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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.

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25 août 2011

13 mai 1915.

                  Carte journée du 13 mai 1915

                                      Légende journée du 13 mai 1915

La relève des 2 compagnies du 1er B.C.P. par deux compagnies du 3e B.C.P. se termine à 3 h 30. Aussitôt après, des attaques allemandes se produisent sur T0, T2 et T3 sous un bombardement intense. Les attaques sur T0 et T3 sont repoussées. Le 3e B.C.P. qui est à peine en place, fléchit devant T2.

A 7 h 50 arrive l’ordre général d’opération pour la journée. Le 10e B.C.P. qui est remis à la disposition de la 43e D.I. doit relever les 2 bataillons du 149e R.I. qui passent en réserve  générale. Cependant, aucune relève ne sera faite tant que l’ancienne ligne conquise par le 149e R.I. ne sera pas reprise à l’ennemi.

En milieu de matinée, des petits postes avancés signalent que des Allemands sont concentrés  en grand nombre dans la sape T1. L’artillerie lourde allemande poursuit son bombardement sur tout le secteur avec une grande intensité.

Le  lieutenant-colonel  commandant le 149e R.I. conserve le commandement de l’infanterie de secteur.

 

A 15 h 00, arrive l’ordre d’opérations pour la journée du 13  et la nuit du 13 au 14 mai.

Le 149e R.I. à pour mission de contre-attaquer dans la soirée à 22 h 00. Il lui faut reconquérir le  secteur perdu.  Son 2e bataillon reçoit une compagnie du 10e B.C.P. qui remplace la compagnie İeské ramenée au chemin des Vaches. Le 3e bataillon du régiment à pour objectif les sapes T2 et T3 ainsi que les tranchées de 1ère ligne qui ont été perdues et qui se trouvent entre ces différentes sapes. Il est renforcé par deux compagnies du 3e B.C.P. et une compagnie du 10e B.C.P..

L’attaque devant se faire par surprise, l’artillerie n’interviendra pas au début. Les fractions du 149e R.I. ne prennent pas part à l’attaque, se tiennent prêtes à marcher au 1er signal.

 

Les pertes pour cette journée sont de 14 tués et de décédés des suites de leurs blessures, de 27 blessés et de 9 disparus.

 

 

                                        Tableau des tués pour la journée du 13 mai 1915

 

                         Tableau des blessés et des disparus pour la journée du 13 mai 1915

 

 

Voici un message écrit par le capitaine Pretet dans l’après-midi du 13 mai qui donne une idée de l’état d’esprit des hommes du 2e bataillon 149e R.I. :

 

La liaison est assurée avec la 13e division à la parallèle Bruckert. Le 109e R.I. occupe des positions en arrière de la ligne tenue par le 149e R.I.. Le 3e B.C.P. avec qui je suis en liaison est également en arrière du 149e R.I.. Nous sommes alors exposés à des feux de flanc de l’ennemi provenant du point V et de T1 et T3. Le bataillon a été en butte avec un bombardement épouvantable de l’ennemi. Les pertes sont très sensibles. Le moral est fortement atteint. Les hommes ne restent dans les tranchées que sous la menace du révolver.

Le bataillon est absolument incapable d’un effort quel qu’il soit. Mes officiers m’ont signalé le fait à maintes reprises et İeské lui-même vient de me dire qu’il ne fallait pas compter sur sa compagnie. J’ai le devoir de vous rendre compte de ces faits. J’ai l’honneur de vous rendre compte d’autre part que l’agent de liaison de l’artillerie ignorait les signaux au pavillon blanc et bleu que j’ai dû employer il y a quelques instants alors que notre artillerie tirait sur nos tranchées. 

 

Réponse du lieutenant-colonel Gothié commandant le 149e R.I. :

 

J’ai prescrit au capitaine Pretet de faire une attaque sur T1 uniquement avec la compagnie du 10e B.C.P.. »

 

Commentaires du général Guillemot, commandant la 85e brigade :

 

Ce rapport est un complément de renseignements sur la force de résistance du 149e R.I. qui semble avoir atteint une limite en raison de la fatigue et des pertes éprouvées. Le bataillon Pretet a fourni 2 compagnies en renfort de l’attaque du 9 mai, il tenait les tranchées depuis le 5 mai. Le 149e R.I. a montré jusqu’alors qu’il était vaillant, je veux bien espérer qu’il n’aura pas de défaillance et j’approuve la mesure prise par le chef de corps de n’envoyer que des unités fraîches du 10e B.C.P. pour le coup de main de ce soir. 

