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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.

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22 novembre 2019

De l’initiation au perfectionnement du tir au 149e R.I..

Le tir au 149e R

La lecture d’un petit carnet individuel qui appartenait à un soldat du 149e R.I. nous permet d’en apprendre davantage sur la pratique du tir durant les obligations militaires. Cette discipline était la plus importante de l’instruction du soldat dans un régiment d’infanterie.

Passer de l’initiation à la maîtrise parfaite du Lebel nécessitait souvent un travail de longue haleine.

La photographie suivante nous montre deux cibles et une silhouette qui ont été directement tracées sur le mur d’un des bâtiments de la caserne Courcy.

Cibles d'apprentissage au tir

Dans un premier temps, la jeune recrue devait apprendre à manipuler le fusil en utilisant des balles d’instruction en bois. Les cibles peintes permettaient de se familiariser avec les rudiments de la visée avant d’aller pratiquer sur le champ de tir.

La plupart du temps, les hommes devenaient des tireurs tout à fait honorables une fois leur passage sous les drapeaux terminé.

Au début, certains gauchers devaient probablement rencontrer quelques difficultés pour armer et tirer correctement avec une arme construite pour les droitiers. Ils étaient tenus de s’habituer au maniement de la culasse à droite et se mettre au diapason des camarades pour prendre la visée.

Des problèmes importants de myopie pouvaient également embarrasser quelques tireurs lorsque leur pathologie oculaire n’avait pas été signalée ou diagnostiquée lors du passage devant du conseil de révision. Le port de lunettes devenait plus que nécessaire !

Pour l’élite, plus rares encore étaient ceux qui perforaient le cœur de la cible en toute circonstance.

Le petit livret retrouvé date de l’année 1900. Il fut la propriété d’un certain soldat Emmonot. Cet homme faisait partie des effectifs de la 13e compagnie du 4e bataillon du 149e R.I., une unité rattachée au groupe de forteresse de la place d’Épinal.

Chaque appelé avait l’obligation d’apporter son carnet dès qu’il se rendait sur le champ de tir.

Champ de tir d'Epinal

Un supérieur marquait,sur le figuratif de la cible du carnet, la position du point d’impact après chaque coup effectué. De cette manière, chacun pouvait se rendre compte de la valeur de ses tirs, tout en suivant sa progression au fur et à mesure des difficultés techniques imposées par les objectifs fixés.

Extrait du règlement relatif à l’instruction sur le tir (ce texte figure dans le carnet de tir du soldat Emmonot)

Carnet individuel de tir du soldat Emonnot

1) Du tir d’instruction au tir d’application

Dans les tirs d’instruction, le point à viser est marqué sur une cible particulière par un cercle en papier noir. Avant de tirer, chaque soldat doit reporter à l’œil, sur la cible qui lui est affectée, et le plus exactement possible, la position du point marqué. C’est sur ce point, et non sur le centre de la cible, que le tireur doit diriger sa ligne de mire.

Carnet individuel de tir du soldat Emmonot 1

Les deux premiers tirs d’instruction sont des tirs préparatoires destinés à familiariser le soldat avec le tir à balles. Ces deux tirs ne comptent pas pour le classement des tireurs

Tout homme qui, dans les cinq tirs d’instruction, n’a pas obtenu au moins 25 points n’est pas admis aux tirs d’application. Il doit recommencer une série de tirs d’instruction fixée par le capitaine. Il ne passe aux tirs d’application qu’après constatation de ses progrès. Il prend la série des tirs d’application à la séance où il se trouve.

Carnet individuel de tir du soldat Emmonot 2

2) Classement des tireurs

Les sous-officiers, caporaux et soldats qui ont obtenu 36 points aux tirs d’application forment la 1ère classe ; ceux qui ont obtenu moins de 36 points forment la 2e classe ; ceux qui n’ont pas été admis aux tirs d’application forment la 3e classe.

3) Récompenses des tireurs

Par compagnie : une épinglette en argent, trois cors de chasse brodés en or et un cor de chasse en drap pour cinq hommes sont décernés aux meilleurs tireurs, caporaux et soldats.

Dans le régiment : 3 épinglettes et six cors de chasse brodés sont alloués aux sous-officiers armés du fusil, à la suite d’un concours réglé par le colonel.  

Recompenses de tir au 149e R

4) L’épingle et le cor de chasse sont la propriété de l’homme qui les porte pendant toute la durée de son service et dans la réserve.

Les militaires qui obtiennent,durant deux années consécutives, le cor de chasse brodé reçoivent en échange un cor de chasse surmonté d’une grenade brodée.

Les noms des tireurs qui ont été récompensés sont mis à l’ordre du régiment.

L’état nominatif de ces tireurs est également affiché à la salle des rapports et dans les chambres.

La mention des récompenses est portée au livret individuel. Les bons tireurs ont droit à des faveurs spéciales accordées par le colonel.

Il existait également une page consacrée au tir à la cible dans le livret militaire du fantassin. Voici celle, peu renseignée, qui est extraite de celui du soldat du 149e R.I., Joseph Ernst de la classe 1904.

Livret militaire du soldat Joseph Ernt

Fiers de leur réussite et de leur gratification, les hommes se rendaient assez régulièrement chez le photographe pour se faire « immortaliser » avec le cor de chasse cousu sur la manche gauche de leur uniforme.

Comme le laisse sous-entendre le montage suivant, les soldats représentés semblent avoir été photographiés avec la même vareuse, probablement prêtée par le professionnel.

Portraits de soldats du 149e R

Source :

Carnet individuel de tir du soldat Emmonot.

Pour en apprendre davantage sur l’instruction du tir dans l’infanterie, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Gallica

La fiche signalétique et des services du sergent Bazaine, gagnant de la montre offerte pour le 2e prix du concours de tir du 149e R.I. de 1895, visible sur les montages, ainsi que la fiche du soldat Emmonot, propriétaire du carnet individuel de tir, n’ont pas été retrouvées.

Un grand merci à M. Bordes, à S. Agosto, à A. Carrobi et à G. François. 

15 novembre 2019

Jean Charles Magne (1895-1915).

Jean Charles Magne

 

Natif de la ville de Paris, Jean Charles Magne voit le jour le 13 mai 1895. Son père, Charles Arthur, travaille comme ingénieur électricien. Il est âgé de cinquante ans. Sa mère, Pauline Virginie Pinault, n’exerce pas de profession. Elle a 23 ans. Le couple parental vit en union libre dans un appartement situé au numéro 46 de la rue Pigalle.

 

Deux jours après la naissance de Jean Charles, les négociants Albert Bertin et Nicolas Dondelinger accompagnent le père à la mairie du 9e arrondissement pour faire enregistrer le nom du nouveau-né sur le registre d’état civil.

 

Une mention rédigée en marge de l’acte de naissance de Jean Charles indique que la mère ne reconnaît officiellement son enfant qu’à la date du 18 août 1898.

 

Ce n’est que le 13 décembre 1900 que Charles Arthur et Pauline Virginie décident d’officialiser leur union en allant se présenter devant l’officier d’état civil de l’Hôtel de Ville du 1er arrondissement de la capitale.

 

À cette époque, la famille Magne est installée au n° 10 de la rue des Pyramides.

 

Quelques années plus tard, Jean Charles quitte l’école communale en sachant lire, écrire et compter. Il semble qu’il ait poursuivi ses études encore quelque temps comme il est stipulé sur sa fiche signalétique et des services qui lui donne le statut d’étudiant dans l’intitulé « profession ».

 

Cinq mois après avoir fêté ses 18 ans, Jean Charles Magne signe un engagement volontaire de trois ans avec l’armée.

 

Pour valider ce contrat, il a dû obtenir l’autorisation parentale, avant de se rendre à la mairie du 16e arrondissement le 14 octobre 1913.

 

Le fait de s’engager volontairement lui permet de choisir l’arme dans laquelle il souhaite servir.

 

Optant pour la cavalerie, il doit se rendre dans la ville de Melun pour intégrer les effectifs du 13e régiment de dragons, dès le lendemain de sa signature. Le jeune homme peut maintenant être formé à l’équitation militaire.

 

Jean Charles Magne est nommé brigadier le 16 mai 1914 puis maréchal des logis le 17 octobre de la même année.

 

C’est à cheval qu’il débute le conflit contre l’Allemagne en août 1914. Les missions de la cavalerie n’étant plus d’actualité, certains régiments furent transformés en unités pédestres. On y chercha, chez les sous-officiers, un vivier de volontaires pour devenir sous-lieutenants d’infanterie. Ce fut le cas du maréchal des logis Magne qui fut promu le 16 juin 1915.

 

Ce changement de statut le fait muter à la 2e compagnie du 149e R.I., un corps de troupe qui se bat en Artois. Le tout nouvel officier arrive sur la ligne de front occupée par le régiment, le 19 juin 1915.

 

L’unité spinalienne a perdu de nombreux cadres durant les attaques qui ont été menées au cours des jours précédant son arrivée.

 

À partir de cet instant, le sous-lieutenant Magne participe à toutes les opérations dans lesquelles sa compagnie est impliquée.

 

Le 25 septembre 1915, le 149e R.I. est concerné par une opération de grande envergure. L’engagement complet de la 43e D.I. doit permettre la prise du bois en Hache, situé au sud de la commune d’Angres. Les combats sont rudes.

 

Le lendemain, l’attaque reprend sous un puissant feu d'artillerie. C’est au cours de cette journée, aux alentours de midi, que Jean Charles Magne trouve la mort. Le jeune homme de vingt ans est tué en allant porter secours à un de ses hommes qui venait tout juste d’être grièvement blessé.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

En memoire de Merieux, impressions septembre 1915

 

Le sous-lieutenant Alexandre Mortemard de Boisse, officier d’état civil du 149e R.I., officialise le décès du sous-lieutenant Magne le 4 octobre 1915.

 

Le capitaine Toussaint, qui commande la 2e compagnie, et le sergent fourrier Louis Bergeron ont témoigné de l’évènement.

 

Le 28 octobre 1915, le lieutenant-colonel Gothié,  responsable du 149e R.I. écrit ceci dans le feuillet individuel de campagne : « Jeune officier provenant des sous-officiers de cavalerie, plein de vigueur et d’entrain, courageux et même téméraire, demandant toujours à remplir les missions les plus difficiles. Cité à l’ordre de son ancienne division pour sa belle conduite. Vient d’être tué à l’attaque du 26 septembre devant Angres, proposé pour une citation. »

 

L’acte de décès de cet officier est transcrit à la mairie du 16e arrondissement de Paris le 31 décembre 1915.

 

Jean Charles Magne ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance. Il n’y a pas de sépulture connue.

