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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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verdun 1916
19 mai 2017

Souvenirs de la bataille de Verdun de Paul Portier (3e partie).

Paul_Portier_

Prière pour les morts de Verdun

Très marqué par son expérience à Verdun, le soldat Paul Portier de la 4e section de la 1ère compagnie de mitrailleuses du 149e R.I. compose la prière suivante :

« Dans cet enfer, il arrive cependant que tout se tait un instant, comme si la providence, prise de pitié pour les humains qui s’entre-déchirent, voulait leur laisser un moment de répit.

Depuis les quelques jours que nous vivons dans ce fort de Vaux, j’aspire à me libérer de cette vie souterraine pour aller respirer au-dehors, mais en plein jour, il ne faut guère y songer.

Un soir, profitant d’une accalmie, je suis monté par une brèche ouverte par les obus, sur le talus du fort. Les canons sont maintenant presque silencieux et la nuit étoilée est sereine ; mais pour combien de temps, hélas ?

Des fusées jaillissent tout le long du front, de ce front sanglant où tant d’hommes sont déjà tombés. Combien sont-ils qui dorment d’un sommeil que le sort ne leur assure même pas tranquille. Tout est bouleversé et ces hommes déchiquetés hier, les obus sans pitiéles martyriseront encore demain, tragique destin de ceux qui sont là pour mourir.

En pensée, j’évoque cette armée sanglante et mon âme désemparée est anéantie de douleur. Pour ces êtres, je veux lancer vers le ciel une prière, la prière la plus naïve, celle qu’ils ont tous récitée,et à genoux, j'implore Dieu.

« Notre père, qui êtes aux cieux, que votre nom soit sanctifié, que votre règne arrive, que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel… »

Ô seigneur, accueillez ces morts près de vous, ouvrez-leur votre ciel.

S’ils furent peut-être des incroyants, daignez les recevoir cependant dans vos bras. Penchez-vous sur leurs souffrances et leurs sacrifices.

Oui seigneur ! Oubliez s’ils vous ont méconnu, considérez la noblesse de leur mort et pardonnez leurs fautes.

Je vous offre pour eux mes souffrances passées comme celles qui vont venir. J’implore pour eux la clémence.

Pardonnez-leur s’ils ont succombé à la tentation. Donnez-leur la paix. »

Sources :

Témoignage de Paul Portier, soldat du 149e R.I., inédit, collection personnelle.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et à la mairie de Vienne, sans qui l’auteur de ce témoignage n’aurait pas pu être identifié.

5 mai 2017

Souvenirs de la bataille de Verdun de Paul Portier (2e partie).

Paul_portier_2

Voici la 2e partie du témoignage de Paul Portier qu’il consacre à son passage à Verdun.

Après une période de repos aux casernes Bevaux et à Dugny, sa compagnie de mitrailleuses se trouve de nouveau engagée dans le secteur du fort de Vaux. Il écrit ceci :

« Le 30 mars à 6 h 00, le régiment se met en marche pour Belrupt où il stationne la journée. Nous devons relever, dans la nuit du 30 aux 31, le 159e R.I.. Dès 19 h 00, nous nous dirigeons d’une façon générale sur la ferme de Bellevue, en passant par la baie Houry, le Tillat et nous prenons ensuite le boyau qui conduit au Tunnel de Tavannes.

Nous empruntons le tunnel sur toute sa longueur (1500 m) et le boyau, ou plutôt l’ébauche de boyau qui mène au fort de Vaux, en passant par la Laufée et les emplacements de batteries de Damloup. La compagnie effectue ses mouvements assez lentement, si bien que nous arrivons au fort qu’au lever du jour. Les abords sont très violemment bombardés.

Carte_1_Paul_Mortier_fin_mars_1916

Legende carte 1 fin mars 1916 Paul Portier

La 1ère section met ses deux pièces de batteries sur la pente nord du ravin de Damloup près du fort de Vaux. La 2e près de la 1ère, la 3e à mi-côte nord du ravin de Damloup ;la 4e, la mienne, est en réserve au fort.

Quel spectacle que l’intérieur de ce fort ! Des casemates sont remplies de blessés, il y a des morts dans les couloirs obscurs.

Le marmitage s’intensifie de plus en plus, sa violence est inouïe. La terre est labourée, les Allemands veulent écraser ce fort qui résiste toujours et ils semblent vouloir concentrer sur lui un effort formidable.

Malgré l’intensité de ce bombardement et l’abrutissement qui en résulte pour nous, je songe qu’en ce jour du 31 mars, je viens d'atteindre mes 21 ans.

Le 1er et le 2 avril, le marmitage redouble encore de violence. Le fort est secoué dans ses fondements par les explosions des obus de gros calibres qui se succèdent sur un rythme accéléré.

Nous souffrons terriblement de la soif, les réserves d’eau du fort sont conservées en cas d’encerclement et le ravitaillement ne nous arrive que difficilement.

Dans la nuit du 4 aux 5, avec mon ami Poulet et mon camarade Canque, nous décidons d’aller chercher de l’eau d’une source qui se trouve, d’après les indications que nous possédons, à 100 ou 150 m en avant de nos tranchées.

Nous quittons le fort vers 20 h 00, malgré un marmitage assez violent. Pour sortir, il faut faire vite, car les éclatements se succèdent à moins d’une minute d’intervalles et les Allemands connaissent bien les issues.

Après avoir averti notre première ligne, nous cheminons en avant, tantôt rampant, tantôt nous courbant. Nous ne connaissons pas exactement le lieu où se trouve la source. La marche est très pénible. Les fils barbelés nous entravent à chaque pas. Nous sommes exténués.

Les Allemands viennent aussi, paraît-il, puiser à cette source et nous risquons de les rencontrer dans notre marche rampante. Les fusées éclairantes nous obligent à nous déplacer au sol pour ne pas être vus. Le moindre bruit peut nous être fatal.

Si nous ne trouvons pas la source, du moins avons-nous un peu d’eau dans un trou d’obus où baigne un cadavre.

Nous revenons à nos tranchées sans avoir pu remplir nos bidons et nous nous arrêtons un moment parmi nos camarades de la 3e section.

Un obus tombe près de nous, sur le bord du parapet, je suis à demi enterré et mon ami Poulet s'effondre près de moi, frappé à mort. Dans mes bras, il rend le dernier soupir, un gros éclat lui a fait dans le dos une blessure béante.

Canque n’a qu’une égratignure à la joue. Moi, je suis indemne, mais abattu. La déflagration nous a rendus sourds.