 

L’attaque de nuit débute à l’heure prévue. Les troupes s’élancent à 60 m environ des sapes. Mais, dès le départ elles sont prises sous un feu de mitrailleuses ennemies placées dans T1, dans le prolongement de la sape 1. Ces mitrailleuses stoppent net le mouvement en avant. Toutes les tentatives de progression sont vouées à l’échec. Une nouvelle attaque est ordonnée et exécutée à 3 h 30. Elle échoue comme les précédentes.

 

Références bibliographiques :

Historique du régiment « 149e Régiment d’infanterie » Épinal. Imprimerie Klein.

Fichier des « Morts pour la France » du site S.G.A./Mémoire des hommes.

Les archives du S.H.D. ont été consultées, ainsi que le J.M.O. de la 85e brigade, série 26 N 520/10.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à A. Chaupin, à T. Cornet, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « collectif Artois 1914-1915 ».

8 août 2011

Témoignage de Louis Cretin : rencontre avec les troupes russes.

                    Les russes

 

De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet. Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « Le camp de Mailly, repos et permission».

  

 De mon séjour passé avec les Russes, je garde de multiples souvenirs. Ces hommes différaient totalement de nous autres français. Toutes leurs sorties et marches se faisaient en chantant une sorte de mélopée plutôt triste. Je veux parler de l’air, car nous ne comprenions pas les paroles !  Pendant une revue, on eût juré voir des statues tant ils étaient immobiles. Les punitions étaient dures et souvent ils recevaient un « passage à tabac » sérieux, sans broncher. Dans le camp ; leur drapeau était toujours sur deux faisceaux, un garde en permanence à côté. Tout homme qui passait devant devait le saluer en criant quelques mots. S’il oubliait de le faire, immédiatement il était empoigné sans ménagement. Au réveil et au coucher, ils étaient rassemblés par compagnie et tête nue, ils faisaient tous ensemble leurs prières. La journée terminée, ils remplissaient les cafés et buvaient jusqu’à l’ivresse. Chaque soir, une voiture passait et ramassait ceux qui ne pouvaient pas rentrer. Ils possédaient tous beaucoup d’argent. Ayant fait un long voyage depuis Archangel, ils n’avaient rien pu dépenser et leurs poches étaient pleines de billets et de coupures des chambres de commerce. Ignorants de la valeur qu’ils représentaient, ils étaient les bienvenus dans la maison de tolérance du camp qui ne désemplissait pas. Les gaillardes qui s’y trouvaient ont du ramasser gros ! Leurs bas servaient de coffres-forts, ils étaient toujours pleins de papiers. Quand ils avaient bu, ils étaient querelleurs, fanatiques, ils l’étaient autant que nos troupes de couleur. Voilà un tableau imparfait de ce que j’ai vu et connu du peuple slave.  Après être rentré dans le secteur qui est occupé par le régiment, je pars en permission de détente. J’amène avec moi un camarade.  Cette permission dure du 6  au 17 juillet. À notre retour, nous retrouvons les compagnies toujours au même endroit. Le régiment est relevé le 25 juillet. Nous partons en camions automobiles, toujours au repos, à Mairy-sur-Marne qui se trouve à dix kilomètres de Châlons. Les répétitions et les concerts reprennent à Sagny-aux-Moulins et à Mairy-sur-Marne. Le 29, il y a une revue de la division faite par le général Gouraud avec remise de décorations. Trois musiciens reçoivent la croix de guerre pour leur brillante conduite à Verdun. Le soir, elles sont arrosées copieusement. Deux de ces hommes seront tués par la suite. Le dimanche 30, il y a un concert et une représentation théâtrale dans le parc du château de Mairy-sur-Marne. Nous demeurons au repos jusqu’au 10 août. Le 11, nous faisons les préparatifs de départ pour la Somme.

 

Sources : « Souvenirs de Louis Cretin soldat musicien au 149e R.I. ». 

 

 La traduction de la phrase inscrite sur le drapeau russe  « Съ нами Богъ » signifie  « Dieu avec nous ». Les photos des bouteilles de vodka ont été trouvées par « Poutine » qui intervient régulièrement sur le forum Pages 14-18. Une des cartes postales utilisées sur le montage provient de la collection de « Poutine », l’autre de ma collection personnelle. 