 

Le sous-lieutenant Jean Charles Magne a obtenu les citations suivantes :

 

Citation à l’ordre de la division n° 15 :

 

« Sous-officier d’un courage remarquable, d’un dévouement absolu. N’a pas hésité à aller rechercher et à rapporter le corps d’un officier tué et resté dans la zone dangereuse. »

 

Citation à l’ordre de la 10e armée n°121 en date du 21 octobre 1915 :

 

« Le 26 septembre 1915, devant Angres, au cours d’un violent bombardement, s’est porté en dehors de son abri, pour aller secourir un de ses hommes grièvement blessé. A été tué pendant l’accomplissement de cet acte de dévouement ; a constamment fait preuve du plus grand courage, s’offrant à effectuer lui-même les reconnaissances les plus dangereuses. »

 

Le nom de cet officier est inscrit sur une des plaques commémoratives fixées sur le mur d’enceinte du cimetière parisien du Père Lachaise, côté du boulevard Ménilmontant.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Le site des archives départementales de la ville de Paris a également été lu.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

8 novembre 2019

Gaston Eugène Émile Relu (1886-1915)

Gaston Eugene Emile Relu

 

Originaire de la Seine-et-Marne, Gaston Eugène Émile Relu naît le 1er juillet 1886 aux Courreaux, un hameau administrativement rattaché à la mairie de Forges.

 

Son père, Eugène Alexandre, travaille comme jardinier. Sa mère, Adèle Eulalie Marteaux, sans profession, a déjà donné vie à un garçon qui n’a pas survécu. Il décéde chez sa nourrice à l’âge de un mois.

 

Les parents sont tous deux âgés de 26 ans à la naissance de Gaston. Une petite sœur, prénommée Blanche Eugénie voit le jour le 30 août 1887.

 

 

Un drame familial marque à tout jamais Blanche et Gaston. Le 11 novembre 1891, sous l’emprise de l’alcool, le père abat leur mère d’un coup de fusil. Les enfants sont respectivement âgés de 4 et 5 ans.

 

Eugène Alexandre craignait que son épouse ne le dénonce comme incendiaire dans le cadre d’un sinistre allumé par ses soins en décembre 1890. En effet, il avait mis le feu à un édifice lui appartenant pour escroquer son assurance, la compagnie l’Aigle.

 

Cet homme violent et très gros buveur était craint de beaucoup au village. Tout au long de son procès, il n’a pas exprimé un seul regret concernant l’acte qu’il a commis. Après délibération, le jury, réuni à la cour d’assises de Melun, lui refuse toutes circonstances atténuantes.

 

Le 5 février 1892, le verdict tombe, il est condamné à mort. Le père de Gaston échappe de peu à « la veuve » de Deibler.

 

Eugène Alexandre Relu obtient la grâce présidentielle signée par Sadi Carnot le 26 mars. Il voit ainsi sa peine initiale commuée en celle de travaux forcés à perpétuité.

 

Ce changement de condamnation l’oblige à quitter la centrale de Melun pour rejoindre la Charente-Inférieure.

 

Le 28 avril 1892, Eugène Alexandre Relu est écroué au dépôt de Saint-Martin-de-Ré, dans l’attente de son départ pour la Guyane.

 

Le 8 octobre, il embarque sur le « ville de Saint-Nazaire », un paquebot spécialement affrété par l’état et qui a pour mission de transporter les forçats de l’autre côté de l’Atlantique. Eugène Alexandre Relu décède au bagne le 4 avril 1906.

 

La petite Blanche fut un temps recueillie par ses grands-parents paternels. Dans l’état actuel des recherches, Il est impossible de savoir ce qu’il est advenu des enfants Relu après l’assassinat de leur mère.

 

Nous retrouvons Gaston quelques années plus tard.

 

Sa fiche signalétique et des services nous apprend qu’il possède un degré d’instruction de niveau 3 ; ce qui veut dire qu’il a appris à lire, à écrire et à compter. Cette fiche nous indique également qu’il a travaillé comme épicier à Asnières.

 

Très rapidement il occupe un poste de chef du personnel dans une maison d’alimentation qui emploie une quarantaine de salariés.

 

L’année de ses vingt ans, Gaston doit penser à ses obligations militaires. Soldat de la classe 1906 de la subdivision de Fontainebleau, il se voit ajourné par le conseil de révision. Il devra se représenter devant les instances militaires dans un an. Cette fois-ci il est déclaré « bon pour le service armé ».

 

Le 6 octobre 1907, il est incorporé au 4e R.I., une unité qui est en garnison à Auxerre.

 

Ayant l’habitude de diriger une équipe, le soldat Relu est proposé pour suivre les cours de l’école des caporaux à la caserne Vauban. Cette formation lui permet d’être nommé dans ce grade le 26 septembre 1909.

 

Son service militaire prend fin lorsqu’il est envoyé dans la disponibilité le 25 septembre 1910. Six jours plus tard, il est inscrit dans la réserve du régiment.

 

De retour à la vie civile avec son certificat de bonne conduite, il retrouve sa place de chef du personnel.

 

Gaston accomplit sa 1ère période d’exercice entre le 29 août et le 20 septembre 1912 dans son ancien régiment.

 

Il est par la suite rattaché à la réserve du 46e R.I. de Fontainebleau.

 

Gaston Relu trouve un nouvel emploi. Il devient gérant du magasin de vente Plouvier, une entreprise commerciale placée au n°15bis du boulevard Saint-Denis dans le 2e arrondissement de la ville de Paris.

 

Lorsque l’ordre de mobilisation générale est décrété le 1er août 1914 et après relecture de son livret militaire, l’ancien épicier sait qu’il dispose de quatre jours pour rejoindre son régiment, le 246e R.I..

 

Nommé sergent le 14 novembre 1914, il occupe les fonctions de ce grade jusqu’au 16 décembre 1914, date de sa blessure, dans le secteur de Crouy.

 

Touché par une balle au cuir chevelu, il est évacué vers l’arrière. Le 22 décembre, le sergent Relu entre à l’hôpital auxiliaire n°77, 145 avenue Parmentier à Paris, pour en sortir le 27 janvier 1915.

 

Il est fort probable qu'il a suivi les cours de chef de section lorsqu’il  s’est retrouvé, après son séjour à l’hôpital, au dépôt de Fontainebleau à la 27e compagnie du 46e R.I..

 

C’est au cours de cette période qu’il fait une demande écrite pour être nommé officier. Gaston n’a aucune difficulté pour obtenir l’avis favorable de ses supérieurs.

 

Le 27 juin 1915 il devient sous-lieutenant à titre temporaire avec une nouvelle affectation à la clé. Il vient de recevoir l’ordre de rejoindre le 149e R.I., une unité qui combat en Artois depuis plusieurs mois. Arrivé sur le front le 22 août 1915, il est affecté à la 7e compagnie du régiment, mis sous les ordres directs du capitaine Guilleminot.

 

Le sous-lieutenant Relu participe à toutes les missions qui sont demandées à sa compagnie jusqu’au 26 septembre 1915.

 

Ce jour-là, le 149e R.I. est engagé dans une vaste offensive commencée la veille.

 

Une série d’attaques menées par toutes les unités de la 43e D.I. doit permettre la prise du bois en Hache. Le sous-lieutenant Relu est tué au cours d’une sortie de sa section dans le no man’s land.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

Carte 1 journee du 26 au 27 septembre 1915n(2e partie)

 

Le corps de Gaston ne fut pas retrouvé après les attaques de septembre. Le 6 octobre 1915, un acte de disparition officiel est signé par le sous-lieutenant Mortemard de Boisse, l’officier responsable de l’état civil. Il n’a pas été possible de trouver les deux témoins nécessaires à la validation du décès d’un homme abattu durant un combat. Seul l’aspirant Maginot affirme l’avoir vu tomber. Mais, ayant été blessé lui-même, il lui fut impossible d’en savoir davantage.

 

Quelques semaines après la mort du sous-lieutenant, le lieutenant-colonel Gothié écrit ceci dans le feuillet du personnel : « Ancien sous-officier dans la réserve, a gagné ses galons sur le champ de bataille. Excellent chef de section, énergique, et dévoué. A été tué le 26 septembre 1915 devant Angres en entraînant sa section à l’assaut. »

 

Le décès du sous-lieutenant Relu est validé le 4 avril 1918, suite à une décision prise par le tribunal civil de la Seine qui le déclare officiellement « mort pour la France » à la date du 26 septembre 1915, jour de sa disparition.

Gaston Relu a obtenu les citations suivantes :

 

Citation à l’ordre de la 55e division n° 34 (texte non connu).

 

Citation à l’ordre de la Xe armée n° 121 en date du 21 octobre 1915.

 

« Officier brave, énergique et plein d’entrain. Le 26 septembre 1915, devant Angres, a été tué en entraînant brillamment sa section à l’attaque des tranchées allemandes sous une fusillade et un bombardement des plus violents. »

 

Gaston Relu ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Monument aux morts et plaque commemorative de la commune de Forges

 

Le nom de cet homme est inscrit sur le monument aux morts et sur la plaque commémorative placée à l’intérieur de la petite église de Saint-Baudèle de la commune de Forges.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Registre matricule et registres de recensement lus sur le site des archives du département de la Seine-et-Marne.

 

Article de presse publié dans le journal « La Justice » du 6 février 1892.

 

Article de presse publié dans le journal «  La Liberté » du 7 février 1892.

 

Base de données des dossiers individuels de condamnés au bagne lisible sur le site des archives nationales d’outre-mer.

 

Les photographies du monument aux morts et de la plaque commémorative de l’église de Forges proviennent du site « MémorialGenWeb » »

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à H. Dropsy, à M. Porcher, à S. Protois et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

1 novembre 2019

Charles Justin Damideau (1879-1915)

Charles Justin Damideau

 

Charles Justin Damideau voit le jour le 3 décembre 1879 à Trémonzey, une commune située au sud du département des Vosges, à la frontière de la Haute-Saône. Ce jour-là, sa mère, Marie Anne Catherine Royer, accouche de jumeaux, le second fut prénommé François Henri. Cette femme élève déjà trois enfants, deux garçons et une fille. Elle a également donné vie à un garçon qui n'a pas survécu à sa première année.

 

Le père, Charles Del Joseph, travaille comme manœuvre. Les parents sont tous deux âgés de 34 ans lorsque les actes de naissance sont enregistrés à la mairie de Trémonzey.

 

Le 31 janvier 1885, l’unique fille de la fratrie, Marie Berthe, décède à l’âge de 12 ans. Charles Justin et François Henri ont fêté leur 6e anniversaire quelques semaines auparavant.

 

Le frère aîné, Henri François, a plusieurs fois affaire à la justice. Celle-ci le condamne à trois reprises à des peines de prison pour des faits de violence. Le moment venu des obligations militaires, Henri François ne se présente pas devant le conseil de révision qui le déclare d’office bon pour le service armé. Envoyé au Tonkin, il y meurt à l’âge de 22 ans. Charles Justin et François Henri ont 9 ans.

 

Le second, Luc Joseph, est condamné à deux mois de prison pour filouterie d’aliments par le tribunal correctionnel de Versailles, en février 1896.

 

Charles Justin et François Henri quittent l’école communale en sachant lire, écrire et compter comme le confirment leurs fiches signalétiques et des services avec leur degré d’instruction de niveau 3. 

 

L’heure de porter l’uniforme approche pour les jumeaux en 1899. Le tirage au sort, qui définit le nombre d’années à passer sous les drapeaux, est moins favorable pour Charles. Avec sa boule n° 93, il en prend pour trois ans. Son frère est beaucoup plus « chanceux » avec son n° 38, il pourra retourner à la vie civile au bout d’une année de service actif.

