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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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23 octobre 2020

Paul Emmanuel Marcel Roux (1894-1917)

Paul Emmanuel Marcel Roux

 

Paul Emmanuel Marcel Roux naît le 14 juillet 1894 à Annonay, un village ardéchois où vivent ses grands-parents paternels.

 

Le père, Alexandre Pierre, est âgé de 36 ans. Il est employé supérieur au crédit lyonnais de Garenne-Colombes. La mère, Marie Mélanie Sorlin, qui a le même âge que son époux, éduque déjà deux garçons.

 

Après plusieurs changements de domicile liés à la carrière du père, les Roux finissent par s’installer définitivement à Lyon.

 

Marie Mélanie décède en 1896. Simon, Jean et Marcel sont alors respectivement âgés de 9, 5 et 2 ans.

 

Genealogie famille Roux

 

La fiche signalétique et des services de Marcel Roux indique un degré d’instruction de niveau 3. Il sait, lire écrire et compter lorsqu’il quitte l’école communale.

 

Tout comme son père et ses frères, il rejoint le monde du commerce des finances et des titres, en travaillant comme employé de banque.

 

En 1911, Marcel vit avec son frère Jean et son père, qui ne s’est pas remarié, dans un appartement de la rue du Bât-d’Argent. Cette année-là, la famille Roux perd un autre de ses membres. Simon, le frère aîné, décède le 23 janvier à l’âge de 23 ans.

 

Le 1er août 1914, la France mobilise ses réservistes. Un nouveau conflit contre l’Allemagne est sur le point de commencer. Les classes en âge de porter l’uniforme sont toutes rappelées à leurs dépôts d’affectation. Les classes 1912 et 1913 sont déjà dans les casernes en train d’effectuer leurs obligations militaires. C’est le cas de Jean qui est sergent au 133e R.I..

 

Marcel est un futur appelé de la classe 1914. Il vient tout juste d’être déclaré « bon pour le service armé » par le conseil de révision. Le jeune homme espère conserver son emploi à la banque au moins jusqu’en octobre, période qui correspond à l’incorporation de sa classe. Mais ce n’est pas comme cela que les évènements vont se dérouler.

 

Marcel Roux reçoit sa feuille de route dans les tout derniers jours du mois d’août. Celle-ci lui demande de rejoindre Montélimar pour y intégrer une compagnie du 52e R.I..

 

Marcel arrive à la caserne Saint-Martin le 6 septembre 1914. Sa formation accélérée de fantassin débute aussitôt. Si une partie de sa classe part dès novembre et décembre, lui reste. A-t-il rencontré des difficultés dans l’instruction ? A-t-il été malade ? A-t-il été affecté à l’instruction de la classe 1915 ? Aucun document ne nous le dit.

 

Le soldat Roux est envoyé au bataillon de marche du 17e R.I. le 3 février 1915 où il achève son instruction. Le 12 mars, il est muté à la 10e compagnie du 149e R.I.. Avec cette compagnie, il participe aux combats de Verdun. Marcel Roux est nommé caporal le 1er avril 1916.

 

Le 149e R.I. quitte la région de Verdun à la mi-avril 1916. Après une brève période de repos, le régiment prend la direction de la Champagne pour venir s’installer dans un secteur situé entre les buttes de Tahure et celles de Mesnil.

 

Marcel est doué pour manier les chiffres. Cette compétence, liée à son ancienne profession, entraîne sa nomination aux fonctions de caporal fourrier à partir du 19 mai 1916.

 

Devenu agent de liaison, il part combattre dans la Somme. Début septembre 1916, le 149e R.I. est engagé dans le secteur de Soyécourt. 

 

L’année suivante, le régiment spinalien occupe plusieurs secteurs proches du chemin des Dames. Les zones investies sont plutôt calmes. Cette unité ne participera pas à une grande offensive avant la 2e décade du mois d’octobre 1917.

 

La photographie suivante a été réalisée le 10 avril 1917. L’identification de Marcel a été rendue possible grâce au livre de Francis Barbe « Et le temps, à nous, est compté ». Le même cliché figure à la page 179 de l’ouvrage. Les noms de ces sous-officiers qui appartiennent tous à la 10e compagnie du 149e R.I. sont inscrits à la droite de la photographie.

 

Marcel Roux porte un brassard de deuil au bras gauche en mémoire de son père qui est décédé en septembre 1916.

 

Les sous-officiers de la 10e compagnie

 

La bataille de la Malmaison débute le 23 octobre 1917. La 10e compagnie, avec le reste du 3e bataillon, est engagée en tête d’attaque durant la 2e phase de l’opération après avoir été en soutien durant la 1ère phase.

 

Pour en apprendre davantage sur cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte 1 journee du 23 octobre 1917 1er objectif

 

L’opération, qui fut minutieusement préparée durant plusieurs semaines, est un véritable succès malgré les pertes élevées en officiers et en hommes de troupe.

 

Le caporal-fourrier Roux fait partie des victimes. Il a été tué en même temps que l’aumônier Galloudec, les sous-lieutenants Monnoury et Dupuy-Gardel et le sergent Ferruit, suite à l’explosion d’un obus qui a éclaté à proximité du groupe.

 

Le sergent Alfred Marquand témoigne :

 

« Morand me conte l’odyssée de la compagnie depuis mon départ à la route de Maubeuge. Tout à bien marché jusqu’au bois, les vides étaient peu nombreux. La marche en avant dans les fourrés s’effectuait régulièrement lorsque nos 155 ont brusquement raccourci leur tir malgré les fusées à 6 feux. Et l’inévitable catastrophe est arrivée… Deux lieutenants, l’aumônier, Ferruit et le caporal-fourrier Roux y ont laissé la vie… »

 

Le caporal fourrier Roux est enterré dans le cimetière militaire de Condé-sur-Aisne par le groupe de brancardiers de la 43e D.I.. Sa tombe porte le n° 277.

 

Le corps de cet homme fut restitué à la famille dans les années vingt. Marcel Roux repose actuellement avec ses grands-parents paternels, ses parents, ses frères et quelques autres membres de la famille dans le cimetière communal d’Annonay.

 

Sepultures famille Roux

 

Décoration  obtenue :

 

Croix de guerre avec étoile de vermeil et étoile de bronze

 

Citation à l’ordre du régiment n°25 en date du 26/09/1916.

 

« D’une grande bravoure et d’un dévouement à toute épreuve lors des attaques du 4  septembre 1916, étant agent de liaison auprès du chef de bataillon, a rempli sa mission sous un violent bombardement et tirs de mitrailleuses permettant ainsi à son commandant  de compagnie de recevoir tous les ordres du bataillon. »

 

Citation à l’ordre du corps d’armée n° 175 du 8 novembre 1917.

 

« Chef de liaison de sa compagnie qu’il a entraîné à l’attaque dans les circonstances les plus périlleuses où il a trouvé la mort. Déjà cité pour sa belle conduite  au feu. Blessé une fois au cours de la campagne. »

 

Marcel Roux ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Sources :

 

Les fiches signalétiques et des services du caporal-fourrier Marcel Roux et du sergent Jean Roux ont été visionnées sur le site des archives départementales du Rhône.

 

Les actes d’état civil de la famille Roux et les registres de recensement de la ville de Lyon ont été consultés sur le site des archives municipales de Lyon et sur celui des archives départementales du Rhône.

 

« Et le temps, à nous, est compté » Lettres de guerre 1914-1919. Albert Marquand, présentation de Francis Barbe, postface du général André Bach. C'est-à-dire Éditions mille mots chuchotés. 2011.

 

La photographie de groupe est extraite du fonds Gérard (collection personnelle).

 

La photographie de la sépulture de la famille Roux a été trouvée sur le site « Généanet ».

 

Un grand merci à M. Bordes, à R. Mioque, à F. Barbe, à A. Carrobi, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes, aux archives départementales du Rhône et aux archives municipales de Lyon.

2 octobre 2020

Ismaël Marie Augustin Sourdon (1884-1915)

Ismael Marie Augustin Sourdon

 

Originaire du Vaucluse, Ismaël Marie Augustin Sourdon voit le jour le 15 novembre 1884 à Loriol.

 

Son père, Augustin Henri, a 32 ans. Ancien cultivateur, il travaille comme jardinier au château du village. Sa mère, Marie Louise Bourgeaud, est âgée de 24 ans. Ex-modiste, elle n’exerce plus de profession depuis que le couple est venu s’installer dans la propriété de madame de Lantiany.

 

La famille s’agrandit avec l’arrivée de la petite Fernande en 1887.

 

En 1891, les Sourdon vivent à Saint-Didier. Le père est devenu cocher. 

 

En 1901, Augustin Henri renoue avec son premier métier. Il est employé comme journalier par Étienne François Blauvac, un cultivateur local propriétaire de ses terres.

 

Ismaël termine sa scolarité avec un degré d’instruction de niveau 3. Il sait lire, écrire et compter lorsqu’il intègre le monde du travail.

 

Avec le temps, son père a fini par créer sa propre société de voiturier. Ismaël est salarié de la petite entreprise en 1906. Cette année-là, Marie Louise, qui a repris un emploi de repasseuse à son compte, donne vie à une seconde fille prénommée Julie.

 

Genealogie famille Sourdon

 

La santé d’Ismaël Sourdon est assez fragile. Il est ajourné pour faiblesse lorsqu’il se présente devant le conseil de révision pour la première fois en 1905. L’année suivante, il bénéficie d’un diagnostic identique.

 

En 1907, il est classé dans les services auxiliaires, toujours pour les mêmes raisons. Sa fiche matricule ne donne aucune indication sur une éventuelle formation militaire à cette époque. Elle nous dit simplement qu’Ismaël est passé dans la réserve de l’armée active le 1er octobre 1908.

 

Ismaël n’est pas concerné par les évènements de la mobilisation générale lorsque le 1er conflit mondial du XXe siècle débute en août 1914. Cependant, il a obligation de se présenter devant la commission de réforme d’Avignon le 30 octobre. Cette fois-ci, la médecine militaire est bien moins regardante concernant ses problèmes de santé. L’hécatombe des premières semaines du conflit oblige l’armée à faire un « recrutement large ». Il faut alimenter les dépôts régimentaires avec tout ce qui est disponible. Dans ce contexte, Ismaël Sourdon est classé dans le service armé.

 

Sa connaissance des chevaux entraîne son affectation au 2e régiment de dragons, une unité qui est logée dans des bâtiments lyonnais. Ismaël arrive à la caserne de la Part-Dieu le 1er décembre 1914. Handicapé par une hernie, il doit vite renoncer à ce régiment. Ses supérieurs le présentent pour un changement d’armes. Une commission réunie le 9 février 1915 l’envoie à l’infanterie. Le 26, l’ancien cavalier rejoint le dépôt du 158e R.I..

 

Le 21 juin 1915, nouvelle affectation ; le soldat Sourdon est muté au 149e R.I., le régiment frère de brigade du 158e R.I..

 

Ismaël intègre la 2e compagnie lorsqu’il rejoint son régiment qui combat en Artois depuis la fin du mois de décembre 1914.

 

Le 25 septembre 1915, le régiment spinalien participe à une importante attaque qui implique la totalité de la 43e D.I.. Les hommes du général Lombard reçoivent l’ordre de prendre le bois en Hache, une tâche ardue qui occasionnera de lourdes pertes. Le 149e R.I. est désigné comme réserve de division.

 

Le lendemain, les 2e et 3e bataillons passent à l’offensive. Le 1er bataillon reste en réserve.

 

Le 27 septembre 1915, la 2e compagnie, sous les ordres du capitaine Toussaint, rejoint le 3e bataillon du régiment en 1ère ligne. Ce jour-là, Ismaël est blessé.

 

Le soldat Sourdon est évacué à l’ambulance 4 du 13e corps qui est installée à Barlin. Il est impossible de le sauver. Ismaël décède le jour même.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

journee du 27 septembre 1915

 

Son acte de décès officiel est transcrit à la mairie de Saint-Didier le 23 novembre 1915.

 

Le corps de ce soldat fut probablement rendu à sa famille dans les années 1920.

 

Le nom de cet homme est inscrit sur le monument aux morts de la commune de Saint-Didier.

 

Ismaël Marie Augustin Sourdon ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Sources :

 

La Fiche signalétique et des services du soldat Sourdon, les actes d’états civils concernant sa famille ainsi que les registres de recensements des années 1891, 1896, 1901, 1906 et 1911 de la commune de Saint-Didier ont été consultés sur le site des archives départementales du Vaucluse.

 

Contrôle nominatif du 3e trimestre 1915 du 149e R.I. des malades et des blessés traités dans les formations sanitaires détenu par les archives médicales hospitalières des Armées de Limoges.

 

La photographie qui représente Ismaël Sourdon provient du site « Mémorialgenweb ».

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à J.M. Laurent, aux archives départementales du Vaucluse, aux archives médicales hospitalières des armées de Limoges et au S.H.D. de Vincennes.

18 septembre 2020

Barthélémy Joseph Géhin (1883-1974)

Barthelemy Joseph Gehin

 

Barthélémy Joseph Géhin naît le 12 janvier 1883, au Rupt de Bâmont, un hameau rattaché à la commune vosgienne de Saulxures-sur-Moselotte.

 

Sa mère, Marie Delphine Vanson, a 29 ans lorsqu’elle lui donne la vie. Son père, Désiré, est âgé de 34 ans. Delphine et Désiré sont tous deux cultivateurs.

 

Barthélémy est le second enfant d’une fratrie composée de 3 filles et de 2 garçons nés entre 1880 et 1897.

 

Rupt de Bamont

 

Il quitte l’école communale en maîtrisant l’arithmétique, la lecture et l’écriture. L’adolescent a la possibilité de poursuivre ses études durant une année supplémentaire en fréquentant le cours complémentaire, ce qui est rare pour un fils de paysans. Durant cette période, il acquiert quelques rudiments de la langue allemande.

