4 mars 1915
Après avoir subi une attaque violente la veille, le 149e R.I. consolide sa nouvelle ligne de front.
Durant la nuit, le secteur reste relativement calme malgré des tirs et bombardements intermittents et modérés.
Un barrage, complété par un petit poste, est installé dans le boyau de la haie G, à égale distance entre les lignes allemandes et françaises. Deux mitrailleuses ont été remplacées au bois 6 et trois au bois 7.
Vers 5 h 00, une fusillade intense éclate dans le secteur du régiment vosgien, mais il ne s'agit pas d'une nouvelle attaque.
À 9 h 00, le commandant du 2e bataillon du 149e R.I., le commandant Magagnosc, prépare un rapport et un croquis destinés au lieutenant-colonel Gothié.
« Le bataillon est dans la situation suivante :
Une compagnie dans des tranchées qu’elle a construites sur une ligne orientée vers la gauche du bois 7. À sa droite, un petit bois à la lisière nord du bois 8, situé à environ 300 mètres de la crête, est occupé par l’ennemi. Cette compagnie, la 6e, occupe avec ses tranchées sur deux lignes, un front d’une centaine de mètres.
Une compagnie, la 5e, à cent mètres en arrière de la précédente, occupe six tranchées qu’elle a construites entre le P.C. (bois 7) et la lisière nord du bois 8.
Une compagnie, la 7e, est dans des tranchées à 300 mètres en arrière de la précédente dans le vallon de Marqueffles.
Une compagnie est en réserve dans un ravin à la lisière du bois.
La liaison est assurée avec les chasseurs à droite et le P.C. du bois 7. »
La matinée du 4 mars est mise à profit pour renforcer les positions et préparer une offensive prévue pour l'après-midi.
Selon l'ordre d'opération n° 279 de la 43e D.I., les chasseurs de la 86e brigade sont chargés d'expulser les Allemands du bois de Bouvigny (bois 8) et de s’y établir solidement.
Le 149e R.I. doit synchroniser son avancée avec la 86e brigade, en longeant la bordure nord du bois de Bouvigny.
Le 2e bataillon est responsable de la liaison à droite, tandis que les 1er et 3e bataillons, situés au centre et à gauche, sont prêts à engager une offensive sur leur ligne de front si l'encerclement du bois de Bouvigny réussit.
L'offensive, prévue pour 16 h 00, sera appuyée par l'artillerie, avec un observateur positionné au point d'observation du bois 6, et renforcée par les canons de 37 mm placés dans le bois 6 et les mitrailleuses du régiment.
À 14 h 45, un bombardement d'artillerie allemande de tous calibres s'abat sur le bois de Bouvigny, mettant fin à toute velléité offensive.
À 15 h 30, le bombardement de l'artillerie ennemie prend fin, l'artillerie française se prépare à effectuer son tir de réglage avant de commencer son tir d'efficacité. Une fois le réglage achevé, le tir d'efficacité débute sur la partie est du bois de Bouvigny.
Cette préparation, très efficace, engendre d'excellents résultats. Les tirs, soigneusement ajustés, contraignent l'infanterie allemande à se replier vers ses positions arrière. Cependant, l’attaque des chasseurs qui a débuté à l’heure prévue est stoppée par l’artillerie allemande.
Au même moment, les fantassins du 3e bataillon du 149e R.I. ouvrent le feu et leurs mitrailleuses crépitent depuis les lisières des bois 5 et 6 sur les troupes allemandes qui battent en retraite ; pendant ce temps, les chasseurs, qui ont repris l’offensive, renforcés par des éléments du 2e bataillon du 149e R.I., progressent à travers le bois de Bouvigny.
Aux alentours de 18 h 30, les chasseurs atteignent le boyau 5. Le 2e bataillon du 149e R.I., toujours positionné à leur gauche, arrive au niveau des abris du Génie.
L'offensive s'arrête à la tombée de la nuit, sans que l'objectif de rejoindre la lisière est du bois 8 ne soit atteint.
Durant cette opération, le 1er bataillon du 149e R.I., positionné au centre, déploie une section de sa 4e compagnie via le boyau de la Haie G dans le but de se positionner le long de la parallèle du chemin des Vaches. Commandée par le sous-lieutenant Peyrus, cette section, affaiblie par les affrontements de la veille, est soutenue par une attaque de la 12e compagnie, dirigée par le capitaine Gruneissen.
Une patrouille de la 4e compagnie parvient à s'infiltrer dans l'ancien boyau à la droite du front français, mais est contrainte de battre en retraite vers le boyau de la Haie G suite à un retour offensif de l'infanterie ennemie.
En outre, les patrouilles dépêchées par le 3e bataillon depuis les bois 5 et 6 sont accueillies par des tirs nourris de fusils et de mitrailleuses allemandes. Les fusils et mitrailleuses français ripostent sans délai.
Les pertes ennemies sont élevées en raison des tirs d'artillerie et des mitrailleuses françaises. Cependant, faute de tirs d’efficacité sur le front du 149e R.I., les Allemands occupent toujours la parallèle du chemin des Vaches. Leurs mitrailleuses bloquent toute progression.
La troupe, fatiguée par les combats de la veille et de la journée, aspire à un temps de repos.
Malheureusement, il est impossible d'envoyer tout le monde à l'arrière.
Il est essentiel de garder pendant la nuit un effectif réduit connaissant bien le terrain, pour défendre et optimiser l'organisation des positions de 1ère ligne.
Le 1er bataillon du 149e R.I., remplacé par deux compagnies du 158e R.I., se retire en réserve. Deux de ses compagnies se dirigent vers Noulette et les deux autres vers la fosse 10.
Les 2e et 3e bataillons conservent chacun deux compagnies pour protéger la 1ère ligne et envoient le reste des troupes se reposer dans les abris les plus proches du front.
Les compagnies en 1ère ligne doivent consolider les défenses secondaires avec le matériel à disposition (fil de fer, réseaux Brun, grenades, pétards, etc.).
L'occupation de la seconde ligne est maintenue dans les mêmes conditions qu’en début de journée jusqu’à l’achèvement complet de la 1ère ligne.
Le 4 mars, trois sous-officiers et douze hommes ont perdu la vie. Le commandant Magagnosc et le sous-lieutenant Chauffenne ont été blessés, ainsi que quatre sous-officiers et dix-neuf soldats.
Sources :
Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.
« Les combats de Notre-Dame-de-Lorette » du Capitaine J. Joubert. Editions Payot.
J.M.O. du 21e C.A.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 195/1.
J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/4.
J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.
J.M.O. de la 86e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/13.
J.M.O. du 31e B.C.P. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 826/25.
Le portrait du commandant Magagnosc vient du tableau d’honneur de la guerre 14-18 publié par la revue « l’Illustration ».
Historique du 149e Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.
Un très grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à T. Cornet, à M. Porcher, à Y. Thomas, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».