Jean Marius Montagnon (1894-1917)
Le 4 avril 1894, Jean Marius Montagnon voit le jour dans le 3e arrondissement lyonnais, au 27 de la rue de Marseille.
Sa mère, Agathe Marie Neyton, est âgée de 21 ans. Elle exerce la profession de femme de ménage. Son père, Rémy, natif du département de l’Ain, est épicier. Il a 28 ans.
Une sœur naît le 28 avril 1900. Le couple Matignon n’aura pas d’autres enfants.
La fiche matricule de Marius mentionne un degré d’instruction de niveau 3. Il sait lire écrire et compter correctement lorsqu’il quitte l’école communale.
La profession indiquée sur cette fiche laisse supposer que Marius a travaillé dans la même épicerie que son père avant de faire ses obligations militaires. Cependant, le terme « employé de commerce » reste bien trop vague pour que cette hypothèse puisse être véritablement confirmée.
La guerre contre l’Allemagne est inéluctable en août 1914. Pour Marius, ce n’est pas encore tout à fait l’heure de revêtir l’uniforme. Il n’est pas concerné par l’ordre de mobilisation générale puisque c’est l’année de sa conscription.
Le jeune homme sait simplement qu’il va bientôt devoir se rendre dans une caserne de l’Hexagone pour être initié au métier des armes. Il a été déclaré « bon pour le service armé » par la médecine militaire du conseil de révision ; ce conseil s’est réuni à la mairie du 7e arrondissement lyonnais quelques mois avant le début du conflit.
La classe 1914 est appelée par anticipation. Deux mois avant la date prévue, Marius Montagnon est dans l’obligation de rejoindre le dépôt du 149e R.I..
Dès le 4 août 1914, ce dépôt, initialement implanté à Épinal, a dû déménager à Jorquenay, un petit village haut-marnais situé au nord de Langres. La caserne Courcy n’était pas assez spacieuse pour accueillir l’ensemble des réservistes du 149e, du 349e R.I. et du 43e R.I.T..
Marius gagne Jorquenay le 7 septembre. Une fois de plus, les cantonnements occupés sont trop exigus pour accueillir les nouveaux arrivants de la classe 14. Il faut prévoir un second déplacement du dépôt. Celui-ci a lieu le 21 septembre. Les jeunes conscrits s’installent à Rolampont, une commune située au nord-ouest de Jorquenay.
Les conditions de vie sont rudes, il faut aller vite dans les apprentissages militaires. Les hommes seront envoyés sur la ligne de front avec une base minimum de connaissances.
Marius a probablement suivi le peloton des élèves caporaux pendant son instruction, ce qui expliquerait ses promotions rapides. Il passe de soldat de 2e classe à sergent en à peine plus de deux mois. Il devient soldat de 1ère classe en mai 1915, caporal en juin puis sergent en juillet.
La date éventuelle de son passage au 9e bataillon n’est pas connue, pas plus que celle où il a été versé dans une des compagnies du régiment actif qui se trouve en Artois, dans le secteur Aix-Noulette.
Fin septembre 1915, le sergent Montagnon participe à une attaque qui doit déboucher sur la prise du bois en Hache, au sud d’Angres. Il est blessé au cours d’un des engagements qui a lieu durant la journée du 26. Les brancardiers parviennent à le transporter jusqu’au poste de secours. C’est l’évacuation vers l’arrière.
Pour en apprendre davantage sur cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.
Le sergent Montagnon est de retour au dépôt du 149e R.I. le 30 novembre 1915. Le jour de Noël, il passe à la 25e compagnie. Le 14 janvier 1916, il est affecté à la 26e compagnie. Six jours plus tard, le sous-officier est envoyé avec un renfort au régiment actif. Marius est à Verdun en mars et avril 1916, puis dans la Somme en septembre où son régiment participe à la reprise des villages de Soyécourt et de Déniécourt.
Le 27 septembre 1916, il rejoint le dépôt de la 43e D.I.. Le motif et la durée de son séjour au dépôt divisionnaire ne sont pas indiqués sur sa fiche matricule.