 

Une fois sa scolarité achevée, Barthélémy rejoint le monde du travail pour exercer la même activité professionnelle que ses parents.

 

Plusieurs années de moissons et de récoltes s’écoulent avant que ce jeune vosgien doive penser aux obligations militaires. Son métier, aux tâches rudes, a fait de lui un homme solide.

 

Barthélémy est donc en très bonne condition physique lorsqu’il se présente devant le conseil de révision qui s’est réuni à la mairie de Saulxures. Sans aucune surprise, il est déclaré « bon pour le service actif » par le médecin militaire qui l’examine. Le futur conscrit est inscrit dans la 1ère partie de la liste de l’année 1904.

 

Le 1er novembre 1904, Barthélémy doit rejoindre le 21e R.I. qui tient garnison à Langres, mais ce n’est que quinze jours plus tard qu’il se présente à la caserne Turenne. La raison de ce retard n’est pas connue.

 

Son niveau scolaire lui permet de suivre les cours dispensés au peloton des élèves caporaux. Il obtient ce grade le 24 septembre 1905.

 

Barthélémy retourne à la vie civile le 11 juillet 1907 avec son certificat de bonne conduite accordé. Le caporal Géhin est rayé des contrôles du corps le 1er octobre 1907.

 

Il se marie le 2 mai 1908 à Cornimont avec Marie Léocadie Irma Jeangeorges. Le couple s’installe à Gerbamont. C’est dans cette commune que naîtront leurs 6 enfants.

 

Barthélémy est d’une grande habileté avec ses mains. Il fabrique lui-même le mobilier indispensable au foyer, lits, tables, armoires, rien ne lui fait peur.

 

Il confectionne également des râteaux et des sabots pour l’usage familial et de manière occasionnelle pour la vente, et cela, jusqu’à la fin de sa vie.

 

En 1910, le caporal Géhin est rappelé par le devoir militaire. Il est obligé de réintégrer la caserne Turenne pour effectuer sa 1ère période d’exercices qui a lieu du 29 novembre au 21 décembre.

 

L’année de ses 30 ans, ce père de deux enfants, devenu réserviste au 349e R.I., réalise sa 2e période d’exercices à Épinal du 14 au 30 mai 1913. Lorsqu’il laisse son uniforme à l’habillement, il pense probablement qu’il va être tranquille de ce côté-là pour un bon bout de temps, ne s’imaginant pas un seul instant que le monde va basculer dans une guerre mondiale dès l’année suivante.

 

L’ordre de mobilisation générale est décrété le 1er août 1914. Barthélémy doit être à son régiment le lendemain. Il laisse derrière lui son épouse avec ses trois enfants en bas âge. Il apprend qu’il est affecté au 149e R.I. dès son arrivée à la caserne Courcy.

 

Le caporal Géhin reste plusieurs mois au dépôt du régiment qui est venu s’installer à Rolampont après avoir fait un bref passage à Jorquenay. Il est chargé de former les nouvelles recrues.

 

Sa fiche matricule indique qu’il arrive dans la zone des armées le 8 novembre 1914.

 

Il a probablement quitté le dépôt du 149e R.I. le 3 novembre avec un renfort composé de 360 hommes, sous l’autorité du capitaine Retout. Ce dernier a pris la direction de la Belgique, où son régiment est engagé. Une fois sur place, Barthélémy est affecté à la 9e compagnie.

 

À partir de ce moment, il participe à tous les combats dans lesquels sa compagnie est impliquée.

 

Le 3 mars 1915, les Allemands lancent une vaste offensive-surprise sur les positions occupées par le 149e R.I., dans le secteur de Lorette. La 9e compagnie, qui est sous les ordres du capitaine Baril, est en 1ère ligne. Les pertes sont sévères. Barthélémy sort indemne de cette attaque qui fut probablement sa première véritable « expérience » de combat de grande ampleur.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

 

À la mi-juin 1915, le 149e R.I. participe à des combats très violents dans le secteur du fond de Buval. C’est au cours de l’un d’entre eux que le caporal Géhin est grièvement blessé. Le 16 juin, il est touché au bras, à un doigt et au genou par deux éclats d’obus. Un 3e éclat est venu briser une grenade qui se trouvait dans une des poches de son pantalon sans que celle-ci explose. Ce jour-là, la chance a vraiment été avec lui !

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

 

Le caporal Géhin est transféré à l'hôpital n° 34 de Rambouillet. Le 11 octobre 1915, Barthélémy poursuit sa prise en charge médicale à l’hôpital de Paramé (couvent de Notre Dame des Chênes) à Saint-Malo.

 

Fin décembre 1915, son état de santé s’aggrave. La fièvre monte, son pied s’infecte. L’infirmière en chef prévient la famille. Léocadie, son épouse, arrive à Saint-Malo le 7 janvier 1916 ; elle n’en  repartira que le 20.

 

Les médecins font tout pour sauver la jambe de Barthélémy, sans succès. Le 24 janvier 1916, il finit par passer entre les mains du chirurgien pour être amputé.

 

Durant son séjour à Paramé, une infirmière religieuse lui apprend à tricoter des chaussettes avec quatre aiguilles. Il en confectionne plusieurs pour ses enfants.

 

En avril 1916, Barthélémy est équipé d'une prothèse de jambe à l'hôpital n° 83 de Rennes.

 

Il obtient le statut de réformé n° 1 avec attribution d’une pension définitive à 85 % ; ceci fait suite à une décision prise par la commission de réforme de la préfecture d’Ille-et-Vilaine dans sa séance du 3 juin 1916 pour :

 

-  amputation de la cuisse droite au 1/3 inférieur.

 

-  raccourcissement de 3 cm de l’index gauche avec limitation de la flexion et limitation de la pronation.

 

Dégagé de toutes obligations militaires, il est renvoyé dans ses foyers et rayé des contrôles du corps.

 

Le 19 novembre 1920, la commission de réforme d’Épinal le maintient dans ce statut pour :

 

-  amputation de la cuisse droite au 1/3 inférieur.

 

-  bras gauche : perte de substance musculaire épicondylienne et pseudarthrose de l’articulation métacarpienne phalangienne de l’index avec résection de la 3e partie inférieure du 2e métacarpien et raccourcissement de 3 cm de l’index gauche avec limitation  de la flexion  et limitation de la pronation. 

 

Le 27 octobre 1932, son taux de pension est porté à 95 %.

 

Le 14 septembre 1960, cet ancien poilu du 149e R.I. est proposé pour une pension définitive de 100 % + un degré par décision de la commission de réforme de Nancy pour :

 

-  amputation de la cuisse droite au 1/3 inférieur.

 

- douleurs névritiques avec sensation de douleur dans le pied et dans le mollet (membre fantôme). Douleurs nocturnes avec insomnies, aggravation et  majoration.   

          

-  raccourcissement de 3 cm de l’index gauche avec limitation de la flexion et limitation de la pronation.

 

Le 1er septembre 1960, il est admis à recevoir cette pension définitive de 100 % + un degré à compter du 25 juin 1960, pension qu’il touchera jusqu’à son décès.

 

Barthélémy possède deux fermes mitoyennes à Gerbamont provenant d’un héritage. La première, qu’il exploite toute sa vie, a une superficie cultivable d’environ 8 ha. La seconde, la ferme du bas du Mettey, bien plus petite avec ses 3 ha, est louée.

 

Barthélémy Géhin décède le 27 janvier 1974 dans sa commune natale. Il a été inhumé dans le cimetière de Vagney.

 

Les decorations de Barthelemy Joseph Gehin

 

Citation obtenue :

 

Citation à l’ordre de la 85e brigade en date du 25 juin 1915 :

 

« A entraîné par son exemple de bravoure intrépide d’entrain et de ténacité, ceux qui l’entouraient dans les attaques successives du fond de Buval le 13 juin et jours suivants. »

 

Médaille militaire par ordre n° 3100 « D » du 20 juin 1916 :

 

« Très bon caporal, a été blessé très grièvement le 16 juin 1915 en entraînant son escouade à l’attaque. Amputé de la jambe droite. » Comporte l’attribution de la croix de guerre avec palme.

 

Il est fait chevalier de la Légion d'honneur par décret du 20 octobre 1963 (J.O. du 8 novembre 1963).

 

Pour connaître la généalogie de la famille Gehin, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Sources :

 

Fiche signalétique et des services et acte de naissance du soldat Gehin consultés sur le site des archives départementales des Vosges.

 

Les portraits de Barthélemy Gehin proviennent de la collection familiale appartenant à L. Delassause.

 

Le fond de carte à été réalisé par V. Le Calvez.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à L. Delassause, à V. Le Calvez, à la famille descendant de Barthélémy Joseph Gehin, aux archives départementales des Vosges et au service historique de la défense de Vincennes.

4 septembre 2020

Henri Félix Sauvage 1884-1915)

Henri Felix Sauvage

 

Henri Felix Sauvage est né le 8 février 1887 au domicile parental, dans le 4e arrondissement de la ville de Lyon. Son père, Charles Thomas Sauvage, est âgé de 31 ans ; sa mère, Adrienne Joséphine Bruyas, a 30 ans. Les parents vivent rue du Pavillon. Ils sont tous les deux tisseurs. Plus tard, la famille Sauvage réside au n° 9 de la rue Gigodot. Henri Félix est le second d’une fratrie composée de 4 enfants.

 

Genealogie famille Sauvage

 

Henri suit une scolarité qui lui permet d'acquérir les connaissances de base dispensées par l'enseignement primaire.

 

Adolescent, il apprend le métier de cartonnier. Il exerce cette profession durant quelques années, mais elle finit par ne plus lui convenir. À peine ses 18 ans atteints, il décide de s'engager volontairement pour une durée de trois ans.

 

Le jeune homme signe son contrat avec l’armée le 20 février 1905. Il choisit le 133e régiment d'infanterie, une unité qui tient garnison à Belley.

 

Son père décède en octobre 1905. Le 20 février 1906, Henri bénéficie d’une disponibilité liée à l'article 21 de la loi du 15 juillet 1889 en qualité de "fils aîné de veuve ". Son séjour dans ce régiment n'ayant donné lieu à aucun problème particulier, Henri obtient son certificat de bonne conduite.

 

L’année suivante, la vie militaire finit par lui manquer. Le 19 août 1907, il renonce à son exemption. Dès le lendemain, il intègre le 149e régiment d'infanterie d’Épinal en qualité de soldat de 2e classe.

 

Au terme de ses trois années d'engagement, Henri passe dans la réserve active le 20 février 1908, avec un nouveau certificat de bonne conduite.

 

Revenu à la vie civile, il réside à Hersin-Coupigny, du 11 août au 6 novembre 1908, chez Camille Nicaisse, un houilleur belge. À partir de cette date, Henri retourne vivre à Lyon. Il habite au n° 24-26 de la rue du Mail dans le quartier de la Croix Rousse. Il exerce la profession de voiturier.

 

Le jeune homme est condamné à un mois d'emprisonnement avec sursis pour abus de confiance, une sentence qui a été prononcée par le tribunal correctionnel de Lyon, le 15 juillet 1911.

 

Lorsque le 1er conflit mondial du XXe siècle éclate en août 1914, Henri Sauvage à obligation de rejoindre le dépôt du 149e R.I.. Le 4 août, il est à la caserne Courcy.

 

Affecté à la 9e compagnie, il participe à tous les combats du régiment dans les Vosges, dans la Marne, en Belgique et en Artois.

 

Le 29 avril 1915, Henri Félix Sauvage est condamné par le conseil de guerre de la 43e D.I. à 30 jours d'emprisonnement pour ivresse publique et manifeste.

 

Le 10 juillet 1915, il comparaît de nouveau devant cette même juridiction. Cette fois-ci, le soldat Sauvage doit répondre d'infractions nettement plus graves. Il lui est reproché les faits suivants :

 

- le 14 juin 1915, entre Boyeffles et Aix-Noulette a abandonné son poste en présence de l'ennemi.

 

- le 15 juin 1915, à Aix-Noulette, a refusé d'obéir à l'ordre de son supérieur le médecin aide-major de rejoindre la compagnie pour marcher contre l'ennemi, et ce, en présence de l'ennemi.

 

- le même jour, au même lieu, a refusé d'obéir au même ordre qui lui était donné par son supérieur, le caporal Benoît, du même régiment, et ce, en présence de l'ennemi.

 

- le 16 juin 1915, au même lieu, a refusé d'obéir au même ordre que lui a donné à nouveau le médecin aide-major Cleu, et ce, en présence de l'ennemi.

 

Le conseil de guerre qui siège au Quartier Général est installé à Hersin-Coupigny. Il est présidé par le chef de bataillon Perrin du 31e B.C.P.. Les assesseurs sont le chef d'escadron Perrier qui commande les trains régimentaires de la 43e D.I., le capitaine Roudet du 4e régiment de Chasseurs à cheval, commandant le 3e demi-régiment, le lieutenant Nestre du 31e B.C.P. et l'adjudant Petit du 12e R.A.C..

 

À l'unanimité, les membres du conseil de guerre retiennent la culpabilité de ce soldat. Il est condamné à la peine de mort.

 

C'est en vertu de l'ordre d'exécution du 11 juillet qu’Henri Félix Sauvage est fusillé le lendemain à 5 h 00 à Hersin-Coupigny.

 

La base des fusillés de la Première Guerre mondiale consultable sur le site « mémoire des hommes » est peu prolixe pour nous aider à comprendre la singularité du parcours de cet homme. Elle ne comporte que deux documents :

 

- la fiche du décès survenu le 12 juillet 1915 qui comporte une date de naissance erronée. Elle indique le 8 février 1884 au lieu du 8 février 1887. Ce soldat était de la classe 1907 et non de celle de 1904 comme indiqué par la fiche de présentation de son dossier.