 

Le 14 novembre 1900, François Henri est incorporé au 109e R.I., une unité qui possède son dépôt dans la ville de Chaumont. Deux jours plus tard, c’est au tour de Charles de se présenter devant le portail de la caserne. Il s’est rendu à Belfort pour rejoindre les effectifs du 35e R.I.. C’est probablement la première grande séparation pour les deux frères.

 

Charles Damideau a l’opportunité de suivre les cours de l’école des caporaux durant sa longue période de service. Il est nommé dans ce grade le 4 juin 1901. Le 8 décembre, il obtient l’autorisation de coudre ses sardines de sergent sur sa tenue militaire.

 

Est-ce à cette période qu’un tatoueur lui a encré un lion entouré de laurier sur l’avant-bras droit ?

 

Le 16 septembre 1903, le jeune homme est envoyé dans la disponibilité. Il repart aussitôt vivre dans son village natal. Mais l’ancien sergent ne s’adapte pas à cette nouvelle existence. Moins d’un an après avoir clôturé ses trois années de service, il se présente devant le sous-intendant militaire d’Épinal avec un formulaire de rengagement dûment rempli. Cet acte, signé pour une durée d’un an, prend effet à compter du 8 août 1904.

 

Cette fois-ci, il a la possibilité de choisir son unité d’affectation. Charles Damideau intègre une des compagnies du 4e bataillon du 149e R.I.. Il retrouve ainsi son quotidien de sous-officier qui semblait tant lui manquer. Les contrats vont se succéder.

 

Le 8 août 1904, Charles est envoyé à la 12e compagnie du régiment.

 

Un second rengagement de deux ans, prenant effet à la date anniversaire d’échéance du premier, est enregistré dès le 28 octobre 1904.

 

Le 10 novembre, Charles apprend qu’il est affecté  à la 3e compagnie du 149e R.I..

 

Le sergent Damideau entre dans la catégorie des sous-officiers rengagés avec prime à partir du 12 avril 1905. En février 1907, il reçoit l’ordre de rejoindre la 4e compagnie du régiment.

 

Un troisième contrat de quatre ans est validé le 5 juin 1907.

 

Charles Damideau exerce les tâches de sergent-fourrier entre le 30 septembre 1907 et le 27 janvier 1909. Il quitte les écritures et les chiffres pour retrouver son rôle de chef d’escouades aussitôt après cette date.

 

Le 11 décembre 1910, il retrouve les fonctions de « plume et d’encrier » en étant sergent-major.

 

Un quatrième rengagement de trois ans voit le jour le 4 août 1911. Le 19 juin 1914, Charles signe de nouveau pour deux années et deux semaines.

 

Le sergent-major Damideau est promu adjudant le 1er juillet 1913.

 

Le 10 février de l’année suivante, il épouse Marie Jeanne Louise Hayotte à Trémonzey, une brodeuse âgée de 33 ans qui est originaire du Val-d’Ajol. La vie paisible du temps de paix est sur le point de s’arrêter.

 

Tremonzey

 

Les relations avec l’Allemagne s’enveniment de plus en plus. L’attentat de Sarajevo du 28 juin 1914 sert de prétexte pour déclencher un conflit armé. Le jeu des alliances entre nations conduit l’Europe au bord d’une catastrophe humaine sans précédent.

 

Le 149e R.I. qui est un régiment de couverture doit envoyer son 1er échelon vers la l’Allemagne dès le 1er août 1914. La guerre n’est pas encore déclarée officiellement. Le 2e échelon suit 3 jours plus tard. Beaucoup se préparent à gagner la frontière franco-allemande en s’imaginant que la guerre ne va pas durer trop longtemps. Chimère !

 

Après plusieurs jours de marche, le régiment spinalien engage son premier combat. Celui-ci a lieu du côté du village de Wisembach, au Renclos-des-vaches, le 9 août 1914.

 

Ce jour-là, l’adjudant Damideau encadre sa section de la 4e compagnie. Cette compagnie, qui se trouve sous les ordres du capitaine Altairac, est engagée dans l’attaque. Charles sort indemne de cette expérience du feu. 

 

Pour en savoir plus sur les événements vécus par les hommes de la 4e compagnie au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

La Chaume de Lusse

 

Le 21 août 1914, Charles Damideau est blessé d’un éclat d’obus à la tête durant les combats qui eurent lieu au nord d’Abrechviller. Touché dans la région occipitale, il souffre également de fortes contusions à la jambe gauche et au poignet gauche.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

Carte 1 journee du 21 aout 1914

 

Évacué en dehors de la zone des armées, il est pris en charge par les médecins de l’hôpital de Moulins.

 

Le 2 septembre 1914, il apprend qu’il est nommé sous-lieutenant à titre temporaire.

 

Charles quitte la préfecture de l’Allier le 26 septembre pour rejoindre le dépôt du 149e R.I. tout juste installé à Rolampont.

 

Le sous-lieutenant Damideau laisse le dépôt derrière lui le 31 octobre 1914 pour rejoindre son ancien régiment qui combat maintenant en Belgique.

 

Le 5 novembre 1914, il prend de manière provisoire le commandement de la 4e compagnie.

 

Le 2 février 1915, le lieutenant-colonel Gothié rédige à son sujet la note suivante dans le feuillet du personnel : « Ancien adjudant de compagnie énergique et très brave. A fait campagne depuis le début jusqu’à Abreschviller où il a été blessé et évacué. A rejoint le régiment en Belgique où il a commandé sa compagnie comme sous-lieutenant à titre temporaire dans des conditions difficiles. Excellent officier qui mérite d’être maintenu. »

 

Le 14 février 1915, Charles Damideau est de nouveau blessé. Cette fois-ci c’est l’éboulement d’une partie du château de Noulette, qui en est la cause.  Ce jour-là, l’artillerie allemande fait s’écrouler une partie des ruines de cet édifice qui perfore le plafond d’une des caves abritant deux sections de la 4e compagnie. Les hommes sont ensevelis. Le lieutenant-colonel Gothié envoie de suite deux équipes de travailleurs avec pelles et pioches pour les dégager. Il demande également le concours de l’artillerie pour arrêter le feu ennemi. Le sous-lieutenant Damideau a de la chance, il fait partie des premiers à revoir le jour.

 

Il est touché à la tête. Son poignet gauche est foulé. Il est victime d’une forte commotion et le diagnostic est réservé.

 

Le sergent Paul Monne évoque l’évènement dans son témoignage qui peut se lire en cliquant sur l’image suivante.

 

Sergent Paul Monne

 

« … Au château, il ne restait plus que des pans de mur, il avait été incendié au cours des premiers combats. Les sous-sols et les caves voûtées étaient restés intacts. Ils servaient d’abris aux soldats qui quittaient la 1ère ligne pour venir se reposer en 2e ligne.

 

Nous restions 48 heures en 1ère ligne et 48 heures en 2eligne. (Bois 6 et sous-sols du château) et enfin 48 heures de grand repos à Aix-Noulette, Noeux-les-Mines.

 

Je signale en passant qu’il n’y avait pas de fontaines, pas de W.C., tout se faisait dans la mare. C’est même là que les cuisiniers venaient chercher l’eau pour faire le café.

 

Les soldats français toujours imprudents sortaient de leur abri pour venir s’ébattre à l’extérieur du château, sans se préoccuper s’ils étaient vus par les Allemands qui étaient sur la crête.

 

Les observateurs allemands les ont aperçus. Aussi, le 14 février 1915, l’artillerie a bombardé violemment le château avec de gros obus.

 

Malheureusement, sous le poids des hautes murailles et les obus de gros calibre, quelques voûtes se sont effondrées et ont enseveli une partie des soldats de notre 4e compagnie.

 

Les survivants des caves épargnées ont voulu aussitôt dégager leurs camarades qui étaient sous les décombres. Douze ont été trouvés morts. »

 

Charles est envoyé à Paris pour y être soigné. Il quitte l’hôpital le 30 mars 1915, bénéficiant d’une convalescence d’un mois. Il est au dépôt du 149e R.I. le 1er mai, dépôt qu’il quitte le 24 juin pour rejoindre deux jours plus tard la ligne de front.

 

Le lieutenant-colonel Gothié lui donne le commandement de la 6e compagnie de son régiment dès son arrivée.

 

Suite à une décision prise par le général commandant en chef, le 3 septembre 1915, le sous-lieutenant Damideau est nommé lieutenant à titre temporaire. Cette promotion ne lui fut pas favorable bien longtemps.

 

Le 26 septembre 1915, le 149e R.I. poursuit une offensive commencée la veille qui doit lui permettre la prise du bois en Hache. Le lieutenant Damideau est mortellement blessé au cours d'une attaque.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante. 

 

Carte 1 journee du 26 au 27 septembre 1915n(2e partie)

 

Quelques semaines après le décès du lieutenant Damideau, le lieutenant-colonel Gothié écrit ceci : «  Revenu sur le front à peine guéri, a pris le commandement de la 6e compagnie qu’il a assuré avec beaucoup d’énergie et d’autorité. Blessé mortellement au combat du 26 septembre devant Angres, a été proposé pour une citation. »

 

Citation à l’ordre de la 10e armée n° 121 en date du 21 octobre 1915.

 

« Le 26 septembre 1915, devant Angres, a été tué à la tête de sa compagnie en l’entraînant à l’attaque des tranchées allemandes après un bombardement des plus violents. Excellent commandant de compagnie, très courageux, avait déjà été blessé au cours de la campagne. »

 

Le nom de cet officier est inscrit sur le monument aux morts et sur la plaque commémorative posée à l’intérieur de la petite église de la commune vosgienne de Trémonzey.

 

Il n’y a pas de descendance connue pour le couple Damideau. Le frère jumeau de Charles est sorti indemne du conflit.

 

Pour connaître la généalogie du lieutenant Damideau, il suffit de cliquer une fois sur le logo suivant.

 

Geneanet

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à  É. Jeannel, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

25 octobre 2019

Ouest du bois en Hache, 26 septembre 1915 (2ème partie).

Lieutenant-colonel Gothie 26 septembre 1915

Le 27 septembre 1915, le lieutenant-colonel Gothié rédige le rapport d’activité de son régiment concernant les opérations qui se sont déroulées la veille. Il y décrit les actions et déplacements de ses trois bataillons.

Pour le 2e bataillon du 149e R.I.

Le bataillon Schalck est positionné à la gauche du groupement de droite.

« Les parallèles et sapes ont été soumises de 13 h 00 à 13 h 30 à un bombardement des plus sérieux qui a causé beaucoup de pertes et enterré plusieurs hommes qu’il a fallu dégager. L’élan de l’attaque a été rompu et il n’y a guère que la 1ère vague de la 7e compagnie, très fortement réduite par les pertes, qui ait pu progresser et sauter dans une ancienne tranchée allemande où il se trouve encore quelques hommes.

Je ne suis pas encore fixé sur les pertes de la troupe qui sont certainement lourdes.

Dans le personnel des officiers, on me signale comme tué, le lieutenant Damideau, comme disparus ou blessés, les sous-lieutenants Lobstein et Relu et le capitaine Jeské est blessé.

