Paul Marie Abel Kolb (1883-1918)
Paul Marie Abel Kolb naît le 6 août 1883 à Saint-Germain, une petite commune située au nord-est de Lure, dans le département de la Haute-Saône.
Son père, Fernand Auguste, est âgé de 26 ans. Sa mère, Marie Ferdinande Simonin, a 21 ans. Ses parents gagnent tous les deux leur vie en travaillant la terre. Le couple Kolb a eu un second enfant, né le 2 avril 1887.
Un drame endeuille la famille en 1888. Abel n’a pas fêté ses cinq ans lorsque son père décède.
Le registre de recensement de l’année 1896 de la commune de Saint-Germain nous apprend que Marie Ferdinande Kolb élève seule ses deux enfants. Elle se remarie en 1898.
Abel quitte l’école communale après avoir obtenu son certificat d’études primaires, ce qui veut dire qu’il sait parfaitement bien lire, écrire et compter.
À 18 ans, il choisit de faire une carrière militaire. Sa mère lui donne son accord. Elle appose sa signature sur un document indispensable : celui-ci autorise toute personne mineure qui le souhaite à rejoindre les rangs de l’armée en tant que volontaire.
Ce 1er engagement est enregistré pour une durée de trois ans. Abel Kolb a choisi le 149e R.I., un régiment d’infanterie dont le dépôt se trouve à Épinal. Sa formation de soldat débute le 15 octobre 1901.
Le jeune homme est affecté à la 12e compagnie dès son arrivée à la caserne Courcy. Abel est admis au peloton d’instruction de la compagnie le 15 décembre, avec 47 autres personnes, pour devenir caporal. Obtenant le n° 20 au classement intermédiaire de mai 1902, il termine avec le n° 14 au classement final au mois d’août.
Le soldat Kolb est nommé caporal le 25 septembre 1902, puis sergent le 6 novembre 1903.
Il signe à nouveau pour un an le 7 juin 1904. Ce contrat prend effet le 14 octobre 1904 à la date anniversaire du 1er contrat. Quatorze jours plus tard, Abel valide un nouvel engagement pour deux ans, ce qui l’oblige à porter l’uniforme jusqu’en octobre 1907.
Les débuts sont un peu difficiles. Trop proche des hommes, probablement chahuté, il a du mal à imposer ses galons. Son capitaine écrit ceci : « le sergent Kolb, rengagé pour un an, à titre d’essai le 7 juin, a fait des progrès sensibles depuis cette date. Il a pris de l’aplomb et de l’autorité. Il y a lieu de croire que n’étant plus gêné par les familiarités de ses anciens camarades, aujourd’hui libérés, il fera un bon sergent. Peut aussi faire un comptable. »
Le 10 novembre 1904, le sergent Kolb déplace ses effets militaires dans un autre bâtiment de la caserne Courcy. Il vient d'être affecté à la 1ère compagnie du régiment.
Abel entre dans la catégorie des sous-officiers rengagés avec prime à partir du 27 mai 1905, ce qui va lui permettre d’améliorer son ordinaire.
Il doit quitter le dépôt du 149e R.I. quelque temps pour accomplir un stage au 7e escadron du train des équipages militaires ; ce stage va durer du 1er juin au 11 juillet 1905.
Le 17 janvier 1906, Abel est muté à la S.H.R. comme sergent garde-magasin.
Le 26 septembre 1907, il signe un engagement de 4 ans qui sera renouvelé le 11 septembre 1911 pour cinq années supplémentaires.
Après presque dix ans d’armée, son capitaine rédige la note suivante : « Le sergent rengagé Kolb remplit au corps les fonctions de sergent garde-magasin. Dans cet emploi, qu’il connaît à fond et dont on se met au courant qu’à la longue, il rend les plus signalés services. Sous-officier dévoué, intelligent, de tenue et de conduite parfaite, dont l’éloge n’est plus à faire. »
Nous sommes très loin des débuts un peu difficiles du jeune sous-officier !
Abel Kolb est nommé sergent major le 19 avril 1913 puis adjudant garde-magasin à partir du 10 novembre 1913.
Il travaille comme secrétaire auprès du capitaine chargé du matériel lorsque l’ordre de mobilisation générale est placardé sur les murs de la ville d’Épinal en août 1914. Quelques mois plus tard, cette tâche de secrétaire semble lui peser. Il demande à partir pour le front.
Le 1er avril, il débute une formation au centre d’instruction de Chaumont comme mitrailleur. Celle-ci se termine le 25 avril 1915.
Abel intègre le bataillon de marche du 149e R.I. le 2 mai 1915.