 

- le jugement du conseil de guerre de la 43e D.I. du 10 juillet 1915 et le procès-verbal de l'exécution du 12 juillet 1915.

 

Le dossier d'instruction est manquant.

 

Ces documents sont bien trop succincts pour déterminer les raisons pour lesquelles Henri Félix Sauvage est passé de l'engagement volontaire à la condamnation à mort.

 

Il est cependant possible de suppléer aux lacunes de son dossier en puisant dans le dossier de procédure d’un autre condamné à  mort.

 

En effet, Henri Félix Sauvage a comparu le même jour qu'un autre soldat du 149e R.I., Eugène Favier, qui fut poursuivi pour des infractions similaires.

 

Ainsi, les notes d'audience rédigées lors de la comparution d'Eugène Favier devant le conseil de guerre, notamment celles qui relatent la déposition du médecin aide-major Cleu, révèlent ceci : le 14 juin 1915, au lieu de suivre leurs unités qui se rendaient dans le secteur d'Aix-Noulette pour combattre, ces deux soldats se sont arrêtés au poste de secours d'Aix-Noulette.

 

Ils se sont présentés en état d'ivresse devant ce médecin qui leur a alors intimé l'ordre de rejoindre sans délai leur compagnie respective (la 2e pour le soldat Favier, la 9e pour le soldat Sauvage).

 

Le caporal d'ordinaire du 149e R.I., entendu également comme témoin lors du procès de Eugène Favier, a déclaré que le lendemain, le 15 au matin, il avait lui-même constaté que les deux compères étaient en train de boire dans un débit de boissons à Aix-Noulette, et qu'ils avaient refusé, malgré une sévère mise en garde, de repartir au front.

 

L'interrogatoire d’Eugène Favier confirme que le 15 au matin, ils étaient bien allés boire à Aix Noulette après s'être esquivés du poste de police du 142e Régiment d'infanterie territoriale ; ils y avaient, tous deux, dormi la nuit du 14 au 15 juin 1915.  

 

Il révèle également qu'après une nouvelle nuit passée à la Malterie, ils étaient partis ensemble, le 16 juin 1915, en direction du front. Le duo s'est séparé lorsqu’ Henri Félix Sauvage, réfugié dans abri, n'a plus voulu en sortir.

 

Eugène Favier dit avoir poursuivi son chemin, seul, avant de revenir sur ses pas pour aller se faire examiner au poste de secours d'Aix Noulette. Sa blessure fut jugée insignifiante par l'intransigeant médecin qui lui réitéra l'ordre de remonter en ligne.

 

Henri Félix Sauvage s'est vu reprocher lui aussi un refus d'obéissance commis le même jour. Le chef de poursuite mentionné dans le jugement et l’absence de déclaration de témoins ne permettent pas de savoir s'il a cherché à se faire exempter avant de faire mine de rejoindre la zone de combat ou si, comme Favier, c'est après s'être remis en route qu'il a fait demi-tour pour retourner au poste de secours.

 

Bien que lacunaires, ces renseignements sont cependant suffisants pour constater la chose suivante :  c'est une consommation excessive d'alcool dans un débit de boissons à Aix-Noulette, juste avant le retour au front de sa compagnie, qui a donné le courage à Henri Félix Sauvage, non pas de retourner au combat, mais de passer à l'acte en refusant ostensiblement d'obéir aux injonctions de rejoindre ses camarades.

 

Dans un premier temps, l'alcool l'a sans doute aidé à supporter, comme tant d'autres, les conditions de vie désastreuses dans les tranchées et probablement à surmonter sa peur de mourir sur le champ de bataille ou d'y subir une blessure mutilante. Au fil du temps, son addiction aux boissons alcoolisées a petit à petit anéanti son sens du devoir et sa volonté de combattre.

 

Progressivement, elles ont pu lui donner la hardiesse de passer à l'acte sans prendre véritablement conscience des conséquences d'un refus d'obéissance ; il n’a probablement pas réalisé que ce « défi » à l'égard d'une institution fondée sur la discipline et l'obéissance lui vaudrait une condamnation à la peine de mort.

 

On peut également concevoir que leur situation personnelle respective, celle d’Henri Sauvage, engagé volontaire à deux reprises et celle d’Eugène Favier, mobilisé malgré la tuberculose, méritait, à leurs yeux, quelques égards. L’indifférence de l’armée à leur sort, a pu faire naître en eux un sentiment de rancœur et d’aigreur qui a pu être ressassé à loisir dans l’ivresse. Ce sentiment a pu les aider à franchir le pas de la désobéissance coupable.

 

Les poursuites ont été étendues à trois refus d'obéissance aux ordres donnés par le médecin aide-major Cleu et par le caporal Benoît de la 9e compagnie.

 

Ces refus réitérés de "monter aux tranchées" caractérisent de manière rigoureuse l'abandon de poste en présence de l'ennemi et rendent ainsi incontestable, sur un plan juridique, l'application de plein droit de la peine de mort à un tel crime.

 

Le conseil de guerre de la 43e D.I. a pris soin d'entendre les témoins, dont les dépositions avaient été recueillies au cours de l'instruction. Même si on ne dispose pas du dossier d'instruction concernant Henri Félix Sauvage, il est certain que le médecin aide-major Cleu, qui a déposé devant le conseil de guerre sur les circonstances des deux refus d'obéissance d’Eugène Favier, a également été entendu sur le cas analogue de désobéissance de son acolyte, jugé le même jour, lors de la même session.

 

Il est tout aussi vraisemblable que le caporal Benoît, qui n'était pas parvenu à le convaincre de rejoindre ses camarades de combat, a été appelé à témoigner lui aussi, comme l'ont été ceux qui avaient essuyé un semblable refus de la part de Eugène Favier.

 

Pour en savoir plus sur le soldat Favier, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Eugene Louis Joseph Favier

 

Nous sommes loin des pratiques de certains conseils de guerre qui consacraient peu de temps à l'examen d'un dossier et expédiaient rapidement les affaires, à l'instar de ce qu'expliquait un commissaire du gouvernement à un nouveau défenseur : " Vous comprenez c'est simple comme bonjour. Par exemple, ce soir, je vous envoie une convocation ; demain, vous voyez le dossier – dix minutes – l'après-midi, vous voyez votre client – dix minutes – et le lendemain, vous plaidez votre affaire – dix minutes. Ce n’est pas plus malin que ça. …des témoins ? Vous n'en avez pas souvent. Il y a une circulaire du grand quartier pour dire qu'on ne doit pas déranger, sauf en cas de nécessité absolue, un témoin du front… Oui, vous voyez que votre rôle est fort peu de chose. On peut même dire presque rien"- (Raymond Lefèvre et Paul Vaillant Couturier – La guerre des soldats – Ernest Flammarion Éditeur – 1919).

 

Un autre défenseur, plaidant devant un conseil de guerre différent, confirme ce fonctionnement expéditif en ces termes : "Pas très intéressants les clients. Des déserteurs en masse, des ivrognes, je vais expédier leur cause le plus vite possible"(le 15 février 1917) " Nous avons établi un record : douze affaires en une heure et demie" (le 2 mars 1917)- (André Kahn, Journal de guerre d'un juif patriote -1914/1918,  Éditions Jean Claude Simoën – 1978).

 

Nous ne disposons pas de renseignements précis sur l'exécution d’Henri Félix Sauvage, le procès-verbal ne contenant que les strictes mentions prévues par la loi. Nous savons seulement que l'ordre d'exécution a été donné le 11 juillet 1915 et que le condamné a été passé par les armes à 5 h 00 par un piquet du 149e R.I. en présence des troupes du cantonnement en armes.

 

Le corps de ce soldat repose, comme celui d’Eugène Favier, dans le carré militaire du cimetière d’Hersin-Coupigny. Sa sépulture porte le n° 153bis.

 

 

Sources :

 

Dossiers individuels des soldats Henri Félix Sauvage et d’Eugène Louis Joseph Favier qui se trouvent dans la base de données des militaires et civils qui ont été fusillés durant le 1er conflit mondial sur le site « mémoire des hommes ».

 

Le registre de recensement réalisé en 1901 de la ville de Lyon et les actes d’état civil de la famille Sauvage ont été consultés sur le site des archives départementales du Rhône.

 

Le texte qui suit a été rédigé par J.P. Poisot auquel j’ai ajouté des informations complémentaires sur la jeunesse du soldat Sauvage et quelques précisions. Qu’il soit remercié pour son travail qui a permis de reconstruire le parcours militaire de cet homme.

 

Merci également à M. Bordes, à A. Carobbi, au Service Historiques de la Défense de Vincennes et aux archives départementales du Rhône.

28 août 2020

Jean Marie Louis Archenoul (1884-1956)

Jean Archenoul

 

Originaire de la Bretagne, Jean Marie Louis Archenoul est né le 24 septembre 1884 à Lande-Chauve, un hameau dépendant de la commune de Pleine-Fougères dans le département de l’Ille-et-Vilaine.

 

Le père, Jean Marie, à 70 ans lorsque son fils voit le jour. La mère, Marie Jeanne Renault, est âgée de 38 ans. Elle a déjà donné vie à une fille en 1876. La sœur aînée de Jean se prénomme Joséphine. Les parents exercent le métier de cultivateur.

 

Le 26 septembre 1885, le père décède, deux jours après le 1er anniversaire de Jean. La mère, qui se retrouve veuve à presque 40 ans, éduque seule ses deux enfants, tout en continuant de travailler à la ferme pendant plusieurs mois.

 

Elle se remarie en 1887 avec Mathurin Beaupère, un voisin qui travaille comme laboureur. Cet homme est alors âgé de 58 ans. Sept ans plus tard, Marie Jeanne est de nouveau veuve.

 

À cette époque, Jean est âgé de 8 ans. Il fréquente l’école communale de Pleine-Fougères. L’instituteur et le curé du village remarquent vite les capacités de cet enfant pour les apprentissages scolaires.

 

Ecole des garçons de Pleine-Fougères

 

La fiche matricule de Jean indique un degré d’instruction de niveau 3. Il sait donc lire, écrire et compter. Mais son niveau est bien supérieur à celui de la plupart des hommes qui possèdent ce degré 3 d’instruction. L’excellente maîtrise des trois matières que sont la lecture, l’écriture et l’arithmétique ainsi que l’ensemble de ses connaissances scolaires permettent à Jean de poursuivre des études qui le mèneront jusqu’à l’école normale de Rennes.

 

Au cours de sa formation d’enseignant, le jeune homme n’oublie pas la famille. Dès qu’il a des vacances, il retourne au pays aider sa mère et sa sœur aux travaux de la ferme.

 

Devenu instituteur public en 1903, Jean Archenoul enseigne à Sens-de-Bretagne. L’année suivante, il pratique devant le tableau de l’école communale de Betton.

 

En 1904, il obtient un diplôme de maître de gymnastique.

 

Le temps de la conscription approche. Après son recensement en décembre 1904, Jean Archenoul passe devant le conseil de révision qui le déclare « bon, service armé ». Il est appelé pour le devoir républicain, l’année de ses 21 ans. Jean Archenoul est incorporé au 47e R.I. de Saint-Malo en octobre 1905.

 

Son niveau d’études lui permet de suivre les cours de l’école des caporaux. Il est nommé dans ce grade le 21 février 1906. C’est un excellent tireur. Sa maîtrise du Lebel lui fait obtenir un rang de 1ère classe.

 

Le 18 septembre 1906, le caporal Archenoul est envoyé en disponibilité avec l’obtention de son certificat de bonne conduite. Jean est resté en tout et pour tout un peu plus de onze mois sous l’uniforme quand la majorité de ses camarades de classe firent deux ans. Aucun passe-droit, juste une application de sa dispense article 21 comme fils de veuve. Il existait toute une série de dispenses nécessitant une justification très codifiée, permettant de faire un service actif écourté.

 

Une fois la conscription terminée, Jean Archenoul réintègre ses fonctions d’instituteur. En 1906, il fait la classe aux élèves du village de Cancale puis à ceux de Janzé l’année suivante. Ce changement de domicile le fait automatiquement rattacher à la subdivision militaire de Rennes à partir du 8 septembre 1908.

 

C’est dans cette commune qu’il fait la connaissance de Julia Briand, une institutrice âgée de 24 ans. Il l’épouse le 1er août 1908. Une petite fille prénommée Jeanne naît de cette union en 1909.

 

L’année suivante, Jean Archenoul est de retour à Saint-Malo pour y accomplir sa 1ère période d’exercice. Il lui faut de nouveau revêtir l’uniforme pour quelques semaines. Ce retour à la vie militaire dure du 24 août au 20 septembre 1910.

 

Sa profession et les qualités montrées à cette occasion expliquent que Jean Archenoul fût ensuite nommé sergent fourrier à partir du 15 novembre suivant.

 

En novembre 1911, l’instruction publique impose une mutation à la famille Archenoul. Elle doit quitter la Bretagne pour aller s’installer dans les Vosges.

 

Jean Archenoul passe à la subdivision d’Épinal. Militairement, il dépend maintenant du 149e R.I..

 

En 1913, Jean Archenoul se présente devant un jury d’examen qui le juge digne d’obtenir le certificat d’aptitude au professorat commercial dans les écoles pratiques de commerce et d’industrie. Il devient alors professeur de français à l’école nationale professionnelle de commerce et d’industrie à Épinal.

 

Cette année-là, il doit également faire, au sein des effectifs du 149e R.I., sa 2e période d’exercice qui a lieu du 18 août au 3 septembre.