Pour en savoir plus sur Joseph Poulet et André Canque, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Joseph_Poulet_et_Andr__Canque

Nous rentrons au fort après être passés à la redoute où se trouve le P.C. de la compagnie.

Le bombardement continue toujours de manière aussi violente.

Dans la nuit du 5 au 6 avril, nous sommes relevés par la compagnie de mitrailleuses de la 85e brigade et les autres sections par le 323e R.I..

Nous descendons en réserve dans le tunnel et, le 9 à 16 heures, nous revenons après relève par le 28e R.I. à Dugny où nous cantonnons.

Le 10, le régiment, dont les rangs sont clairsemés, se rend sur la route entre Lempire et Nixeville pour embarquer. Mais au dernier moment, nous recevons l’ordre verbal de rejoindre nos cantonnements de Dugny-Landrecourt. Sur tout le front s’est déchaîné un bombardement d’une extrême violence et il ne faut pas chercher plus loin la cause de notre non-embarquement aujourd’hui. 

Pendant notre absence de Dugny, l’artillerie allemande a bombardé le village avec des pièces de longue portée.

Enfin, le 11, nous quittons de nouveau Dugny pour aller embarquer sur la route de Verdun à Bar-le-Duc. Cette fois-ci, nous ne faisons pas demi-tour. Le soir, à la nuit, nous cantonnons à la Savonnière près de Bar-le-Duc, pour y prendre quelques jours de repos avant un embarquement en chemin de fer.

Notre mission devant Verdun est terminée. Nous venons de vivre des heures tragiques dont le souvenir restera puissamment gravé dans nos mémoires. Pourrait-on oublier ces heures si douloureuses, nous qui les avons vécues ? Pourrait-on ne plus entendre le grondement formidable des canons, les gémissements des blessés, les râles d’agonie de ceux qui sont morts ?

« Non possumus », le souvenir est là ! Il s’est incarné en nous et demeure.

Pour en savoir plus sur les déplacements et les positions occupées par les éléments du 149e R.I. durant les journées évoquées dans le témoignage de Paul Portier, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte_2_temoignage_Paul_Portier

Sources :

Témoignage de Paul Portier, soldat du 149e R.I., inédit, collection personnelle.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et à la mairie de Vienne, sans qui l’auteur de ce témoignage n’aurait pas pu être identifié. 

28 avril 2017

Louis Félicien Richard (1891-1916).

Louis_F_licien_Richard

Louis Félicien Richard voit le jour le 13 mai 1891 à Dounoux. Ses parents, Louis Nicolas Richard et Marie Eugénie Didier, tous deux d’origine vosgienne, se sont mariés le 24 janvier 1880 à Uriménil. Louis Félicien sera le septième d’une fratrie de 9 enfants. Son petit-frère, Charles René décède dans sa première année. Le père de cette famille nombreuse travaille comme fermier. Il accédera à la propriété.

Le registre matricule de Louis Félicien Richard, qui peut se lire sur le site des archives départementales des Vosges, n’est pas renseigné sur son parcours militaire. Seules les informations concernant son état civil, son signalement et la décision prise par le conseil de révision sont notées.

Cette fiche nous fait savoir qu’il est inscrit sous le numéro 97 du canton de Xertigny et qu’il a été classé dans la 1ère partie de la liste en 1912.

Nous apprenons également que Louis Félicien exerce la profession de cultivateur et que son degré d’instruction est de niveau 3.

La date de son incorporation n’est pas connue. A-t-il attendu l’âge légal pour effectuer son service militaire ? A-t-il signé un engagement volontaire ? Est-il monté en grade avant le conflit ou à l'occasion du conflit ? Combien de temps a-t-il passé au 149e R.I. ? Au front ? Toutes ces questions restent, pour l’instant, sans réponses.

Ce qui est certain, c’est que Louis Félicien Richard porte l’uniforme lorsque les hostilités contre l’Allemagne débutent aux premiers jours du mois d’août 1914.

En février 1916, il est adjudant à la 1ère compagnie du 149e R.I. sous les ordres du capitaine Gaston de Chomereau de Saint-André.

Début mars 1916, sa compagnie est à Seigneulles, prête à monter en première ligne dans le secteur de Verdun.

Louis Félicien Richard trouve la mort à la suite d’un accident survenu au cours d’un exercice de tir à la grenade, le 5 mars 1916. Il était âgé de 24 ans.

Le sergent-major Auguste Silvestre et le soldat Joseph Bocquet, tous deux du 149e R.I., confirment son décès qui est enregistré le 18 mars 1916.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Seigneulles

L’adjudant Richard est, dans un premier temps, inhumé au cimetière communal de Seigneulles. Le corps de ce sous-officier a certainement été restitué à la famille après le conflit.

Louis Félicien Richard est inscrit au tableau spécial de la Médaille militaire, à titre posthume, dans le J.O. du 7 juin 1921. « Sous-officier d’une bravoure réputée. Est mort glorieusement pour la France, le 5 mars 1916, à Seigneulles, en faisant vaillamment son devoir. Croix de guerre avec étoile d’argent »

Le nom de cet homme est inscrit sur le petit monument aux morts de la commune d’Uzemain.

Monument_aux_morts_d_Uzemain_Louis_F_licien_Richard

Louis Félicien Richard est resté célibataire et n’a pas eu de descendance.

Sources :

Les sites « Mémoire des hommes », « Généanet », « Gallica » et celui des archives départementales des Vosges ont été consultés.

Le portrait de Louis Félicien Richard et la photographie du monument aux morts de la commune d’Uzemain ont été trouvés sur le site « Généanet ».

Les circonstances de la mort de ce sous-officier ont été trouvées sur son acte de décès.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carrobi, à M. Lepage, à la mairie d’Uzemain et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

21 avril 2017

Un musicien brancardier du 149e R.I. au cœur de la bataille de Verdun.

Louis_Cretin

Le soldat Louis Cretin, musicien brancardier à la C.H.R. du 149e R.I. depuis le début du conflit, évoque, dans son témoignage, ce qu’il a vécu lors de son passage à Verdun.

Pour lire ce qu’il a écrit sur le sujet, il suffit de cliquer une fois  sur l’image suivante.

La_bouffarde_de_M_sieur_Drouot_

Il raconte également l’après Verdun. Un certain relâchement avec la discipline laisse imaginer la dureté du vécu de ces hommes durant les jours passés en 1ère ligne.

Pour lire ce qu’il dit sur ces évènements, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

149e_R

Un grand merci à M. Bordes, D. Browarsky, A. Carobbi, A Chaupin et à T. Cornet., ainsi qu’à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

14 avril 2017

Albert Marquand… Souffrances à Verdun.

