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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.

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19 mai 2023

Alphonse Marie Gabriel Petit (1894-1915)

Alponse Marie Gabriel Petit

 

Alphonse Marie Gabriel Petit est né le 30 septembre 1894, au 3 rue des Meules, à  Chalon-sur-Saône, dans le département de Saône-et-Loire.

 

Son père, Alphonse Jules Raoul Fernand, 35 ans, est employé des chemins de fer. Sa mère, Gabrielle Félicie Prieu, 25 ans, n’exerce pas d’activité professionnelle. Elle gère la maison familiale et l’éducation des enfants.

 

Alphonse est le cinquième d’une fratrie de 7 enfants, très proches les uns des autres. Leur sœur aînée, Juliette, est décédée à l’âge de deux mois.

 

Alphonse Petit effectue sa scolarité à l’école primaire publique, au centre des garçons de sa commune natale. Il suit ensuite les cours dispensés par l’école professionnelle de Chalon-sur-Saône, mais les études sont loin d’être son fort. Sa fiche matricule indique un degré d’instruction de niveau 2.

 

Il se passionne pour le dessin dès son plus jeune âge (son frère Gaston deviendra plus tard un artiste reconnu). Alphonse Petit est également un sportif confirmé spécialisé en gymnastique et en saut à la perche. En 1913, il devient champion de Bourgogne dans cette seconde discipline.

 

Quelques camarades

 

Alphonse Petit, surnommé Polo par ses proches, n’a pas encore fêté ses vingt ans lorsque le conflit contre l’Allemagne éclate en août 1914.

 

Classé dans la 1ère partie de la liste de l’année 1914 du canton de Chalon-Nord, il est déclaré « bon pour le service armée » par le médecin du conseil de révision. Alphonse Petit va devoir quitter son travail d’employé de commerce un peu plus tôt que prévu. En effet, l’armée française a besoin d’hommes pour alimenter ses régiments, elle appelle la classe 14 par anticipation.

 

Le 4 septembre 1914, le conscrit Petit intègre le 149e R.I. à Jorquenay, au nord-ouest de Langres. Le dépôt de ce régiment, initialement installé à Épinal, a dû quitter cette ville au début de la guerre pour venir s’installer dans ce village.

 

Les cantonnements sont effectués chez l’habitant. Ils s’avèrent être insuffisants pour loger l’intégralité de la classe 14. Le 21 septembre, les jeunes recrues nées en 1894 et l’équipe d’encadrement quittent Jorquenay pour venir s’installer à Rolampont, une commune voisine située à six kilomètres au nord.

 

La formation est dure. Les apprentissages sont faits à la hâte pour envoyer les hommes sur la ligne de front le plus rapidement possible.

 

Repéré par ses supérieurs, Alphonse Petit suit la formation des élèves caporaux durant son instruction. Le jeune homme est nommé à ce grade le 11 novembre 1914.

 

Le 23 avril 1915, le caporal Petit n’a toujours pas rejoint la ligne de front. Il écrit la lettre suivante à ses parents :

 

(Pour plus de clarté, l’orthographe et la ponctuation de cette correspondance ont été corrigées, seul le style a été conservé)

 

« Mon cher papa, ma chère maman,

 

Bien des nouvelles à vous annoncer. Je suis nommé, ainsi que tous mes camarades de la classe 14 qui n’ont pas encore été au feu, pour faire partie d’une compagnie de marche. Les caporaux et les sergents qui n’ont pas été au feu en font partie.

 

Nous allons partir pour Épinal demain afin de former la compagnie. Une fois sur le pied de guerre, nous allons nous entraîner pendant un mois et ½ à faire des manœuvres, en parfaite perfection, et de connaître tous nos hommes pour les avoir sur la main constamment et qu’ils connaissent à qui ils ont affaire.

 

Nous irons dans un grand centre, car je crois que nous resterons à Épinal. Si jamais j’avais la chance, comme la 1ère compagnie qui est déjà partie, de pouvoir aller à Lyon, je pourrais obtenir, de mon capitaine,  une permission de 48 heures, car nous ne serons plus dans la zone des armées.

 

Je suis content de partir avec lui, car c’est lui qui m’a fait mon instruction aux élèves caporaux et comme toutefois il est épatant, il s’appelle Mr de Chomereau de St André, ce n’est pas de la petite bière »

 

Alphonse Petit rejoint le 149e R.I. avec un groupe de renfort en mai 1915. Il est affecté à la 1ère compagnie du régiment. Cette unité combat en Artois, dans un secteur particulièrement exposé, près de Notre-Dame-de-Lorette.

 

Correspondance famille Petit (1)

 

Alphonse Petit frôle la mort dès le jour de son baptême du feu. Le 29 mai 1915, sa compagnie, sous la direction du lieutenant Pierron, a reçu l’ordre de franchir le parapet après une longue attente dans les tranchées. L’ennemi est prêt à  recevoir cette compagnie…

 

Le fusil de notre soldat s’est brisé en deux au cours de l’attaque et une de ses cartouchières a été touchée par un éclat d’obus. Très chanceux, le jeune homme a probablement évité la blessure mortelle. Dès son retour vers l’arrière, il prend le temps de rédiger une lettre particulièrement émouvante.

 

« 1er juin 1915

 

« Chers Parents,

 

Je vais vous raconter en deux mots ma première rencontre avec les Boches.

 

Nous étions tout près des tranchées de premières lignes, prêts à relever les chasseurs à pied à 8 heures du soir. Nous voilà partis pour les relèves une fois après avoir pris position de la tranchée.

 

Nous attendons 24 heures et pendant cette nuit, nous guettions ces bandits à travers les créneaux. Le reste du temps, nous mangions et nous jouions aux cartes. Pendant ce temps, le lieutenant de la compagnie reçoit des ordres d’attaques.

 

Nous étions tous prêts à sauter la tranchée aux commandements du commandant qui était présent à nous voir partir à 2 heures du matin.

 

Trois fusées, lancées du poste de commandement, nous préviennent de partir. Nous posons tous nos sacs et le lieutenant commande en avant.  À ces mots,  tout le monde saute par dessus la tranchée. Nous n’avions pas fait 10 mètres que les mitrailleuses, les balles et les batteries d’artillerie allemandes commencent à nous canarder sans discontinuer.

 

Quel spectacle horrible ! Mes camarades commencent à tomber après avoir fait une 40ne de mètres. En avant, tout le monde est couché à terre, et surtout, dans les trous d’obus, nous laissons un instant l’élan prêt à repartir encore une fois.

 

C’est tout ! Le lieutenant tombe, le mollet enlevé par un éclat d’obus. Les 2 sous-lieutenants sons aussi tombés. Un mort et l’autre blessé au pied. Le lieutenant commande à maintes reprises pour que le suivant prenne le commandement, mais personne ne bouge.