 

Le 1er conflit du XXe siècle contre l’Allemagne vient interrompre sa vie d’enseignant. Comme des milliers de Vosgiens, Jean Archenoul est rappelé à l’activité militaire par l’ordre de mobilisation générale du 2 août 1914. Ce jour là, il a obligation de se rendre à la caserne Courcy pour rejoindre, en tant que réserviste, les effectifs de la C.H.R. du 149e R.I. pour y occuper un poste administratif.

 

Le 1er septembre 1914, Jean Archenoul est nommé sergent-major. Il ne souhaitera pas aller plus haut dans la hiérarchie.

 

Jean fait l’intégralité du conflit au sein de la C.H.R. qu’il ne quitte que pour aller en permissions. Il fallait alors, avant les effusions des retrouvailles avec la famille, ôter les poux, se laver sérieusement. Ces débuts de permission étaient un moment particulièrement difficile à vivre pour sa fille.

 

 

Durant les quatre années du conflit, la partie administrative de la C.H.R. à suivi le 149e R.I. en marge des zones de combats, dans les Vosges, dans la Marne, en Belgique, en Artois, à Verdun, dans la Somme, au chemin des Dames et dans les Ardennes pour ne citer que les principales régions où le régiment vosgien a été exposé. Le sergent-major Archenoul a toujours été présent.

 

En Artois en 1915

 

Jean Archenoul est un homme cultivé ; il aime dessiner. Dès qu’il en a la possibilité, il réalise des dessins au crayon noir et aux crayons de couleur sur un petit carnet de croquis. Il commence à faire des photographies en 1915.

 

Durant ces longues années de guerre, Jean a eu la chance de ne pas être blessé et de ne pas avoir été gazé.

 

Il est mis en congé de démobilisation le 18 mars 1919 en même temps que les autres hommes de sa classe.

 

Entouré de sa femme Julia, de sa fille Jeanne et de sa belle-mère, il retrouve son poste de professeur de lettres à l’école nationale professionnelle d’Épinal.

 

Ecole nationale industrielle et commerciale des Vosges

 

Politiquement, Jean Archenoul est un homme de gauche. Il fut membre et secrétaire de la section spinalienne de la ligue des droits de l’homme et adhérent à la S.F.I.O. d’Épinal où il a également exercé les fonctions de secrétaire.

 

Il est l’un des fondateurs de l’hebdomadaire socialiste Le Travailleur Vosgien, signant ses articles sous le pseudonyme de Luc Rohanne, une anagramme construite à partir de son prénom et de son nom de famille.

 

Jean Archenoul est également vice-président du Photo-Club spinalien.

 

Il se met à la peinture de façon régulière à partir de l’année 1921.

 

En 1922, Jean Archenoul participe, aux côtés de L. Renaux, à l’organisation d’une éphémère fédération socialiste unitaire des Vosges avant de retourner à la S.F.I.O..

 

Le 10 octobre 1924, il passe dans la réserve du 158e R.I..

 

Jean Archenoul fut également candidat aux élections sénatoriales de 1927 dans les Vosges, au conseil général dans le canton d’Épinal en 1931 et, à plusieurs reprises, au conseil municipal d’Épinal.

 

Il obtient sa carte d’ancien combattant en 1932.

 

Jean Archenoul prend sa retraite en 1937. Il s’installe dans le XIVe arrondissement de la capitale, au 3 rue Poiret de Narçay, près de la porte d’Orléans.

 

Il décède le 28 juin 1956, à l’âge de 70 ans, aux Riceys ; c’est un petit village situé dans le département de l’Aube.

 

Les Riceys

 

Pour prendre connaissance de la généalogie de la famille Archenoul, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Marqué par le conflit, Jean Archenoul ne parla que très peu de ses cinq années passées sous l’uniforme et toujours de manière allusive et générale. Il a laissé de nombreuses photographies, des dessins et une correspondance qui permettent  de retrouver les grandes étapes de son parcours.

 

Sources :

 

Fiche signalétique et des services lue sur le site des archives départementales de l’Ille-et-Vilaine.

 

Dossier des instituteurs nés avant 1900 consultable aux archives départementales d’Ille-et-Vilaine.

 

Une grande partie des informations concernant Jean Archenoul ont été fournies par sa petite-fille.

 

Un grand merci à M. Bordes, à J. Breugnot, à A. Carobbi, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales de l’Ille-et-Vilaine et de Vosges..

10 juillet 2020

Georges Joseph Roger de Parseval (1893-1968).

Georges Joseph Roger de Parseval

Années de jeunesse

Originaire du département du Loiret, Roger Georges Joseph de Parseval voit le jour le 13 avril 1893 à Orléans. Il est le fils aîné de Paul Édouard et de Léonie Marie Virginie Escallier. À sa naissance, son père a 31 ans. Il exerce les fonctions de lieutenant au 46e R.I.. Sa mère est âgée de 30 ans.

Les Parseval donnent vie à 5 autres enfants. Georges fête ses neuf ans l’année où son plus jeune frère vient au monde.

Genealogie famille de Parseval

La fiche signalétique et des services de cet homme, consultable sur le site des archives départementales des Vosges, indique un degré d’instruction de niveau 5.

Georges a poursuivi ses études jusqu’au baccalauréat es lettres dont il a obtenu les 2 parties. C’est un jeune homme qui maîtrise bien la langue allemande.

Première formation sous l’uniforme

À l’âge de vingt ans, il est reçu à l’École spéciale militaire par décision ministérielle du 23 septembre1913. Pour prétendre suivre les cours, Georges doit absolument sceller un contrat avec « la grande muette ». Le 28 octobre 1913, il se rend à la mairie d’Épinal pour y signer un engagement volontaire d’une durée de 8 ans. Sa décision est maintenant définitive, il suivra les traces paternelles.

Les premiers enseignements lui sont donnés à partir du 6 novembre 1913. Il fait partie des élèves de la 98e promotion saint-cyrienne dite promotion de la « Croix du drapeau ». Tout comme ses camarades, il va lui falloir travailler dur. À ce moment-là, tous ces futurs officiers sont bien loin de s’imaginer qu’ils ne pourront pas aller au bout de leurs études.

Les évènements internationaux qui imposent à la France la mobilisation générale en août 1914 brisent net la formation de cette promotion.

Au 149e R.I..

Affecté au 149e R.I. le 3 août 1914, Georges de Parseval est nommé sous-lieutenant le 6 août. Il reste au dépôt de Langres jusqu’au 14 août, ce qui lui laisse un peu de temps pour se préparer à ses nouvelles fonctions. Le manque d’expérience doit se faire ressentir. Donner des ordres à des hommes beaucoup plus âgés que soi en début de carrière ne doit pas être aisé.

Ce jour-là, le sous-lieutenant de Parseval part avec un renfort composé de 531 hommes en direction du régiment qui est en Alsace. Tous ces soldats doivent venir combler les pertes subies au cours du baptême du feu qui a eu lieu, cinq jours auparavant, du côté de Wisembach, à proximité de la frontière.

Le 16 août, Georges arrive avec un 1er renfort de 260 combattants à Saint-Blaise-la-Roche. L’église du village s’apprête à sonner les onze coups du matin.

Le colonel Jean Louis Menvielle affecte aussitôt Georges comme chef de section à la 1ère compagnie, sous les ordres du lieutenant Pierre Grüneissen depuis le 10 août.

Au cours des jours suivants, Georges va devoir effectuer de longues et pénibles marches en attendant les évènements d’Abreschviller.

Pour en savoir plus sur cette période, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte journee du 21 aout 1914

Le 25 août 1914, Georges est blessé dans le secteur de Thiaville. Aux alentours de 7 h 00, sa section est en train d’exécuter une contre-offensive par bonds de tirailleurs, pour protéger le gros du régiment qui bat en retraite.

Georges est atteint d’une balle qui pénètre à hauteur de l’oreille gauche. Cette balle est ressortie par le côté droit du menton avant de venir traverser le coude droit et finir sa course vers le sol. Ces deux blessures en séton le font évacuer vers l’arrière pour plusieurs mois.

Pour en savoir plus sur cette période, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte journee du 25 aout 1914

Ses soins durent jusqu'en décembre 1914. Le 20, le sous-lieutenant de Parseval rejoint temporairement le dépôt du 149e R.I. qu'il quitte dès le 5 janvier 1915 ; il va retrouver le régiment qui combat maintenant dans un secteur sensible du Pas-de-Calais, du côté de Notre-Dame-de-Lorette.

Le 23 avril 1915, il est touché par un éclat d’obus à la tête. Heureusement pour lui, cette blessure n’est pas très grave, il peut conserver ses fonctions.

Nommé lieutenant le 5 mai, Georges de Parseval est de nouveau blessé le 9 mai. Cette fois-ci, un éclat d’obus lui inflige une plaie en séton à la face externe de la cuisse droite alors qu’il entraîne sa section à l’attaque.

Il est amené au poste de secours. La blessure est sérieuse, le jeune officier va devoir être évacué vers l’arrière pour la seconde fois depuis son arrivée au régiment spinalien. Le 8 juin 1915, il est décoré de la croix de guerre avec une citation à l’ordre du C.A. pour l’action qu’il a menée à Aix-Noulette.

Pour en savoir plus sur la journée du 9 mai 1915, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte journee du 9 mai 1915

Le 24 juillet 1915, Georges de Parseval quitte le dépôt des convalescents de Rennes. Le 24 août, c’est le retour au dépôt du 149e R.I.. Un nouveau départ pour le front n’est pas envisagé. Il lui faut d‘abord effectuer un stage au centre d’instruction des mitrailleurs à Chaumont où il doit se rendre quatre jours plus tard.

Ses compétences et ses bons résultats lui offrent la possibilité de devenir instructeur aussitôt après la fin des cours. Le lieutenant de Parseval retrouve le dépôt du 149e R.I. le 23 octobre 1915.

Le 3 décembre, il prend le commandement d’une compagnie du 9e bataillon du 149e R.I., un poste qu’il conserve durant plusieurs mois.

Le 24 septembre 1916, il part en renfort, envoyé à la 14e compagnie du dépôt divisionnaire de la 43e D.I..

Le 1er octobre, c’est le retour en 1ère ligne. Georges de Parseval est, dans un premier temps, versé à la 3e compagnie du régiment avant de rejoindre la 1ère compagnie à partir du 13 octobre.

Le 149e R.I. combat dans un secteur mouvementé de la Somme depuis le début du mois de septembre 1916. Le lieutenant obtient sa seconde citation à l’ordre du C.A. le 6 novembre 1916.

Le même jour, il passe à l’état-major du régiment pour y exercer les fonctions de capitaine adjoint au chef de corps. Le grade de capitaine lui est attribué à titre définitif le 3 décembre 1916.

Vingt jours après, le lieutenant-colonel Pineau écrit ceci dans le feuillet du personnel de son subordonné :

« Jeune commandant de compagnie très allant, plein d’énergie, a fait preuve de très belles qualités militaires pendant la période des attaques. Adjoint au chef de corps, montre une assez grande aptitude à ces fonctions. Fera certainement très bien dès qu’il aura l’habitude de la paperasse. »

Le cliché suivant montre le lieutenant-colonel Pineau en présence de Georges de Parseval qui porte le fanion du régiment.

Fanion du 149e R

Paul Francis Pineau quitte le 149e R.I. le 13 mai 1917. Il vient tout juste de passer le commandement au lieutenant-colonel Boigues. Ce jour-là, il fait ses adieux à l’état-major du régiment devant l’entrée du château Belleau ; le capitaine de Parseval est présent.

Devant le chateau Belleau

En juin 1917, Georges est photographié dans le Soissonnais au P.C. de la sablière du bois Marcon avec deux de ses camarades non identifiés.

Au P

Le 29 septembre 1917, c’est au tour du colonel Boigues de l’évaluer. Voici ce qu’il note : « Très intelligent, très bien élevé, ayant de grandes qualités de jugement et de méthode, la capitaine de Parseval est un adjoint précieux pour un chef de corps. Son esprit de décision, sa grande autorité et son zèle le classent comme officier parmi les meilleurs. A tout ce qu’il faut pour un très brillant avenir.»

Le 23 octobre 1917, l’attaque dite de la Malmaison est lancée. Le capitaine de Parseval occupe toujours sa charge de capitaine adjoint. Il gagne sa 3e citation à l’ordre du C.A. au cours de ces évènements.

Georges de Parseval quitte le 149e R.I. à la mi-février 1918.

Avant l’armistice

Durant les six semaines qui suivent, il assiste aux cours du centre d’état-major de Senlis. Le capitaine de Parseval y montre beaucoup d’application sans être payé en retour.

Le 1er avril, il entre au C.I.D. 43 après une interruption de son stage au C.E.M. de Senlis. Le capitaine est ensuite détaché à l’E.M. de l’I.D. 43 en attendant de se présenter au C.E.M. de Melun à partir du 27 mai 1918. À sa sortie de l’école d’état-major, il retrouve son poste à l’E.M. de l’I.D. 43 qui se trouve être en pleine bataille. Cette division est en train d’attaquer la puissante position Hunding en Champagne. Georges apprend la mort de son frère Alexandre, un tout jeune capitaine âgé de 22 ans qui servait au 149e R.I.. Georges et Alexandre se sont longtemps côtoyés dans cette unité.

Pour en savoir plus sur le capitaine Alexandre de Parseval, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Alexandre de Parseval

Les années après guerre

Le 5 janvier 1919, le capitaine de Parseval est nommé adjoint à l’administrateur supérieur de Wiesbaden. Il se trouve de nouveau sous les ordres du lieutenant-colonel Pineau.