Le chef de bataillon a reçu lui-même, directement, devant l’entrée de son abri, entre 13 h et 13 h 30, une dizaine de 105 qui ont blessé des hommes et enterré à moitié les liaisons.

Le téléphone a été coupé à plusieurs reprises.

Carte 1 journee du 26 au 27 septembre 1915 (2e partie)

En ce moment, les débris des compagnies occupent la parallèle extérieure entre la sape 3’ et 4’ reliée, à droite, par la 9e compagnie qui a des éléments dans la sape 3.

Pour le 3e bataillon du 149e R.I..

Le 3e bataillon était chargé d’attaquer le bois en Hache, sa gauche suivant la direction g11, g7, e13.

L’attaque s’est déclenchée à l’heure fixée à 13 h 10. La veille au soir, la 11e compagnie a creusé de toutes pièces, une tranchée un peu en avant de la tranchée allemande g11,  g12 et g13 qu’elle a occupée, ayant à sa droite un peloton du 31e B.C.P.. Elle s’est portée à l’attaque et, vigoureusement conduite par le lieutenant Prenez, elle occupa g15 et arriva aux abords de g7.

La 12e compagnie suivit la 11e compagnie. La 9e compagnie, qui tenait la parallèle de départ s’est avancée à découvert et, violemment battue par le feu, ne put progresser que lentement. À la nuit, elle est dans g16, g15.

La 10e compagnie atteint sous le même feu violent g11, g12 et, à la nuit, s’y organise.

La compagnie du 1er bataillon du 149e R.I. mise à la disposition du 3e bataillon tenait la parallèle de départ.

À la nuit, le terrain conquis est organisé et les deux compagnies du 1er bataillon sont employées à prolonger vers l’est, l’avance acquise vers g7 et à relier cette organisation à la parallèle de départ.

Carte 2 journée du 26 au 27 septembre 1915

La liaison à droite avec le 31e B.C.P. est établie.

Pour le 1er bataillon du 149e R.I..

Le bataillon quitte la 1ère ligne h12, sape 9 pour se rendre dans la région f7, f8 où il stationne jusqu’à 13 h 10, heure du déclenchement de l’attaque.

À ce moment, le bataillon se porte dans la direction e6 et occupe la 1ère ligne, entre les sapes 4 et 5. Pendant la nuit, une compagnie occupe les tranchées conquises, en deçà de la lisière du bois en Hache. Une autre compagnie est tout entière à la construction d’une sape pour relier la tranchée conquise à la 1ère ligne française.

Les deux autres compagnies ont un peloton employé à la réfection des sapes et boyaux de la 1ère ligne et l’autre peloton au service des tranchées.

Les 2e et 3e bataillons du 149e R.I. qui ont été engagés dès le début des attaques de la fin du mois de septembre 1915 se sont très bien montrés au feu. Durant les journées du 25 et du 26, le 2e bataillon a perdu plus de la moitié de son effectif.

Le 3e bataillon s’est emparé de 2 lignes de tranchées.

Un premier état des pertes de la journée du 26 septembre est communiqué au lieutenant-colonel Gothié dès le 27 septembre 1915.

Tableau des pertes pour les journees des 25 et 26 septembre 1915

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

Le fond de la première carte a été construit par V. le Calvez.

La photographie représentant le lieutenant-colonel Gothié à cheval provient du fonds Archenoul.

La photographie aérienne du bois en Hache qui se trouve sur le montage fait partie de la collection de l’association « Collectif Artois ».

Concernant les deux cartes, une nouvelle fois il n’a pas été possible de faire un travail de grande précision. Ces cartes n’ont donc qu’une valeur indicative.

Un grand merci à M. Bordes, à J. Breugniot, à A. Carobbi, à A. Chaupin, à T. Cornet, à V. le Calvez, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

18 octobre 2019

Paul Marius Pierre Viala (1895-1918).

Paul Marius Pierre Viala

Né d’Edmond Étienne et d’Adèle Félicie Abric, Paul Marius Pierre Viala voit le jour le 27 novembre 1895 dans la ville du Vigan dans le département du Gard. Il est le second d’une fratrie de trois enfants.

Encore adolescent, il doit aller gagner sa vie comme journalier. Sa fiche signalétique et des services nous dit qu’il possède un degré d’instruction de niveau 2. Ses acquisitions scolaires sont sans doute restées assez modestes.

Soldat de la classe 1915, Paul n’est pas concerné par la mobilisation générale qui a eu lieu en août 1914. Mais son contingent est appelé bien avant l’heure prévue pour le passage devant le conseil de révision. Un dispositif d’appel des classes les plus jeunes, dispositif plus « serré », a été mis en place par les instances supérieures. Il permet de fluidifier les rotations entre les hommes à former au métier des armes sur du moyen terme et les hommes qui sont capables de rejoindre la zone des armées rapidement sans totalement vider les dépôts.  

Les réserves disponibles ne doivent pas s’épuiser ! Si c’était le cas, il serait impossible de combler les pertes des unités combattantes au fur et à mesure des besoins, ce qui serait un problème majeur !

Déclaré bon pour le service armé par la médecine militaire, Paul est incorporé au 173e R.I. à compter du 21 décembre 1914. Il quitte le petit village de Sumène pour se rendre en Corse.

Quelques mois doivent suffirent pour sa formation de fantassin. Il lui faut aller vite pour acquérir les bases de la discipline de caserne, maîtriser à minima le tir au Lebel ; il doit également obtenir les forces physiques suffisantes pour effectuer les nombreuses marches longues et pénibles qu’il sera susceptible de faire lorsqu’il sera sur le terrain des combats.

Vingt et un régiments « 400 » naissent en 1915. Ils sont largement alimentés par une partie des soldats de la classe de Paul Viala.

En mars 1915, Paul quitte la ville de Bastia. Le 15 du mois, il intègre les effectifs du 415e R.I.. Il doit se rendre au camp de Carpiagne, près de Marseille.

Faute de J.M.O. pour ce régiment, il est difficile, même dans les grandes lignes, de reconstituer le parcours de Paul Viala. Nous saurons simplement qu’il a été blessé par un éclat d’obus à la plante du pied gauche le 25 septembre 1915 à Perthes-les-Hurlus, en Champagne. Il est envoyé à l’arrière pour y être soigné. Le soldat Viala change d’affectation après sa convalescence. Le 18 mars 1916, il est envoyé au 149e R.I..

Cette unité se trouve dans le secteur de Verdun à cette période de l’année. Le régiment vient de subir des pertes importantes au cours des jours précédents. Paul est envoyé à la 3e compagnie du régiment.

Il a à peine le temps de faire connaissance avec ses camarades d’escouade qu’il doit remonter en 1ère ligne. Le 1er bataillon du 149e R.I. est désigné pour tenter de reprendre aux Allemands le village de Vaux-devant-Damloup le 2 avril 1916.

Cette opération est un échec total. L’ennemi n’a pas cédé un pouce de terrain. Plusieurs soldats sont capturés au cours de l’opération. Paul Viala fait partie du nombre.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Carte 3 journée du 2 avril 1916

Une recherche entreprise sur le site du Comité International de la Croix Rouge a permis de retrouver plusieurs fiches au nom de Paul Viala. Celle qui est présentée ci-dessous reste la plus détaillée.

Fiche Croix Rouge de Paul Viala

Cette fiche nous indique le numéro de sa compagnie au sein du 149e R.I.. Elle nous fait également savoir qu’il est infirmier. Mais à quel moment a-t-il pu apprendre les rudiments de ce métier ? Durant ses classes ? Au cours de son passage au 415e R.I. ? La réponse à ces questions demeure pour l’instant inconnue.

Paul est, dans un premier temps, interné à Darmstadt. Il est ensuite envoyé dans le camp d’Altdamm en Poméranie en juin 1916.

Camps de prisonniers où Paul Viala a été en captivité

Durant sa captivité, il adresse la carte photo suivante à son père qui vit à Sanissac, dans le Gard.

En captivite a Altdamm

Les conditions de captivité sont très dures. Sa santé se dégrade au fil des années. Paul finit par tomber malade. Il décède le 1er avril 1918 au feld lazareth du camp. A-t-il été victime de la grippe espagnole ?

Paul est inhumé dans la nécropole de Sarrebourg au début des années vingt. Son corps, réclamé par la famille, est restitué en 1926. Il arrive à Marseille le 6 mars. Son cercueil est à Nîmes le 9 mars. Le soldat Viala est ensuite enterré dans le « carré des poilus » du cimetière communal de Sumène.

Sepulture Paul Viala

La plaque noire placée sur sa sépulture a été rajoutée dans le cadre des commémorations du centenaire. Le nom original inscrit dans le cœur était devenu presque illisible.

La Médaille militaire lui a été attribuée à titre posthume (publication dans le J.O. du 22 novembre 1921).

« Brave soldat mort pour la France le 1er avril 1918 des suites de ses glorieuses blessures. Croix de guerre avec étoile de bronze. »

Le nom de cet homme est inscrit sur le monument aux morts de la commune de Sumène et sur les plaques commémoratives des églises de Sanissac et de Sumène.

Pour prendre connaissance de la généalogie de Paul Viala, il suffit de cliquer une fois sur le logo suivant.

Geneanet

Paul est resté célibataire et n'a pas eu de descendance.

Sources :

La fiche signalétique et des services de Paul Marius Pierre Viala a été consultée sur le site des archives départementales du Gard.

La photographie de sa sépulture à été réalisée par M. Bresson.

Un grand merci à M. Bordes, à M. Bresson, à A. Carobbi et aux archives départementales du Gard.

11 octobre 2019

Ouest du bois en Hache, 26 septembre 1915 (1ère partie).

En memoire de Merieux, impressions septembre 1915

Les affrontements menés le 25 septembre par les bataillons de chasseurs et le 158e R.I. de la 43e D.I. ne se sont pas déroulés tout à fait comme prévu. Le 149e R.I., qui était réserve de division, a eu toutes les peines du monde pour rejoindre la 1ère ligne.

Le régiment spinalien fut dans l’impossibilité de soutenir efficacement les unités de la division qu’il devait épauler au cours de leurs attaques. Seuls, sa 5e compagnie et un peloton de sa 8e compagnie ont pu être sollicités pour participer à une contre-attaque dans le secteur du 1er B.C.P..

Réorganisation du secteur d’attaque

Depuis la veille au soir, la zone d’attaque de la 43e D.I. a été séparée en deux. D’un côté, les 1er et 10e B.C.P. et le 149e R.I. sous les ordres du lieutenant-colonel Gothié, de l’autre, le 158e R.I., le 31e B.C.P. et un bataillon du 17e R.I. sous le commandement du lieutenant-colonel Garcin.

Le 1er B.C.P. est commandé par le commandant Camors, le 10e B.C.P. par le commandant Faury.

Chaque fantassin, chaque chasseur, se conditionne pour reprendre le combat.

Carte 1 journee du 26 septembre 1915

Legende carte 1 journee du 26 septembre 1915

L’heure de l‘attaque est fixée à 13 h 10.