 

Plus blottis dans nos trous d’obus, nous attendions que la fusillade finisse pour se rendre compte ou l’on se trouve. Impossible de bouger la tête, car à chaque instant, les balles boches sifflent à nos oreilles.

 

Nous attendions toute une journée, dans ces malheureux trous d’obus, que la nuit commence à venir, pour essayer de nous évader. Nous sommes dans une sale situation depuis les 2 h du matin que nous sommes à plat ventre dans la terre et rien à manger.

 

Petit à petit, avec nos outils portatifs  nous creusons une tranchée entre chaque trou d’obus. Nous sommes 3-4 par trous et nous essayons de nous réunir tant bien que mal.

 

Après avoir attendu toute la journée nous entendons creuser vers 9 du soir.

 

Nous appelons,  et à notre grande surprise, c’est le Génie français qui vient nous sortir de cette sale position. Nous n’attendions même pas qu’il soit vers nous.

 

Il leur restait une 60ne de mètres à creuser, mais tellement nous étions fatigués à être dans ce trou que d’un bond, nous sautions tous dans la tranchée qu’il creusait pour venir à nous. Quel soupir de soulagement que nous ne pouvions pas revenir, que nous étions sauvés, car nous étions prisonniers, et impossible de partir, car ces sales bêtes nous guettaient bien. Enfin, nous sommes sauvés.

 

Nous traversons toutes nos lignes. Nous allions en arrière, car sitôt que nous étions partis, nous étions remplacés par d’autres. Une fois arrivés, nous étions fourbus, vannés, car il y avait bientôt 3 jours et 3 nuits que nous ne dormions pas du tout et sur ces 3 jours, une journée sans manger. Enfin, nous voilà en repos en seconde ligne. Là, nous ne risquons pas d’attaquer, mais nous sommes assiégés par les obus.

 

Nous couchons sur la terre, dans ses anciennes tranchées prises aux Boches et nous sommes dévorés par les poux. Tout le monde en est garni.

 

Dans cette furieuse attaque, je suis passé à travers les balles, mais par contre, mon fusil a été coupé en deux et une de mes cartouchières aussi, par un éclat d’obus. J’ai perdu mes 2 musettes que j’avais sur moi ainsi que mon portefeuille et mon livret militaire. Je n’ai pas de chance, mais d’un côté, j’ai sauvé ma peau.

 

Nous avons perdu 80 hommes dans ma compagnie, dont les trois officiers. C’est par miracle que le reste en est sorti, car nous étions pris entre 3 feux.    

 

Nous ne sommes toujours pas relevés des tranchées, mais je pense que nous allons aller au repos pendant quelques jours.

 

J’avais un tas de choses boches comme souvenir, mais j’ai été obligé de les laisser, car s’y j’avais été prisonnier, les bandits m’auraient fusillé.

 

J’ai aussi un chandelier qui sort du château de Noulette. Il est parti de là, mais il sera trouvé dans une tranchée que les Boches avaient laissée, après avoir pillé le château.

 

Tu feras lire la lettre à Gaston, car j’ai sommeil et je vais me coucher.

 

Et comme je n’aime pas écrire, tu fais la même chose, tu lui feras parvenir. Sitôt que je serai en repos, je vous écrirai une pareille lettre.

 

Mille baisers à toute la famille. Ton fils qui t’embrasse bien fort. »

 

Dans ce courrier, Alphonse Petit n’a pas tout raconté concernant les conditions de sa vie de soldat. Quand il écrit à son frère, il est beaucoup plus clair. Il raconte certains repas pris à proximité de cadavres à moitié décomposés qui font parfois office de chaise ; une telle scène aurait probablement rempli d’effroi sa mère si elle avait été informée de cette situation peu ragoûtante !

 

« Copie d’une lettre de Polo datée du 7 juin 1915,

 

Mon cher Gaston,

 

Sans prendre le temps de recevoir ton colis, je réponds à ta lettre aussitôt. J’ai envoyé à maman une grande lettre ou je lui raconte ma première attaque contre les Boches. Je lui ai dit qu’elle te la communique et tu jugeras un peu quelle veine j’ai eue de m’en sortir. Je suis aussi proposé sous-off pour la première place qu’il y aura à la compagnie, pour mon courage et ma fermeté que j’ai eus envers les hommes à réoccuper une tranchée que les Boches avaient abandonnée.

 

Il est vrai que personne ne voulait s’aventurer à la réoccupation de cette tranchée. Je fis une patrouille, puis une fois sûr qu’il n’y aurait pas de danger, toute la section entre en sa possession.

 

Le commandant me fit des félicitations devant toute la compagnie en me disant que la prochaine fois,  je serai cité à l’ordre du jour.

 

Pour le moment, nous sommes au repos à 8 km en arrière où nous faisons un petit exercice matin et soir.

 

Je me porte toujours très bien. J’oubliais de te dire que le soir, une fois la tranchée réoccupée, le x régiment devait attaquer.

 

Nous étions soutien à notre gauche. Une fois l’heure de l’attaque, nous formions une équipe de grenadiers, mais pas un n’a voulu marcher, car c’est la plus sale place. Ils sont placés à l’endroit où doit partir l’attaque, de manière à arroser les Boches de grenades dans leurs tranchées. Alors, je fais ni une ni deux, à l’heure juste de l’attaque, je me place derrière le pare-éclats qui nous sépare des Boches et je commence à les arroser de grenades en tout genre, cela m’a valu encore une bonne note.

 

Pour la 1ère fois que je montais aux tranchées, mes chefs me feront bien des félicitations. C’est tout ce que j’avais à te dire pour le moment et sitôt que j’aurai reçu ton paquet je t’écrirai à moins que je ne sois remonté aux tranchées.

 

C’est la plus sale vie qu’un homme peut mener. Nous sommes remplis de poux, nous restons pendant 8 jours sans nous laver même les mains. Nous mangeons autour des cadavres à moitié pourris, parfois même ils nous servent de chaise.

 

Toi qui es minutieux, je ne voudrais pas te voir avec nous. Ta lettre, que je viens de recevoir, a mis deux jours et celles de Chalon mettent vingt jours. Tu vois d’ici la correspondance que je peux avoir chez nous. À peine deux lettres par mois, alors tu me feras plaisir d’écrire un peu plus souvent. Ton frère qui t’embrasse bien fort. »

 

Le 25 juin, le général Guillemot le fait citer à l’ordre de la brigade pour son courage au cours d’un violent bombardement dans le secteur du fond de Buval. Le caporal Petit a le droit de porter la croix de guerre avec une étoile de bronze. Le jour même, il peut coudre ses galons de sergent sur sa Poiret.