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à A. Carobbi, à A Chaupin, à T. Cornet., à l’association « Collectif Artois 1914-1915 » et, pour « la partie russe » à « Poutine » du forum Pages 14-18. 

 

3 août 2011

12 mai 1915.

                  Carte journée du 12 mai 1915

                                      Légende carte du 12 mai 1915

Dans la nuit, le capitaine Prétet qui commande le 2e bataillon fait savoir qu’au moment de la relève, l’embranchement de la sape T1 sur l’ancienne 1ère ligne allemande, n’est plus occupée par la compagnie du 1er B.C.P. qu’il devait remplacer, mais par l’ennemi. Des ordres sont donnés pour que cette sape soit reprise au cours de la nuit. Toutes les tentatives échouent sous le feu des mitrailleuses allemandes.

Vers 6 h 30, il est signalé une forte concentration de troupes allemandes dans le fond de Buval.

La 13e D.I. doit consolider ses positions pour ensuite poursuivre son attaque sur la sucrerie d’Ablain-Saint-Nazaire. La 43e D.I. à gauche, attaquera sur le bois carré. Cette attaque sera menée par le 158e R.I. et par 2 compagnies du 149e R.I..

Toute la matinée,  le secteur subit un intense bombardement particulièrement violent sur la première ligne. Les tranchées sont bouleversées et n’existent plus en certains endroits. Les hommes sont obligés de se coucher à plat ventre pour être un peu abrités.

Le projet d’attaque est stoppé. À 12 h 30 bombardement sur la haie G et sur les bois 5, 6 et 7. Vers 16 h 00, il y a une grande activité allemande contre le barrage de la sape T3. L’activité ennemie dans ce secteur dure jusqu’à 19 h 30. À partir de ce moment, le retour au calme s’effectue progressivement. À 20 h 00, les Allemands tiennent toujours la sape T1. Un ordre de stationnement est donné, il fait savoir que rien ne change pour les dispositions générales du 149e R.I.. Les 2 compagnies du 1er B.C.P. qui sont en 1ère ligne sont relevées par 2 compagnies du 3e B.C.P.. 

 

                                     Tableau des tués pour la journée du 12 mai 1915

 

                                   Tableau des blessés pour la journée du 12 mai 1915 

 

Les pertes pour cette journée sont de 7 tués au combat et de décédés des suites de leurs blessures et de 9 blessés.

 

Références bibliographiques :

Historique du régiment « 149e Régiment d’Infanterie » Épinal. Imprimerie Klein.

Fichier des « Morts pour la France » du site S.G.A./Mémoire des hommes.

Les archives du S.H.D. ont été consultées, ainsi que le J.M.O. de la 85e brigade, série  26 N 520/10.

 

 Un très grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à A. Chaupin, à T. Cornet, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ».

28 juillet 2011

16 juillet 2011, à Saint-Boniface devant « le monument du poilu ».

                         

             Lucien Kern Cérémonie     

Le 16 juillet 2011, il vient de se dérouler un évènement concernant Lucien Kern (1889-1920) soldat du 149e R.I.. En effet, des descendants de la famille de Lucien, des représentants des gouvernements canadien et français, des anciens combattants français du Manitoba et des représentants religieux se sont rassemblés autour du monument du poilu qui se trouve dans le cimetière de la cathédrale de Saint-Boniface. Cette ville canadienne se situe dans le Manitoba « la région aux 110 000 lacs ». À la suite de cette cérémonie, son nom sera gravé sur le monument pour retrouver celui de son frère Eugène et ceux de ses compagnons d’infortune.

 

Voici l’allocution prononcée à cette occasion par Jacques Janson, doyen des élus français du Canada à Saint-Boniface.