L’attaque

À l’heure dite, les troupes s’élancent. L’artillerie allemande riposte aussitôt très énergiquement. Le 3e bataillon du 149e R.I. est obligé de se terrer, face contre sol, presque dès sa sortie des tranchées. Le 2e bataillon du régiment, durement éprouvé avant l’heure de l’attaque, parvient tout de même à lancer deux vagues d’assaut.

Le 1er bataillon du 149e R.I. se place immédiatement dans la parallèle de départ pour soutenir et appuyer les efforts des deux autres bataillons.

Le 10e B.C.P. est pris instantanément sous le feu des mitrailleuses. Les positions occupées la veille par ces mitrailleuses ont été complètement modifiées, surprenant ainsi les chasseurs du commandant Faury. La 1ère vague franchit à peine 12 mètres. Elle doit vite s’abriter dans les trous d’obus. La situation est identique pour la compagnie de gauche du 149e R.I..

Au sud-est, le 31e B.C.P. parvient à pénétrer dans le bois en Hache. Le 158e R.I. poursuit sa progression par bonds successifs à la gauche du bois.

À 13 h 45, le lieutenant-colonel Gothié rédige son premier compte-rendu qu’il adresse à ses deux supérieurs des 85e et 86e brigades.

« Le commandant Camors rend compte qu’une demi-heure avant l’attaque, l’artillerie lourde allemande a commencé à arroser copieusement la sape 4 déjà éboulée le matin.

Plusieurs fractions du 2e bataillon du 149e R.I. ont été enterrées. Malgré ces évènements, l’attaque est déclenchée normalement, à l’heure exacte fixée.

Ordre a été donné aussitôt au 1er bataillon du régiment de serrer sur e6 et d’y transporter son P.C..

À son arrivée à e6, le capitaine Cochain doit mettre à la disposition du commandant Camors, chef du groupement du centre, deux de ses compagnies.

Dès que je serai fixé sur les progrès de l’attaque, je me transporterai moi-même en e6.

Les communications entre la 1ère ligne et la parallèle de départ sont coupées. Celles entre le P.C.4 et le P.C. de 1ère ligne sont toujours intactes.

D’après de nouveaux renseignements qui me parviennent du commandant Faury, ses compagnies n’ont pas pu déboucher en raison d’une fusillade violente et beaucoup plus intense qu’hier, partant des tranchées allemandes. Il en est de même pour la compagnie de gauche du 149e R.I..

Je donne l’ordre au commandant Faury de renouveler ses tentatives de sortie dès que les circonstances le permettront ou au moins d’ici l'heure, coûte que coûte. »

À 14 h 15, le lieutenant-colonel Gothié fait un second rapport :

« Le commandant Comors me rend compte par téléphone que les deux vagues de tête du bataillon Chevassu du 149e R.I., qui avait dû se coucher sous les rafales d’artillerie, ont repris leur mouvement, au bout de quelques minutes. Mais elles ont subi des pertes telles qu’elles ont dû stopper de nouveau, sous les feux combinés d’artillerie, de mitrailleuses et d’infanterie.

Je fais renforcer la ligne par une 3e vague pour la pousser en avant.

Du côté du 10e B.C.P., le commandant Faury rend compte que ses compagnies viennent de faire deux nouvelles tentatives pour se porter en avant, mais à peine ont-elles débouché qu’elles sont prises à partie par des mitrailleuses placées en de nouveaux points tels que g7, e32, e13 et g11. Il y a de nombreux blessés.

Je fais renforcer ces deux côtés. »

Un nouvel écrit du lieutenant-colonel Gothié est envoyé aux responsables des deux brigades de la 43e D.I. à 15 h 13.

« Le commandant Faury fait connaître que sa situation à gauche est inextricable. Il se heurte à une organisation défensive formidable le long de la route e20, d24 où les réseaux de fil de fer ennemis n’ont pu être détruits et où les mitrailleuses subsistent particulièrement en d11, d22, d10 d21 et e32.

Tout ce qui essaie de sortir du front e20, e17 et e12 est immédiatement fauché. Tant que ces organisations ne seront pas détruites par l’artillerie, les troupes d’attaque sur ce front sont vouées à l’insuccès. Les parapets ennemis sont en outre garnis de nombreux défenseurs ayant résisté à notre tir d’artillerie.

Tout cela semble indiquer que les Allemands ont, en face de notre gauche, accumulé leurs efforts pour y constituer un véritable pivot de défense.

Cette partie-là a du reste été moins battue par notre artillerie.

Au groupement de droite, on me signale que le sous-lieutenant Magne a été tué en portant secours à un blessé de sa compagnie.

Le 31e B.C.P. paraît progresser dans le bois en Hache. Le commandant Camors a fait renforcer le bataillon Chevassu du 149e R.I. pour avancer en se reliant à cette progression.

La tranchée e18, g10 a été reconquise. »

Il est demandé au chef de corps du 149e R.I. de redoubler d’efforts au nord du bois en Hache, afin de faciliter la progression effectuée par le groupement du lieutenant-colonel Garcin au sud-est du bois. Dans le but d’obtenir coûte que coûte un résultat, le lieutenant-colonel Gothié met toute sa réserve dans la bataille. Une lutte très âpre s’engage.

À 16 h 00, le lieutenant-colonel Gothié écrit son 4e rapport de la journée.

« À la réception du renseignement que vous venez de me transmettre par message téléphonique à 15 h 45, m’annonçant la nouvelle offensive du 158e R.I., je mets toute ma réserve à la disposition du groupement Camors pour prendre l’offensive à travers le bois en Hache, en liaison avec le 31e B.C.P..

On me rend compte à l’instant que 2 compagnies du 3e bataillon du 149e R.I.viennent de pénétrer dans le bois.

J’envoie également au commandant Camors mes dernières sections de mitrailleuses disponibles de la 85e brigade.»

À 17 h 20, le colonel commandant la 86e brigade envoie à chacun des responsables des 149e R.I. et 158e R.I. l’ordre suivant :

« Les progrès s’accentuent sur notre droite, il faut à tout prix, intensifier et activer la poussée par la vallée de la Souchez, de façon à atteindre avant la nuit, la ligne, Cabaret du Tonkin, pont au sud de g23. Au centre, les éléments des 158e et 149e R.I. et 31e B.C.P. devront s’assurer pour la nuit la possession du bois en Hache, dont la lisière nord devra être organisée défensivement.

Plus à gauche, il faudra occuper si possible la ligne g9, g18,  g7, g17, e18, e12 et e20.

Il faudra placer partout des défenses accessoires, devant les lignes conquises et avoir des mitrailleuses aux points de flanquement g20, g9 et g7. »

À 17 h 35, trois compagnies du 149e R.I. sont dans le bois en Hache. Le 31e B.C.P. est au milieu du bois en liaison avec le 158e R.I. et le 149e R.I.. De grosses pertes sont signalées.

Premier bilan

Tard dans la soirée, le responsable du 149e R.I. fait un dernier compte-rendu à ses supérieurs. Il y développe l’intervention du bataillon Chevassu pour l’ensemble la journée.

« Le 3e bataillon du 149e R.I. était chargé d’attaquer le bois en Hache, sa gauche devant suivre la direction g11, g7, e13.

L’attaque s’est déclenchée à l’heure fixée. La 11e compagnie avait, la veille au soir, creusé de toutes pièces une tranchée, un peu en avant de la tranchée allemande g11 g12 et g13. Elle l’a occupée ayant à sa droite un peloton du 1er B.C.P.. Elle s’est portée à l’attaque dans le bois, vigoureusement conduite par le lieutenant Prenez pour occuper g15 et arriver aux abords de g7.

La 12e compagnie suivit la 11e. La 9e compagnie, qui tenait la parallèle de départ, s’est avancée à découvert et, violemment battue par le feu, elle ne put progresser que lentement. À la nuit, elle est dans g16, g15.

La 10e compagnie atteint, sous le même feu violent, g11, g12 et, à la nuit, elle s’y organise.

La compagnie du 1er bataillon du 149e R.I., mise à la disposition du 3e bataillon tient la parallèle de départ.

À la nuit, le terrain conquis est organisé. Les 2 compagnies du 1er bataillon du 149e R.I. sont employées à prolonger vers l’est l’avance acquise vers g7 et à relier cette organisation à la parallèle de départ. La liaison est établie à droite avec le 31e B.C.P.. »

Tout au long de la journée, les 1er et 10e B.C.P. et les 2e et 3e bataillons du 149e R.I. ont tenté de poursuivre leur progression, à de nombreuses reprises, malgré les feux combinés de l'infanterie, des mitrailleuses et de l'artillerie ennemies. Dans un premier temps, chaque tentative fut vouée à l’échec. Mais en fin d’après-midi certaines de ces unités purent poursuivre leurs progressions sans jamais atteindre les objectifs fixés par le colonel de la 86e brigade.

Carte 2 journee du 26 septembre 1915

Legende carte 2 journee du 26 septembre 1915

Organisation du secteur en fin de journée

La nuit arrête les opérations. La situation sur le front de la 43e D.I. est la suivante :

10e B.C.P. : e20, e17, e12.

3e bataillon du 149e R.I. : g7, g2  et en arrière g7, g12, g15. Les deux autres bataillons du régiment  sont à la parallèle de départ.

Les 31e B.C.P. le 158e R.I. et les fractions du 17e R.I. sont dans le bois en Hache, ligne k2, k32, k3, k19, k26, k18.

Le 3e bataillon du 158e R.I. est à la tranchée des fils de fer.

Dans la nuit, les éléments du 1er B.C.P. qui étaient sous les ordres directs du lieutenant-colonel Gothié quittent la 1ère ligne. Les chasseurs du commandant Camors vont stationner au boyau Moreau et dans la tranchée 1bis, à cheval sur le boyau Defrasse. Le 31e B.C.P. est également retiré.

L’attaque doit reprendre le lendemain…

Contrairement à la journée du 25 septembre 1915, l’état nominatif des tués, blessés et disparus du 26 septembre n’a pas encore été retrouvé dans les archives du S.H.D. de Vincennes.

Le tableau suivant a été réalisé à partir du fichier des « Morts pour la France » qui se trouve sur le site de « Mémoire des hommes ».

                                          Tableau des tués pour la journée du 26 septembre 1915

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/4

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.

J.M.O. de la 86e brigade S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/13 et 14.

J.M.O. du 1er B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/2.

J.M.O. du 31e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 826/26.

Fond de carte du secteur de Noulette construit par V. le Calvez.

Site « Mémoire des hommes »

Le dessin intitulé « En mémoire de Mérieux, impressions septembre 1915» a été réalisé par Hippolyte Journoud, soldat au 149e R.I.. Il est extrait du fascicule « Hippolyte Journoud, imprimerie de la maison des deux-collines, XXXII phototypies MCMXIX.

Concernant la 1ère carte, de nouveau, il n’a pas été possible de faire un travail de grande précision. L’échelle du calque utilisé pour sa réalisation est différente de la carte dessinée par V. Le Calvez. Ceci peut expliquer les dissemblances importantes avec la réalité du terrain. Cette carte n’a donc qu’une valeur indicative.