 

Le 25 septembre 1915, le 149e R.I. participe à une attaque d’envergure impliquant l’ensemble de la 43e D.I.. Il faut absolument prendre le bois en Hache à l’ennemi.

 

Cette fois-ci, la chance n’est pas au rendez-vous. Le sergent Petit est tué le lendemain au cours d’une charge menée par sa compagnie. Ses hommes l’enterrent sur place.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur le dessin suivant.

 

En memoire de Merieux, impressions septembre 1915

 

Le 4 octobre 1915, les deux témoins oculaires, les sergents-fourriers André Devineau et André Gérardin, confirment la mort du sergent Petit auprès de l’officier d’état civil du 149e R.I.. L’acte de décès est transcrit à la mairie de Chalon-sur-Saône le 20 mars 1916.

 

Correspondance famille Petit (2)

 

Le 16 octobre 1915, le sous-lieutenant Guyon rédige une lettre adressée au frère du sergent Petit.

 

« J’ai bien reçu votre lettre du 8 octobre. J’étais en effet en bonne amitié avec votre frère, le sergent Petit.

 

Malheureusement depuis quelque temps nous étions séparés, lui étant au 1er  bataillon et moi au 3e.

 

Je n’ai su ainsi sa mort qu’accidentellement ; elle m’a fort peiné, car je considérais Petit comme un brave garçon et un ami sincère.

 

Je ne sais pas grand-chose sur les circonstances de cet accident ; mais je suis bien certain qu’il est tombé en brave, et bien face à l’ennemi, en accomplissant tout son devoir.

 

Il a toujours été un exemple d’énergie et de bravoure à ses camarades et il a été toujours très estimé de ses chefs. 

 

Son avancement avait été rapide et il pouvait espérer monter encore.

 

Le 149e R.I. perd beaucoup en lui ; ses camarades et ses chefs le regretteront toujours.

 

Monsieur Baverey qui est au 1er bataillon va s’enquérir des circonstances qui entourèrent sa mort. Dès qu’il saura quelque chose, il vous en fera part.

 

Recevez, Monsieur, avec mes plus sincères condoléances, mes salutations très distinguées 

 

R. Guyon » 

 

La réponse du sous-lieutenant Baverey ne se fait pas attendre. Le 21 octobre 1915, il écrit ceci à  Gaston Petit.

 

« Cher ami,

 

Après renseignement pris auprès des camarades qui ont assisté aux derniers instants de votre malheureux frère, je puis vous dire qu’au moment de l’attaque, il n’a pas été possible de ramener le corps à l’arrière.

 

Ses camarades ont creusé au-devant du parapet de la tranchée une fosse qui conservera les restes de celui que le devoir a perdu. Il sera extrêmement douloureux pour vous de ne pas avoir d’autres détails, mais il m’est absolument interdit de vous décrire d’une façon précise cet endroit ; que le hasard me permette de revenir et de pouvoir vous donner tous les renseignements désirables.

 

De tout cœur avec vous, je vous envoie mes affectueuses salutations.

 

Henri Baverey. 4e compagnie du 149e R.I.. »

 

Aphonse Petit- le bois en Hache

 

Les restes mortuaires du sergent Petit, s’ils ont été retrouvés, n’ont pas été identifiés. Il y a de fortes probabilités pour qu’ils reposent dans un des ossuaires de la Nécropole de Notre-Dame-de-Lorette.

 

Alphonse Petit a été décoré  de la Croix de guerre avec une étoile de bronze et une étoile d’argent

 

Citation à l’ordre de la brigade n° 11 en date du 25 juin 1915

 

« Le 16 juin 1915 a montré sous le bombardement d’une extrême violence du fond de Buval, un sang froid et un mépris du danger qui en ont imposé à ceux qui l’entouraient et les a maintenu sur place. »

 

Le sergent Petit a obtenu la Médaille militaire à titre posthume.

 

« Sous-officier d’une bravoure réputée. Toujours au premier rang dans les moments difficiles. Tombé glorieusement le 26 septembre 1915, devant Angres. Croix de guerre avec étoile d’argent. »

 

Sepulture famille Petit

 

Le nom de ce sous-officier a été gravé sur le monument aux morts de la ville de Chalon-sur-Saône. Il a également été inscrit sur la tombe familiale au cimetière communal de Mellecey.

 

Alphonse Petit  ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Pour consulter la généalogie de la famille Petit, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Quelques années plus tard, Gaston Petit se rend en Artois avec des indications très précises fournies par des vétérans du 149e R.I. sur l’endroit où son frère est tombé. Malheureusement pour sa famille, il n’a trouvé aucune trace de sépulture.

 

Sources :

 

La fiche matricule du sergent Petit et les registres d’état civil  de sa fratrie ont été consultés sur le site des archives départementales de la Saône-et-Loire.

 

La correspondance du sergent Petit avec sa famille, les lettres des sous-lieutenants Baverey et Guyon, le cadre avec son portrait et les photographies présentées ici sont la propriété de K. Isker, petit neveu du sergent Alphonse Petit.

 

La photographie du bois en Hache a été réalisée par T. Cornet.

 

Le cliché de la sépulture familiale a été réalisé par K. Isker.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à T. Cornet,  à K. Isker, à M. Porcher, aux archives départementales de la Saône-et-Loire et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

12 mai 2023

10 novembre 1916

Sucrerie d'Ablaincourt dessin réalise par Hippolyte Journoud

 

La relève du 149e R.I. par des troupes fraîches n’est toujours pas d’actualité. Le lieutenant-colonel Pineau gère un secteur difficile avec ses trois bataillons épuisés par les conditions météorologiques et par l’attaque du 8 novembre. Il utilise au mieux ses compagnies pour couvrir la zone impartie à son autorité.

 

Dans la nuit du 9 au 10, les Allemands tirent à plusieurs reprises sur les nouvelles tranchées françaises. Des rafales de mitrailleuses et des explosions de grenades à fusil sont régulièrement entendues dans tout le secteur. Des éléments de 1ère ligne du 149e R.I. viennent occuper la tranchée des Germains et la partie est de la tranchée Simon.

 

Les hommes du 149e R.I. profitent de l’obscurité pour prolonger le barrage de la tranchée Pêle-Mêle jusqu’au point 916 k.

 

Les petits groupes et les isolés qui circulent à découvert sont pris pour cible dès le lever du jour.

 

L’artillerie allemande ne relâche pas ses efforts. Elle effectue à plusieurs reprises de violents tirs de barrage sur la 1ère ligne et la ligne de soutien.

 

L’artillerie lourde et l’artillerie de campagne françaises effectuent des tirs de contre-préparation et de réglage.