Le 31 mai, Georges retourne à l’école spéciale militaire. Le lieutenant-colonel qui commande le groupe rédige le petit texte suivant dans son feuillet individuel de campagne : « Nature ouverte et sympathique. Intelligence vive, bien équilibrée et bien orientée. Possède une bonne instruction générale et une instruction militaire. A travaillé avec intérêt et régularité. Vigoureux, tenue et éducation absolument irréprochables. A obtenu la mention bien. »

Le 9 octobre 1919, il rejoint son ancien régiment du temps de guerre pour y prendre le commandement d’une compagnie durant deux mois. Le 9 décembre, il quitte le 149e R.I. pour aller à l’E.M. de la 13e D.I., division sœur de la 43e D.I. qui forme, avec elle, le 21e C.A..

Georges de Parseval est mis à la disposition du général commandant en chef des armées d’Orient, suite à une décision ministérielle prise le 19 février 1920.

Le 18 mars, peu de temps avant de s’embarquer pour la Turquie, il épouse Louise Élodie Gaze à Sablon, une petite commune iséroise.

Le 26 mars 1920, Georges est employé au 2e bureau de l’état-major du corps d’occupation de Constantinople, affecté pour ordre au 45e R.I.. En mai 1920, il est désigné pour occuper un poste à l’état-major particulier d’infanterie avant d’être muté à l’état-major du C.O.C. le 1er octobre 1920.

Constantinople

Le capitaine de Parseval est rapatrié le 9 septembre 1921. Bénéficiant d’une permission de 114 jours, il se rend d’abord à Paris avant d’aller à Sablon.

Une décision ministérielle en date du 9 janvier 1922 l’affecte au 172e R.I., une unité qui prend part à l’occupation de la Rhénanie ; il y est affecté jusqu’à la dissolution du régiment qui a lieu au mois d’avril 1923.

De retour en France, Georges est muté au 25e B.C.A.. Il fait un stage à l’école normale de gymnastique et d’escrime de Joinville du 16 avril et le 28 juillet 1923 avant de retourner au 25e B.C.A..

25e B

L’activité sportive intense qu’il subit au cours de ce stage réveille probablement les vieilles blessures de guerre. Georges est proposé pour l’obtention d’une pension temporaire de 15 %; la raison en est un reliquat d’une plaie en séton au coude droit et un reliquat d’une transfixion du plancher buccal par balle. Cette décision est prise par la commission de réforme de Nice en date du 15 octobre 1924.

Le 29 août 1925, il traverse la méditerranée à destination du Maroc. Le 2 septembre, il est à Casablanca pour y occuper un poste à l’E.M. de la 6e brigade. Sa présence sur le sol africain est brève. Le 21 novembre 1925, il est de retour sur l’hexagone pour rejoindre le dépôt du 25e B.C.A. à Menton.

Le capitaine de Parseval prend ensuite le commandement des postes d’hiver et des écoles de ski du 15e C.A., à partir du 16 décembre 1925. Le 9 mars 1926, victime d’un accident de montagne, il se fait une fracture du péroné gauche doublée d’une entorse tibio-tarsienne. Guéri après plus de 4 mois de soins et de convalescence, il est envoyé au 31e B.C.P. à compter du  23 juillet 1926. Le 10 août, il occupe les fonctions d’adjoint au chef de corps, un poste qu’il maîtrise bien.

Vers de plus hautes fonctions

Poussé par ses supérieurs, il est reçu à l’École de guerre. Georges de Parseval doit d’abord effectuer toute une série de stages avant de pouvoir suivre la formation théorique.

Il va à l’école d’application d’artillerie du 13 au 31 mars 1928, au centre de transmission de Versailles du 1er au 15 avril 1928, au 506e régiment de chars de combat du 15 au 30 avril 1928, dans l’aviation du 1er au 31 mai 1928, au 4e régiment d’artillerie divisionnaire du 15 juin 1928 au 15 août 1928 et pour finir au 11e régiment de dragons du 16 août 1928 au 30 septembre 1928.

Le 28 septembre 1928, la commission spéciale de Colmar le propose pour une pension permanente de 15 % pour ses séquelles de blessure de guerre .

Les cours de l’École supérieure de guerre durent du 1er novembre 1928 au 31 octobre 1930. Georges obtient son brevet d’état-major.

Diplôme en poche, il est mis à la disposition du commandant supérieur des troupes du Levant.

Le 14 novembre 1930, Georges de Parseval est affecté à l’état-major des troupes du Levant en tant que stagiaire, puis à l’état-major du commandement des troupes du territoire de Damas, du Djebel-Druze et du Hauran.

Du 15 octobre 1931 au 15 décembre 1931, le capitaine de Parseval accomplit un stage au 39e R.A.R. à Rayak, une petite ville libanaise située à 62 km de Beyrouth, en vue d’obtenir son brevet d’observateur en avion.

Rayak

Le 15 janvier 1932, il est nommé chef d’état-major du commandement des troupes des territoires de l’Euphrate. Le 29 octobre 1932, il est cité à l’ordre de la division du Levant.

Il quitte les troupes du Levant pour convenance personnelle avant la fin de son temps de séjour. Le 22 février 1933, le capitaine de Parseval est muté à l’état-major de la 16e région militaire de Montpellier après avoir profité de son congé de fin de campagne.

Promu au grade de chef de bataillon le 14 décembre 1933, il est envoyé au 99e régiment d’infanterie alpine à Modane à partir du 25 mai 1934. Georges de Parseval est mis à la tête du 4e bataillon de ce régiment pour y effectuer son premier temps de troupe en tant que commandant. Suite à une réorganisation, ce bataillon est renommé 71e bataillon alpin de forteresse à partir du 16 octobre 1935.

Son temps de commandement s’achève le 9 août 1936. Le chef de bataillon de Parseval est ensuite affecté à l’état-major du gouvernement militaire de Lyon et de la 14e région militaire où il est fait officier de la Légion d’honneur le 13 décembre 1938.

Le 27 août 1939, il passe à l’état-major du 1er corps d’armée avec lequel il fait la campagne de France à partir du 2 septembre 1939. Le 1er juillet 1940, il est cité à l’ordre de la division.

Le 7 juillet, Georges occupe un poste à l’état-major de la 17e région militaire à Toulouse. Le 16 octobre, il passe à l’état-major du général commandant supérieur des troupes du Maroc.

Promu au grade de lieutenant-colonel le 25 mars 1941, il est envoyé au 8e régiment de tirailleurs marocains le 30 août. Le 25 février 1942, il est affecté au 4e régiment de tirailleurs marocains.

Le 18 janvier 1943, Georges de Parseval reçoit le commandement du 3e régiment de tirailleurs marocains, un régiment qui vient tout juste d’être reconstitué à partir de compagnies des 2e, 4e et 6e régiments de tirailleurs marocains.

Il est promu au grade de colonel le 25 septembre 1943. Le 12 novembre 1943, il est nommé chef d’état-major de la division de Casablanca.

Le colonel de Parseval est admis à la retraite le 16 mars 1946. Il est nommé général de brigade dans la section de réserve le 1er juillet 1946.

Le 6 février 1950, il est fait commandeur de la Légion d’honneur.

Son épouse Louise Élodie Gaze décède en 1963. Il se remarie la même année avec Sidonie Rose Marie Mazières.

Roger Georges Joseph de Parseval décède le 29 juillet 1968 à l’hôpital d’instruction des armées Sainte-Anne de Toulon.

Les decorations du général Georges de Parseval

Décorations obtenues :

Croix de guerre avec 3 étoiles de vermeil.

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 48 du 8 juin 1915 :

« Officier plein d’allant, a entraîné sa section à l’attaque des tranchées allemandes au cours du combat de Lorette le 9 mai. Blessé au cours de cette opération (2e blessure). »

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 119 du 6 novembre 1916 :

« Jeune commandant de compagnie plein d’allant et de bravoure, déjà blessé 3 fois. Du 16 au 21 octobre 1916, a grandement contribué à la mainmise sur un point d’appui et à l’établissement de notre première ligne au contact de l’ennemi. En a assuré, par son énergie l’organisation et la conservation. »

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 175 du 8 novembre 1917 :

« A assuré avec un zèle et un dévouement de tous les instants, aux côtés du chef de corps, l’organisation de l’attaque du 25 octobre 1917, dont il a contribué à achever le plein succès par son intelligente initiative.»

Citations obtenues après le 1er conflit mondial :

Cité à l’ordre de la division sans attribution de la croix de guerre. (O.G. n° 200/A du 29 octobre 1932 du général commandant supérieur des troupes du Levant).

« A, au cours d’une période d’opérations difficiles, témoigné de jour comme de nuit, d’une inlassable activité et d’une compétence éclairée dans la préparation de la mise en route des renforts. »

Croix de guerre 1939-1940 avec une étoile de vermeil.

Citation à l’ordre du C.A. n° 65 en date du 1er juillet 1940 :

« Chef du 4e bureau du C.A. depuis le début de la campagne, y a fait preuve des plus belles qualités militaires, par son activité inlassable, son esprit d’organisation et sa constante initiative devant les évènements imprévus, est parvenu au prix des plus grandes difficultés dans les moments de crise, à dominer la situation et à assurer le fonctionnement de tous les services du C.A.. S’est particulièrement distingué au cours des opérations de la VIIe Armée du 5 au 24 juin 1940 en réglant avec maîtrise le transport d’éléments avancés au cours d’un repli de près de 400 kilomètres. » (Citation non homologuée).

Chevalier de la Légion d’honneur  (J.O. du 3 mars 1921) :

« Brillant officier qui a fait toute la guerre au front et qui s’est toujours fait remarquer par son allant, sa bravoure sa ténacité et son énergie (3 blessures, 3 citations). »

Officier de la Légion d’honneur le 13 décembre 1938.

Commandeur de la Légion d’honneur le 6 février 1950 (J.O. du 17 février 1950).

Autres décorations :

Médaille commémorative française de la Grande Guerre

Médaille interalliée de la victoire

Médaille de la paix du Maroc

Médaille commémorative Syrie-Cilicie

Grand officier du Ouissam alaouite chérifien (Dahir du 27 août 1950)

Roger de Parseval n’a pas eu de descendance.

Pour visualiser la généalogie de cet officier, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Geneanet

Pour prendre connaissance de la généalogie de la famille de Parseval, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Les Parseval et leurs alliances - genealogie et souvenirs de famille

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Les portraits du général de Parseval sont extraits de ce dossier.

La carte du Liban et la photographie du terrain d’aviation de Rayak ont été trouvées sur le site Wikipédia.

Les cartes de Constantinople et de la région de Nice proviennent du site « Gallica » propriété de la B.N.F..

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carrobi, à M. Porcher, à la famille de Parseval, aux archives départementales des Vosges, du Loiret, de l’Indre, de l’Oise, de l’Yonne et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

26 juin 2020

Marius Joseph Voisin (1895-1915).

Marius Joseph Voisin

Marius Joseph Voisin naît le 23 juin 1895 au domicile de ses parents situé au numéro 7 de la rue du Lycée, dans le canton sud de la ville de Clermont-Ferrand.

Son père, Jean Pierre Victor, est un contremaître âgé de 25 ans. Il exerce ses fonctions professionnelles aux ateliers des chemins de fer de la compagnie P.L.M..

Sa mère, Anna Antoinette Gros, est une femme originaire de Thiers. Elle a 20 ans lorsqu’elle donne vie à son second fils.

La famille Voisin s'installe ensuite à Oullins dans le département du Rhône. Cette ville est bien connue du père. Il y est né et il y a vécu une bonne partie de sa jeunesse.

L’arrivée d’un nouvel enfant agrandit la famille en 1903. 

Genealogie famille Voisin

La fiche signalétique et des services de Marius Voisin indique un degré d’instruction de niveau 3. Il sait donc lire, écrire et compter. Contrairement à la plupart des adolescents de sa génération qui rejoignent rapidement le monde du travail après l’école obligatoire, Marius a la possibilité de faire une formation plus poussée.

Son niveau scolaire est suffisamment important pour qu’il puisse intégrer l’École des arts et métiers de Lille. Une fois sa formation terminée, Marius est engagé comme dessinateur industriel aux ateliers des wagons du réseau P.L.M. de Villeneuve-Triage.

Les Voisin sont venus s’établir à Villeneuve-Saint-Georges depuis peu. La date exacte de leur aménagement dans le département de la Seine-et-Oise n’est pas connue, mais cette famille a certainement subi les affres de la grande crue de la Seine qui a eu lieu à la fin du mois de janvier 1910. En 1911, les parents de Marius sont installés dans l’avenue Choisy avec leur plus jeune fils, Louis. Le père travaille comme sous-chef d’atelier pour le réseau P.L.M. de Villeneuve-Triage.

Villeneuve-Triage

Le 1er août 1914, la France ordonne la mobilisation générale. La guerre contre l’Allemagne est proche. Marius tout juste âgé de 19 ans, n'est pas concerné par les évènements. 

Les premiers mois des hostilités sont particulièrement funestes pour l’armée française. Il est demandé à la classe 1914 et à la classe 1915 de se présenter devant le conseil de révision bien avant l’heure de la conscription du temps de paix.

Inscrit sous le numéro 375 de la liste du canton de Boissy-Saint-Léger, Marius Voisin est déclaré « bon pour le service armé » par le médecin du conseil de révision.

Il sait qu’il va bientôt devoir délaisser sa planche à dessin pour accomplir ses obligations républicaines. Sa feuille de route lui ordonne de quitter Villeneuve-Triage pour aller faire ses classes au 170e R.I., une toute jeune unité créée en 1913.

Ce nouveau régiment rassemble les 4e bataillons des 21e, 44e, 60e et 149e R.I. déjà installés dans les plus vieux bâtiments militaires de la cité spinalienne. 

Le 20 décembre 1914, Marius arrive à la caserne Contades avec une centaine de recrues de la classe 15 et une poignée d’ajournés de la classe 13 et 14 ; ceux-ci proviennent du 5e corps de la Seine-et-Oise de la région de Versailles.