Les zones occupées par les 1er, 10e et 31e B.C.P. et les 3 bataillons du 149e R.I. dessinées sur la seconde carte sont également indiquées de manière approximative. 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à A. Chaupin, à T. Cornet, à V. le Calvez, à M. Porcher, à la famille Aupetit, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

4 octobre 2019

Maurice Joseph Le Hoc (1880-1943).

Marie Joseph Le Hoc

Maurice Joseph Le Hoc est né le 5 mai 1880 à Trouville, dans le département du Calvados. Son père, Désiré Magloire, est alors âgé de 29 ans. À l’époque secrétaire de la mairie Touvillaise, il fut élu maire de Deauville vingt plus tard. Désiré Le Hoc occupera cette fonction jusqu’à la date de sa mort survenue en 1919. La mère, Aimée Marie Salogne, est une femme de 28 ans originaire de la Mayenne et qui n’exerce pas de profession.

Genealogie famille Le Hoc

Maurice suit une scolarité qui le mène jusqu’aux portes de l’université. Sa fiche signalétique et des services nous apprend qu’il possède un degré d’instruction de niveau 5. Il termine ses études avec une licence de lettres, un diplôme particulièrement élevé pour l’époque.

L’heure de la conscription approche. Soldat appelé de la classe 1900 de la subdivision de Lisieux, notre jeune normand se retrouve dispensé par l’article 23 lorsqu’il passe devant le conseil de révision. En 1901, il est ajourné pour faiblesse avant d’être reconnu « bon pour le service », dispensé licencié es lettres, l’année suivante.

Incorporé au 119e R.I. à compter du 14 novembre 1902, il est autorisé à suivre la formation de chef d’escouade. Maurice est officiellement confirmé dans ce grade le 26 mai 1903.

Le caporal Le Hoc est mis en disponibilité le 19 septembre de la même année avec, en poche, son certificat au grade de sous-officier de réserve et son certificat de bonne conduite accordé.

Toujours rattaché à son régiment, il se retire à Deauville. Maurice devient sergent de réserve le 9 mai 1904.

C’est avec ce nouveau grade de sous-officier qu’il doit se rendre à Bernay pour accomplir une période de « dispensé article 23 » entre le 16 août et le 12 septembre 1904, au 24e R.I.. Il fut affecté à la 12e compagnie du régiment durant toute cette période. Ici, Maurice travaille pour obtenir son certificat d’aptitude à l’emploi de chef de section dans la réserve. Les notes obtenues sont excellentes : 18 pour l’instruction militaire théorique, 17 pour l’instruction militaire pratique et 18 pour l’aptitude au commandement.

Il passe officiellement dans la réserve de l’armée active le 1er novembre 1904.

Maurice Le Hoc a été désigné par le gouvernement français pour les fonctions de sous-préfet de la ville d’Yvetot. La date de cette nomination n’a pas été retrouvée pour l’instant.

Grâce à l’obtention de son certificat d’aptitude à l’emploi de chef de section, il est promu sous-lieutenant de réserve par un décret présidentiel du 20 décembre 1909. Il dépend maintenant du 134e R.I., le régiment de Mâcon.

Le 25 janvier 1913, Maurice est rattaché au régiment d’infanterie de Compiègne. Le 30 juin 1913, il est placé hors cadre.

Le 30 mai 1913, un décret présidentiel, sur proposition du ministre de l’Intérieur, nomme Maurice Le Hoc sous-préfet d’Épernay. Il se rend dans la Marne pour y remplacer le sous-préfet Boivin qui vient d’être appelé à d’autres fonctions.

Sous-Prefecture d'Epernay

Lorsque le conflit contre l’Allemagne est sur le point d’éclater, le sous-préfet Le Hoc est rappelé à l’activité militaire par suite de mobilisation générale. Il a obligation de rejoindre son corps le 2 août 1914. Le sous-préfet Touzet qui exerce ses fonctions professionnelles à Issoire vient le remplacer.

Le 16 septembre 1914, le sous-lieutenant Le Hoc est muté au 297e R.I..

Son rôle au sein de ce régiment alpin reste inconnu pour toute la période où il fut affecté dans cette unité. Son nom ne figure pas dans les effectifs du début de campagne inscrits dans le J.M.O. du régiment, et encore moins dans celui du 97e R.I..  Maurice Le Hoc est probablement resté au dépôt de Chambéry.

Cette affectation au dépôt semble se confirmer, car au début du mois de février 1915, le sous-lieutenant Le Hoc est rattaché à la 15e compagnie du bataillon de marche du 17e R.I., une unité qui vient tout juste d’être créée. Son nom figure dans le tableau nominatif des cadres, consultable dans le J.M.O. du 17e R.I.. Il y est également écrit qu’il arrive du 97e R.I..

Le 11 mars 1915, ce bataillon reçoit l’ordre d’envoyer au 149e R.I. un renfort composé d’un capitaine, de 5 lieutenants et sous-lieutenants, de 13 sous-officiers, de 12 caporaux et de 300 hommes de troupe. Le sous-lieutenant Le Hoc est du nombre.

Au 149e R.I.

Maurice rejoint l’équipe des cadres du 149e R.I. le 12 mars 1915. Ce régiment d’origine vosgienne combat en Artois depuis la fin du mois de décembre 1914. Le secteur est particulièrement dangereux. Dès son arrivée, le sous-lieutenant apprend que sa nouvelle unité a subi une sévère attaque allemande le 3 mars. Il a été très difficile de contenir l’ennemi et les pertes ont été importantes.

Le lieutenant-colonel Gothié lui donne le commandement d’une section de sa 11e compagnie qui vient tout juste d’être mise sous l’autorité du lieutenant Wichard, en remplacement du lieutenant Thomas qui a été tué au cours de l’attaque allemande.

Le 9 mai 1915, deux bataillons du 149e R.I. participent à une offensive qui doit permettre la prise du fond de Buval. La majorité des effectifs de la 43e D.I. est engagée. Le sous-lieutenant Le Hoc mène sa section dans le no man’s land. Sa compagnie est vite en difficulté. Son chef de compagnie, le lieutenant Wichard, est tué. De nombreux soldats perdent la vie ou sont blessés au cours de l’action. Le fond de Buval est finalement atteint par seulement la moitié des hommes de la 11e compagnie.

L’intervention du sous-lieutenant Le Hoc au cours de l’attaque du 9 mai 1915 a été décrite par un de ses sous-officiers dans un article qui fut publié dans « la petite revue bas-normande de la guerre ».

« Nous avons évidemment eu une très lourde tâche dans notre compagnie, qui d’abord était compagnie d’attaque. Elle avait la plus longue distance à parcourir, 500 mètres en attaquant et en prenant successivement cinq lignes de tranchées. Nous eûmes à le faire, de surcroît, sous le feu le plus meurtrier et le plus décimant. Il est fort probable que si les officiers n’avaient pas marché en tête et vigoureusement, il y aurait eu, à certains moments, un peu d’hésitation chez les hommes, qui tombaient à chaque pas. Mais la compagnie fut héroïque et le lieutenant Le Hoc l’entraîna même plus loin que les objectifs assignés. En arrivant dans le fond de Buval, ç’est là que tombant sur une masse d’Allemands, l’autre lieutenant et l’adjudant furent tués. Le lieutenant le Hoc établit rapidement, avec quelques hommes, un barrage avec des sacs de terre, bouchant le boyau d’accès des Allemands et paralysant ainsi leur retour offensif. C’est là que je fus blessé. Cette poignée d’homme coucha là deux jours et deux nuits, ne perdant rien de la position, sous le feu terrible d’artillerie. Quand on a vu cela, on a tout vu !

Du reste, toute la compagnie a été citée à l’ordre de l’armée.

Plusieurs autres sous-officiers et soldats de cette compagnie engagée à Notre-Dame-de-Lorette sont actuellement en traitement dans les ambulances du littoral, à Deauville, à Trouville, à Bernières-sur-Mer, etc. »

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte du 9 mai 1915

Le 24 mai 1915, Maurice Le Hoc est nommé sous-lieutenant porte-drapeau ;  le commandement de la C.H.R. du régiment lui est également confié.

Le 13 septembre 1915, l’officier bénéficie d’une permission. Maurice se rend à Paris pour y épouser Armandine Maria Weber. Au cours de cette union, le couple reconnaît, en vue d’une légitimation, le petit Jean Maurice qui est né le 22 octobre 1914 à Deauville.

Le 20 septembre 1915, le sous-lieutenant Le Hoc est promu à titre définitif dans le grade supérieur. Il apprend rapidement qu’il va devoir quitter le régiment qui a pour devise « Résiste et mord ».

Peu avant son départ, le lieutenant-colonel Gothié écrit ceci dans le relevé des notes de son subordonné : « Officier intelligent et distingué, ayant eu une belle attitude au feu en mai alors qu’il commande sa section. A rempli ensuite les fonctions de porte-drapeau et de commandant de la compagnie hors rang à l’entière satisfaction du chef de corps. »

À la Légion

Le 8 octobre 1915, cet officier est mis à la disposition du commissaire résident général du Maroc, suite à une décision prise par le général commandant en chef.

Sa nouvelle affectation le conduit au 1er régiment de marche du 2e étranger.

Le lieutenant Le Hoc arrive dans sa nouvelle unité le 17 décembre 1915. Il est affecté à la section de mitrailleuses de la 11e compagnie du régiment.

Au cours du mois de juin 1916, Maurice participe à une série d’opérations qui ont lieu dans la région de Taza. Il faut tenter de soumettre les Beni-Ouaraïn qui sont placés entre El Menzel et Oued Matmata.

Le 16 juin 1916, il se bat à Aïn-Agéri. Le lendemain, il est engagé dans l’attaque des kasbah de Bizranne. Le surlendemain, c’est le combat de Cassiona puis celui de Ziberbarine, le 19 juin.

Le 25 juin 1916, il fait des reconnaissances vers El Khemis des Beni-Ouaraïn.

Le colonel Théveney  rédige la note suivante  dans le relevé des notes de Maurice : «  Le lieutenant de réserve Le Hoc, après s’être fort bien conduit sur le front, est au Maroc depuis 8 mois. Il n’a pas tardé à s’y faire fort bien juger par ses supérieurs. Intelligent, dévoué, très instruit, d’esprit militaire, il sert avec entrain. Aux colonnes, il s’est parfaitement comporté, tant comme chef de section, qu’en qualité d’agent de liaison du chef de bataillon. Comme commandant de troupe mobile, j’ai pu apprécier son sang-froid, sa vigueur, sa compréhension très nette de la situation et de son courage. A été l’objet d’une proposition de citation à l’ordre des T.M.O.. »

Le 25 novembre 1916, il ajoute « Bon officier de réserve, mais qui en dehors des colonnes semble préférer le séjour de la ville à celui du bled, ce qui ne lui enlève rien de ses qualités d’intelligence et de discipline et de zèle à s’instruire. »

En mars et avril 1917, le lieutenant Le Hoc prend part à de nouvelles opérations qui sont effectuées par les groupes mobiles de Fez et de Taza dans le secteur de Taza contre les contingents d’Abd-el-Malek.

Le 6 avril 1917, il participe à la prise du camp d’Abd-el-Malek à Taza.

Le 14 mai 1917, il intervient dans le combat de Der-Kollart puis dans celui de Tagueniet quatorze jours plus tard.