 

Carte 1 journee du 10 novembre 1916

 

 

Depuis le P.C. 5008, le lieutenant-colonel Pineau rédige un rapport adressé au général Guillemot concernant l’état de ses troupes.

 

« J’ai l’honneur de vous soumettre la situation dans laquelle se trouve actuellement le 149e R.I..

 

L’extension du front prévue par l’ordre d’opérations n°110 de la 43e D.I. du 9 novembre a été faite sans incident.

 

Situation des troupes

 

Le régiment a maintenant :

 

- en 1ère ligne : quatre compagnies et une compagnie de mitrailleuses

 

- en soutien : deux compagnies et une compagnie de mitrailleuses

 

- au repos : trois compagnies et une compagnie de mitrailleuses à Harbonnières

 

Les compagnies de 1ère ligne sont fournies :

 

trois compagnies et une compagnie de mitrailleuses, par le 1er bataillon du 149e R.I. (entrées dans la nuit du 8 au 9 novembre)

 

- Une compagnie, par le 2e bataillon du 149e R.I. (entrée dans la nuit du 6 au 7 novembre et ayant pris part à l’attaque)

 

Le soutien est fourni par :

 

- Une compagnie et 1 compagnie de mitrailleuses du 2e bataillon du 149e R.I. (entrées en 1ère ligne dans la nuit du 8 au 9 novembre, ayant pris part à l’attaque). Leur emplacement est en avant de la sucrerie, par conséquent dans la même situation précaire qu’en 1ère ligne.

 

- Une compagnie du 3e bataillon du 149e R.I. laissée en Valet pendant que son bataillon est parti au repos, remplace la 6e compagnie. Cette compagnie ayant perdu la majeure partie de ses cadres dans l’attaque a été envoyée à Harbonnières pour se reconstituer. Elle se trouve dans l’impossibilité matérielle de remonter dans le secteur.

 

- Relèves nécessaires

 

Il me faut songer à relever dans la nuit du 12 au 13 :

 

- les 4 compagnies de 1ère ligne et la compagnie de mitrailleuses, dont l’une, la 7e, sera restée 6 jours en secteur, et aura pris part à l’attaque et les 4 autres, 4 jours.

 

- Les 2 compagnies et la compagnie de mitrailleuses de soutien, dont 2, (5e et C.M.2) auront 6 jours de secteur et l’autre, (9e), 7 jours (4 en 1ère ligne et 5 en soutien)

 

Or, pour satisfaire à ces exigences, je n’ai que 2 compagnies (10e et 11e) et la C.M.3 à Harbonnières.

 

Conclusion 

 

En résumé, il faut envisager que le 12 au soir, le régiment ne sera plus en état de tenir le front qui lui est confié, faute de troupes fraîches.

 

Antérieurement, j’avais rendu compte au commandement de ce qu’il me semblait difficile de durer jusqu’au 8 novembre. En combinant un jeu compliqué de relèves, en faisant appel au superbe moral de nos hommes, j’ai pu obtenir une durée plus longue que je ne l’avais prévue.

 

La nécessité de l’extension de la nuit dernière, limite nécessairement à la date extrême du 12 au soir, le temps au-delà duquel il ne me semble pas prudent de laisser nos troupes en secteur. »

 

La réponse du général Guillemot ne se fait pas attendre :

 

« Fait retour à Monsieur le lieutenant-colonel commandant le 149e R.I..

 

Il me semble que la nouvelle organisation du sous-secteur prescrite par l’ordre général d’opérations n° 22 de la 85e brigade en date du 10 novembre, réduise dans de notables proportions les charges du 149e R.I. (une compagnie du 10e B.C.P. devra remplacer une compagnie du 149e R.I. au moment de la relève du 3e B.C.P.).

 

Prière de faire connaître ci-dessous les modifications qu’apporterait le nouvel état de choses aux conclusions qui précèdent. »

 

Suite à cet ordre, le lieutenant-colonel Pineau ajoute ceci à son rapport :

 

« En réponse à la note ci-dessus, j’ai l’honneur de vous rendre compte de ce qu’en effet les prescriptions de l’ordre général d’opérations n° 22 de la 85e brigade, qui me m’est parvenu qu’après l’envoi de ma lettre n° 182 T, apportent au 149e R.I. un soulagement sensible en permettant de retirer de la 1ère ligne la 7e compagnie qui va venir au Valet se reposer.

 

Toutefois, il y a lieu de prévoir que le 12 au soir, 2 compagnies du 3e bataillon du 149R.I. me resteront seules pour relever en 1ère ligne les 3 compagnies du 1er bataillon. La compagnie Onde (9e) étant toujours maintenue en secteur à la place de la 6e dont il ne faut plus rien espérer avant quelque temps. »

 

Les deux aviations restent très actives tout au long de la journée. Un avion allemand est abattu au nord de Deniécourt vers 14 h 00. Une de ses ailes, fracturée, entraîne l’appareil dans une chute en spirale qui ne laisse aucune chance à ses deux occupants.

 

La nouvelle 1ère ligne française est prolongée de 85 m vers le sud-ouest entre le 3e B.C.P. et le 149e R.I. et le boyau reliant les tranchées des Germains et Poypoy. Les travaux de consolidation des tranchées conquises se poursuivent. Les boyaux de liaison sont approfondis. 

 

Les hommes du 149e R.I. construisent une sape de 65 m au point 6187 pour  mieux visualiser terrain. Du fil de fer est posé devant la tranchée Poncelet.

 

Les Allemands renforcent la partie conservée de la tranchée Couverte.

 

Plusieurs patrouilles sont effectuées en cours de journée et durant la nuit.

 

Les 3e et 10e B.C.P. sont un peu moins fatigués. À l’exception de deux compagnies et d’une compagnie de mitrailleuses du 10e B.C.P. placées en réserve de division depuis le 7 novembre (15 jours de secteur), toutes les autres compagnies ont pu bénéficier d’un temps de repos plus important que les bataillons du 149e R.I..

 

La 6e compagnie est citee a l'ordre de l'armee

 

La 6e compagnie sera citée à l’ordre de l’armée pour ses actions menées au cours des combats du 17 septembre et du  7 novembre 1916.