Albert_Marquand

Un chaleureux merci à F. Barbe qui nous offre ici la possibilité de lire un large extrait d’une des lettres rédigées par le caporal Albert Marquand de la 12e compagnie du 149e R.I..

Mars 1916, Albert Marquand s’apprête à rejoindre une compagnie du 149e R.I..

Il est à la 32e compagnie du 55e R.I. depuis janvier 1916, une unité qui cantonne dans la petite commune ardéchoise de Bourg-Saint-Andéol, lorsqu’il apprend qu’il va devoir repartir dans la zone des combats.

Le 17 mars, il quitte cette compagnie avec 4 sergents, 8 caporaux et 40 soldats.

Bourg_Saint_Andeol

Tous ces hommes ont reçu l’ordre de se rendre au dépôt régimentaire de Pont-Saint-Esprit pour y être « habillé de neuf ». Une fois équipés, ils devront rejoindre le dépôt du 58e R.I.. Ils arrivent à Avignon le 18 mars. Le départ pour le secteur du front est prévu quatre jours plus tard. Cinq cents hommes quittent la caserne Chabran, dans la soirée du 22 mars, pour se rendre à la gare de la préfecture vauclusienne, direction de Verdun…

Albert Marquand arrive à destination le 26 mars 1916. Il est aussitôt affecté à la 10e escouade de la 12e compagnie du 149e R.I..

12e_compagnie_du_149e_R

Il apprend que le régiment a été fortement éprouvé au cours d’un premier passage en première ligne. Les renforts en provenance d’Avignon servent à combler les pertes du régiment. Albert peut encore bénéficier de quelques jours de répit avant de subir de près les bombardements allemands.

Sa compagnie, sous les ordres du capitaine Chauffenne, quitte Dugny dans la nuit du 29 au 30 mars pour se rendre à Belrupt. Albert Marquand s'apprête à monter en 1ère ligne dans la nuit du 30 au 31 mars 1916.

Carte_1_albert_Marquand

Legende_carte_1_Albert_Marquand

Il passe plusieurs jours près du fort de Vaux dans une zone particulièrement exposée aux bombardements.

Le 2 avril 1916, le caporal Marquand est à l’abri, en « relative sécurité », sous le tunnel de Tavannes.

Voulant rassurer les siens, il écrit une petite carte-lettre dans « un style télégraphique ».

« Bien reçu votre lettre et vos journaux. Sommes sous un tunnel de chemin de fer depuis deux jours. Venons de passer 6 jours en première ligne. Nous avions souffrances effroyables, bombardement terrible. Pas mangé depuis 48 heures. Pour boire, nous sucions les gouttes qui filtraient au-dessus du fort. Compagnie bien réduite, sommes dégoûtants, éreintés. On ne trouve rien à acheter. Je suis encore sous l’effet du bombardement, abruti… »

Le 10 avril, le caporal Marquand est de nouveau à Dugny. Il dispose d’un peu plus de temps pour écrire. Il raconte ses journées de souffrances dans le secteur du fort de Vaux dans une lettre adressée à la famille.

« Mes biens chers,

… Je vais vous raconter à présent mes pérégrinations si ça peut vous intéresser ! Nous sommes montés en ligne le 30 mars à 21 h 00 et nous en sommes descendus le 9 avril au matin. Ce qui fait 10 jours et 11 nuits. Dans ce laps de temps, j’ai plus souffert que dans tout mon séjour sur le front. D’abord pour faire la relève, nous avons fait au moins 15 km, dont trois à proximité des Allemands. Nous sommes arrivés à 1 h 00 après avoir perdu quelques hommes, car ça crachait !!! Notre place se trouve à 20 mètres devant le fossé du fort de Vaux.

Nous nous sommes immédiatement couchés dans la tranchée qui était démolie par les obus. Les Allemands ont commencé un bombardement infernal qui a duré 2 jours et 2 nuits avec obus de 210 et 320. Nous sommes restés accrochés là 80 heures, attendant la mort à chaque instant. Mon escouade a été enterrée 2 fois. J’ai eu deux tués et cinq blessés. Moi-même, j’ai reçu un éclat à la cuisse qui me faisait souffrir, mais sans gravité. Les Allemands envoyaient des obus lacrymogènes qui faisaient bien souffrir. Inutile de parler de manger, ni de boire, les cuistots ne venaient pas avec ce train d’enfer, ce qui fait que nous avons eu cependant des pommes de terre en salade, un bout de bœuf froid et un quart de café froid dans la nuit du 3e jour. Et cela a été comme ça, jusqu’à la relève. On avait à manger et à boire une fois par 24 heures, à minuit. C’est de la soif que nous avons souffert, nous avons été jusqu’à sucer les gouttelettes qui suintaient au mur du fort, lorsqu’on était en réserve.

J’ai été faire 2 patrouilles en avant vers 2 h 00 et il n’est rien arrivé de fâcheux. Lorsque nous avons été relevés, il fallait faire 300 m au pas de course sur un terrain couvert de cadavres et battu par les obus. Au bout de 50 m, mes jambes ont fléchi, j’ai trébuché et je me suis allongé à côté d’un cadavre pour reprendre haleine. Si un obus était tombé à ce moment-là, j’étais fait ! Puis je suis reparti en trébuchant, comme ivre, la tête lourde !… »

Albert Marquand fait savoir, à la fin de sa lettre, qu’il reste une soixantaine d’hommes valides sur 120 à la 10e compagnie du 149e R.I. lorsque celle-ci a rejoint Dugny le 9 avril 1916.

Pour en savoir plus sur Albert Marquand, il suffit de cliquer une fois sur l'image suivante.

Albert_Marquand

Pour lire l’analyse d’Arnaud Carobbi de l’ouvrage « Et le temps, à nous, est compté », il faut cliquer une fois sur l’image suivante.

Site_Arnaud_Carobbi

Sources :

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

« Et le temps,à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach. C'est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011.

Un grand merci à M. Bordes, à R. Mioque, à F. Barbe, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

7 avril 2017

Une citation à l’ordre de l’armée pour la section du sous-lieutenant Daufresne de la Chevalerie.

Section_Daufresne_de_la_Chevalerie

Le 149e R.I. n’obtient pas de citation à l’ordre de l’armée pour son engagement dans le secteur de Verdun. Seules les 4 compagnies du 1er bataillon du régiment ont été véritablement sollicitées durant les combats en 1ère ligne.

Les 1ère et 4e compagnies ont lancé une attaque le 9 mars 1916 sur la partie du village de Vaux-devant-Damloup occupée par les Allemands.