L’adjudant Kolb rejoint l’unité combattante du régiment spinalien le 14 mai. Le lieutenant-colonel Gothié l’affecte à sa compagnie de mitrailleuses qui est rattachée à la 85e brigade. Huit jours plus tard, Abel est nommé sous-lieutenant à titre temporaire.
Sa section de mitrailleuse est engagée dans les différents combats qui eurent lieu en Artois en mai, en juin et en septembre 1915.
Le sous-lieutenant Kolb repart en stage au centre de mitrailleuses de Bourges entre le 19 novembre et le 18 décembre 1915. La Saint-Étienne, la Hotchkiss, la Maxim et la Vickers n’ont plus aucun secret pour lui.
Le 18 avril 1916, il est sous-lieutenant à la 2e compagnie de mitrailleuses du 149e R.I.. Peu de temps avant qu’il ne soit titularisé dans son grade d’officier à titre définitif, son régiment est engagé dans la bataille de la Somme au début du mois de septembre.
Les combats sont rudes. Le 7 novembre 1916, le sous-lieutenant Kolb quitte sa compagnie de mitrailleuses pour être affecté à la tête de la 6e compagnie, ceci une heure avant qu’elle ne se lance dans une nouvelle attaque. La compagnie n'avait plus d'officiers !
Abel Kolb s’acquitte honorablement de sa tâche en s’emparant d’une zone de 1ère ligne ennemie après un violent combat au corps à corps, sans connaître ses subordonnés.
Confirmé à ce nouveau poste, ses chefs le font nommer lieutenant à titre temporaire, le 21 novembre 1916.
L’année suivante, le 149e R.I. occupe plusieurs secteurs proches du chemin des Dames. Les lieux occupés sont relativement calmes, mais particulièrement dangereux. Régulièrement il y a des pertes liées aux bombardements, mais il n’y a pas de grande attaque en perspective.
Le lieutenant Kolb profite de cette période de relative accalmie pour retourner en formation. N’ayant pas les connaissances théoriques suffisantes pour assumer la charge de chef de compagnie, il doit suivre la 3e série des cours de commandant de compagnie du 25 février au 18 mars 1917.
Les mois suivants, il bénéficie de deux permissions. La 1ère a lieu entre le 12 et le 22 mai, la seconde entre le 19 et le 29 août.
La photographie suivante a été réalisée le 30 septembre 1917 à Troësnes, un petit village situé dans le département de l’Aisne. Le lieutenant Kolb figure parmi ce groupe d’officiers responsable des différentes unités du 2e bataillon du 149e R.I..
Fin octobre 1917, le régiment vosgien est engagé dans la bataille de la Malmaison. Abel Kolb y gagne une citation à l’ordre de la division en menant ses hommes au combat.
Il est nommé lieutenant à titre définitif à la date du 22 mai, suite à un décret qui fut publié le 16 novembre 1917.
Abel bénéficie d’une nouvelle permission entre le 27 décembre 1917 et le 9 janvier 1918.
En février 1918, le colonel Boigues rédige la petite note suivante dans le feuillet du personnel du lieutenant Kolb : « Continue à commander très bien son unité, pondéré et réfléchi, donne toute satisfaction. »
Sa promotion dans le grade supérieur ne se fait pas attendre. Abel est nommé capitaine à titre temporaire le 17 mai 1918 (publication dans le J.O. du 2 juin 1918).
La guerre de mouvement reprend du service. Fin mai 1918, le capitaine Kolb participe aux combats d’Arcy-Restitue puis à ceux qui eurent lieu en juillet du côté du trou Bricot en Champagne. Les offensives allemandes sont stoppées.
Le 30 juillet 1918, Paul Kolb est au C.R. Vauclerc au sud-ouest de Perthe-lèz-Hurlus. Ce jour là, sa compagnie subit une attaque au gaz.
L’abbé Henry évoque cet évènement dans un de ses carnets : « Après une heure d’attente, ne voyant pas de blessés arriver, je reviens au C.R. Vauclerc. Vu en passant les débris de l’aéroplane de l’avion boche tombé en flammes le 15 juillet, le soir de l’attaque. La 6e compagnie du 149 a été fortement éprouvée par les gaz. Le capitaine Kolb a été évacué. Il ne reste ce matin en ligne que l’adjudant Humes, l’aspirant et une quinzaine d’hommes. Tout le reste est ou prisonniers ou en traitement comme victimes des gaz. Le docteur Pierrot a dû, lui-même, se faire soigner à l’infirmerie. »
Le 26 septembre 1918, le 149e R.I. est de nouveau impliqué dans une attaque de grande envergure dans le même secteur. Le capitaine Kolb est à la tête de ses hommes.
Exceptée son intoxication à l’ypérite, Paul est toujours passé au travers des balles et des éclats d’obus. Cette fois-ci, la chance n’est plus au rendez-vous. Le capitaine est touché au cou.