 

Citation n° 244 à l’ordre de la Xe armée  en date du 12 décembre 1916 :

 

« À l’attaque du 17 septembre 1916, la 6e compagnie s’est précipitée sur la tranchée ennemie qu’elle a enlevée d’un brillant élan, faisant des prisonniers et facilitant la progression du corps voisin, l’a organisée ensuite avec une ardeur inlassable sous un bombardement des plus intenses. A continué à progresser le lendemain 18, sur une profondeur de 700 mètres et ne s’est arrêtée qu’à bout de force, devant une position fortement occupée par l’ennemi. Le 7 novembre 1916, entraînée brillamment par le lieutenant Kolb, remarquable d’énergie et de bravoure et qui venait d’en prendre le commandement, tous les officiers ayant été mis hors de combat, s’est emparée de haute lutte de la première ligne ennemie, après un violent combat corps à corps et s’y est maintenue malgré un fort tir de barrage et deux contre-attaques. »

 

Le général Guillemot signe un bilan récapitulatif des pertes subies par la 85e brigade, depuis son arrivée dans le secteur de la sucrerie. Ce bilan est aussitôt envoyé au général commandant la 43e D.I..

 

Pour le 149e R.I. les pertes s’élèvent à 62 tués, à 242 blessés, à 4 disparus (présumés tués) et à 14 hommes évacués pour pieds gelés.

 

Le lieutenant Poncelet a été tué, le capitaine Viala et les sous-lieutenants Daumont, Bachetta, Blandin ont été blessés et le sous-lieutenant Damiens a été évacué pour maladie.

 

Une patrouille du 149e R.I. capture un blessé du 20e I.R. vers 19 h 30. Ce soldat allemand annonce une attaque prévue pour le lendemain. Il faut se préparer en conséquence.

 

Le 10e B.C.P. relève le 3e B.C.P. dans la nuit du 10 au 11 novembre. En plus du 3e B.C.P., il remplace une compagnie du 149e R.I. de 1ère ligne, ce qui étend le front du quartier D vers l’ouest.

 

Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

La carte présentée ici a été réalisée à partir de la carte figurant dans le J.M.O. du 3e B.C.P..

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

 

J.M.O. de la 86e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/15.

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

 

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 819/5.

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Le dessin intitulé « Sucrerie d’Ablaincourt (front novembre 1916) »» a été réalisé par Hippolyte Journoud, soldat au 149e R.I.. Il fait partie d’un fonds privé appartenant à la famille Aupetit.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher, à la famille Aupetit et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

5 mai 2023

Victor Marie Voirin (1887-1937)

Victor Marie Voirin

 

Victor Marie Voirin voit le jour le 6 juillet 1887 à Champlitte, dans le département de la Haute-Saône.

 

Son père, Emmanuel, 44 ans, est marchand de chiffons. Sa mère, Benoite Goutte, âgée de 39 ans, n’exerce pas d’activité professionnelle.

 

Victor est le benjamin d’une fratrie composée de 2 filles et de quatre garçons (ses deux sœurs sont toutes les deux décédées en bas âge). Son père meurt lorsqu’il a 8 ans.

 

Genealogie famille Voirin

 

La fiche matricule de Victor Voirin mentionne un degré d’instruction de niveau 3. Il sait lire, écrire et compter correctement lorsqu’il quitte l’école communale. Pour lui, il n’est pas question de poursuivre ses études. Il doit rapidement gagner sa vie pour subvenir aux besoins de la famille.

 

En 1903, Victor vit avec sa mère et son frère Louis, cordonnier né avec un pied bot (ses deux autres frères, Émile et Auguste, sont mariés alors que lui-même fête ses 16 ans). Tout comme son père et son frère Auguste, Victor devient chiffonnier.

 

Peut-être lassé par un métier peu lucratif ou par une existence qu’il juge trop ennuyeuse, Victor Voirin profite de l’arrivée des obligations militaires pour contracter un engagement volontaire avec l’armée (article 50 de la loi du 21 mars 1905).

 

Le 29 février 1908, il se rend à la mairie de Champlitte pour signer son contrat. Désireux de mettre de la distance avec son ancienne vie, il choisit de servir durant 3 ans au 1er régiment de Zouaves, une unité qui tient garnison à Alger (un bataillon et une compagnie cantonnent à la caserne d’Orléans, deux compagnies au fort national et une compagnie à Koléa).

 

Victor Voirin arrive au corps le 9 mars 1908. Nommé zouave de 2e classe le 1er novembre 1909, il n’ira pas plus loin dans la hiérarchie militaire. Ses supérieurs ne l’autorisent pas à suivre la formation des élèves caporaux.

 

Le moment venu, le zouave Voirin ne souhaite pas signer de nouveau contrat. Sa carrière sous l’uniforme s’arrête officiellement à la fin du mois de février 1911. De retour en France avec son certificat de bonne conduite validé, il retourne vivre dans sa commune natale. Le 1er mars, il passe dans la réserve de l’armée active.

 

Victor Voirin trouve un emploi de garçon brasseur. Le 26 octobre 1912, il épouse Marie Amélie Joséphine Parfait à Champlitte. Trois filles naîtront de cette union.

 

Son ancien statut d’engagé volontaire le dispense d’effectuer sa 1ère période d’exercice.

 

Victor Boivin travaille dans l’administration des postes ; il est classé non affecté entre le 7 mai 1914 et le 1er septembre 1914.

 

Une nouvelle guerre contre l’Allemagne est sur le point de commencer. L’ancien zouave Voirin est affecté au 149e R.I. C’est un régiment qui tient habituellement garnison à Épinal, mais qui a vu son dépôt déplacé à Jorquenay puis à Rolampont, près de Langres. Victor Voirin arrive dans sa nouvelle unité le 28 août 1914.

 

Il rejoint le régiment actif en Belgique le 12 décembre 1914.

 

Si sa fiche signalétique et des services ne donne pas d’indication précise sur son parcours de combattant, elle laisse tout de même supposer sa présence sur le front d’Artois en 1915 et à Verdun durant les mois de mars et avril 1916.

 

Sa fiche matricule mentionne une blessure à la tête suite à l’effondrement d’un abri, à la date du 9 novembre 1916. À cette période de sa vie, le soldat Voirin fait partie des effectifs de la 9e compagnie du 149e R.I.. Son régiment est engagé dans la Somme depuis le début du mois de septembre.

 

Pour en savoir plus sur cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Du cote de Deniecourt-novembre 1916

 

Le soldat Voirin est dans un premier temps soigné à l’ambulance 7/21  S.P. 116. Le 10 novembre,  il est pris en charge à l’ambulance 7/13 S.P. 142.

 

Le 13 décembre, il bénéficie d’une permission de 7 jours. Le 22, il est de retour au 149e R.I.. Le numéro d’affectation de sa nouvelle compagnie n’est pas connu.

 

Une citation à l’ordre du régiment confirme sa présence sur le champ de bataille au cours de l’attaque allemande du 15 juillet 1918. Il est impossible d’en dire plus sur ce qu’il a fait après, jusqu’à la signature de l’armistice, le 11 novembre 1918.