 

Monsieur Guy Jourdain, représentant le premier ministre,

Honorable Maria Chaput,

Monsieur le Consul de France à Toronto, Jérôme Cauchard,

Monsieur l’abbé Marcel Damphousse, représentant de Monseigneur l’Archevêque, que nous rejoindrons demain pour une autre cérémonie au Mémorial français de Saint-Claude,

Monsieur le Consul honoraire de France à Winnipeg, Bruno Burnichon,

Monsieur, le représentant du maire de Winnipeg,

Messieurs Basile Rotoff, et Jean-Marie Éloi, respectivement président et vice-président honoraires des anciens combattants français du Manitoba,

Monsieur Jean-Luc Chodkiewicz, président de l’Union nationale française,

Mesdames et Messieurs,

 

Ce matin, nous écrivons ensemble une page glorieuse de l’histoire du Manitoba, où la France officielle, par ses consuls ici présents, par moi, élu de la République, est venue rendre hommage, dans cette province, qui nous est chère, à deux de ces illustres enfants, que près d’un siècle sépare : l’héroïque Lucien Kern et Maria Chaput, la sénatrice infatigable défenseur de la Francophonie au Manitoba et dans tout le Canada.La sénatrice qui a aussi d’autres mérites vis-à-vis de la France, mérites sur lesquels je reviendrai.

 

Le 6 juin 2006, en présence du premier ministre, Greg Selinger, qui était alors député de Saint-Boniface, ministre des Finances, président du Conseil du Trésor et ministre des Services en français, c’est-à-dire de facto ministre de la Francophonie, qu’il a toujours soutenue, l’honorable Maria Chaput et moi avions ré inauguré le Monument des Français de l’Ouest des morts pour leur patrie. Ces jeunes soldats canadiens d’origine française du Manitoba et de tout l’Ouest du Canada, qui versèrent leur sang pour leur patrie, étaient au nombre de 81, entre 1914 et 1918, et 24, entre 1939 et 1945.

 

Parmi ces jeunes, qui avaient laissé derrière eux leur famille, leurs amis, leur métier, leur pays d’adoption, pour libérer la terre de leurs ancêtres sur laquelle ils avaient peu ou pas vécu, mais à laquelle ils restaient profondément attachés, il y avait les trois frères Kern.  Eugène Kern, qui fut un collaborateur de l’hebdomadaire la Liberté fondé par le prédécesseur de Monseigneur Albert Legatt, Monseigneur Adélard Langevin.  Il mourut à 32 ans, lors de la bataille de la Marne, le 21 mars 1915. En tant que mort au champ d’honneur, il a son nom inscrit sur le monument.  Eugène Kern et ses frères, Aimé et Lucien, appartenaient à une famille alsacienne profondément chrétienne et patriote, comme en témoigne leur correspondance touchante avec leur famille, entre les tranchées et Saint-Léon, au Manitoba.  Aimé Kern, blessé au combat, lui aussi, épousa la nièce de Dom Marie Antoine Straub, le curé de Saint-Léon, et rentra en France, à Lons-le-Saunier, dans le Jura.  Lucien Kern, qui passa plus de temps que ses deux frères dans les tranchées n’a pas son nom sur le monument du poilu, parce qu’après avoir été grièvement blessé en 1915, et être retourné au front, en janvier 1916, il bénéficia d’une permission en 1917 pour visiter sa famille au Canada, après laquelle il mourut en mars 1920, à Saint-Léon, victime de la grippe espagnole.

 

Sensibilisé à cette injustice et appuyé par l’Ambassadeur de France au Canada, François Delattre, aujourd’hui Ambassadeur de France à Washington -- permettez-moi de saluer son successeur l’Ambassadeur Philippe Zeller, qui arrivera prochainement à Ottawa --, le Consul de France à Toronto, Jérôme Cauchard,  le Consul honoraire de France à Winnipeg, Bruno Burnichon, j’ai écrit à Monseigneur Legatt pour lui dire notre intention de réparer cette injustice.  L’archevêque de Saint-Boniface a appuyé aussitôt notre démarche; nous l’en remercions très vivement. 

 

Pour  localiser le Manitoba dans le vaste Canada :

(cliquer sur  lien suivant, puis sur la carte pour l'agrandir)

 

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/98/Carte_administrative_du_Canada.png?uselang=fr

 

Pour localiser la région de Saint-Boniface dans le Winnipeg :

 

http://www.elections.mb.ca/fr/Maps/mapswinnipeg.html

 

Pour en savoir plus sur l’histoire de Lucien Kern :

 

http://amphitrite33.canalblog.com/archives/soldat_lucien_kern__1889_1920_/index.html

 

 A lire également l’ouvrage intitulé « Lettres des tranchées » correspondance de guerre de Lucien, Eugène et Aimé Kern, trois frères manitobains, soldats de l’armée française durant la Première Guerre, aux Éditions du blé. Saint-Boniface (Manitoba) Canada 2007.