Maurice Le Hoc est remis à la disposition du ministre suivant une décision prise par le commissaire résident général commandant en chef du Maroc, décision enregistrée sous le n° 8922B à la date du 8 octobre 1917.

Promu capitaine de réserve à titre définitif le 14 octobre 1917, il rentre en France le 19 octobre 1917.

De nouveau mis à la disposition du résident général du Maroc par décision ministérielle du 19 novembre 1917, il repart pour le Maroc le jour de Noël.

Le capitaine Le Hoc est affecté au 2e bataillon de marche du Maroc le 4 janvier 1918. Il arrive à Fez cinq jours plus tard.

Le 1er avril 1918, Maurice Le Hoc prend le commandement de la compagnie blanche du 21e bataillon sénégalais.

Il fait partie des effectifs de la colonne de l’Arba-de-Tahala, dite des Ait  Mohand ou Yaya, effectifs qui partent de Fez le 3 avril 1918. Ce groupe mobile a pour mission de construire deux postes qui doivent protéger la route et la voie ferrée Fez-Taza en construction, des attaques des Beni-Ouaraïn.

La colonne est de retour le 18 mai 1918.

Le capitaine Le Hoc participe à une autre opération avec la colonne de Senhadja entre le 19 juin et le 13 juillet 1918.

Carte du Maroc

 Retour à la vie civile

Quelques jours après la signature de l’armistice, le gouvernement français construit progressivement la liste des cadres administratifs qui vont intervenir dans les trois départements de l’Alsace et de la Lorraine.

Maurice Le Hoc est envoyé à Haguenau dans la Basse-Alsace pour y exercer les fonctions d’administrateur de la direction des affaires militaires au commissariat général de la République à Strasbourg.

Démobilisé le 12 juillet 1919 par les soins du 71e R.I., il est nommé sous-préfet de cette commune, une fonction qu’il occupera durant dix ans.

L’ancien capitaine est mis hors cadre de l’armée le 20 mai 1922.

Il est rayé des cadres définitivement par décret en date du 27 novembre 1929 et par l’application  de l’article 10 de la loi du 25 janvier 1925.

En 1930, le sous-préfet d’Haguenau est nommé préfet du Tarn-et-Garonne, une charge qui doit prendre effet à compter du 15 mai 1930. Mais cette promotion reste sans suite, l’ancien officier du 149e R.I. devient chef du service central à la direction générale des services d’Alsace-Lorraine.

Maurice Joseph Le Hoc décède le 6 mai 1945 dans son domicile parisien au numéro 9 de la place Vauban. La veille, il venait de fêter son 65e anniversaire.

Les decorations du capitaine Le Hoc

Décorations obtenues :

Citation à l’ordre de la 43e Division n° 56  le 25 mai 1915 :

« Le 9 mai, a brillamment entraîné sa section sous un feu violent d’artillerie et d’infanterie. A repoussé une contre-attaque allemande dans la nuit du 9 au 10 mai malgré que l’effectif de sa section ait été réduit de moitié  »

Citation à l’ordre de la subdivision n° 30 en date du 24 août 1916 :

« A fait preuve d’une calme bravoure et d’un mépris complet du danger le 19 juin et les 3-4 juillet 1916, d’un remarquable courage en allant porter des ordres sous le feu de l’ennemi et dans des terrains difficiles, à des unités engagées en première ligne »

Citation à l’ordre de la subdivision de Fez en date du 23 juin 1917 :

« Officier d’une haute valeur. Au combat du 3 avril 1917, voyant la 11e compagnie vivement pressée par l’ennemi, s’est porté, avec ses mitrailleuses, au secours de cette unité avec une telle célérité que l’ennemi a été mis en fuite avant d’avoir atteint son but. »

Chevalier de la Légion d’honneur en date du 16 juin 1920.

Autres décorations :

Médaille coloniale agrafe Maroc.

Officier dans l’ordre marocain Ouissam Alouite.

Officier de l’instruction civique.

Chevalier du mérite agricole.

Maurice Le Hoc possède un dossier individuel de fonctionnaire de l’administration préfectorale consultable aux archives nationales enregistré sous la référence F/1bI/1091.

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Fiche signalétique et des services provenant du site des archives départementales de la ville de Paris.

Actes d'état civil lus sur le site des archives départementales du Calvados et de la ville de Paris.

La photographie représentant le lieutenant Le Hoc provient de la collection personnelle de J. Breugnot.

J.M.O. du 17e R.I.. S.H.D. de Vincennes. : Réf 26 N588/1

Petite revue bas normande de la guerre numéro du 16 juin 1915. Cette revue est consultable sur le site « Gallica ».

Petite revue Bas-Normande de la guerre

Historique du 2e bataillon de marche du Maroc.

Historique du 2e bataillon de marche du Maroc

Un grand merci à M. Bordes, à J. Breugnot, à A. Carrobi, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales du département du Calvados et de la ville de Paris.

27 septembre 2019

Ouest du bois en Hache, 25 septembre 1915 (5ème partie).

Officiers du 2e bataillon du 149e R

Le 25 septembre 1915, le 2e bataillon du 149e R.I., qui fait partie de la réserve de la 43e D.I., arrive avec beaucoup de retard sur ses positions de 1ère ligne pour soutenir correctement le 1er B.C.P. dans son opération offensive.

Des explications sont exigées par le responsable du 149e R.I. qui doit rendre compte à sa hiérarchie. Celle-ci cherche à savoir si les compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. sont responsables ou non de l’échec de l’offensive qui a eu lieu ce jour-là dans le secteur d’attaque du 1er B.C.P..

Le 7 octobre 1915, des rapports circonstanciés sont rédigés par les chefs des 7e et 8e compagnies du 149e R.I.. Les capitaines Guilleminot et Jeské donnent leur version des faits.

Rapport du capitaine Pierre Guilleminot de la 7e compagnie du 149e R.I. :

« Les dispositions initiales pour le 25 septembre 1915 étaient les suivantes :

Les 5e et 8e compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. sont dans la place d’armes CD.

Les 6e et 7e compagnies sont installées dans la T.D.A.. La 6e au nord du boyau Defrasse la 7e au sud.

Leur mission était de suivre étroitement le mouvement des compagnies de 1ère ligne du bataillon en passant par le boyau Defrasse.

À 12 h 25, heure de l’attaque, la compagnie est à la T.D.A.. À ce moment, le renseignement parvient de l’avant selon lequel la 5e compagnie, 6e en tête, commence à progresser. La 8e la suit. La 7e avance à son tour par le boyau Defrasse et rencontre la queue de la 8e, dans le boyau Moreau. Il est, à ce moment, environ 13 h 15.

La progression qui avait été assez rapide jusque-là va être considérablement ralentie. La compagnie suit le dernier peloton de la 8e qui progresse par Defrasse vers la sape 4. Le boyau est encombré de blessés qui reviennent. La marche est excessivement lente. Vers 14 h 00, nous pouvons arriver lentement à la sape 4.

Là, le mouvement est complètement arrêté. Dans la sape 4, il y a un peloton de la 8e du 149e R.I., mélangé à une section de mitrailleuses de chasseurs qui arrête tout mouvement dans la sape elle-même et dans le chemin creux en faisant de multiples mouvements d’aller et retour. J’en ai compté jusqu’à cinq.

Impossible d’aller à droite ou à gauche, dans le chemin creux, il est rempli de chasseurs du 1er bataillon qui ne bougent pas, la 1ère ligne ne dégageant pas.

Au moment de la contre-attaque allemande de 16 h 30, je tente d’envoyer un peloton par la sape 4’, pour aider la 5e compagnie du 149e R.I.. Le peloton ne peut avancer, car le chemin creux est archi bondé de chasseurs.

Ce n’est qu’à la nuit, et assez tard, vers 20 h 00 ou 21 h 00, que les chasseurs dégagèrent un peu le chemin creux, que je parviens à gagner, avec mille difficultés, par la sape 4 et la tranchée de départ. Cette dernière était d’ailleurs encore occupée par des éléments des chasseurs. »

Rapport du capitaine Martin Jeské de la 8e compagnie du 149e R.I. :

«  Le 25 septembre 1915, la 8e compagnie occupait les places d’armes C.D.. À 12 h 25, la compagnie a quitté les places d’armes pour se porter vers la 1ère ligne suivant les boyaux Cordonnier, Moreau et Defrasse. La compagnie a suivi étroitement la 5e compagnie du 149e R.I..

Les boyaux Moreau et Defrasse ont été encombrés par des fractions du 1er bataillon de chasseurs à pied, qui occupaient les boyaux. La progression a été très lente vu que les fractions du 1er B.C.P. n’avançaient pas. Après de très grandes difficultés, la compagnie a réussi à atteindre la sape 4 à 13 h 15. Vers 13 h 30, une section et demie de ma compagnie a été placée dans la parallèle de départ entre les sapes 4 et 3 bis ; le restant de ma compagnie est obligé de rester dans la sape 4. La parallèle au nord de la sape 3 bis était encore occupée par des fractions du 1er bataillon de chasseurs à pied. Le terrain, en avant de cette parallèle, était très battu par des mitrailleuses ennemies, ce qui, très probablement, a arrêté l’attaque de cette partie du 1er B.C.P.. ».

Ces deux rapports sont rapidement remis à leur commandant pour qu’il puisse, à son tour, écrire le sien.

Carte 1 journee du 25 septembre 1915 (5e partie)

Legende carte 1 journee du 25 septembre 1915 (5e partie)

Rapport du commandant Schalck du 2e bataillon du 149e R.I. :

« Il ressort des rapports ci-joints des capitaines commandants les 7e et 8e compagnies, que la progression des unités du 2e bataillon du 149e R.I. dans l’attaque du 25 septembre dernier a été arrêtée et considérablement retardée par des éléments du 1er B.C.P. qui stationnait dans le chemin creux et dans la sape 4.

Ces éléments comprenaient deux sections de mitrailleuses et des sections de la compagnie de chasseurs placée avant l’attaque, dans le boyau Moreau.

La 5e compagnie du 149e R.I. et une partie seulement de la 8e compagnie ont pu les dépasser, alors qu’elles auraient dû les suivre. Le reste de la 8e (2 sections ½) et la 7e compagnie qui marchait exactement dans ses traces, furent non seulement arrêtés par ces éléments, mais encore refoulés vers l’arrière par les deux sections de mitrailleuses de chasseurs, ainsi que l’avait déjà signalé le chef de bataillon Schalck dans son rapport.

De plus, la 5e compagnie du 149e R.I. et la fraction de la 8e compagnie qui ont pu atteindre la parallèle de départ au nord et au sud de la sape 4 l’ont trouvé remplie de chasseurs, ce qui prouve péremptoirement que les différentes vagues que devait lancer le 1er B.C.P. n’avaient pu toutes sortir de la parallèle.

Le 2e bataillon qui devait suivre le débouché des chasseurs ne peut donc être incriminé en rien de la non-réussite de l’attaque dans cette partie du secteur, battu de front et d’enfilade par un tir intense d’artillerie et de mitrailleuses et dont les défenses accessoires ennemies étaient presque intactes.