 

Victor Voirin est mis en congé illimité de démobilisation le 19 mars 1919 par le dépôt divisionnaire du 21e R.I. à Langres.

 

Du 2 mars 1921 au 23 février 1927, il est classé dans l’affectation spéciale en tant que facteur rural à l’administration des postes et télégraphes.

 

Le 10 novembre 1928, l’ancien combattant Voirin passe dans la 2e réserve (ancienne réserve territoriale).

 

Son nouveau fascicule de mobilisation conservé à l’intérieur du duplicata de son livret militaire permet d’en savoir un peu plus sur ses obligations militaires en cas de nouveau conflit. Le réserviste Voirin, devenu infirmier, aurait dû se présenter à la mairie de Champlitte, quatre jours après l’ordre de mobilisation générale où il aurait été employé à la conduite des animaux de réquisition.

 

Fascicule de mobilisation de Victor Voirin

 

Fin 1935, Victor Voirin fait appel au Chanoine Pierre Henry et à l’ancien vicaire de Champlitte, Urbain Nurdin pour leur demander une attestation écrite prouvant les circonstances de sa blessure à la tête du 9 novembre 1916.

 

Dans quel but fait-il cette demande ? Endure-t-il des douleurs qui pourraient -être en rapport avec son ancienne blessure ? Souffre-t-il de séquelles physiques ou psychiques qui justifieraient un passage devant la commission de réforme ? Souhaite-t-il faire valoir un éventuel pourcentage de handicap ? Il est difficile de se prononcer sur le sujet. Il est vrai que contrairement à des plaies provoquées par balle ou par éclats d’obus, cette blessure n’a probablement pas laissé de trace corporelle.

 

Victor Voirin a peut-être tout simplement eu besoin d’une preuve écrite, signée par deux témoins oculaires « fiables », pour justifier d’éventuels symptômes post-traumatiques en lien avec la guerre. Ceci n’est, bien sûr, qu’une supposition.

 

Le chanoine Henry, ancien aumonier du 149e  R.I., lui rédige le compte-rendu suivant : 

 

« Le poste de secours des brancardiers divisionnaires est installé dans un ancien abri boche, abri bétonné, solidement construit dans l’ancien fossé du château. Il n’a qu’un inconvénient, c’est d’avoir ses ouvertures assez étroites, heureusement tournées du côté de l’ennemi.

 

8 novembre

 

C’est la soirée des émotions pour notre P.S.. Nuldin vient d’arriver avec 12 hommes pour enterrer les morts du 158e R.I..

 

19 h 00

 

Qu'est-ce qui prend aux Boches ? C’est à nous, à notre P.S. qu’ils en veulent. Voilà que ça tombe plus près, trop près !  Une équipée du 149e R.I. qui vient de se faire sonner dans le village se précipite en trombe dans notre abri qui se remplit. Pan, cette fois, ça y est ! En plein dessus le P.S.. On entend des cris. Les bougies se sont éteintes. On sent une forte odeur de poudre. Il y a des blessés, des tués peut-être ? Quelque chose s’écroule ; une minute d’affolement dans le noir, les hommes se précipitent à l’aveugle dans toutes les directions, au risque de marcher sur les blessés !

 

Il faut se jeter au-devant d’eux et crier : « attention aux blessés ! » et ponctuer pour cela de mots énergiques, ce que ne manquent de faire Ducuing et Legrand (aides-majors).

 

La lumière se fait, on se précipite, personne de tué.

 

Un trou dans la voûte ; l’obus, un gros, a frappé l’angle de la fenêtre, atteignant la voûte qui s’est comme vidée sur la tête de ceux qui étaient en dessous. Un homme qui a reçu les plus gros morceaux a la tête en sang. On dirait qu’il est comme scalpé, le crâne ne paraît pas entamé.

 

Ce blessé n’est pas de notre groupe. C’est un nommé Henri Voirin du 149e R.I. (9e compagnie). Il est de Champlitte et causait avec son compatriote Nuldin qui lui, en est quitte pour l’émotion.

 

Relisant ces lignes écrites en ce temps là, il m’est facile de certifier, et ceci ne sera certes pas un certificat de complaisance, que Voirin Henri, alors soldat au 149e R.I. (9e compagnie) a été blessé à Deniécourt, le 8 novembre 1916, par les blocs de ciment armé détachés de la voûte par l’éclatement d’un obus de gros calibre. Chanoine P. Henry chancelier de l’Évêché à Langres. 2 janvier 1936 »

 

L’ancien vicaire de Champlitte Urbain Nurdin témoigne à son tour :

 

 « Je connaissais très bien Monsieur Henri Voirin avant la guerre puisque lui était de Champlitte et moi vicaire de cette paroisse. Je l’avais revu souvent durant la guerre, puisqu’il était dans la même Division que moi. Lui au 149e R.I. et moi au G.B.D. 43.

 

Le 8 novembre 1916, nous devions nous revoir dans des circonstances qui auraient pu être plus tragiques, mais où néanmoins, il reçut en ma présence, une blessure à la tête que je suis bien en mesure de certifier.

 

Avec douze hommes dont on m’avait donné la direction, j’avais procédé dans cette journée du 8 novembre à l’inhumation sur le terrain, derrière nos lignes, de morts restés sur le sol ou insuffisamment enterrés. Nous étions rentrés à notre poste de secours de Deniécourt où je fus heureux de saluer mon confrère l’abbé Henry, notre aumônier divisionnaire.

 

Nous goûtions, depuis un moment, un repos bien gagné quand un bombardement acharné du village commence, puis, tout d’un coup, une corvée de soupe du 149e R.I. dont faisait partie Henri Voirin s’enfourne dans notre P.S..

 

De suite, je reconnais Voirin et avec lui, je taille une petite partie de blague. On était bien en train de rire des Boches qui se fâchaient quand tout à coup un de ses maousses nous tombe en plein dessus alors que la voûte s’effondre sur nous.

 

Nos chandelles s’éteignent. On crie : moi je n’ai rien, mais il y en a sûrement qui sont blessés. Quand une bougie s’allume, je vois mon pauvre Voirin, la tête toute en sang et le corps à moitié enseveli dans les débris. Je l’aide à se relever pour que nos majors puissent lui faire un premier pansement. Ensuite, il a été évacué vers l’arrière.

 

C’est un témoin oculaire qui certifie l’exactitude de tous ses détails comme aussi, je peux certifier le fait de la blessure de Monsieur Henri Voirin et la nature du projectile : un obus de gros calibre qui a défoncé la voûte bétonnée de notre poste de secours. Mornay, 8 janvier 1936 (il est à noter que ces deux hommes d’Église l’appellent Henri Voirin et non Victor Voirin).