 

Chronique du livre : Lettres des tranchées » aux Éditions du blé. A regarder cette petite vidéo sur le lien suivant :


http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia%3Dhttp://www.radio-canada.ca/Medianet/2008/CBUFT/ZIGZAG200801201730_3.asx
 

Un très chaleureux merci à Suzanne et Denise Martel et à Roselyne Duclos.

22 juillet 2011

Témoignage de Louis Cretin : le camp de Mailly, repos et permission.

             La musique à Mairy-sur-Marne

De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet. Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « Après Verdun, la troupe se lâche».

 

Pendant 3 mois, le régiment occupe le secteur entre la butte de Tahure et celle de Menil-les-Hurlus. Après ce que nous avions vécu, c’était plutôt du repos. Le secteur était calme. La musique demeure à Saint-Jean-sur-Tourbe, où nous répétons et montons de nouveaux programmes. Concerts deux fois par semaine à Somme-Tourbe. Nous demeurons sans histoire, nous nous la coulions douce jusqu’au 4 juin. Le 5 juin, nous apprenons que le lendemain, la musique et la clique doivent embarquer au complet. C’était vrai. Parti de Somme-Tourbe, nous passons à Chalons et à 13 h 00 nous arrivons au camp de Maillly. Nous sommes détachés comme musique de place. Une brigade russe est à l’instruction à cet endroit. À partir du 7, commencent pour nous des répétitions sérieuses. Nous faisons concert tous les jours de 16 h 00 à 17 h 00 et retraite tous les deux jours. C’est là que je vis pour la première fois notre grosse A.L.G.P., des pièces de 400 mm s’y trouvaient. Nous les visitons avec curiosité. Le 16 juin, je vais passer une permission de 24 heures à Paris. Je vais voir ma cousine Valentine Cretin.

Le 20 juin, le général Joffre vient visiter les troupes russes. Joli tableau, beau défilé. C’étaient tous des hommes choisis, équipés et armés à la française. Ils avaient fière allure. Le 24, ils partent occuper un secteur en Champagne. Après un service religieux, ils quittent le camp de Mailly. Nous les faisons défiler pour la dernière fois. Le lendemain, nous partons retrouver notre régiment qui est resté dans le même secteur qu’avant notre départ. Nous voyageons par voie ferrée. (À suivre…)

 

Sources :

« Souvenirs de Louis Cretin soldat musicien au 149e R.I. »

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à A. Carobbi, à A. Chaupin et à T. Cornet, ainsi qu’à l’association « Collectif Artois 1914-1915 »

15 juillet 2011

Nouvelles lettres de Joseph Dechanet.

                   Joseph Dechanet

De nouveau un très grand merci à Y. Marain et à Y. Petrazoller, pour leurs autorisations de reproduire ici, de nouvelles lettres écrites par  Joseph Dechanet. Elles ont également été publiées dans un ancien  numéro des « cahiers Haut-Marnais ».

 

22 janvier 1915.

Me voici rescapé encore une fois, je ne sais comment : sur 13 sergents de ma compagnie nous sommes revenus 3. Quel tableau d’honneur, mon pauvre Henri ! Et nous allons y retourner. Cette fois… il est temps d’en finir car on se sent devenir fous, sous ces bombardements épouvantables… 50, 60000 obus pleuvent dans une journée, et l’on passe sur les morts, les blessés… Le sang nous éclabousse. Les têtes s’ouvrent, les jambes sautent… Combien on désire la mort ou la blessure qui donneront enfin la paix ! Me voici, à présent, l’un des plus anciens de la guerre, dans la compagnie. C’est bientôt mon tour. Nous en avons assez de vivre dans ces conditions. Puisses-tu ne jamais voir ce que nous voyons ! On croirait que le monde entier veut s’anéantir.

 

29 janvier 1915.

