon de Chasseurs alpins comme adjudant commissionné, après avoir accompli quinze années et demie de services militaires.

 

Période avant-guerre

 

Considéré comme retraité, il est rayé du contrôle du corps à l’âge de 34 ans. Ayant trouvé un emploi de régisseur au domaine de Ripaille, il se retire à Thonon, en Haute-Savoie.

 

Chateau_de_Ripaille

 

Un décret et une décision ministérielle du 14 juillet 1914 lui permettent d’être nommé au grade de sous-lieutenant de réserve. Il est rattaché au 97e R.I..

 

Début du conflit

 

Mobilisé le 2 août 1914, pour cause de guerre, Louis Giray laisse son emploi de régisseur pour rejoindre le dépôt de son régiment à Chambéry.

 

Ses fonctions exactes au sein du régiment alpin ne sont pas connues pour toute la période où il est resté dans cette unité. Son nom ne figure pas dans les effectifs du début de campagne inscrits dans le J..M.O. du 97e R.I..

 

Le sous-lieutenant Giray est ensuite affecté au bataillon de marche du 17e R.I. à la date du 2 février 1915.

 

Au 149e R.I.

 

Louis est muté au 149e R.I. le 13 mars 1915. Ce régiment est engagé dans le département du Pas-de-Calais près d’Aix-Noulette, depuis la fin du mois de décembre 1914. Les hommes du lieutenant-colonel Gothié se remettent d’une violente attaque allemande qui a eu lieu dix jours auparavant. Il a fallu contenir l’offensive ennemie coûte que coûte et les pertes furent importantes.

 

Le responsable du régiment spinalien affecte Louis au commandement d’une des sections de sa 7e compagnie, sous les ordres du capitaine Guilleminot.

 

Le sous-lieutenant Giray participe à tous les évènements dans lesquels sa section est impliquée jusqu’à sa blessure reçue le 9 mai 1915. Ce jour-là, une balle lui traverse la joue droite au cours d’une attaque qui s’est déroulée dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

carte_journee_du_9_mai_1915

 

Rapidement évacué vers l’arrière pour y subir les soins nécessaires,  il retrouve le 149e R.I. le 5 juin 1915. Cette fois-ci, il est envoyé à la 8e compagnie du régiment sous les ordres directs du capitaine Jeské. Louis Giray a tout juste une dizaine de jours pour prendre en main cette nouvelle section qu’il va devoir mener au feu durant les combats des 16, 17 et 18 juin 1915.

 

Le 25 septembre 1915, il conduit un peloton de sa compagnie, en association avec la 5e compagnie du régiment, pour répondre en urgence à une contre-attaque allemande à l’ouest du bois en Hache. Un sifflement, une détonation et Louis se retrouve grièvement blessé au visage par un éclat d’obus.

 

L’intervention des brancardiers est rapide, mais il faut du temps pour rejoindre le 1er poste de secours du régiment. Pour aller à l’arrière, c’est encore plus long. Les boyaux sont détrempés par la pluie, encombrés de blessés qui peuvent marcher et de brancardiers qui croisent en permanence les hommes qui montent en 1ère  ligne.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte_journee_du_25_septembre_1915

 

Le 30 septembre 1915, le sous-lieutenant Giray est déposé à l’hôpital bénévole le Français, à Amiens.

 

De séjours hospitaliers en séjours hospitaliers

 

Il s’ensuit alors un très long parcours de soins. Le sous-lieutenant Giray apprend qu’il va devoir subir plusieurs interventions chirurgicales de réparation faciale pour sa fracture compliquée du maxillaire gauche et pour son gros détachement du visage.

 

Louis quitte l’établissement d’Amiens le 7 octobre 1915 pour rejoindre l’hôpital complémentaire n° 137  Rollin, à Paris où il arrive le lendemain. Sorti le 30 octobre de cet établissement, il entre le jour même à l’hôpital parisien de la Jonquière où il reste jusqu’au 14 janvier 1916.

 

Louis Giray est ensuite pris en charge par les médecins de l’hôpital Chaptal dans le 20e arrondissement.

 

Sorti le 8 mai, toujours en cours de traitement, il peut aller en convalescence d’un mois avant de revenir à Chaptal pour y subir une nouvelle intervention. Cette convalescence commence officiellement à partir du 15 mai. Il part en repos chez lui, à Thonon-les-Bains.

 

Le 16 juin 1916, il est de retour à l’hôpital complémentaire Chaptal pour une reconstruction de la pyramide nasale et de la branche montante du maxillaire supérieur gauche.

 

Le sous-lieutenant Giray est promu au grade de lieutenant de réserve à titre définitif, par décret du 20 juillet 1916, pour prendre rang le 14 juillet 1916 au titre du 97e R.I. ; il figure toujours sur le contrôle de l’administration centrale de ce régiment.

 

Le 7 août 1916, avec ses nouveaux galons de lieutenant, il est envoyé en convalescence pour une période d’un mois. De nouveau à l’hôpital Chaptal il n’en sort que le 21 avril 1917.

 

Le 17 mai 1917, il revient dans cette structure hospitalière pour en sortir le 26 juin 1917. Le jour même, il est évacué sur le C.R. de Clignancourt où il est proposé pour une convalescence d’un mois avec retour. Il quitte ce service le lendemain.