 

L’ancien soldat du 149e R.I. est définitivement libéré de toutes obligations militaires le 29 février 1936.

 

Carte de combattant et livret militaire de Victor Voirin

 

Le soldat Voirin a été décoré de la croix de guerre avec une étoile de bronze.

 

Citation à l’ordre du régiment n° 66 en date du 5 décembre 1918 :

« Bon soldat, très consciencieux, s’est distingué en maintes circonstances, particulièrement le 15 juillet 1918, en Champagne où il fit preuve d’un grand sang-froid dans une mission de reconnaissance qui lui avait été confiée. »

 

Victor Marie Voirin est décédé chez lui, à Champlitte, le 10 février 1937 à l’âge de 49 ans.

 

Sources :

 

Fiche signalétique et des services consultée sur le site des archives départementales de la Haute-Saône.

 

La généalogie de la famille Rallier a été réalisée à partir des informations trouvées sur le site Généanet associée à la lecture des registres de recensement de la commune de Champlitte.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à J.L. Poisot, aux archives de la Saône-et-Loire, au Service Historique de la Défense de Vincennes et à la mairie de Champlitte. 

28 avril 2023

8 et 9 novembre 1916

Du cote de Deniecourt-novembre 1916

 

8 novembre 1916

 

Les conditions météorologiques se sont à nouveau dégradées. Il est impossible de poursuivre l’offensive dans ce contexte. L’ordre donné par le général Guillemot concernant la reprise de l’attaque commencée la veille est donc annulé.

 

Chacun doit maintenant se concentrer sur les positions conquises pour les sécuriser au mieux.

 

La partie de la tranchée Couverte, enlevée à l’ennemi par le 149e R.I., est rebaptisée tranchée Poncelet, en hommage au lieutenant Poncelet tué la veille devant Geniecourt.

 

Le dépôt de grenades du 149e R.I., placé en 1ère ligne, a explosé. Les compagnies du commandant Schalck sont presque à court de ce précieux projectile fort utile ; ces compagnies sont en effet dans un secteur où la boue a pratiquement rendu impossible l’utilisation des armes traditionnelles.

 

Une corvée d’une soixantaine de chasseurs est demandée dans la matinée pour réapprovisionner les compagnies du 2e bataillon du 149e R.I. en grenades.

 

Carte 1 journee du 8 novembre 1916

 

 

À 13 h 45,  le lieutenant-colonel Pineau rédige, depuis le P.C. Valet, un compte-rendu d’opération adressé au responsable de la 85e brigade, le général Guillemot :

 

« Une compagnie du 2e bataillon du 149e R.I. a essayé ce matin à 9 h 45 de s’emparer des points 916 j et 916 k.

 

L’opération a été menée comme suit : deux escouades de grenadiers avaient pour objectif le point 916 j. L’une empruntant le prolongement vers l’ouest du boyau Couvert, l’autre se dirigeant nord-sud, le long de la tranchée Pêle-Mêle.

 

Par la tranchée Pêle-Mêle, la progression a réussi jusqu’à 50 m environ.

 

L’avancée a dû se faire en terrain découvert. Elle a été arrêtée nette par des feux de flancs tirés de la tranchée des Germains entre 916 i et 916 h et par une mitrailleuse placée à 920.

 

On a réussi à pousser une sape à quelques mètres au sud de la jonction de la nouvelle tranchée faite cette nuit avec la tranchée Pêle-Mêle.

 

Ci-joint un croquis indiquant en ce point la situation exacte du 2e bataillon du 149e R.I..

 

Croquis qui accompagne le rapport du lieutenant-colonel Pineau

 

Conformément à l’ordre reçu à 10 h 45 annulant les ordres précédents, j’ai suspendu toute nouvelle tentative sur ce point.

 

Toutes les sapes marquées sur le croquis seront terminées ce soir. »

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. s’efforce de réparer les éléments de tranchées récemment pris aux Allemands. Ces tranchées sont, pour la plupart, remplies d’eau. La terre est tellement détrempée qu’elles s’effondrent en de nombreux endroits. Il faut impérativement commencer les travaux de terrassement.

 

Le boyau entre le bois Bauer et la tranchée Poncelet 6187-915 est terminé à 1,60 m de hauteur sur toute sa longueur. Il est occupé face à l’est vers 915.

 

Plusieurs patrouilles d’observation et de liaison sont expédiées dans le no man’s land.

 

L’aviation ennemie s’est montrée très active tout au long de la journée. Quelques drachens surveillent le secteur de la 43e D.I..

 

L’artillerie française exécute de nouveaux tirs de réglage. Les 75 se livrent à leur mission habituelle.

 

Dans la soirée, l’artillerie allemande effectue des bombardements violents sur les lignes conquises par le 149e R.I.. À la fin du jour, les canons ennemis réalisent un premier tir de barrage, avec des obus de gros calibre. Un second tir de barrage a  lieu aux alentours de 20 h 30.

 

La commune d’Harbonnières est bombardée à plusieurs reprises dans la soirée et dans la nuit.

 

L’aviation allemande effectue des vols de nuit. Les mitrailleuses françaises tirent plusieurs rafales dans leur direction.

 

Une recherche réalisée sur le fichier « mémoire des Hommes » a permis d’identifier 5 hommes tués au cours de cette journée au 149e R.I. ; mais le décompte des pertes est chiffré à 14 tués, 16 blessés et 31 disparus. Sont comptabilisé ici un certain nombre de tués, de blessés et de disparus du 7 novembre non signalés par le régiment et dont le sort a pu être déterminé entre temps.

 

                                Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 8 novembre 1916

 

Du chiffre des disparus, il faut également déduire les tués restés entre les lignes ou ensevelis par les divers bombardements et les blessés passés par les P.S. des corps voisins (pour ces deux catégories le nombre n’a pas pu être établi).

 

Deux officiers allemands blessés du 20e I.R. sont transportés par les soins du 149e R.I..

 

Dans la nuit du 8 au 9, le 1er bataillon du 149e R.I., sous les ordres du capitaine de Chomereau, relève le bataillon Schalck en 1ère ligne.

 

9 novembre 1916

 

L’activité de l’artillerie allemande reste moyenne durant toute la matinée.

 

Six avions ennemis volant à très basse altitude ont été obligés de faire demi-tour après avoir essuyé les tirs de barrage des mitrailleuses françaises.

 

L’activité de l’artillerie allemande est plus marquée l’après-midi. Plusieurs drachens sont aperçus dans le ciel.

 

La réfection de tranchées se poursuit. Les voies de communication s’améliorent au fil des heures, mais l’état du terrain ne permet toujours pas de circuler dans les boyaux. Seules quelques parties sont praticables. Les hommes poursuivent la pause des caillebotis.