Contrairement à la classe 1914, la formation militaire que Marius reçoit est assez rapide. Elle est plus complète que celle qui a été donnée aux classes précédentes. Après 4 mois passés au dépôt, Marius Voisin est affecté au 149e R.I. le 1er mai 1915.

Il quitte la ville d’Épinal pour se rendre au cantonnement du 9e bataillon de ce régiment. Marius est affecté à la 36e compagnie. Cette compagnie est chargée de l’instruction au front des jeunes recrues. Elle fournit des renforts à chaque fois que c’est nécessaire. Le 9e bataillon peut aussi être utilisé pour effectuer des travaux en 2e et en 1ère ligne.

Le 23 juillet 1915, Marius Voisin est nommé caporal. La date de son affectation dans une unité combattante du 149e R.I. est inconnue. Si elle a existé, elle est probablement très proche de celle de son décès.

En effet, sa fiche individuelle sur le site de mémoire des hommes et la présence de son identité dans le contrôle nominatif du 3e trimestre 1915 du 149e R.I. (contrôle des malades et des blessés traités dans les formations sanitaires) indiquent une appartenance à  la 36e compagnie du 149e R.I..

Le nom du caporal Voisin est également inscrit dans les effectifs de la 6e compagnie du 149e R.I. dans l’état nominatif des militaires blessés au combat devant Souchez à la date du 12 septembre 1915. Le caporal Voisin accomplissait-il des travaux pour la 6e compagnie tout en étant resté rattaché à la 36e compagnie du 9e bataillon le jour de sa blessure ? C’est une possibilité.

La 6e compagnie est en 1ère ligne depuis le 8 septembre 1915. Elle est sous les ordres du lieutenant Damideau.

Quatre jours plus tard, les artilleurs allemands pilonnent le secteur. Marius est grièvement blessé par un éclat d’obus reçu à la tête. Il est rapidement évacué vers l’arrière. Les soignants ne peuvent rien faire pour lui. La plaie est bien trop grave pour qu’il puisse être sauvé. Le caporal Voisin décède le lendemain à l’hôpital auxiliaire n° 52 de Nœux-les Mines, à l'âge de 20 ans.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés le 12 septembre 1915, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

A ceux du 149e R

Marius Voisin fut, dans un premier temps, enterré dans le carré militaire du cimetière de Nœux-les Mines. Actuellement, il n’y a plus de sépulture individuelle qui porte son nom dans ce lieu. Son corps a probablement été restitué à la famille dans les années 1920.

Le nom de ce caporal a été inscrit sur le monument aux morts de la commune de Villeneuve-Saint-Georges et sur la plaque commémorative de l’église Saint-Georges. Il est également gravé sur la plaque de l’École nationale supérieure des arts et métiers.

Monument aux morts de la commune de Villeneuve-Saint-Georges

Ses parents ont fait imprimer un mémento avec son portrait après sa mort.

Pour en savoir plus sur ce type de document, il suffit de cliquer sur l’image suivante :

Site Arnaud Carobbi

Joseph Marius Voisin ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

Sources :

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

Fiche signalétique et des services de Marius Joseph Voisin visualisée sur le site des archives départementales des Yvelines.

Livre d’or des élèves et des anciens des écoles nationales d’arts et métiers morts pour la France 1914-1918. Imprimerie de Montligeon. La Chapelle-Monttligeon. Orne.

Contrôle nominatif du 3e trimestre 1915 du 149e R.I. des malades et des blessés traités dans les formations sanitaires détenu par les archives médicales hospitalières des Armées de Limoges.

Site « MémorialGenWeb ».

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, au S.H.D. de Vincennes, aux archives médicales hospitalières des Armées de Limoges et aux archives départementales des Yvelines.  

19 juin 2020

Marie Émile Adrien Marcel Roze (1890-1915)

Marcel Roze

 

Marie Émile Adrien Marcel Roze voit le jour le 30 décembre 1890 au domicile de ses parents. La famille habite la commune vosgienne de Bains-les-Bains, une petite ville thermale, nichée dans la vallée du Bagnerot, connue pour ses sources chaudes.

 

Sa mère, Irma Marie Grandgury est âgée de 27 ans. Elle n’exerce pas d'activité professionnelle. Marcel est son 2e enfant. Elle a déjà eu une fille mort-née en 1889. Son père, Auguste, travaille comme boulanger. Il est également âgé de 27 ans. 

 

Irma donne la vie à un second garçon en 1892. Ces parents le prénomment Marie René Maurice. 

 

 

Marcel et Maurice grandissent à Bains-les-Bains au rythme des leçons reçues à l’école communale du village. L’histoire ne nous dit pas s’ils furent de bons élèves.

 

Leurs fiches signalétiques et des services indiquent un degré d’instruction de niveau 3. Les hussards noirs de la république leur ont donné les bases de la lecture, de l'écriture et du calcul. 

 

Une nouvelle tranche de vie commence pour Marcel. Il doit maintenant choisir sa voie professionnelle.

 

Commune de Bains-les-Bains

 

Contrairement à son frère cadet, son nom ne figure pas dans le registre de recensement de l’année 1906 de Bains-les-Bains. À seize ans, il ne semble plus vivre chez ses parents. Sa fiche matricule indique simplement, qu'avant de partir au régiment, il a pratiqué le métier de voiturier. 

 

Comme pour la plupart des fiches signalétiques et des services du bureau de recrutement d’Épinal, il n’y a rien d’inscrit sur la sienne en dehors des informations concernant son état civil, son signalement et la décision prise par le conseil de révision. Cette fiche n’offre pas la possibilité de reconstruire un itinéraire militaire détaillé.

 

Elle nous informe juste qu’il a été déclaré « bon pour le service armé » dès son premier passage devant le conseil de révision ; ce dernier s’est réuni à la mairie de Bains-les-Bains en 1911.

 

Le régiment dans lequel Marcel Roze a effectué ses obligations républicaines reste donc inconnu.

 

Il a probablement été libéré en octobre 1913, puis affecté à un régiment proche de son domicile, comme tous les réservistes.

 

Il nous est impossible d’identifier la ville où il doit se rendre, le jour de la déclaration de guerre contre l’Allemagne, en août 1914.

 

Est-il allé directement à la caserne Courcy pour intégrer une des compagnies du 149e R.I. dès les premiers jours du conflit ? A-t-il été blessé en servant dans une autre unité avant d’être affecté dans ce régiment ? Aucuns documents ne permet de donner de réponses à ces deux questions.

 

Les informations en notre possession permettent uniquement de confirmer ceci : Marcel Roze servait comme caporal dans une des sections de mitrailleuses du 1er bataillon du régiment spinalien lorsqu’il trouve la mort dans la nuit du 6 au 7 septembre 1915.

 

Marcel a été tué par un obus français, tombé en plein sur la sape 9, au moment où il effectuait des travaux de nuit pour consolider sa position. Deux de ses hommes, les soldats Lucien Batailland et Jean-François Dupriez ont également été tués.

 

Pour en savoir plus sur la journée du 6 septembre 1915, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Secteur approximatif occupe par le 1er bataillon du 149e R

 

Le second choc psychologique subi par la mère de Marcel, veuve depuis plusieurs années, qui a déjà perdu son fils cadet, décédé à Saint-Pol-en-Ternoise au début du mois de juillet 1915, fut certainement terrible lorsqu’elle apprend la mort de son aîné. 

 

L’analyse des documents officiels retrouvés ne permet pas d’aller plus loin dans l’écriture de cette biographie. L’histoire de cet homme, mort à l’âge de 24 ans, restera probablement encore longtemps pleine d’inconnues.

 

Heureusement, un mémento ayant survécu au  temps nous offre la possibilité de mettre un visage sur ce soldat de la Grande Guerre. Nous pouvons y voir un Marcel arborant une belle moustache patiemment entretenue au fer à friser, posant à côté de son frère cadet.

 

Monument aux morts de Bains-les-Bains

 

Il n’y a pas de sépulture connue pour le caporal Roze. Il repose peut-être dans un des ossuaires de la nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette.

 

Marcel et Maurice ne se sont pas mariés. Irma n'a pas eu la joie de devenir grand-mère.

 

Sources :

 

La fiche signalétique et des services du caporal Roze a été consultée sur le site des archives départementales des Vosges.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carrobi et aux archives départementales des Vosges. 

5 juin 2020

Lucien Joseph Ferry (1889-1915).

Lucien Joseph Ferry

Lucien Joseph Ferry est né le 12 juillet 1889 à Clefcy, dans le département des Vosges. Ses parents, Henry et Marie Agathe Amélie Georges se sont mariés en 1870. Sa mère vient de donner naissance à son 9e enfant.

Son père, âgé de 48 ans, exerce le métier de sabotier, une profession qui doit être bien utile pour chausser une famille nombreuse à moindres frais. Avec son épouse, il travaille également comme cultivateur.

Lucien quitte l’école communale avec un degré d’instruction de niveau 3. Il sait  lire, écrire et compter lorsqu’il intègre le monde du travail. En 1906, il est fileur dans une usine de textile locale.

Comme pour la quasi-totalité des registres matricules du bureau de recrutement d’Épinal, la fiche de Lucien est presque blanche. Elle ne fournit que les informations concernant son état civil, son signalement et la décision prise par le conseil de révision.

Avec une fiche signalétique et des services aussi lacunaire, il est donc impossible de reconstruire le parcours militaire de cet homme dans son ensemble.

Cette fiche nous informe tout de même qu’il a été ajourné pour faiblesse en 1910. À partir de là, deux questions se posent.

Lucien a-t-il été à nouveau ajourné pour être la troisième année "exempté" ou a-t-il fait un service actif ? Cela donne deux possibilités de parcours, même si l’un des deux est plus probable.

1) Mobilisé dès août 1914, il a été évacué pour une raison et à une date qui sont inconnues puis renvoyé au front en avril 1915 après un passage au dépôt du 170e R.I..

2) Exempté avant-guerre, il passe devant le conseil de révision en même temps que la classe 1915, comme tous les exemptés et réformés des classes 1887 à 1913.

Classé "Bon service armé", il rejoint le dépôt du 170e R.I. à la mi-décembre 1915, toujours en même temps que la classe 1915 dont il suit le sort.

Son instruction achevée, il gagne la zone des armées fin 1915, comme la majorité de sa classe. Il fut probablement envoyé directement en renfort. L'autre hypothèse aurait été un passage au 9e bataillon ; cependant ces unités d'instruction dans la zone des armées ne furent créées que le 29 avril 1915, jour de son départ.

L'indice clef est la photo-carte représentant Lucien Ferry conservée par la famille. Elle permet l'identification du régiment dans lequel ce jeune vosgien se trouve au début 1915. Il est au dépôt du 170e R.I. comme le montre son uniforme.

Portrait Lucien Ferry

Le petit texte, rédigé au dos de cette carte-photo adressée à l’une de ses sœurs, nous apprend qu’il est parti avec un renfort envoyé au 149e R.I. le soir du 30 avril 1915.

« Épinal, 30 avril,

Chère sœur,

Nous embarquons ce soir à 6 h 00. Nous allons rejoindre le 149e R.I.dans le nord, je t’enverrai des nouvelles dans deux ou trois jours.

Ton frère Lucien »

Lucien Ferry intègre les effectifs de la 2e compagnie lorsqu’il rejoint cette unité qui combat en Artois depuis la fin décembre 1914.

Début septembre 1915, la 2e compagnie est sous les ordres du capitaine Toussaint.

Le 25 septembre 1915, le 149e R.I. est engagé dans une attaque de grande ampleur. Cette fois-ci, il est le régiment de réserve de la division. Toute la 43e D.I. est impliquée. Objectif : prise du bois en Hache.

Le lendemain, deux bataillons du régiment spinalien passent à l’offensive. Le 1er bataillon reste en réserve.

Le 27 septembre 1915, la 2e compagnie est intégrée au 3e bataillon du régiment. Elle subit un violent bombardement. Lucien est très grièvement blessé au cours de celui-ci. Il est évacué à Nœud-les-Mines où il décède le lendemain.

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés durant cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

carte journee du 27 septembre 1915

Une fiche, au nom de Lucien Ferry, qui se trouve sur le site du Comité International de la Croix Rouge, montre qu’une recherche a été entreprise par la famille auprès des instances compétentes.

Lucien Ferry fiche Croix Rouge

Après vérification, il s’avère que Lucien n’a pas été interné dans un camp de prisonniers allemands. Une réponse ôtant les derniers espoirs est envoyée à la famille le 6 novembre 1915.

Six jours plus tard, l’acte de décès officiel du soldat Ferry est transcrit à la mairie de Clefcy.

La Médaille militaire lui est attribuée à titre posthume (publication dans le J.O. du 9 septembre 1920).

« Soldat courageux et brave. Blessé mortellement le 18 septembre 1915, devant Angres au cours d’un violent bombardement »

Cette distinction lui permet d’obtenir également la croix de guerre avec étoile de bronze.

La date indiquée dans le journal officiel est erronée. Lucien est entré à l’ambulance 10/21 installée à Nœud-les-Mines le 27 septembre 1915, la veille de sa mort.

Il a été impossible de produire un extrait de son acte de décès pour tenter d’en apprendre un peu plus sur les circonstances de sa mort. En effet, les archives de l’ancienne commune de Clefcy ont été détruites en 1944 par fait de guerre.

Une fiche matricule vierge et la destruction des registres d’état civil de sa ville natale laissent donc d’importantes zones d’ombre sur la vie de cet homme.

Lucien Ferry repose actuellement dans le carré militaire du cimetière communal de Nœux-les-Mines, dans le Pas-de-Calais. Sa sépulture porte le numéro 53.

Sepulture Lucien Ferry

La généalogie de la famille Ferry peut se consulter sur le site « Généanet ». Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

Geneanet

Le nom du soldat Ferry est gravé sur le monument aux morts de la commune de Ban-sur-Meurthe-Clefcy et sur la plaque commémorative placée à l’intérieur de l’église Sainte-Agathe.

