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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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11 octobre 2019

Ouest du bois en Hache, 26 septembre 1915 (1ère partie).

En memoire de Merieux, impressions septembre 1915

Les affrontements menés le 25 septembre par les bataillons de chasseurs et le 158e R.I. de la 43e D.I. ne se sont pas déroulés tout à fait comme prévu. Le 149e R.I., qui était réserve de division, a eu toutes les peines du monde pour rejoindre la 1ère ligne.

Le régiment spinalien fut dans l’impossibilité de soutenir efficacement les unités de la division qu’il devait épauler au cours de leurs attaques. Seuls, sa 5e compagnie et un peloton de sa 8e compagnie ont pu être sollicités pour participer à une contre-attaque dans le secteur du 1er B.C.P..

Réorganisation du secteur d’attaque

Depuis la veille au soir, la zone d’attaque de la 43e D.I. a été séparée en deux. D’un côté, les 1er et 10e B.C.P. et le 149e R.I. sous les ordres du lieutenant-colonel Gothié, de l’autre, le 158e R.I., le 31e B.C.P. et un bataillon du 17e R.I. sous le commandement du lieutenant-colonel Garcin.

Le 1er B.C.P. est commandé par le commandant Camors, le 10e B.C.P. par le commandant Faury.

Chaque fantassin, chaque chasseur, se conditionne pour reprendre le combat.

Carte 1 journee du 26 septembre 1915

Legende carte 1 journee du 26 septembre 1915

L’heure de l‘attaque est fixée à 13 h 10.

L’attaque

À l’heure dite, les troupes s’élancent. L’artillerie allemande riposte aussitôt très énergiquement. Le 3e bataillon du 149e R.I. est obligé de se terrer, face contre sol, presque dès sa sortie des tranchées. Le 2e bataillon du régiment, durement éprouvé avant l’heure de l’attaque, parvient tout de même à lancer deux vagues d’assaut.

Le 1er bataillon du 149e R.I. se place immédiatement dans la parallèle de départ pour soutenir et appuyer les efforts des deux autres bataillons.

Le 10e B.C.P. est pris instantanément sous le feu des mitrailleuses. Les positions occupées la veille par ces mitrailleuses ont été complètement modifiées, surprenant ainsi les chasseurs du commandant Faury. La 1ère vague franchit à peine 12 mètres. Elle doit vite s’abriter dans les trous d’obus. La situation est identique pour la compagnie de gauche du 149e R.I..

Au sud-est, le 31e B.C.P. parvient à pénétrer dans le bois en Hache. Le 158e R.I. poursuit sa progression par bonds successifs à la gauche du bois.

À 13 h 45, le lieutenant-colonel Gothié rédige son premier compte-rendu qu’il adresse à ses deux supérieurs des 85e et 86e brigades.

« Le commandant Camors rend compte qu’une demi-heure avant l’attaque, l’artillerie lourde allemande a commencé à arroser copieusement la sape 4 déjà éboulée le matin.

Plusieurs fractions du 2e bataillon du 149e R.I. ont été enterrées. Malgré ces évènements, l’attaque est déclenchée normalement, à l’heure exacte fixée.

Ordre a été donné aussitôt au 1er bataillon du régiment de serrer sur e6 et d’y transporter son P.C..

À son arrivée à e6, le capitaine Cochain doit mettre à la disposition du commandant Camors, chef du groupement du centre, deux de ses compagnies.

Dès que je serai fixé sur les progrès de l’attaque, je me transporterai moi-même en e6.

Les communications entre la 1ère ligne et la parallèle de départ sont coupées. Celles entre le P.C.4 et le P.C. de 1ère ligne sont toujours intactes.

D’après de nouveaux renseignements qui me parviennent du commandant Faury, ses compagnies n’ont pas pu déboucher en raison d’une fusillade violente et beaucoup plus intense qu’hier, partant des tranchées allemandes. Il en est de même pour la compagnie de gauche du 149e R.I..

Je donne l’ordre au commandant Faury de renouveler ses tentatives de sortie dès que les circonstances le permettront ou au moins d’ici l'heure, coûte que coûte. »

À 14 h 15, le lieutenant-colonel Gothié fait un second rapport :

« Le commandant Comors me rend compte par téléphone que les deux vagues de tête du bataillon Chevassu du 149e R.I., qui avait dû se coucher sous les rafales d’artillerie, ont repris leur mouvement, au bout de quelques minutes. Mais elles ont subi des pertes telles qu’elles ont dû stopper de nouveau, sous les feux combinés d’artillerie, de mitrailleuses et d’infanterie.