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte_journee_du_9_mars_1916_2

Le 1er bataillon du 149e R.I. a tenté, le 2 avril 1916, de reprendre ce village qui avait été perdu quelques jours auparavant.

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Carte_2_journee_du_2_avril_1916

Une section du régiment a été récompensée. Le général qui commande la 2e armée cite à l’ordre de l’armée la 1ère section de la 1ère compagnie du 149e R.I..

Le  9 mars 1916, la 1ère compagnie du 149e R.I. enlève aux Allemands une partie du village de Vaux-devant-Damloup qu’ils occupent. Cette compagnie parvient à conserver cette zone.

Le capitaine Gaston de Chomereau de Saint-André évoque l'événement dans son témoignage :

« La section de la Chevalerie que je suis progresse rapidement. Elle saute sur le village, bouscule les Allemands et les refoule jusqu’au moulin où elle s’est arrêtée. »

La 1ère section de cette compagnie, qui s’est distinguée d’une manière particulière, est citée à l’ordre de l’armée suite à ce fait d’armes, dans les termes suivants :

« Brillamment enlevée par son chef (sous-lieutenant Daufresne de la Chevalerie), est entrée, le 9 mars 1916, dans un village occupé par les Allemands, a chassé ces derniers des maisons qu’ils occupaient et a coopéré efficacement au rétablissement de la situation dans cette partie du secteur. Par son attitude ultérieure, a interdit à l’ennemi toute progression. Est allée chercher sous le feu et a rapporté, dans nos lignes, 52 caisses de grenades abandonnées en terrain découvert. A perdu le 5e de son effectif. »

Le capitaine de Chomereau de Saint-André, responsable de la 1ère compagnie durant l’attaque, certifie que les soldats de la 1ère section nommés dans le tableau suivant étaient bien tous présents ce jour-là.

Compostion_de_la_section_du_sous_lieutenant_Daufresne_de_la_Chevalerie

Le 19 mai 1916, le général Gouraud, qui commande la IVe armée, passe en revue de détachements les 6e et 21e C.A..

Le 10e B.C.P. et le 1er bataillon du 149e R.I. sont conviés à participer à cet évènement qui doit avoir lieu à 2,5 km au sud de la gare de Suippes. Le fanion de la 1ère section de la 1ère compagnie et le capitaine de Chomereau de Saint-André sont décorés pour leurs actions menées dans le secteur de Verdun. À cette occasion, plusieurs autres décorations sont remises par le général Gouraud.

Decoration du capitaine de Chomereau de Saint-Andre

Sources :

Historique du 149e R.I..

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

Témoignage du capitaine de Chomereau de Saint-André visible sur le blog du 149e R.I..

Informations qui proviennent des archives personnelles de T. de Chomereau.

Le site de la C.I.C.R. a été consulté pour confirmer la captivité des soldats qui sont inscrits dans le tableau et qui ont pu être retrouvés  

La photographie du fanion de la 1ère section de la 1ère compagnie du 149e R.I. qui se trouve sur le montage a été réalisée par T. de Chomereau.

Le cliché représentant le capitaine de Chomereau est la propriété de la famille.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi,  à T. de Chomereau, à M. Porcher, au C.I.C.R. et au S.H.D. de Vincennes.

24 mars 2017

Somme-Vesle, Poix (du 15 avril 1916 au 18 avril 1916).

                 Gare_de_Chalons_sur_Marne

Après un séjour éprouvant à Verdun, le 149e R.I. et toute la division sont envoyés dans un secteur calme, à l'arrière, pour être reconstitués. Mais avant d'atteindre la zone où les effectifs seront complétés et entraînés, il y aura une longue marche à effectuer pour rejoindre les nouveaux cantonnements. 

15 avril 1916 (suite)

Les bataillons du 149e R.I. ont embarqué dans des wagons à bestiaux à la gare de Nançois-Tronville, pour prendre la direction de Châlons-sur-Marne dans la matinée.

L’analyse d’une lettre rédigée par le caporal Marquand, ainsi que la lecture d’un court passage du témoignage laissé par le mitrailleur Paul Portier permettent de se faire une idée de ce qui s’est passé durant cette partie de la journée pour une partie des éléments du 149e R.I..

Le premier écrit :

« … Débarqués à Châlons, nous avons traversé toute la ville où les habitants nous regardaient avec des airs apitoyés et nous donnaient des oranges et des cigarettes. Châlons a l’air d’une ville très bien. Bref, ce soir-là, nous sommes allés cantonner à Sarry, à 9 km de là… »

Le second raconte :

« Le 15 avril, après quelques jours de repos à Savonnières, nous avons embarqué en chemin de fer à Nançois-Tronville. Nous venons ainsi de quitter le secteur de Verdun. Le même jour, nous débarquons à Châlons-sur-Marne et cantonnons la nuit à Sarry. »

Le J.M.O. de la 85e brigade nous fait savoir que l’état-major de la  brigade est installé, dans la soirée du 15 avril, à Somme-Vesle avec les 1er et 2e bataillons du 149e R.I..

16 avril 1916

Le 3e bataillon du 149e R.I. et la 1ère compagnie de mitrailleuses du capitaine Vial, qui ont pris la veille leurs quartiers dans le petit village de Sarry, s'apprêtent à partir en début de matinée. Ils prennent la direction de Somme-Vesle.

Les observations fournies par Paul Portier et par Albert Marquand permettent de suivre le parcours effectué par ces éléments du 149e R.I. durant cette journée.

Paul Portier écrit :

« Le 16, nous faisons mouvement sur Somme-Vesle par l’Épine, Courtisols, Saint-Julien… »

Albert Marquand relate la situation :

« Départ à 9 h 00, il fait beau temps. Étape pénible, beaucoup de boue. Bref, nous avons fait 24 km et nous sommes arrivés à 16 h 00 à Poix… C’est un patelin de 131 habitants où on ne trouve que de la bière et du vin… »

17 avril 1916

Les unités de la 85e brigade sont regroupées de la manière suivante dans la soirée du 17 avril :

Les 1er et 2e bataillons du 149e R.I. cantonnent à Somme-Vesle. Le 3e bataillon du régiment a installé ses compagnies dans le village de Poix.

Le 3e B.C.P. a pris ses quartiers dans le village de Moivre. Les chasseurs du 10e B.C.P. sont à Le Fresne.