Monument aux morts de la commune de Clefcy

La destruction des registres d’état civil de la commune de Clefcy durant le 2e conflit mondial du 20e siècle ne permet pas de savoir si Lucien a été marié et s’il a laissé une descendance.

Sources :

Fiche signalétique et des services du soldat Ferry lue sur le site des archives départementales des Vosges.

Contrôle nominatif du 3e trimestre 1915 du 149e R.I. des malades et des blessés traités dans les formations sanitaires détenu par les archives médicales hospitalières des armées de Limoges.

La photographie qui représente Lucien Ferry provient du site « Généanet ».

Le cliché de sa sépulture a été réalisé par J.M. Laurent.

Un grand merci à M. Bordes, à C. Ruppel-Leonet, à A. Carobbi, à J.M. Laurent, à G. Leonet, aux archives départementales des Vosges, aux archives médicales hospitalières des Armées de Limoges et à la mairie de la commune de Ban-sur-Meurthe-Clefcy.

29 mai 2020

Eugène Louis Joseph Favier (1889-1915).

Eugene Louis Joseph Favier

Eugène Louis Joseph Favier naît le 18 avril 1889 au Martinon, un hameau dépendant de la commune iséroise de Viriville.

Sa mère, Henriette Eugénie Merlin, travaille comme ménagère. Elle est âgée de 28 ans lorsqu’elle donne naissance à ce premier enfant.

Son père, Louis Philippe Favier, un ancien ouvrier boulanger devenu cultivateur, est âgé de 27 ans.

Des trois prénoms inscrits sur le registre d’état civil, Henriette Eugénie et Louis Philippe choisissent le second comme prénom d’usage pour leur fils.

Le couple Favier donne vie à deux autres garçons en 1890 et 1897.

Genealogie famille Favier

La fiche signalétique et des services de Louis mentionne un degré d’instruction de niveau 3. Il a donc acquis les bases du calcul, de l’écriture et de la lecture.

Une fois sa scolarité primaire terminée, il devient aide-boulanger, une profession autrefois pratiquée par le père. Alimenter en farine la machine à tamiser et pétrir le levain devient le lot quotidien de l’adolescent. Le métier est contraignant, il faut exercer la nuit.

Conscrit de la classe 1909, Louis Favier est classé dans la 5e partie de la liste lorsqu’il passe devant le conseil de révision qui s’est réuni à Roybon en 1910. Les raisons qui ont motivé cet ajournement ne sont pas connues.

L’année suivante, Louis ne se présente pas devant le conseil de révision. Il est automatiquement classé dans la 1ère partie de la liste, déclaré « bon absent ». 

Le jeune homme est incorporé au 99e R.I. à compter du 1er octobre 1911.

Il est contre indiqué de prendre des risques pour tenter d’en faire un « bon fantassin ». Louis est mis entre les mains des médecins militaires et va devoir passer devant la commission de réforme du Rhône.

Le 13 octobre 1911, celle-ci diagnostique un « développement musculaire insuffisant avec des varices dans la jambe gauche et une mauvaise denture ». Cinq jours plus tard, le général commandant le département du Rhône décide de le faire classer dans le service auxiliaire avec maintenance au corps. Louis échappe aux longues marches et aux durs entraînements de la vie de soldat.

De retour à la caserne, il apprend qu’il est affecté à la 14e section de commis pour y exercer l'activité de boulanger. Cela semble être dans ses cordes puisqu’il connaît bien la profession, mais c’est sans compter sur ses manquements disciplinaires qui vont le conduire tout droit aux sections spéciales.

Le 18 août 1912, il est envoyé dans l’île d’Oléron dans une des trois sections spéciales ordinaires, anciennement administrées par le 6e R.I. de Saintes, qui dépendent du 123e R.I. de La Rochelle depuis l’application du décret du 28 mars 1912 portant sur la réorganisation de ces sections.

Le 14 mai 1913, il est affecté à la section spéciale ordinaire du 112e R.I. de Toulon à Entrevaux, puis, pour finir, à la section spéciale de transition de Sisteron qui dépend du 3e R.I. à partir du 1er juillet 1913.

Louis finit par s’amender. Le 13 septembre 1913, il est réintégré au 30e R.I.. Il est censé passer dans la réserve de l'armée active le 1er octobre 1913, mais il est maintenu au corps jusqu'au 14 novembre1913.

Sans surprise, son certificat de bonne conduite lui est refusé lorsqu'il quitte la caserne. Il retourne vivre à Viriville.

Viriville

De retour à la vie civile, Louis Favier retrouve son fournil.

Il est rappelé le 1er août 1914, pour cause de guerre. Il n’est pas envoyé au front avec les premiers réservistes. Le 1er septembre 1914, Louis Favier est réformé n° 2 par la commission spéciale de Chambéry pour « bronchite du sommet droit », ce qui signifie qu’il est atteint par la tuberculose au poumon droit.

Cette maladie ayant été contractée avant son incorporation, Louis ne touchera pas de pension.

Louis Favier, qui n'avait pourtant pas montré beaucoup d'intérêt pour la vie militaire, décide de signer un engagement volontairement pour la durée de la guerre le 17 décembre 1914. On peut s'interroger sur sa motivation à le faire. Céda-t-il à la pression de son entourage qui l’incitait à aller accomplir, comme les autres, son devoir de soldat, malgré sa maladie ?

Il rejoint le dépôt du 75e R.I. deux jours plus tard. Le 4 février 1915, il est affecté au 158e R.I. puis au 149e R.I. le 13 mars 1915.

Dès son arrivée dans le régiment spinalien, il se montre particulièrement réfractaire à la discipline militaire. Son penchant pour la boisson est très prononcé. Louis Favier est sanctionné pour les infractions suivantes :

- le 1er avril 1915, il se présente à une revue avec des armes et des effets très mal entretenus.

- le 20 avril 1915, il quitte le cantonnement sans autorisation et manque à l'appel du soir ; il ne revient qu'à 22 h 30.

- le 17 mai 1915, il s'enivre à l'arrivée au cantonnement. Le lendemain, il est toujours incapable de se tenir debout. Louis Favier manque une revue effectuée par le capitaine. Pour cet acte, il est condamné par le conseil de guerre de la 43e D.I. pour ivresse publique et manifeste à Sains-en-Gohelle le 4 juin 1915. Il écope de soixante jours de prison.

Cette condamnation par le conseil de guerre aurait dû l'inciter à modérer son penchant pour l'alcool afin de rentrer dans le rang. Son intempérance va au contraire l'entraîner à commettre une série d'actes de désobéissance dont la gravité finira par le rendre passible de la peine de mort.

Le rapport initial du commandant de la 2e compagnie du 21 juin 1915, les interrogatoires de Louis Favier, les auditions de trois témoins et le rapport final du rapporteur commissaire du gouvernement nous permettent de connaître avec précision les circonstances dans lesquelles les infractions militaires reprochées à ce soldat ont été commises.

Le 14 juin 1915, la 2e compagnie du 149e R.I. quitte le cantonnement de Bracquancourt dans la soirée pour se rendre aux tranchées en vue d'une attaque dans le secteur de Noulette. Louis Favier parvient à suivre ses camarades bien qu'étant en état d'ébriété au moment du départ.

À l'approche des tranchées, à un moment où le bombardement est particulièrement violent, il déclare ne plus pouvoir avancer en raison d'une indisposition.

Il s'arrête alors au poste de secours à Aix-Noulette. Le médecin aide-major Cleu le déclare « non malade » mais « en état d'ivresse ». Il le fait incarcérer au poste de police du 142e Régiment Territorial pour un dégrisement en lui donnant l'ordre de rejoindre sa compagnie dès le lendemain.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au 149e R.I. durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte du 16 juin 1915

Le 15 juin, au petit matin, au lieu d'exécuter cet ordre, il s'esquive du poste de police pour aller boire en compagnie d'un autre soldat.

Le sergent-major Grumbach, qui a été informé de sa présence dans un café à Aix-Noulette, se déplace pour lui intimer l'ordre de rejoindre sa compagnie.

Louis Favier demande alors une seconde visite. Cette visite se révélant de nouveau infructueuse, le même médecin lui renouvelle l'ordre de rejoindre immédiatement son poste. Au lieu d'obéir, le soldat Favier demeure à Aix et passe la nuit à la Malterie.

Dans l'après-midi, vers 16 h 00, le caporal d'ordinaire se rend à la Malterie pour le conduire lui-même aux tranchées. Il le trouve couché, vraisemblablement ivre, ne bougeant plus et ne répondant à ses appels que par des sons inarticulés.

Vers 8 h 30, Louis Flavier se soumet à l'ordre que lui réitère le sergent-major Grumbach. Il se met en route pour rallier sa compagnie. Mais dans la soirée, avant même d'avoir rejoint celle-ci, il revient à Aix-Noulette en prétendant avoir été blessé par des éclats d'obus à la cuisse et aux bras aux environs des abris du Métro.

Sa blessure est jugée insignifiante. Une nouvelle fois, le même médecin lui donne l’ordre de retourner immédiatement aux tranchées.

Il fait mine d'obéir en repartant en direction du front, mais, à 21 h 00, il s'arrête aux abris du Ravin où il va y passer deux nuits et une journée.

Le 18 juin, plutôt que de gagner le front, Louis Favier prend délibérément la direction de l'arrière. Il finit par se rendre à un gendarme rencontré sur la route Aix-Noulette vers 17 h 00.

Il est ramené à Sains-en-Gohelle, à la Fosse 10. Le sergent-major le dépose au poste du 142e R.I.T., à Aix-Noulette pour être sûr qu'il rejoint bien sa compagnie. Ce qu'il finit par faire. Il la retrouve le 19 au matin, vers 2 h 00 ou 3 h 00 au moment où celle-ci, qui n'était plus en première ligne, était en train de se ravitailler.

Ce refus de rejoindre les tranchées au moment des combats s'inscrit dans la continuité d'un comportement rebelle à toute forme d'autorité. Cette attitude ne surprend pas ses supérieurs hiérarchiques qui le jugent de manière totalement négative.

Dans son rapport du 21 juin 1915, le sous-lieutenant Stehlin, qui dirige la compagnie, le dit sans nuance : « Le soldat Favier Louis est arrivé au corps le 13 mars 1915 avec le renfort du bataillon de marche du 158e R.I.. Dès son arrivée au corps, Favier s'est montré un soldat très médiocre, paresseux et animé d'un mauvais état d'esprit. Le 4 juin 1915, le soldat Favier était traduit devant le conseil de guerre et condamné à 2 mois de prison pour ivresse publique et manifeste et évasion du poste où il avait été conduit. Depuis cette date, il n'a pas cherché à racheter sa conduite antérieure… Favier Louis est un soldat très médiocre, paresseux, sale et animé d'un mauvais état d'esprit ».

Le lendemain, 22 juin 1915, le chef de bataillon réclame lui aussi sa traduction devant le conseil de guerre en portant sur la même appréciation négative : « Le soldat Favier est non seulement un ivrogne, mais un lâche qui a abandonné sa compagnie au moment où elle allait se battre. Il n'a jamais voulu la rejoindre, alors que par renseignement il aurait très bien pu le faire. Il mérite toutes les rigueurs du code de justice militaire ».

Le même jour, le lieutenant-colonel Gothié, commandant par intérim le 149e R.I., émet l'avis qu'il « ne mérite aucune indulgence » et que ce "mauvais soldat … doit être traduit devant le conseil de guerre pour ivresse (récidive) et pour abandon de poste en présence de l'ennemi ».

Le 23 juin, le général Lombard, commandant la 43e D.I., ouvre une information. Au cours de l'instruction, Louis Favier ne conteste pas les faits. Il explique qu'il avait bu avant de partir aux tranchées et qu'ensuite il ne savait plus ce qu'il faisait.

Le 8 juillet 1915, le général Lombard ordonne sa traduction devant le conseil de guerre qui siège le 10 juillet 1915, à 13 h 30. Le soldat Favier doit répondre des chefs de poursuite suivants :

- abandon de poste en présence de l'ennemi le 14 juin 1915.

- refus d'obéissance le 15 juin 1915 au sergent-major Grumbach, du 149e R.I. lui ordonnant de rejoindre sa compagnie.

- refus d'obéissance à l'ordre donné par le médecin aide-major Cleu, le même jour, de rejoindre sa compagnie.

- refus d'obéissance à l'ordre donné par le caporal Rencurel, le même jour, dans l'après-midi.

- refus d'obéissance à l'ordre donné le 16 juin par le médecin, aide-major Cleu.

- le 16 juin 1915, désertion en présence de l'ennemi.

Le conseil de guerre est composé comme suit :

- Président : Perrin, chef de bataillon du 31e B.C.P..

- Juges : Perrier, chef d'escadron, commandant les trains régimentaires de la 43e D.I. - Roudet, capitaine du 4e régiment de chasseurs à cheval, commandant le 3e demi-régiment - Nestre, lieutenant du 31e B.C.P. - Petit, adjudant du 12e  R.A.C..

- Défenseur : Schoumacker, officier interprète de la 43e D.I..

Louis Favier ne conteste rien de ce qui lui est reproché devant le rapporteur commissaire du gouvernement et ses juges. Il reconnaît sans difficulté qu'il avait bu avant de partir aux tranchées. Ce qui est nouveau pour sa défense, c'est qu'il explique qu'il n'a pu suivre sa compagnie jusqu'à la sortie de Boyeffles, ne pouvant marcher vite, en raison de la tuberculose qui avait entraîné sa réforme.

