Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
Archives
15 juillet 2011

Nouvelles lettres de Joseph Dechanet.

                   Joseph Dechanet

De nouveau un très grand merci à Y. Marain et à Y. Petrazoller, pour leurs autorisations de reproduire ici, de nouvelles lettres écrites par  Joseph Dechanet. Elles ont également été publiées dans un ancien  numéro des « cahiers Haut-Marnais ».

 

22 janvier 1915.

Me voici rescapé encore une fois, je ne sais comment : sur 13 sergents de ma compagnie nous sommes revenus 3. Quel tableau d’honneur, mon pauvre Henri ! Et nous allons y retourner. Cette fois… il est temps d’en finir car on se sent devenir fous, sous ces bombardements épouvantables… 50, 60000 obus pleuvent dans une journée, et l’on passe sur les morts, les blessés… Le sang nous éclabousse. Les têtes s’ouvrent, les jambes sautent… Combien on désire la mort ou la blessure qui donneront enfin la paix ! Me voici, à présent, l’un des plus anciens de la guerre, dans la compagnie. C’est bientôt mon tour. Nous en avons assez de vivre dans ces conditions. Puisses-tu ne jamais voir ce que nous voyons ! On croirait que le monde entier veut s’anéantir.

 

29 janvier 1915.

Ce matin, cela tonne encore, dans la même direction, d’une façon épouvantable. Cela chauffe mon cher ! Et l’on est en train d’en abattre par centaines. La terre est gelée, très durement, et c’est un temps propice aux grandes attaques, aux « coups durs ». Il fait un froid de chien. Pas de neige, mais qu’il fait grand froid ! Il fera bon demain soir, dans la tranchée… La situation, toujours la même. Ce n’est que lorsque le temps deviendra relativement beau que l’on tentera sans doute le grand coup. D’ici là, je pense que ce sera toujours la guerre de tranchées, les bombardements, les attaques localisées. Chaque jour, quelques morts, quelques blessés, une balle perdue, un instant de malchance… Nous ne « les » tenons pas encore. Heureusement, on ménage un peu plus nos existences que leurs chefs à eux ne ménagent les leurs. On les envoie à la mort en rangs serrés.

Mais nous n’avons accompli que la première moitié de notre tâche et il nous reste à faire un travail bien dur et combien sanglant. Le jour approche où il faudra, pour tout de bon, courir sur la tranchée allemande et coûte que coûte, rompre les lignes ennemies, passer, passer… les rejeter vers la frontière. Ce jour-là !... Enfin, on continuera à faire son devoir, jusqu’au bout.

 

Source :

« Les cahiers Haut-Marnais », cahiers édités par les archives départementales de la Haute-Marne. Cote 7 rev 168.

 

Un grand merci à M. Alzingre, à M. Bordes, à J.N. Deprez, à Y Marain, à F. Petrazoller et au Conseil départemental de la Haute-Marne.

Commentaires
149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
Visiteurs
Depuis la création 836 411
Newsletter
41 abonnés
149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.