L’aumônier Henry raconte : « On dit que le lieutenant Cadoux serait blessé, mais légèrement. Le capitaine Kolb de la 6e est blessé également. Voici qu’on l’apporte tout sanglant sur un brancard. Une balle lui a traversé le cou. Il a l’air d’un moribond et gémit faiblement. Mon Dieu ! Pourvu que la blessure ne soit pas mortelle ! Le capitaine Kolb est une des figures les plus sympathiques du régiment. Parti d’en bas, il s’est élevé au grade de capitaine par son seul mérite ! »
La blessure est bien trop grave pour être soignée. Abel a perdu beaucoup de sang. Il décède le jour même malgré la prise en charge faite par les médecins de l’ambulance 10/13 installée à Bussy-le-Château.
L’abbé Henry apprend tardivement son décès. Le 9 octobre, il écrit : « Kolb est mort ! Kolb n’a point survécu à sa blessure. Je suis navré de cette nouvelle. Kolb était une figure sympathique. Ardent patriote et brave soldat. Il avait conquis ses grades par son seul mérite. Il avait refusé dernièrement de se retirer à l’intérieur. »
Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.
Paul Kolb a obtenu les décorations suivantes :
Croix de guerre avec trois palmes, une étoile de bronze et une étoile d’argent.
Citation à l’ordre de la 85e brigade n° 36 en date du 24 mars 1916 :
« A su, par son calme et son sang-froid, établir dans sa troupe et dans une fraction voisine, l’ordre un moment compromis par un bombardement des plus sévère. »
Citation à l’ordre de la Xe Armée n° 243 en date du 10 décembre 1916 :
« La 6e compagnie du 149e R.I. à l’attaque du 17 septembre 1916, s’est précipitée sur la tranchée ennemie qu’elle a enlevée d’un brillant élan, faisant des prisonniers et facilitant la progression du corps voisin, l’a organisée avec une ardeur inlassable sous un bombardement des plus intense ; a continué à progresser le lendemain, 18 septembre, sur une profondeur de 700 m et ne s’est arrêtée qu’à bout de force devant une position fortement occupée par l’ennemi. Le lieutenant Kolb, remarquable d’énergie et de bravoure, qui venait d’en prendre le commandement, tous les officiers ayant été mis hors de combat, s’est emparé de haute lutte de la première ligne ennemie après un violent combat, corps à corps, et s’y est maintenu malgré un fort tir de barrage et deux contre-attaques. »
Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 264 en date du 14 novembre 1917 :
« Commandant de compagnie d’un sang-froid, d’une énergie et d’un courage remarquables à l’attaque du 23 octobre 1917, a entraîné sa compagnie derrière le bataillon de 1ère ligne sous un violent barrage et a puissamment contribué à la possession et à l’organisation du terrain conquis. Déjà titulaire d’une citation à l’ordre de l’armée ».
Citation à l’ordre de la IVe Armée n° 1357 en date du 25 août 1918 :
« Officier superbe de crânerie et de sang-froid. Pense à tout, veille à tout, surveille tout lui-même. Pendant la bataille de Champagne, le 15 juillet 1918 a, tout en assurant la défense de son quartier de sa compagnie, laquelle a résisté à tous les assauts, envoyé des renforts qui ont puissamment renseigné le chef de bataillon. »
Le capitaine Kolb a été fait Chevalier de la Légion d’honneur le 5 juin 1918 par ordre n° 9348 « D » du 25 août 1918 :
« Excellent officier, véritable entraîneur d’hommes qui a fait preuve, au cours des derniers combats, d’un courage et d’un sang-froid exemplaires obtenant de sa compagnie un rendement exceptionnel et faisant face à toutes les difficultés. 3 citations. »
Cette nomination au grade de Chevalier de la Légion d’honneur lui donne également le droit d’ajouter une palme sur sa croix de guerre.
Le nom de cet officier a été gravé sur le monument aux morts de la commune de Saint-Germain.
Abel Kolb est resté célibataire et n’a pas eu de descendance.
Il n’y a de sépulture militaire individuelle portant son nom. Son corps a probablement été rendu à la famille dans les années 1920.
Sources :
Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.
La fiche signalétique et des services de cet officier n’a pas été retrouvée.
Les actes d’état civil de la famille Kolb et le registre de recensement de l’année 1896 de la commune de Saint-Germain ont été lus sur le site des archives départementales de la Haute-Saône.
La photographie du monument aux morts de la commune de Saint-Germain provient du site Généanet.
Témoignage inédit de l’abbé Henry.
Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à J.L. Poisot, à M. Porcher, au S.H.D. de Vincennes et aux archives départementales de la Haute-Saône.