Carte_1_journee_du_17_avril_1916

18 avril 1916

Le lieutenant-colonel Gothié reprend le commandement du 149e R.I. Cet officier connait bien le régiment puisqu'il l'a commandé durant toute l’année 1915. Il en avait été éloigné après avoir été blessé au début du mois de janvier 1916, au cours d’une mission de reconnaissance, en première ligne, dans le secteur du bois en Hache en Artois.

Pour en savoir plus sur le lieutenant-colonel Gothié, il suffit de cliquer une fois sur l'image suivante.

Lieutenant_Colonel__Frederic_Gothie

 « Ordre du régiment n° 79

 En reprenant le commandement du régiment, le lieutenant-colonel tient à exprimer à tous officiers, sous-officiers, caporaux et soldats, la joie et la fierté qu’il éprouve de se retrouver parmi eux après les évènements de Verdun, où le régiment s’est montré à la hauteur des belles traditions du passé.

Il continuera à les suivre à l’avenir et chacun aura à cœur de se dépenser sans compter pour arriver au triomphe final et définitif de la belle cause que nous défendons. Vive la France ! P.C. le 18 avril 1916 Lieutenant-colonel Gothié »

Le caporal Clovis Richardet de la 3e C.M. et le soldat Marius Lamberti de la 9e compagnie seront punis au cours de cette période.

Le premier avec le motif suivant « Est rentré ivre au cantonnement à 21 h 40 »

Le second avec celui-ci :« S’est enivré et a causé du scandale au moment du départ du cantonnement »

Ces deux punitions seront changées en 12 jours de prison par le lieutenant-colonel Gothié.

Sources :

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

« Et le temps, à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach ; c’est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011.

Témoignage du mitrailleur Paul Portier, consultable sur le blog du 149e R.I..

Documents provenant de la collection personnelle du petit-fils du lieutenant-colonel Gothié.

Un grand merci à M. Bordes, à F. Barbe, à A. Carobbi, à D. Gothié, à A. Orrière, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

10 mars 2017

Savonnières-devant-Bar (du 12 avril 1916 au 15 avril 1916).

Savonni_res_devant_Bar_du_12_au_15_avril_1916

12 avril 1916

Les hommes, éreintés par les évènements des semaines précédentes, peuvent enfin prétendre à un repos bien mérité. Ils sont maintenant loin de la zone des combats.

Le caporal Albert Marquand, dans une de ses lettres adressées à sa famille, écrit ceci :

« Nous sommes bien arrivés au repos ainsi que je vous l’avais écrit, après avoir fait 8 km à pieds et 60 en auto. Nous sommes à Savonnières près de Bar-le-Duc.

Et on parle de nous reporter plus loin. Ici, c’est la vie et on trouve de tout… »

Les tensions, les angoisses, les peurs, la fatigue générale marquent encore profondément les visages des soldats. Très rapidement, des débordements liés à l'alcool apparaissent.

Plusieurs hommes du 149e R.I. subissent des sanctions disciplinaires au cours de cette période : parmi eux, les soldats Rachel Brocher et André Louis Boban de la 4e compagnie.

Ces deux hommes sont punis de 8 jours de prison par ordre du lieutenant Canon.

Le premier avec le motif suivant « A quitté le cantonnement le 13 après-midi, s’est rendu à Bar-le-Duc sans autorisation et n’est rentré que le lendemain à 8 h 00. »

Le second avec celui-ci :« A quitté le cantonnement après l’appel du soir et a été rencontré dans les rues en état d’ivresse à 21 h 00. »

Ces deux punitions seront changées en 15 jours de prison par le lieutenant-colonel Gothié,qui reprendra le commandement du 149e R.I. quelques jours plus tard.

Le musicien-brancardier Louis Cretin évoque cette situation dans son témoignage.

« Pendant les premiers jours de notre repos à Savonnières, les hommes étaient comme fous. Ce fut la noce après le carnage. Les officiers eurent de la peine à reprendre de l’autorité et à faire régner de nouveau la discipline ».

Savonni_res_devant_Bar__Meuse_

Il ne faut donc pas laisser la troupe dans l’oisiveté !

Le général Antoine Baucheron de Boissoudy, responsable de la 43e D.I., rédige la note suivante :

« Au cours de la période de repos et de reconstitution qui commence actuellement, tous les efforts devront tendre à remettre les unités dans le bel état physique et moral que toutes possédaient au moment où nous avons quitté la région du nord.

Il y a là un effort sérieux à accomplir, qui ne peut-être obtenu que progressivement au fur et à mesure de l’arrivée de renforts, de l’arrivée ou de la nomination de nouveaux cadres.

Pour le moment, il s’agit surtout d’une sorte de détente à procurer à la troupe, après les journées passées dans le secteur de Vaux.

Cette détente ne doit pas consister à laisser les hommes dans l’inaction, dont les effets ne sauraient être que fâcheux. Il ne peut être question, d’autre part, de reprendre immédiatement les exercices. L’activité et l’ingéniosité de tous les officiers, en particulier les chefs de corps, devront être guidées par les directives suivantes : 

  1. Remettre de l’ordre dans les unités. Il faut les recompléter au point de vue matériel (habillement, équipement, vivres, mitrailleuses, spécialités, etc.)

  2. Faire prendre à tous les soins de propreté corporelle, négligés depuis plus d’un mois, faire couper les cheveux à la tondeuse.

  3. Faire laver le linge, les effets de toile, etc.

  4. Organiser des séances de jeux, des séances récréatives.

  5. Par les belles journées, organiser de petites marches, plutôt des promenades, sans sacs, au cours desquelles on s’arrête en des endroits ensoleillés pour permettre aux hommes de se reposer agréablement.

 Il importe, en outre, que les officiers, et surtout les commandants de compagnie, aient de fréquents entretiens, des causeries avec leurs hommes destinées à surexciter leur moral. Les journées de Verdun sont pleines d’enseignements et d’espoir. Il ne faut pas oublier que dans les durs combats que nous menons, l’énergie morale a encore plus d’importance que la force physique. Enfin, les ressources de la région doivent permettre une amélioration de l’alimentation que rendront plus facile les économies réalisées dans la région de Verdun. 

En résumé, il faut détendre les hommes, ne pas les laisser inactifs, les mettre dans les meilleures conditions d’hygiène physique et morale. C’est le premier but à poursuivre dès à présent.

 Le général compte sur le dévouement de chaque officier de sa belle division pour l’aider dans cette tâche. »

 D’après Louis Cretin, il est inutile de dire que toutes ces consignes auront bien du mal à se mettre en place et qu’elles ne seront pas toujours bien respectées pour quelques-uns !