Au moment de la contre-attaque allemande, vers 16 h 30, ce sont des unités du 149e R.I. qui avaient pu réussir à prendre place dans la parallèle de départ où se trouvait le chef de bataillon. C'est-à-dire la 5e compagnie et la section de la 8e compagnie qui sont sorties de la tranchée sur l’ordre de leur chef de bataillon et ont refoulé l’ennemi, laissant 4 officiers et environ 100 hommes sur le terrain. »

À la lecture de ce rapport, il est clairement établi que le 2e bataillon du 149e R.I. ne fut en aucun cas responsable de l’échec de l’attaque du 25 septembre 1915 vis-à-vis de la tâche qui lui avait été donnée.

Il est intéressant d’aller faire un tour du côté du J.M.O. du 1er B.C.P. pour savoir ce qui est écrit à propos de ces évènements. Le bataillon de Chasseurs ne s’attribue pas les torts. Seul l’état des boyaux est rendu responsable du retard  du bataillon Schalck.

« Le bataillon du 149e R.I., retardé dans sa marche par l’état des boyaux, n’arrive dans la parallèle de départ que vers 15 h 30. »

Le J.M.O. de la 85e brigade ne reprend qu’une seule phrase qui résume de manière très imprécise la réalité du terrain évoquée par les deux officiers du 149e R.I.. Ce J.M.O. ne fait que la synthèse des informations pour les unités qui la composent, sans chercher à donner le détail de chaque étape des combats.

« A 15 h 00, le colonel du 149e R.I. rend compte que le bataillon Schalck  a déjà été engagé par le commandant du 1er B.C.P. et que sur la demande du commandant du 31e B.C.P.. Il engage le bataillon Chevassu pour appuyer l’action du 31e B.C.P.. »

En finissant avec celui de la 43e D.I., le 149e R.I. est juste en soutien, aucun rôle majeur pour lui ! Il s’agit pour le J.M.O. de donner une vision d’ensemble des gains et des grands moments  sans entrer dans les détails.

« Au nord, le 1er B.C.P. résistait énergiquement aux contre-attaques ennemies et se maintenait en g11 g12. Il avait été renforcé à sa gauche par un bataillon du 149e R.I.. »

Que peut en apprendre la population dans la transcription qui lui est faite, du résumé du 25 septembre 1915 dans la presse nationale ? Rien de précis. Pourtant la journée fut dure  pour le 149e R.I..

Les rapports rédigés par les officiers présents sur le terrain sont incomparablement plus riches et donnent une vision de la réalité de la guerre à des années lumières de la presse où même des J.M.O. des niveaux supérieurs.

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/4

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.

J.M.O. du 1er B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/2.

Fond de carte du secteur de Noulette construit par V. le Calvez.

La carte qui indique les emplacements et les mouvements des compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. a été construite à partir de la lecture des trois rapports rédigés par les officiers du bataillon. Cette carte ne doit avoir qu’une valeur indicative.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

20 septembre 2019

Pierre Fernand Bonnet-Casson (1887-1916).

Pierre Fernand Bonnet-Casson

Natif du département de l’Isère, Pierre Fernand Bonnet-Casson voit le jour le 17 février 1887 dans la commune de Vienne.

Sa mère, Louise Rolland, est âgée de 25 ans lorsqu’elle lui donne vie. Elle exerce le métier de femme de ménage.

Son père se prénomme Marie Joseph François Fernand. Il travaille comme laveur de laine dans une entreprise de la région. C’est un homme âgé de 29 ans. Lorsqu’il se rend à la mairie pour signer le registre d’état civil, il est accompagné des deux témoins, Michel Magrand et Charles Plantier. Le premier est tonnelier, le second négociant.

Quelques années plus tard, le jeune Fernand quitte l’école communale en sachant lire, écrire et compter. Sa fiche signalétique et des services nous apprend qu’il possède un degré d’instruction de niveau 3 et qu’il a été formé au métier de coiffeur, peut-être par son oncle maternel, Jean Rolland.

Doué pour le vélo et sportif de bon niveau, Fernand s’inscrit à plusieurs courses en tant qu’amateur.

En 1907, il termine 9e du Paris-Amiens. L’année suivante, il finit 2e du Paris-Amiens, 2e du Paris-Auxerre, et 1er du Paris-Évreux.

1908 est aussi l’année où il est appelé sous les drapeaux. Fernand Bonnet-Casson doit se rendre à Épinal pour accomplir ses devoirs militaires dans une des compagnies du 149e R.I.. Il arrive au corps le 8 octobre.

Un peu moins de deux ans plus tard, le 25 septembre 1910, le soldat Bonnet-Casson est envoyé dans la disponibilité de l’armée active avec l’obtention de son certificat de bonne conduite. Six jours plus tard, il passe dans la réserve de l’armée active.

Installé au numéro 4 de la rue Saint Vincent de Paul à Paris, Fernand partage à nouveau son temps entre son métier de coiffeur et ses courses de vélo. Il est devenu coureur indépendant. Toutes les épreuves auxquelles il participe sont courues dans cette catégorie.

En 1911, il termine 3e de la boucle Paris-Château-Thierry-Paris.

Cette année-là, Fernand Bonnet-Casson prend également part au tour de France des indépendants. Il doit également faire sa 1ère période d’exercice au 149e R.I. entre le 22 novembre et le 14 décembre.

Le 26 décembre, il épouse Marie Thérèse Soulhac à la mairie du 10e arrondissement. À cette période de sa vie, son père habite Lyon où il travaille comme conducteur de fiacre. Sa mère n’est plus de ce monde et son frère Étienne, alors âgé de 23 ans, est sous les drapeaux comme soldat au 60e R.I. de Besançon.

En 1912, Fernand Bonnet-Casson gagne le Paris-Honfleur.

L’année suivante, il est 11e du Paris-Roubaix, 3e du Paris-Beaugency puis 1er du grand prix de Juvisy.

Le 1er mars 1914, Marie Thérèse donne naissance à une petite fille qui est prénommée Jeannine Antoinette Fernande. Le couple Bonnet-Casson vit au numéro 17 de la rue de l’Aqueduc. Cette année-là, les courses s’enchaînent pour Fernand. Il finit 2e du Paris-Gaillon, 13e du Paris-Nancy, 17e du grand prix de Touraine, 10e du Paris-Châteauroux, 3e du Paris-Roubaix, 1er du Paris-Calais et 3e du championnat national.

La saison n’est pas tout à fait terminée qu’il faut y mettre fin. Fernand ne sait pas encore que le monde est à la veille d’un grand cataclysme humain. Comme des dizaines de milliers d’hommes, il est rappelé par ordre de mobilisation générale. L’Allemagne et la France sont sur le point de se déclarer la guerre. En tant que réserviste, Fernand doit rejoindre la caserne Coursy à Épinal le 4 août 1914. Dès son arrivée au dépôt, il est affecté à la 10e compagnie. Le soldat Bonnet-Casson tombe rapidement malade.

Il est impossible de savoir ce qui lui est arrivé au sein du régiment. Son registre matricule est insuffisamment détaillé pour nous puissions être bien renseignés sur son parcours de combattant. À quelles attaques menées ou subites par le 149e R.I. a-t-il participé ? Quand est-il tombé malade ? Combien de temps est-il resté à l’arrière avant d’être obligé de retourner dans la zone des armées ? Où a-t-il été soigné ? Pour l’instant, il n’y a pas de réponses satisfaisantes à donner à toutes ces questions.

Cependant, grâce à la lecture d’un article de presse publié quelques jours après sa mort, nous pouvons tout de même obtenir quelques détails sur sa vie de soldat. L’article nous informe qu’il est tombé rapidement malade après avoir revêtu son uniforme de combattant. Fernand Bonnet Casson est ensuite devenu infirmier à l’hôpital où il fut soigné, avant d’être obligé de repartir dans la zone des armées pour y réintégrer son ancienne unité.

En mars 1916, nous le retrouvons dans le secteur de Verdun. Le 3e bataillon du 149e R.I., sous les ordres du commandant de Witkowski, est en réserve du côté du village de Fleury-devant-Douaumont. La 10e compagnie est commandée par le capitaine Gérard. Elle est placée dans un secteur régulièrement bombardé. Le 10 mars, Fernand est mortellement blessé, il décède le lendemain.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Carte journee du 12 mars 1916 a1

Le soldat Bonnet-Casson est dans un premier temps enterré dans le cimetière militaire de Souville. Son lieu de sépulture actuel reste inconnu.

Le journal sportif parisien « l’auto » dirigé par Henri Desgranges lui rend hommage dans son édition du 22 mars 1916 :

« C’est un de nos plus modestes, mais un de nos meilleurs champions indépendants Fernand Bonnet que nous pleurons aujourd’hui. Son frère Étienne, glorieux mutilé de cette guerre, également très bon coureur indépendant, nous en apporta hier, la triste nouvelle. Le 11 mars dernier, mortellement frappé de plusieurs balles, il survécut quelques heures encore, le temps de confier à un camarade ses volontés in extremis pour être transmises à sa jeune femme. Né à Vienne (Isère), le brave Bonnet était âgé de 29 ans. Il débuta dans les courses cyclistes en 1907. Coiffeur de son état, il était un des fidèles de notre annuel championnat de la coiffure et c’est dans une de ces épreuves qu’il fit ses premiers pas sportifs. C’était un concurrent d’une loyauté absolue qui jouissait de l’estime de tous ses camarades. D’abord membre de feue la société athlétique de Montrouge, puis du club athlétique de la société générale, le vaillant champion était inscrit, avant la guerre, au vélo-club de Levallois. C’est sous les couleurs de ce dernier qu’il gagna, en 1913,  Paris-Calais, Paris-Honfleur et le grand prix de Juvisy.

À la mobilisation, Fernand Bonnet fut intégré à la 10e compagnie du 149e R.I. comme cycliste. Il tomba bientôt malade et fut évacué sur un hôpital du front où on le soigna pour une crise d’entérite.

Lors de sa convalescence, il vint nous rendre visite et nous fit part de son intention de solliciter son passage dans l’aviation. En attendant, il fut nommé infirmier à l’hôpital même où il avait été soigné. Mais une commission de majors le déclara de nouveau apte au service armé et Bonnet fut versé dans une formation d’infanterie sur le front. »

Décoration obtenue :

Citation à l’ordre de la brigade n° 36 du 24 mars 1916.

« Très bon soldat, a fait preuve de calme et de bravoure au combat du 10 mars 1916, a été mortellement blessé au cours de l’action. »

Son épouse, Marie Thérèse Soulhac, se remarie le 29 octobre 1932.

Sources :

La fiche signalétique et des services de Fernand Bonnet-Casson a été consultée sur le site des  archives départementales du Rhône.

Les sites « Gallica » et « mémoire des hommes » ont également été visités pour réaliser cette petite notice biographique.

Le portrait de Fernand Bonnet-Casson est extrait de la revue l'auto-vélo du 13 juillet 1914  publié sur « Gallica ».

Le palmarès de ce coureur cycliste a été trouvé sur le site suivant :

Logo du site cyclistes dans la Grande Guerre

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carrobi et aux archives départementales du Rhône.

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