Ce matin, cela tonne encore, dans la même direction, d’une façon épouvantable. Cela chauffe mon cher ! Et l’on est en train d’en abattre par centaines. La terre est gelée, très durement, et c’est un temps propice aux grandes attaques, aux « coups durs ». Il fait un froid de chien. Pas de neige, mais qu’il fait grand froid ! Il fera bon demain soir, dans la tranchée… La situation, toujours la même. Ce n’est que lorsque le temps deviendra relativement beau que l’on tentera sans doute le grand coup. D’ici là, je pense que ce sera toujours la guerre de tranchées, les bombardements, les attaques localisées. Chaque jour, quelques morts, quelques blessés, une balle perdue, un instant de malchance… Nous ne « les » tenons pas encore. Heureusement, on ménage un peu plus nos existences que leurs chefs à eux ne ménagent les leurs. On les envoie à la mort en rangs serrés.

Mais nous n’avons accompli que la première moitié de notre tâche et il nous reste à faire un travail bien dur et combien sanglant. Le jour approche où il faudra, pour tout de bon, courir sur la tranchée allemande et coûte que coûte, rompre les lignes ennemies, passer, passer… les rejeter vers la frontière. Ce jour-là !... Enfin, on continuera à faire son devoir, jusqu’au bout.

 

Source :

« Les cahiers Haut-Marnais », cahiers édités par les archives départementales de la Haute-Marne. Cote 7 rev 168.

 

Un grand merci à M. Alzingre, à M. Bordes, à J.N. Deprez, à Y Marain, à F. Petrazoller et au Conseil départemental de la Haute-Marne.

10 juillet 2011

Témoignage de Louis Cretin : après Verdun, la troupe se lâche...

                 149e_R

De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet.

Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « La bouffarde de M’sieur Drouot ».

Pendant les premiers jours de notre repos à  Savonnières, les hommes étaient comme fous. Ce fut la noce après le carnage. Les officiers eurent de la peine à reprendre de l’autorité et à faire régner de nouveau la discipline. Le jour du Vendredi saint, nos cuisiniers mirent de la viande, de la morue et des patates à cuire dans la même marmite. Au moment de servir, cela faisait une bouillie sans nom qui fut impossible à avaler. Le 15 avril 1916 dans la soirée, nous partons à pied et, après trois heures de marche, nous arrivons à la gare de Nançois où nous embarquons. Le 16, à 8 h 00 nous descendons à Châlons-sur-Marne. Nous faisons une vingtaine de kilomètres pour venir cantonner à Somme-Vesle. Du 17 au 28 avril, nous sommes au repos. Nous reprenons l’instrument. Théâtre, cinéma, concerts, jeux divers occupent les hommes. Les compagnies sont renforcées. Nous sommes vaccinés, après quoi, je tombe malade et je vais à l’infirmerie. Le 1er mai, deux bataillons quittent Somme-Vesle. Le 2, je pars avec l’infirmerie régimentaire, sans sac, en raison de mon épaule endolorie. Nous allons cantonner à Lacroix-en-Champagne. Le 3, je rejoins mes camarades. Le 4 nous arrivons à Saint-Jean-sur-Tourbe où l’on trouve un bon cantonnement en dehors du pays. (À suivre…)

 

Sources :

« Souvenirs de Louis Cretin soldat musicien au 149e R.I. »

 

« La bouffarde de M’sieur Drouot » peut se lire sur le lien suivant : 

La_bouffarde_de_M_sieur_Drouot_

 Les photos utilisées pour le montage représentent une compagnie du 149e R.I. Ces photos proviennent de ma collection personnelle. Elles ont été réalisées sur la commune de Poix en Champagne.

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à A. Carobbi, à A Chaupin et à T. Cornet., ainsi qu’à l’association « Collectif Artois 1914-1915 » et aux camarades du « Forum pages 14-18 ».

2 juillet 2011

Une bien curieuse nomination !

                    Nelly Martyl

Titulaire du diplôme de l’Union des femmes de France, Madame Scott de Plagnolles était l’épouse du peintre Georges Scott. Dès le début du conflit, elle se consacra aux soins des blessés. Avant-guerre, elle était cantatrice à l’Opéra-Comique et chantait sous le nom de Nelly Martyl. En octobre 1916, elle croise le chemin du 149e R.I. qui se trouvait dans le secteur de la Somme, comme en atteste cette nomination dans le grade de sergent honoraire. Nomination signée de la main du lieutenant-colonel Pineau.

 

Aux armées le 11 octobre 1916.

Le lieutenant-colonel commandant le régiment nomme au grade de sergent honoraire au 149e R.I. : Le caporal Nelly Martyl.