Trois témoins sont entendus au cours de l’audience, le médecin aide-major Cleu, le sergent-major Grumbach et le caporal d'ordinaire Rencurel. Nous retrouvons ici les trois hommes qui lui ont donné l'ordre de rejoindre les tranchées et qui ont essuyé un refus de sa part.

Le président demande au premier témoin si Louis Favier jouissait d'un état de santé normal. Le médecin répondit « 'il n'était pas à première vue dans un état de santé brillant, mais en ce moment il ne s'agit que de savoir si un homme peut marcher, or il le pouvait ».

Sur une question posée par le défenseur, il précise que du point de vue mental, un examen approfondi de l'intéressé ne lui était pas apparu nécessaire lors de sa visite.

Dès lors qu'une altération, même partielle, de ses capacités physiques ou mentales était écartée par le médecin, il ne pouvait plus bénéficier d'une atténuation ou d'une suppression de sa responsabilité pénale. En conséquence, il devait répondre pleinement de ses actes. L'audition du médecin signait en quelque sorte sa condamnation à mort.

On peut s'étonner de la rigueur de ce médecin à l'égard d'un soldat tuberculeux, mais elle s'inscrivait dans le droit fil de la nouvelle doctrine des commissions de réforme en matière d'incorporation.

Pour combler les vides creusés dans les effectifs par les hécatombes des premiers mois de guerre, celles-ci se montrent moins regardantes sur l'état de santé des nouveaux soldats et les services de santé valident, malgré les risques de contagion, l'incorporation ou l'engagement volontaire de la plupart des tuberculeux qui avaient été antérieurement réformés.

Ces soldats tuberculeux sont allés rejoindre la cohorte des "Récupérés", qu'ils soient diabétiques, cardiaques, cancéreux…ou atteints d'une autre pathologie grave, qui étaient dispersés dans les unités combattantes.

 Il est vrai que, pour prendre part à une guerre de tranchées et à des attaques de masse, il fallait des effectifs conséquents, peu important qu'ils soient renforcés, faute de mieux, par des soldats amoindris par la maladie, du moment qu'ils étaient, comme Louis Favier, déclarés apte à la marche. En outre, la mort sur les champs de bataille ne faisait pas de distinction entre les bien-portants et les malades.

Les deux autres témoins, le sergent-major Georges Grumbach et le caporal d'ordinaire Rencurel, exposent les faits sans être contestés par le prévenu. Le caporal d'ordinaire, à qui on demanda ce qu'il pensait de Louis Favier, répondit que c'était « un esprit faible, se laissant aller, sans initiative, peu causant. »

Un passé militaire peu glorieux et un refus ostensible et réitéré de rejoindre les tranchées ne pouvaient lui attirer aucune clémence. Son absence illégale qui a duré quatre jours et huit heures était, pour le conseil de guerre, injustifiable.

Dès lors qu'à Aix-Noulette, il y avait le sergent-major, le caporal d'ordinaire ainsi que les cuisiniers de la compagnie qui étaient allés plusieurs fois ravitailler la compagnie, il avait eu toute latitude pour rejoindre rapidement son unité.

Le 10 juillet 1915, le conseil de guerre, à l'unanimité, le déclare coupable d'abandon de poste en présence de l'ennemi et de quatre refus d'obéissance commis également en présence de l'ennemi. Louis Favier est condamné à la peine de mort avec dégradation militaire. En revanche, le conseil de guerre à voté à l'unanimité l'acquittement du chef de désertion. Il a sans doute considéré que l'intéressé n'était pas parvenu à quitter les zones occupées par l'armée en raison de la surveillance des routes par les gendarmes.

Le 11 juillet 1915, l'ordre est donné de procéder à l'exécution de Louis Favier.

Le 12 juillet, il est passé par les armes, conformément au règlement militaire, par un piquet du 149e R.I. à 5 h 00 à Coupigny.

Si les notes d'audience rendent amplement compte de l'interrogatoire de l'accusé, des déclarations des témoins, le procès-verbal d'exécution est, en revanche, succinct. Il ne précise pas les unités qui étaient présentes, ni à quel endroit le corps a été inhumé.

Le chef de bureau spécial de comptabilité du dépôt du 149e R.I. recommande au maire de Viriville d'informer, « avec tous les ménagements nécessaires », la famille de Louis Favier de son décès et de lui présenter "les condoléances de M. le ministre de la Guerre".

Cette lettre est le modèle type couramment utilisé pour annoncer une mort « au champ d'honneur ». Elle ne correspond absolument pas à la cause de la mort d'un soldat passé par les armes.

Après la guerre, les parents de Louis Favier tentent d'obtenir sa réhabilitation en s'adressant au député de l'Isère, Camille Rocher. Celui-ci interroge le ministre de la Guerre pour savoir si la famille pouvait obtenir sa réhabilitation en raison d'une citation qu'il a obtenue avant les faits ayant motivé sa condamnation.

Le 13 novembre 1923, le ministre lui répond qu'aucune trace de citation n'a été retrouvée et qu'en tout état de cause, selon les dispositions de la loi du 19 mars 1919, la réhabilitation n'était possible qu'à l'égard des condamnés cités à l'ordre du jour postérieurement à l'infraction et non antérieurement.

Cette réponse dissuade les parents de poursuivre leurs démarches.

Près de dix ans plus tard, la mère Henriette Marlin, qui est devenue veuve, n'a  toujours pas renoncé. Le 17 mai 1932,  elle dépose une requête tendant à la révision du jugement de condamnation de son fils.

Elle est représentée dans la procédure d'abord par André Rouast, professeur à la faculté de droit de Paris, puis par Louis Plateau, docteur en droit, directeur des services de l'Union fédérale des mutilés. Ce dernier est agréé par l'Union fédérale des associations françaises des anciens combattants.

Dans sa requête, Henriette Marlin rappelle que son fils avait été appelé à la mobilisation en 1914 et renvoyé dans ses foyers comme étant inapte, puis déclaré apte et qu'il était, sur sa demande, parti au front en 1915.

Elle produit, à l'appui de sa demande de révision du jugement de condamnation, une lettre, non datée, rédigée par quatre anciens mitrailleurs de la compagnie des mitrailleuses de brigade du 149e R.I..

Ces hommes rappellent que, lorsque l'abandon de poste a été relevé, Lucien Favier « s'était tout simplement enivré, ce qui lui arrivait fréquemment » et qu'il n'avait pu ainsi rejoindre sa compagnie.

Estimant que sa condamnation n'était pas justifiée, ils demandent la révision du jugement en faisant valoir qu'il avait été auxiliaire au début de la guerre et qu'il avait demandé à passer au service armé, ce qui lui avait été accordé. Ils font également valoir qu'il avait été proposé pour la croix de guerre et qu’il avait fait la campagne jusqu'en juillet.

Ils mentionnent en outre que son frère, de la classe 17, décédé des suites de la guerre, avait servi dans l'infanterie, et qu’il avait été cité et qu’il avait reçu la croix de guerre. Ils demandent que "la justice soit rendue à la mémoire du soldat Favier pour adoucir la peine de sa pauvre mère éplorée ".

Le 12 mai 1932, le maire de Viriville établit un certificat rappelant que Louis Favier avait été volontaire pour partir à la guerre, qu'il avait toujours été un bon citoyen et que s'il était « quelques fois pris par la boisson, il ne pouvait pas en être déduit qu'il était un ivrogne ».

Le conseiller général du canton, par ailleurs président d'une association d'anciens combattants, fait valoir que la famille Favier était digne d'intérêt. Les trois enfants du couple étaient morts, l'un avant la guerre, un autre, mobilisé pendant la guerre, était mort en janvier 1922. La mère, dont la détresse était immense, voulait réhabiliter la mémoire d'un fils qui lui avait écrit des lettres pleines d'amour filial et de patriotisme.

Il est vrai que dans une lettre du 13 mai 1915, versée à l'appui de la demande, Louis Favier écrit à ses parents qu'il était aux tranchées depuis 11 jours. Il fait savoir également qu’il a été cité à l'ordre du régiment le 12 mai à midi en ajoutant : « cela me laisse complètement indifférent pourvu que je puisse retourner vous embrasser et revoir mon cher pays, cela me suffit ! ».

La trace de cette citation n’a pas été retrouvée dans les archives du régiment. A-t-elle existé autrement que dans l’imagination de ce soldat ? Il est fort probable que Louis Favier, pour plaire à ses parents, se soit quelque peu vanté en s'attribuant une citation à l'ordre du régiment qu'il n'avait sans doute pas méritée. Cette façon de romancer la réalité peut se vérifier, dans une autre de ses lettres rédigée le 19 mai 1915.

Il a une façon toute particulière de leur écrire que, le lundi, il a « bu un verre » avec un compatriote rencontré fortuitement alors que, précisément ce jour-là, le lundi 17 mai, il s'est enivré à un point tel que le lendemain, il était encore « incapable de se tenir debout ».

De même, il leur décrit avantageusement sa participation aux combats : « J'ai repris du service et j'ai assisté à deux combats où nous avons fait du beau travail, ce qui m'honore, mon régiment aussi… » … « Nous avons attaqué les tranchées allemandes et réussi à les leur prendre et aussi nous avons fait 800 prisonniers et pris 26 mitrailleuses. Enfin, nous avons bien rempli notre journée, mais que voulez-vous, c'est la guerre. Espérons que la paix sera bientôt signée au profit de la France, bien entendu. ».

Cette description de sa vie de soldat courageux et patriote visait sans doute à susciter chez ses parents un sentiment de fierté, mais elle est peu crédible, étant aux antipodes de l'opinion peu flatteuse de ses chefs. Le rapporteur, commissaire du gouvernement, résumait ainsi : « Favier est un mauvais soldat » qui s'est signalé « immédiatement par sa paresse, son mauvais esprit et ses habitudes d'ivrognerie ».

Les interventions de notables et les lettres de Louis Favier transmises à la cour spéciale de justice militaire n'auront aucun impact. Cette juridiction n'a pas à se prononcer sur le bien-fondé de la requête pour la raison simple que celle-ci était irrecevable.

Dans un premier temps, le 1er juillet 1933, la cour spéciale va renvoyer l'examen de la requête en révision présentée par Madame Favier à l'audience du 22 juillet 1933. Le but est de lui permettre de produire les pièces établissant qu'entre le 11 novembre 1918 et le 11 novembre 1928, elle avait manifesté auprès d'une autorité judiciaire ou administrative sa volonté d'obtenir la révision du jugement de condamnation de son fils.

En effet, selon l'article 3, paragraphe 3, de la loi du 9 mars 1932, ne sont recevables que les demandes formées par les ayants droit dont la volonté d'obtenir la révision se sera manifestée par une requête adressée à une autorité judiciaire ou administrative, ceci  dans un délai de 10 ans à compter du 11 novembre 1918 et si le jugement est antérieur à cette date.

Au terme de l'audience de renvoi du 22 juillet 1933, la Cour, composée de trois conseillers à la cour d'appel de Paris, d'un lieutenant de réserve, d'un sergent, réformé de guerre et d'un soldat réserviste, relève l'irrecevabilité de la requête. Celle-ci n'a pas été précédée par une manifestation de volonté d'obtenir la révision dans le délai de dix ans, ouvert à compter du 11 novembre 1918.

La Cour constate en effet qu'une telle manifestation de volonté ne résulte pas seulement des pièces produites et des démarches faites en 1923 par le député Rocher. L’intervention de ce député consistait à se renseigner auprès du ministère de la guerre sur la possibilité d'obtenir la réhabilitation du soldat Favier, en raison d'une citation obtenue par ce militaire ; il ne s’agissait pas d'obtenir la révision en application de la loi du 29 avril 1921.

Les archives relatives à la demande du député n'ayant pas été conservées par le ministère de la guerre, il ne subsistait donc que la réponse ministérielle à cette demande de renseignements. Ce fut insuffisant pour fonder la recevabilité de la requête de la veuve Favier. Son fils ne sera donc pas réhabilité.

C'est en définitive un curieux destin que celui de Louis Favier. Il aurait pu échapper au service actif en raison de sa tuberculose mais il s'engage volontairement pour combattre sur le front. Ensuite, son comportement d'ivrogne indiscipliné fera passer au second plan la maladie qui rongeait ses poumons ce qui l’a privé du traitement humain que justifiait sa situation de soldat tuberculeux dans l'enfer des tranchées. Au lieu d'être écarté de l'armée par un renvoi dans ses foyers il en sera éliminé par les balles d'un peloton d'exécution.

Le corps du Louis Favier repose actuellement dans le carré militaire du cimetière communal d'Hersin-Coupigny. Sa tombe porte le n° 111.

Sepulture Louis Favier

Le nom de cet homme est gravé sur le monument aux morts de la commune de Viriville.

Monument aux morts de la commune de Viriville

Louis Favier est resté célibataire et n’a pas eu de descendance.

Sources :

Dossier individuel d’Eugène Louis Joseph Favier figurant dans la base de données des militaires et civils qui ont été fusillés durant le 1er conflit mondial sur le site « mémoire des hommes ».

Le registre de recensement réalisé en 1906 de la commune de Viriville et les fiches signalétiques et des services des trois frères Favier ont été consultés sur le site des archives départementales de l’Isère.

Le texte qui suit a été rédigé par J.P. Poisot auquel j’ai ajouté les informations sur la jeunesse du soldat Favier et quelques précisions. Qu’il soit remercié pour son étude qui a permis de remettre en lumière le parcours de ce soldat.

Pour en savoir plus sur les soldats tuberculeux, voir l'article de Pierre Darmon intitulé "La grande guerre des soldats tuberculeux. Hôpitaux et stations sanitaires", publié dans les Annales de démographie historique 2002, n° 1, page 35 à 50.

Merci également à M. Bordes, à A. Carobbi, à G. Laurent, au Service Historiques de la Défense de Vincennes et aux archives départementales de l’Isère.

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