Je fais renforcer la ligne par une 3e vague pour la pousser en avant.

Du côté du 10e B.C.P., le commandant Faury rend compte que ses compagnies viennent de faire deux nouvelles tentatives pour se porter en avant, mais à peine ont-elles débouché qu’elles sont prises à partie par des mitrailleuses placées en de nouveaux points tels que g7, e32, e13 et g11. Il y a de nombreux blessés.

Je fais renforcer ces deux côtés. »

Un nouvel écrit du lieutenant-colonel Gothié est envoyé aux responsables des deux brigades de la 43e D.I. à 15 h 13.

« Le commandant Faury fait connaître que sa situation à gauche est inextricable. Il se heurte à une organisation défensive formidable le long de la route e20, d24 où les réseaux de fil de fer ennemis n’ont pu être détruits et où les mitrailleuses subsistent particulièrement en d11, d22, d10 d21 et e32.

Tout ce qui essaie de sortir du front e20, e17 et e12 est immédiatement fauché. Tant que ces organisations ne seront pas détruites par l’artillerie, les troupes d’attaque sur ce front sont vouées à l’insuccès. Les parapets ennemis sont en outre garnis de nombreux défenseurs ayant résisté à notre tir d’artillerie.

Tout cela semble indiquer que les Allemands ont, en face de notre gauche, accumulé leurs efforts pour y constituer un véritable pivot de défense.

Cette partie-là a du reste été moins battue par notre artillerie.

Au groupement de droite, on me signale que le sous-lieutenant Magne a été tué en portant secours à un blessé de sa compagnie.

Le 31e B.C.P. paraît progresser dans le bois en Hache. Le commandant Camors a fait renforcer le bataillon Chevassu du 149e R.I. pour avancer en se reliant à cette progression.

La tranchée e18, g10 a été reconquise. »

Il est demandé au chef de corps du 149e R.I. de redoubler d’efforts au nord du bois en Hache, afin de faciliter la progression effectuée par le groupement du lieutenant-colonel Garcin au sud-est du bois. Dans le but d’obtenir coûte que coûte un résultat, le lieutenant-colonel Gothié met toute sa réserve dans la bataille. Une lutte très âpre s’engage.

À 16 h 00, le lieutenant-colonel Gothié écrit son 4e rapport de la journée.

« À la réception du renseignement que vous venez de me transmettre par message téléphonique à 15 h 45, m’annonçant la nouvelle offensive du 158e R.I., je mets toute ma réserve à la disposition du groupement Camors pour prendre l’offensive à travers le bois en Hache, en liaison avec le 31e B.C.P..

On me rend compte à l’instant que 2 compagnies du 3e bataillon du 149e R.I.viennent de pénétrer dans le bois.

J’envoie également au commandant Camors mes dernières sections de mitrailleuses disponibles de la 85e brigade.»

À 17 h 20, le colonel commandant la 86e brigade envoie à chacun des responsables des 149e R.I. et 158e R.I. l’ordre suivant :

« Les progrès s’accentuent sur notre droite, il faut à tout prix, intensifier et activer la poussée par la vallée de la Souchez, de façon à atteindre avant la nuit, la ligne, Cabaret du Tonkin, pont au sud de g23. Au centre, les éléments des 158e et 149e R.I. et 31e B.C.P. devront s’assurer pour la nuit la possession du bois en Hache, dont la lisière nord devra être organisée défensivement.

Plus à gauche, il faudra occuper si possible la ligne g9, g18,  g7, g17, e18, e12 et e20.

Il faudra placer partout des défenses accessoires, devant les lignes conquises et avoir des mitrailleuses aux points de flanquement g20, g9 et g7. »

À 17 h 35, trois compagnies du 149e R.I. sont dans le bois en Hache. Le 31e B.C.P. est au milieu du bois en liaison avec le 158e R.I. et le 149e R.I.. De grosses pertes sont signalées.

Premier bilan

Tard dans la soirée, le responsable du 149e R.I. fait un dernier compte-rendu à ses supérieurs. Il y développe l’intervention du bataillon Chevassu pour l’ensemble la journée.

« Le 3e bataillon du 149e R.I. était chargé d’attaquer le bois en Hache, sa gauche devant suivre la direction g11, g7, e13.

L’attaque s’est déclenchée à l’heure fixée. La 11e compagnie avait, la veille au soir, creusé de toutes pièces une tranchée, un peu en avant de la tranchée allemande g11 g12 et g13. Elle l’a occupée ayant à sa droite un peloton du 1er B.C.P.. Elle s’est portée à l’attaque dans le bois, vigoureusement conduite par le lieutenant Prenez pour occuper g15 et arriver aux abords de g7.