 

 Le sergent Martyl sera affecté à la C.H.R. (section de liaison). Cette nomination est motivée par les brillants états de service du sergent Martyl :

«  Sur le front depuis le début de la guerre, fondatrice de plusieurs hôpitaux militaires, le sergent Martyl est allé à plusieurs reprises, sous le feu, chercher des blessés graves, qu’elle a soignés elle-même avec une admirable abnégation.

Malgré les veilles, malgré les fatigues, elle se prodigue chaque jour pour apporter à tous, sous-officiers et soldats, séduits par son charme délicieux, et pour leur faire partager la belle flamme patriotique qui anime son cœur. Se dévouant toute entière à l’œuvre splendide qu’elle s’est imposée, elle a su, par ses accents qui nous prennent, faire vibrer nos âmes à l’unisson de la sienne et exalter encore le superbe moral de nos jeunes héros. « Vive le sergent Martyl ! » Le lieutenant-colonel commandant le 149e Régiment d’infanterie. (Signé) Pineau.

 

Source :

Le portrait de Nelly Martyl a été trouvé sur le site « Gallica» :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9028979t.r=Nelly+Martyl.langFR

 

Un grand merci à M. Bordes et à A. Carrobi.

26 juin 2011

11 mai 1915.

Photo du bois 5

De 6 h 00 à 10 h 00 une canonnade irrégulière se déroule sur les premières lignes,  les bois 5, 6, 7 et la haie G. À midi, l’artillerie française débute son tir de préparation d’attaque et l’ennemi répond presque aussitôt par des rafales d’artillerie lourde. Ces tirs  forment barrages sur la corne nord-est du bois 5, sur la haie G, sur les boyaux de communication, et sur les bois 6 et 7.

 

La 43e D.I. doit toujours poursuivre le combat dans la direction de Souchez. Dans le secteur du 149e R.I., l’attaque est effectuée par le 31e B.C.P, par deux compagnies du 1er B.C.P. et par le 3e bataillon du 158e R.I.  Tous ces éléments se retrouvent sous l’autorité du lieutenant-colonel Gothié qui commande le 149e R.I..

 

  

 

                  Carte journée du 11 mai 1915

 

                                       Legende carte du 11 mai 1915

 

Les observations de la note qui accompagne la carte de la journée du 10 mai 1915 sont toujours applicables pour celle-ci. La position des abris du bois 5 reste à confirmer.

 

A 14 h 00, l’attaque d’infanterie se déclenche avec le 31e B.C.P. et les 2 compagnies du 1er B.C.P.. La progression reste très difficile. Sur la gauche, une compagnie du 1er B.C.P. se porte en avant par les sapes T3 et T2 pour atteindre la tranchée ennemie du fond de Buval. Le 3e bataillon du 158e R.I. qui devait participer à l’attaque est resté bloqué en arrière tellement le terrain est battu par les obus. Ce bataillon doit soutenir l’attaque du 31e B.C.P.. À 16 h 00, un  ordre est donné pour qu’il puisse se retirer dans une zone plus abritée, car il est vraiment trop exposé aux tirs de l’artillerie ennemie qui sont d’une extrême violence.

 

Les 2 bataillons restants du 158e R.I. et le 149e R.I. doivent maintenir leurs positions actuelles.

Dans la soirée, vers 20 h 00 arrive l’ordre de stationnement. Le 2e bataillon du 149e R.I. va relever immédiatement le 31e B.C.P., dans la partie droite du sous-secteur. Deux compagnies en 1ère ligne, 2 en soutient (à la parallèle Nord et au chemin des Vaches) en liaison avec la 13e D.I. Les 2 compagnies du 1er B.C.P. resteront en 1ère ligne dans la partie nord depuis la sape T1 incluse jusqu’au boyau en Y, en liaison avec le 158e R.I..

Le 3e bataillon du 149e R.I. laisse deux compagnies en soutien du 1er B.C.P. au boyau en S et à la haie 4. Il retire ses compagnies qui sont les plus éprouvées pour les mettre aux abris du bois 5. Les 2 compagnies de soutien seront sous les ordres du capitaine Moreau qui commande les 2 compagnies du 1er B.C.P. qui sont  en 1ère ligne. Il en disposera en cas d’attaque ennemie.

Le 1er bataillon du 149e R.I. reste aux abris du bois 6. Il est en réserve, à la disposition du lieutenant-colonel commandant le secteur. Il doit également occuper la haie G avec un peloton, et un autre aux abris Métro.