Une photographie réalisée le 10 avril 1917 confirme la présence de Marius au sein de l’équipe des sous-officiers de la 10e compagnie du 149e R.I..
L’identification de cet homme a été rendue possible grâce au livre de Francis Barbe « Et le temps, à nous, est compté ».
Un tirage identique figure à la page 179 de son ouvrage. Les noms de chacun des sous-officiers sont inscrits à la droite de la photographie.
Quelques semaines plus tard, la 10e compagnie est en 1ère ligne du côté d’Aizy-Jouy. La zone est dangereuse. Elle est régulièrement bombardée.
Le 21 juin 1917, le sergent Montagnon est grièvement blessé par un obus de 88. Il est impossible de le maintenir en vie, les lésions sont trop importantes. Il meurt au poste de secours à l’âge de 23 ans. Les circonstances de son décès sont évoquées dans une des lettres rédigées par le sergent Marquand ; ces lettres figurent dans le livre de Francis Barbes.
« … Je vous ai écrit que j’étais à un poste d’observation. Nous étions 2 sergents et nous nous relevions toutes les 6 heures. Il était 3 heures, je venais de quitter le poste pour aller roupiller lorsque 10 minutes après, un obus de 88 arrive dans le créneau et blesse grièvement l’autre sergent qui, par bonheur, était seul. J’ai bondi avec un homme pour le retirer des décombres. Il avait le bras gauche arraché, touché dans les reins et une jambe fracassée. On l’a traîné comme on a pu jusqu’à un abri où je lui ai fait un garrot en attendant les brancardiers. Mais il est mort au poste de secours. Que ceux qui ont déchaîné la guerre assistent à de tels spectacles !!! »
Un autre fait marquant a eu lieu au cours de cette journée au 149e R.I.. Un obus a explosé à l’intérieur du P.C. Constantine, faisant plusieurs victimes à la liaison du 3e bataillon du régiment.
Pour en apprendre davantage sur cet évènement, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.
Marius Montagnon a été inhumé par les soins du groupe de brancardiers de la 43e D.I..
Il n’existe pas de sépulture militaire individuelle à son nom. Son corps fut probablement rendu à la famille dans les années 20.
Le sergent Montagnon a été décoré de la croix de guerre avec une étoile d’argent et une étoile de bronze.
Citation à l’ordre du régiment en date du 17 octobre 1915 :
« Le 27 septembre 1915, devant Angres, aux cours de travaux périlleux qu’il dirigeait pour l’établissement d’une sape en avant d’une position nouvellement conquise, a été blessé. »
Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 5 en date du 28 juin 1917 :
« Sous-officier de liaison ayant fait preuve en maintes circonstances d’un mépris absolu du danger. Déjà cité une fois à l’ordre. Tombé glorieusement à son poste de combat le 22 juin 1917. »
La Médaille militaire lui a été attribuée à titre posthume avec le même énoncé que sa citation à l’ordre de la division (publication dans le J.O. du 8 novembre 1920).
L’acte de décès de ce sous-officier fut transcrit à la mairie du 7e arrondissement de la ville de Lyon le 24 mars 1918.
Marius ne s'est pas marié et n'a pas eu de descendance.
Sources :
La Fiche signalétique et des services du sergent Montagnon, les actes d’états civils concernant sa famille, les registres de recensements des années 1896, 1906 et 1911 de la ville de Lyon ont été consultés sur le site des archives départementales du Rhône.
L’acte de décès du sergent Montagnon officialise sa mort au 21 juin 1917 contrairement à sa fiche « mémoire des hommes » et à son registre matricule qui la datent au jour suivant.
La photographie de groupe est extraite du fonds Gérard (collection personnelle).
« Et le temps, à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach. C'est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011.
Un grand merci à M. Bordes, à R. Mioque, à F. Barbe, à A. Carobbi, aux archives départementales du Rhône et au Service Historique de la Défense de Vincennes.