La 12e compagnie suivit la 11e. La 9e compagnie, qui tenait la parallèle de départ, s’est avancée à découvert et, violemment battue par le feu, elle ne put progresser que lentement. À la nuit, elle est dans g16, g15.

La 10e compagnie atteint, sous le même feu violent, g11, g12 et, à la nuit, elle s’y organise.

La compagnie du 1er bataillon du 149e R.I., mise à la disposition du 3e bataillon tient la parallèle de départ.

À la nuit, le terrain conquis est organisé. Les 2 compagnies du 1er bataillon du 149e R.I. sont employées à prolonger vers l’est l’avance acquise vers g7 et à relier cette organisation à la parallèle de départ. La liaison est établie à droite avec le 31e B.C.P.. »

Tout au long de la journée, les 1er et 10e B.C.P. et les 2e et 3e bataillons du 149e R.I. ont tenté de poursuivre leur progression, à de nombreuses reprises, malgré les feux combinés de l'infanterie, des mitrailleuses et de l'artillerie ennemies. Dans un premier temps, chaque tentative fut vouée à l’échec. Mais en fin d’après-midi certaines de ces unités purent poursuivre leurs progressions sans jamais atteindre les objectifs fixés par le colonel de la 86e brigade.

Carte 2 journee du 26 septembre 1915

Legende carte 2 journee du 26 septembre 1915

Organisation du secteur en fin de journée

La nuit arrête les opérations. La situation sur le front de la 43e D.I. est la suivante :

10e B.C.P. : e20, e17, e12.

3e bataillon du 149e R.I. : g7, g2  et en arrière g7, g12, g15. Les deux autres bataillons du régiment  sont à la parallèle de départ.

Les 31e B.C.P. le 158e R.I. et les fractions du 17e R.I. sont dans le bois en Hache, ligne k2, k32, k3, k19, k26, k18.

Le 3e bataillon du 158e R.I. est à la tranchée des fils de fer.

Dans la nuit, les éléments du 1er B.C.P. qui étaient sous les ordres directs du lieutenant-colonel Gothié quittent la 1ère ligne. Les chasseurs du commandant Camors vont stationner au boyau Moreau et dans la tranchée 1bis, à cheval sur le boyau Defrasse. Le 31e B.C.P. est également retiré.

L’attaque doit reprendre le lendemain…

Contrairement à la journée du 25 septembre 1915, l’état nominatif des tués, blessés et disparus du 26 septembre n’a pas encore été retrouvé dans les archives du S.H.D. de Vincennes.

Le tableau suivant a été réalisé à partir du fichier des « Morts pour la France » qui se trouve sur le site de « Mémoire des hommes ».

                                          Tableau des tués pour la journée du 26 septembre 1915

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/4

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.

J.M.O. de la 86e brigade S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/13 et 14.

J.M.O. du 1er B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/2.

J.M.O. du 31e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 826/26.

Fond de carte du secteur de Noulette construit par V. le Calvez.

Site « Mémoire des hommes »

Le dessin intitulé « En mémoire de Mérieux, impressions septembre 1915» a été réalisé par Hippolyte Journoud, soldat au 149e R.I.. Il est extrait du fascicule « Hippolyte Journoud, imprimerie de la maison des deux-collines, XXXII phototypies MCMXIX.

Concernant la 1ère carte, de nouveau, il n’a pas été possible de faire un travail de grande précision. L’échelle du calque utilisé pour sa réalisation est différente de la carte dessinée par V. Le Calvez. Ceci peut expliquer les dissemblances importantes avec la réalité du terrain. Cette carte n’a donc qu’une valeur indicative.

Les zones occupées par les 1er, 10e et 31e B.C.P. et les 3 bataillons du 149e R.I. dessinées sur la seconde carte sont également indiquées de manière approximative. 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à A. Chaupin, à T. Cornet, à V. le Calvez, à M. Porcher, à la famille Aupetit, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

Commentaires
P
Voilà une zone de combat que je connais particulièrement bien pour avoir habiter à 100 mètres de ce lieu. Régulièrement j'y retourne pour chercher des artéfacts de ces combats. L'urbanisation réduit malheureusement de plus en plus les zones de recherche, couvrant de maisons et de routes les tranchées, le bois est encore accessible et est resté dans le même état qu'au lendemain des combats. Il est donc intéressant de savoir ce qui s'est passé, de ce qu'ont pu vivre ces hommes en cet endroit. Merci pour ces témoignages de vie et félicitations pour les recherche et transcriptions. Au plaisir de lire le prochain article.
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