 

 

                                    Tableau des tués pour la journée du 11 mai 1915

 

                      Tableau des blessés et des disparus pour la journée du 11 mai 1915

 

 

Les pertes pour cette journée sont de 37 tués au combat et de décédés des suites de leurs blessures, de 51 blessés et de 11 disparus.

 

Graphiques et brefs commentaires.

 

 

                  Tableau des tués pour la journee du 11 mai 1915 

  

 Une fois de plus, le 1er bataillon subit les pertes les plus importantes. Plus de la moitié des tués pour cette journée ont eu leurs actes de décès enregistrés dans les années 1920. Un bon nombre d’entre eux ne figurent pas dans la liste nominative des officiers et hommes de troupe du 149e R.I. « Morts pour la France » qui se trouve dans l’historique du régiment. Pour ces hommes, des erreurs ont pu se glisser dans les dates réelles de leurs décès. Quelques-uns sont certainement décédés le 9 où le 10 mai. Il est vrai qu’il devait être très difficile de comptabiliser les pertes en plein cœur des combats lorsque ceux-ci duraient plusieurs jours.

.

 

                  Tableau des blessés journée du 11 mai 1915

       

 

 Références bibliographiques :

Historique du régiment « 149e Régiment d’Infanterie » Épinal. Imprimerie Klein.

Fichier des « Morts pour la France » du site S.G.A./Mémoire des hommes.

Les archives du S.H.D. ont été consultées, ainsi que le J.M.O. de la 85e brigade, série  26 N 520/10.  

Legende photoLa légende qui peut se lire au dos de la photo nous fait savoir qu’elle a été prise le 11 mai 1915 dans le secteur du bois 5. L’homme photographié, selon toute vraisemblance (nom au dos de l'image, contexte)  est le sous-lieutenant Léon Hugon qui a été tué le 2 juin 1915.
  

 Un très grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à V. le Calvez, à A. Chaupin, à T. Cornet, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à l’association « Collectif Artois 1914-1915 ». 

20 juin 2011

Louis Viard (1889-1914)

                       Montage Louis Viard

 Louis Viard est né à Lœuilley en Haute-Saône, le 21 août 1889, il est le fils d’Honoré Viard et de Marie Louise Trécourt. De constitution peu robuste et d’un caractère doux et enjoué, il fréquente dans un premier temps l’école de son village. À quatorze ans, ses parents le confient à l’école Saint-Joseph de Dijon. En 1905, il quitte le pensionnat. De retour dans sa famille, il se livre aux travaux de l’agriculture. Soldat de la classe 1909, Louis Viard est incorporé au 149e R.I., en garnison à Épinal, où il ne fit qu’une année de service en raison de la faiblesse de sa constitution. Pourtant, il ne veut pas accepter d’être classé dans les services auxiliaires. Aussi, dès la mobilisation du 2 août 1914, il est appelé pour rejoindre son ancien régiment. Après une courte période de préparation à Jorquenay, près de Langres, Louis part pour le front le 14 août. C’est de ce jour qu’il date sa dernière lettre que ses parents devaient recevoir. Engagé immédiatement dans la mêlée qui faisait rage en Lorraine, le bataillon de Louis Viard reçoit l’ordre de couvrir la retraite de Sarrebourg et de « tenir » coûte que coûte. Il faut se sacrifier pour sauver le gros des troupes accablé par le nombre toujours croissant des Allemands. Telle est la mission confiée à son bataillon. Louis et ses camarades n’y faillirent point. Ils surent « tenir ». Mais à quel prix !

Il fut du nombre des victimes, il succomba selon toutes probabilités, dans les combats du 19 ou 20 août 1914, à la lisière de la forêt du Freiwald, territoire de Biberkirch. Ce ne fut que longtemps après que ses parents eurent la confirmation de la nouvelle. Puis en juillet 1919, son père découvrait enfin la fosse commune où Louis repose avec 25 de ses compagnons d’armes et deux Allemands.

 

Source :

« Livre d’or à la mémoire des morts de la Grande Guerre », d’après les documents recueillis de 1914 à 1919 par Louis Lagoutte. Association amicale des anciens élèves des frères et de l’école de Saint-Joseph de Dijon. Éditions Imprimerie Jobard 1921.

 

Un grand merci à P. Baude. 

149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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