 13 avril 1916

 Le commandant Schalck, responsable du 2e bataillon du 149e R.I.,  doit se rendre à Montplonne pour venir y présider un conseil de guerre concernant un chasseur du 10e B.C.P.. La sentence tombe très rapidement, Paul Tisserand est condamné à mort en début d’après-midi. Il sera fusillé le lendemain.

14 avril 1916

La 43e D.I. effectue une prise d’armes. Des renforts sont semble-t-il déjà arrivés et ont fait remonter les effectifs.

Prise_d_armes_43e_D

Un nouveau soldat du 149e R.I. est épinglé pour état d’ivresse.

Paul Vouriot de la 4e compagnie, conducteur détaché au T.R., est puni de 8 jours de prison par ordre de l’officier d’approvisionnement, le lieutenant Rouganne,  avec le motif suivant « S’est absenté du cantonnement pendant la soirée du 14 avril, s’est enivré et a manqué au départ du T.R., a rejoint le détachement le 15 au matin. ».

Cette sanction sera portée à 15 jours de prison par ordre du lieutenant-colonel, commandant le régiment, quelques jours plus tard. Ce soldat sera également relevé de son poste de conducteur.

15 avril 1916

Le 149e R.I. quitte les cantonnements de Savonnières-devant-Bar et des fermes Vadinsaux et Beauregard.

Toutes les unités de la 43e D.I. doivent se rendre à la gare de Nançois-Tronville pour embarquer dans les trains qui les mèneront à Châlons-sur-Marne.

Le caporal Marquand évoque cette journée dans un de ses courriers :

« … Partis à 1 h 00, nous avons fait 16 km en suivant le canal de la Marne au Rhin et nous avons embarqué en chemin de fer à 7 h 00… »

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Un soldat du 149e R.I. ratera l’horaire ! Marie Émile Bégard, de la 4e compagnie, est puni de 8 jours de prison par ordre du capitaine commandant la compagnie, avec le motif suivant « À Savonnières, étant pris de boisson, a  manqué à l'embarquement du bataillon et n’est rentré que le surlendemain à 18 h 00. »

Cette sanction sera également portée, quelques jours plus tard, à 15 jours de prison par ordre du lieutenant-colonel commandant le régiment.

Ainsi s'achève le seul passage du 149e R.I. dans la fournaise de Verdun. La nouvelle page qui s'ouvre pour le régiment va lui permettre de tenir un secteur plus calme avant une nouvelle participation à une grande bataille.

Sources :

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N ….

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

« Et le temps, à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach. C'est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011.

Témoignage du musicien brancardier Louis Cretin, consultable sur le blog du 149e R.I..

Le bonnet de police qui se trouve sur le montage est du modèle 1915, le numéro du régiment n’est pas réglementaire, mais il reste crédible pour un sous-officier (chiffres métalliques).

Excepté le bonnet de police, l’équipement de fantassin fait partie de la collection d’O. Gérardin.

Documents provenant de la collection personnelle du petit-fils du lieutenant-colonel Gothié.

Un grand merci à M. Bordes, à F. Barbe, à A. Carobbi, à O. Gérardin, à D. Gothié, à J. Huret, à A. Orrière, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

24 février 2017

11 avril 1916.

11_avril_1916

Le 149e R.I. et les autres unités de la division se préparent à quitter définitivement le secteur de Verdun.

Le 5e bataillon du 306e R.I. relève le 3e B.C.P. dans la matinée. Il n’y a plus aucune unité de la 43e D.I. en 1ère ligne.

Les chasseurs de la 85e brigade et les trois bataillons du 149e R.I. se rendent à la Queue de Mala pour embarquer dans les camions. Un peu tiraillés par l’angoisse, les hommes espèrent ne pas renouveler l’expérience de la veille. Revenir une seconde fois en arrière, serait vraiment difficile à supporter. Mais, cette fois-ci tout se passe comme prévu, ils montent dans les véhicules pour prendre la direction de Bar-le-Duc.

Le mitrailleur Paul Portier raconte cette journée dans son témoignage :

« Enfin, le 11, nous quittons de nouveau Dugny pour aller embarquer sur la route de Verdun à Bar-le-Duc. Cette fois-ci, le régiment ne fait  pas demi-tour. »

Le caporal Albert Marquand l’évoque également dans une de ses lettres datant du 17 avril 1916.

« … Partis à 13 h 00 de Landrecourt, nous nous sommes appuyés 8 km par pluie battante pour aller nous embarquer dans les autos camions (22 par voiture) qui nous ont amenés à Savonnières où nous sommes restés 2 jours »

Deux bataillons et les compagnies de mitrailleuses du 149e R.I. s'installent à Savonnières-devant-Bar au sud-est de Bar-le-Duc avec l’E.M. de la brigade. Le bataillon restant du régiment envoie deux de ses compagnies à la ferme Vadinsaux et les deux autres à la ferme Beauregard.

Le 3e B.C.P. prend ses quartiers dans le village de Montplonne tandis que le 10e B.C.P. cantonne à Bazincourt.

Carte_1_journee_du_11_avril_1916

Legende_carte_1_journee_du_11_avril_1916

Sources :

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

J.M.O. du 306e R.I. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 745/17.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

« Et le temps à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach. C'est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011

Le témoignage inédit du soldat du 149e R.I. provient de ma collection personnelle.

La photographie de la Queue de Mala a été réalisée par F. Radet.

L’équipement de fantassin fait partie de la collection d’O. Gérardin.

Le véhicule figurant sur  le montage, et toujours en état de fonctionnement, appartient à D. Bleunven.

Un grand merci à M. Bordes, à F. Barbe,  à A. Carobbi, à D. Bleunven, à O. Gérardin, à A. Orrière, à M. Porcher, à F. Radet, et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

17 février 2017

Gaston Louis Martin Édouard Fernagu (1871-1937).

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Les années de jeunesse

Gaston Louis Martin Édouard voit le jour le 7 février 1871 dans le 6e arrondissement de la capitale, quelques semaines avant le début de la Commune de Paris. Son père, Auguste Gabriel, est un sous-lieutenant âgé de 31 ans,qui sert dans le régiment des sapeurs-pompiers. Sa mère, Louise Rosine Beyer est une jeune femme âgée de 23 ans.

Gaston Louis Martin Édouard Fernagu est l'aîné d’une fratrie de trois garçons. Il obtient son baccalauréat ès sciences. Les trois frères feront tous une carrière militaire.

Au moment de la conscription, Gaston Fernagu souhaite signer un engagement volontaire. Pour cela, il doit se rendre à la mairie d’Orléans pour y apposer sa signature d’un contrat d’une durée de quatre ans. Nous sommes le 25 août 1891. Le jeune homme est dans sa vingtième année.