 

En fait, il vient de bénéficier de 45 jours de convalescence qui le mènent une fois de plus à Thonon-les-Bains. Ce repos médical est prolongé de 45 jours à dater du 17 juin 1917.

 

Le 26 juillet 1917, il entre à l’hôpital Desgenettes à Lyon pour une plaie profonde du nez. Louis part de cet établissement le 6 août 1917.  Il est de nouveau en convalescence d’un mois à Thonon-les-Bains. Le 7 septembre 1917, il est encore soigné à l’hôpital complémentaire du collège Chaptal pour un effondrement du nez.

 

Le 5 février 1918, il est toujours pris en charge à l’hôpital Chaptal, au numéro 73 de la rue de Rome à Paris. Le lieutenant Giray fait une demande écrite au ministre de la Guerre pour être affecté au 11e B.C.A., corps auquel il a appartenu durant onze ans, entre mars 1902 et septembre 1913, pour lui permettre, à sa sortie de l’hôpital, de demander un emploi de l’intérieur dans la 14e région où habite sa famille.

 

Le 8 mars, Louis obtient une réponse favorable de ses supérieurs. Il est affecté au 11e B.C.A.. Le lieutenant est proposé pour une pension de retraite de 5e classe ; une invalidité de 70 % lui est accordée par la commission de réforme de Chambéry qui s’est réunie le 20 octobre 1918.

 

Les années après-guerre

 

Le 31 juillet 1919, Louis Giray est rayé des contrôles des cadres du 11e B.C.A.. Son chef de corps, le commandant Lambert le propose, avec avis favorable, pour l’honorariat du grade de lieutenant.

 

L’ancien officier se retire à Thonon-les-Bains, au château de Ripaille.

 

Il perd son épouse en février 1919. Deux ans plus tard, il se remarie à Lausanne, avec Élise Charlotte Wulliens, une Suissesse qui est originaire de l’Isle.

 

Louis est maintenant titulaire d’une pension d’invalidité à 100 % avec le statut d’invalide de guerre 1914-1918.

 

En 1926, Louis Giray est domicilié au numéro 19 de la rue de la Rivière à Lutterbach, dans le Haut-Rhin. Il y fait sa demande de carte d’ancien combattant. L’ancien régisseur du château de Ripaille est maintenant employé aux usines Dolfuss, Mieg et Cie de Mulhouse.

 

Dans les années cinquante, il se retire au Péage-de-Roussillon, la commune où vivait son oncle Jean.

 

La_terrible_blessure_du_sous_lieutenant_Giray

 

Si son visage est terriblement marqué par sa blessure, les photographies ne montrent pas la somme des difficultés permanentes qui lui sont liées.

 

Afin de faire valoir ses droits, il fait lister huit conséquences de sa blessure, outre la défiguration : larmoiement constant à gauche, des séquelles rhinologiques, port d’une prothèse pour obturer la voûte palatine. Ce ne sont qu’une partie des conséquences laissées par l’éclat d’obus qui le marquèrent à vie.

 

La pose de sa prothèse conduisit à l’enlèvement de dents supplémentaires. On comprend la virulence de sa demande de reconnaissance de son invalidité, d’autant que ses difficultés auditives sont réelles, bien qu’invisibles (bourdonnements constants, hyperacousie, mais aussi incapacité de comprendre certaines discussions à de petites distances)

 

En mars 1955, la commission de réforme de Lyon fait une demande pour qu’il puisse obtenir un taux de 100 % + 13 % d’invalidité. Cette requête fut homologuée.

 

Louis décède le 28 février 1962 à  au Péage-de-Roussillon sans laisser de descendance.

 

Décorations obtenues :

 

Croix de guerre avec palme.

 

Citation  à l’ordre du corps d’armée du 26 octobre 1915 :

 

« Le 25 septembre devant Angres a entraîné brillamment son peloton au-devant d’une contre-attaque allemande. A été blessé pendant l’engagement ».

 

Chevalier de la Légion d’honneur pour prendre rang du 16 mars 1916 (journal officiel du 13 avril 1916).

 

« Officier d’une bravoure et d’un sang-froid à toute épreuve. Le 25 septembre 1915, pendant un violent bombardement, a réuni à sa section des éléments de différents corps qui se trouvaient à proximité, les a entraînés brillamment au-devant d’une contre-attaque allemande menaçante, et a contribué puissamment à la repousser. Au cours de la charge, a été grièvement blessé par un éclat d’obus. »

 

Louis Giray a été fait officier de la Légion d’Honneur le 21 mai 1952 puis commandeur de la Légion d’Honneur le 16 juin 1959.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Les recherches effectuées sur les sites des archives municipales de Lyon et des archives départementales du Rhône ont permis la reconstruction d’une partie de la généalogie du lieutenant Giray.

 

Les photographies de cet officier sont extraites de son dossier individuel qui se trouve au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Le lieutenant Giray possède également un dossier individuel sur le site la Base Léonore. Pour le lire, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Site_base_Leonore

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à T. Cornet, à  M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes, aux archives municipales de Lyon et aux archives départementales du Rhône.

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