Son nom est inscrit sur la liste de recrutement de la classe 1891 de la subdivision du 3e bureau du département de la Seine, avec le numéro de tirage n° 314, dans le canton du 4e arrondissement de Paris.

Les débuts de carrière militaire

Sur les traces professionnelles de son père, il demande à servir dans le régiment des sapeurs-pompiers. Ce choix est-il dû au fait qu’il ait passé une grande partie de son enfance dans l'entourage des soldats du feu ? La réponse n’est pas connue, mais l’idée reste très présente à l’esprit ! Le jeune homme est incorporé comme sapeur de 2e classe dès le lendemain de la signature de son contrat avec l’armée.

Il est nommé caporal le 26 février 1892 puis sergent le 26 août 1892. Gaston Fernagu exerce les fonctions de sergent-fourrier entre le 4 mars 1893 et le 14 juin 1894.

Après avoir réussi le concours d’entrée de l’école militaire d’infanterie de Saint-Maixent, ce jeune sergent suit les cours pour devenir officier, à partir du 3 avril 1895,avec la promotion de Tananarive.  Il semble avoir eu du mal à s’adapter à cette formation.  

Le lieutenant-colonel de l’école militaire écrit ceci dans sa feuille de notes détaillées de fin d’études : « Avait une préparation complètement insuffisante à l’entrée à l’école. A eu beaucoup de difficultés à les vaincre et ne les a pas suffisamment surmontées. »

À la base, ce n’est pas un militaire d’une arme classique, nous pouvons aisément  imaginer qu’il ait eu plus de difficultés que les autres.

Il termine avec le numéro de sortie 309 dans une promotion qui compte 362 élèves.

Le 1er avril 1896, revêtu de son uniforme d’officier flambant neuf, il rejoint la ville de Maubeuge pour intégrer une compagnie du 145e R.I.. Il est ensuite détaché à Hirson, où il sera bien noté par son supérieur.

Au régiment de sapeurs-pompiers de Paris

Souhaitant redevenir « soldat du feu », le sous-lieutenant Fernagu fait une demande pour réintégrer le régiment de sapeurs-pompiers en 1897.

Le 1er avril 1898, il est nommé lieutenant. C’est avec ce grade qu’il réintègre le régiment de Paris le 21 mai 1898.

Il quitte le 145e R.I. avec la note suivante :

« Officier zélé, de caractère ferme, habile aux exercices de corps, mais qui peut parfois se montrer très dur avec ses inférieurs. Il parait avoir en lui-même une confiance que ses services et son instruction ne justifient pas encore. Le 145e R.I. ne perdra qu’un officier de valeur ordinaire. »

Le lieutenant Fernagu va devoir encore beaucoup travailler sur lui-même pour tenter d’améliorer son comportement. C’est un officier qui se montre assez bon instructeur militaire dans l’éducation des jeunes recrues, mais qui n’a pas toujours la patience nécessaire pour exercer correctement ce rôle. Il lui arrive souvent de manquer de tact.

Les observations parfois sévères de ses supérieurs, à propos de ses écarts de caractère, commencent à porter leurs fruits au fil du temps.

En 1900, le changement de tempérament de cet officier est radical. L’accomplissement de ses devoirs de formateur, dans l’encadrement des engagés volontaires, est maintenant très bien perçu par ses chefs. Il va même assurer, durant un mois, le commandement provisoire de sa compagnie. Au cours de cette période, il obtiendra de très bons résultats. Sa manière d’être, vis-à-vis des gradés qui sont sous ses ordres, est maintenant irréprochable.

Pompiers_de_Paris

Le 16 juin 1902, Gaston Louis Martin Édouard Fernagu épouse une jeune parisienne âgée de 22 ans,qui se nomme Marguerite Pauline Derondel. De cette union naîtront deux enfants, Robert et Jean Honoré.

En 1903, il est dit de lui : « Officier sérieux et discipliné, sert avec exactitude et correction, bon instructeur, sait se faire obéir, obtient des résultats. Donne toute satisfaction. »

En 1905, il suit les cours de 2e année de l’école de droit tout en poursuivant son service. Il obtient sa licence en juillet.

Pompiers_de_Paris

Retour à un régiment d’infanterie

Nommé capitaine le 27 mars 1911, Gaston Fernagu doit laisser derrière lui la ville de Paris pour rejoindre le 132e R.I. qui se trouve à Reims.

Il est très bien noté dans cette unité.

« Vigoureux officier, travailleur instruit, commande sa compagnie avec un très grand souci de son devoir professionnel. Deviendra certainement un capitaine d’une réelle valeur. »

Le lieutenant-colonel Cadoux, responsable du 132e R.I. au cours du 1er semestre de l’année 1912, dit pourtant de lui qu’il a bien du mal à se dépouiller de son habit de sapeur-pompier.

Au cours de cette année, il passe une thèse de médecine à la faculté de Paris qui s’intitule « Les troubles de la parole dans les chorées ». Ce travail, qui porte le n° 283 de l’année de l’obtention du diplôme, est publié par les éditions Jouve.

Nostalgique de son ancien corps, Il fait de nouveau une demande pour retourner chez les sapeurs-pompiers. Cette requête est entendue puisqu’il  retrouve son ancien régiment à partir du  8 mars 1914.

Les premières années du conflit

Lorsque, en août 1914, le conflit contre l’Allemagne débute, il porte toujours l’uniforme de sapeur-pompier. Très vite, il souhaite être envoyé sur le front. Il fait une demande insistante pour servir dans un régiment de la Légion étrangère.

Le 16 octobre 1914, il est affecté au régiment de marche de la Légion étrangère du camp retranché de Paris, qui deviendra à partir du 28 novembre, le 3e régiment de marche du 1er étranger. Dès son arrivée, le colonel lui propose le poste d’officier adjoint. Riche de son savoir et de ses expériences, le capitaine Fernagu peut rendre de multiples services à son supérieur durant la période d’organisation du régiment. Au front à partir de la fin du mois de novembre 1914, il s’occupe également de la S.H.R. du régiment, en plus de ses fonctions d’officier adjoint. Entre décembre 1914 et juin 1915, son régiment couvre différents secteurs de la Somme.

Le 26 juillet 1915, il est muté au 10e B.C.P. pour prendre le commandement de la 3e compagnie. Il ne reste que très peu de temps dans cette unité de chasseurs puisque le 14 août 1915, il reçoit l’ordre de rejoindre le 3e B.C.P. pour y seconder le chef de bataillon Faure. Les chasseurs de cette unité combattent dans le secteur d‘Aix-Noulette en Artois.

Gaston Fernagu prend ensuite part aux affaires de Verdun entre le 7 et le 11 mars 1916. Sa belle conduite au feu lui permet d’être proposé au grade de commandant.

Courts passages au 158e R.I. et au 149e R.I.

Le 24 mars 1916, le commandant Fernagu est affecté au 158e R.I. avec ses nouveaux galons de chef de bataillon. Quelques jours plus tard, il est au 149e R.I..

Le J.M.O. du 3e B.C.P. nous fait savoir que le capitaine Fernagu est nommé chef de bataillon au 149e R.I. le 1er avril 1916.

Le journal officiel du 15 avril 1916 nous dit que cette mutation est prononcée le 5 avril.

Cette courte période d’affectation au sein de ces deux régiments de la 43e D.I. reste difficile à identifier. Les dates qui figurent dans son dossier individuel,qui se trouve au S.H.D. de Vincennes, ne concordent pas toujours avec les autres documents consultés.

Le nom du commandant Fernagu apparaît dans un contrôle nominatif des officiers du 149e R.I qui date du 18 avril 1916. À cette période, il commande le 3e bataillon du régiment.

Gaston Fernagu a-t-il pris le commandement du 3e bataillon du 149e R.I. lorsque celui-ci se trouvait encore dans le secteur de 1ère ligne au fort de Vaux ? A-t-il remplacé le capitaine Gaston de Chomereau de Saint-André à la tête de ce bataillon plus tard, après le retour vers l’arrière ? Ces questions restent pour l’instant sans réponse !

Le témoignage laissé par le capitaine de Chomereau de Saint-André n’évoque pas ce passage de commandement.

De nouveau au 158e R.I.

Le 18 avril 1916, il est de nouveau affecté au 158e R.I.. En juin 1916, il commande le 3e bataillon du régiment.

Il dirige son bataillon avec conscience et zèle. Cet officier se distingue aux combats, particulièrement à ceux qui se déroulent dans la Somme entre le 4 et le 18 septembre 1916. Durant les périodes de repos, il se consacre laborieusement à l’instruction de ses cadres et de son bataillon.

Fatigué par son long séjour ininterrompu au front, il est muté au 9e bataillon du 152e R.I. le 27 octobre 1917. Il commande son nouveau bataillon avec autorité et facilité. Très consciencieux, et très actif, il s’adonne tout particulièrement à l’instruction des cadres et de la troupe. Ce qui fait de son bataillon un bon bataillon d’instruction.

Les années après-guerre

Gaston Fernagu a conservé son poste de commandant pendant 25 mois entre 1914 et 1918. Il rompt avec une carrière militaire qui aurait pu être prometteuse. Le 20 avril 1918, il remet volontairement son grade de commandant pour redevenir capitaine. Il fait cette démarche pour pouvoir réintégrer le régiment de sapeurs-pompiers, où il prend le commandement d’une compagnie.

En janvier 1921, il exerce les fonctions d’adjudant-major.

Gaston Fernagu est promu chef de bataillon major par décret du 24 juin 1922. Affecté au 22e régiment de Tirailleurs, il ne rejoindra jamais cette unité. Quelques semaines plus tard, il est admis à faire valoir ses droits à la retraite par décision ministérielle du 26 juillet 1922. Le 15 août 1922, il est rayé des contrôles de l’armée active.

Il est nommé chef de bataillon de réserve par décret du 17 octobre 1922 affecté au 131e R.I..

Le 12 août 1927, il dépend du centre de mobilisation d’infanterie n° 51.

Maintenu dans les cadres de réserve, à sa demande, il quitte définitivement l’armée le 7 février 1932.

Le 26 novembre 1937, Gaston Fernagu décède, dans la petite commune manchote de Torigni-sur-Vire, à l’âge de 66 ans.

Décorations obtenues :

Chevalier de la Légion d’honneur par arrêté ministériel du 28 octobre 1915 :

« Officier venu du régiment de sapeurs-pompiers de Paris, s’est signalé en toutes circonstances par ses belles qualités militaires. »

Officier de la Légion d’honneur par décret du 11 juillet 1928 (J.O. du 12 juillet 1928).

Croix de guerre avec une palme et une étoile d’argent.

Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 107  du 2 février 1916:

« N’a cessé de donner, depuis qu’il est sur le front, l’exemple des plus belles qualités militaires ; a rendu à son chef de corps les meilleurs services, particulièrement pendant les attaques de septembre. » 

Citation  à l’ordre de l’armée n° 225 du 20 septembre 1916 :

« A très brillamment enlevé son bataillon à l’attaque du 4 septembre 1916. Arrêté par un feu violent de mitrailleuses devant une position extrêmement solide, s’en est emparé par un violent combat à la grenade. Contre attaqué le soir et le 5 au matin, de front et de flanc, n’a pas cédé un pouce de terrain. Le 6, a progressé et a atteint tous les objectifs assignés, faisant plusieurs centaines de prisonniers, s’emparant de mitrailleuses et de lance-bombes. S’y est ensuite maintenu énergiquement, faisant preuve, pendant 4 jours et 4 nuits, d’un entrain, d’une vigueur et d’un courage admirables.»

Autres décorations :

A obtenu du ministre de l’Intérieur, une médaille d’honneur en argent de 2e classe pour s’être distingué, le 1899 à Pantin (Seine) en dirigeant, avec le plus grand dévouement, les travaux de sauvetage de 3 ouvriers, ensevelis sous un éboulement (brevet du 28 octobre 1899).

Médaille commémorative de la Grande-Guerre.

Médaille interalliée de la victoire.

Médaille d’honneur en argent de 1ère classe (brevet du 6 février 1922).

Sources :

J.M.O. du 3e régiment de marche du 1er étranger  S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 861/6.

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 819/3.

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/2 et 3.

J.M.O. du 158e R.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 700/13.

J.M.O. du 152e R.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 697/15.

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Le commandant Fernagu possède également un dossier individuel sur le site la Base Léonore. Pour le lire, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Site_base_Leonore

Les informations concernant la généalogie de Gaston Fernagu ont été trouvées sur le site « Généanet ».

La photographie du commandant Fernagu provient de la collection  personnelle d’une branche collatérale descendante de cet officier.

Le contrôle nominatif des officiers du 149e R.I.,qui date du 18 avril 1916, fait partie de la collection personnelle du petit-fils du lieutenant-colonel Gothié.

Un grand merci à M. Bordes, à C. Chauvet, à A. Carobbi, à D. Gothié, à  M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

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