 

Une tranchée allant de la corne sud-est du bois Bauer à l’ancienne 1ère ligne allemande à l’ouest de 915 c (direction générale nord-sud) est en cours de construction.

 

Les hommes attendent. Ils n'ont entendu de rumeurs ni sur une éventuelle relève, ni sur une reprise de l'attaque.

 

                                  Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 9 novembre 1916

 

Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

 

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 819/5.

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

21 avril 2023

Charles Élie Marcel Depierre (1892-1916)

Charles Elie Marcel Depierre

 

Charles Élie Marcel Depierre est né le 14 août 1892, aux Granges Michel, un hameau dépendant de la commune de Verrières-de-Joux, dans le département du Doubs. Élie est le 6e enfant d’une fratrie composée de 4 filles et de 5 garçons.

 

Son père, Louis Narcisse, 38 ans, et sa mère, Marie Philomène Myotte, 29 ans, exercent tous les deux le métier de cultivateur.

 

La fiche matricule d’Élie Depierre mentionne un degré d’instruction de niveau 2, ce qui laisse supposer une maîtrise moyenne de la lecture, de l’écriture et de l’arithmétique.

 

Ce degré d’instruction est probablement dû à des périodes d’absentéismes prolongés, liées aux travaux agricoles. Élie devait régulièrement aider sa famille avant même la fin de ses obligations scolaires.

 

Une fois sa scolarité terminée, Élie est contraint d’aller gagner sa vie malgré son jeune âge. Tout comme ses parents, il rejoint le milieu agricole pour aller travailler la terre. Élie pratiquera ce métier difficile jusqu'à son départ pour la conscription.

 

Solide comme un roc, il est déclaré « bon pour le service armé » par le conseil de révision du canton d’Ornans, qui l’inscrit dans la 1ère partie de la liste de l’année 1913.

 

Le 10 octobre, Élie Depierre intègre les effectifs de la 4e compagnie du 149e R.I., un régiment qui tient garnison à Épinal.

 

Sa section se fait photographier avec l’ensemble de ses cadres, peu de temps après son arrivée dans cette unité.

 

Une section de la 4e compagnie du 149e R

 

Le 30 octobre 1913, le conscrit Depierre donne des nouvelles à ses parents.

 

Texte rédigé par Elie Depierre

 

Élie Depierre porte toujours l’uniforme lorsque l’Allemagne entre en conflit avec la France en août 1914. Son régiment, qui fait partie de la réserve des troupes de couverture, doit gagner la frontière dès le 31 juillet.

 

Le 9 août, c’est le baptême du feu pour le 149e R.I.. L’attaque a lieu au Renclos des Vaches près de Wisembach. La 4e compagnie, sous les ordres du capitaine Altairac, est une des toutes premières à être engagée. Le soldat Depierre est touché par une balle à la jambe droite. Il doit être évacué vers l’arrière.

 

La période et le lieu où il est soigné ne sont pas connus. Il en est de même pour la date de son retour au sein du 149e R.I.. Sa fiche matricule indique simplement qu’il a été de nouveau blessé au cours de l’offensive allemande du 3 mars 1915, dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette. Cette fois-ci, c’est un éclat d’obus qui lui a généré une plaie dans la région pectorale droite.

 

Une nouvelle fois, sa fiche signalétique et des services ne mentionne pas la date et le lieu concernant sa prise en charge médicale. Il est donc impossible de dire à quel moment le soldat Depierre a rejoint son unité après sa période de convalescence.

 

A-t-il participé aux combats de mai, de juin et de septembre 1915 ? A-t-il pris part à la bataille de Verdun en mars-avril 1916 ? Il est difficile de l’affirmer avec aussi peu d’informations à disposition.

 

Début septembre 1916, le 149e R.I. est engagé dans le département de la Somme. Le 4, il doit prendre le village de Soyécourt. L’attaque est une réussite totale. Le mois suivant, le régiment contrôle une zone comprise entre la sucrerie d’Ablaincourt et le bois Bauer. C’est un secteur particulièrement dangereux. Chaque imprudence peut-être fatale.

 

Une offensive prévue depuis le 24 octobre 1916 débute le 7 novembre. Ce jour-là, Élie Depierre, devenu pionnier à la C.H.R., meurt suite à ses blessures (il n’est fait aucune mention des circonstances de sa mort sur son acte de décès).

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte journée du 7 novembre 1916

 

Le soldat Depierre repose actuellement dans la nécropole nationale de Maucourt. Sa tombe porte le n° 1564.

 

 

Son acte de décès a été transcrit à la mairie de Voires le 25 février 1919.

 

Charles Élie Marcel Depierre ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Son nom a été gravé sur le monument aux morts de la commune de Durnes.

 

Pour consulter la généalogie de la famille Depierre, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

log geneanet

 

Le pionnier Depierre a été décoré de la croix de guerre avec deux étoiles de bronze.

 

Citation à l’ordre du régiment n° 107 en date du 10 mai 1916

 

« Très bon soldat courageux et discipliné. Deux blessures. »

 

Citation à l’ordre du régiment n° 28 en date du 1 décembre 1916

 

« Pionnier d’une grande bravoure, d’un zèle et d’un dévouement à toute épreuve. Blessé le 7 novembre 1916 à Gomiécourt, plaies multiples par éclat d’obus. »

 

 Il a reçu la Médaille militaire à titre posthume (J.O. du 4 septembre 1920).

 

« Pionnier d’une bravoure, d’un zèle et d’un dévouement à toute épreuve. Tué glorieusement, le 7 novembre 1916, à Gomiécourt, en s’élançant à l’attaque des positions ennemies malgré une vive fusillade. A été cité. »

 

Sources :

 

Les informations concernant ce soldat sont extraites de sa fiche matricule consultée sur le site des archives départementales du Doubs et de sa fiche individuelle lue sur le site « Mémoire des Hommes ».

 

La photographie de sa sépulture a été réalisée par B. Étévé.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à B. Étévé, à T. Vallé, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales du département du Gard.

14 avril 2023

Témoignage de Paul Portier : sucrerie de Génermont et bois des Satyres (octobre – novembre 1916)

Paul Portier temoignage octobre-novembre 1916

 

Le 12 octobre 1916, la 1ère compagnie de mitrailleuses du 149e R.I. remonte en 1ère ligne, dans la Somme. Elle vient de bénéficier d’un temps de repos dans le département de l’Oise.

 

Un de ses soldats, Paul Portier, connaît bien le secteur de Soyécourt et d’Ablaincourt. Il y a combattu en septembre. Il évoque ses souvenirs dans son témoignage réalisé après le conflit.

 

« Le repos de Velennes a pris fin le 12 octobre. Nous avons embarqué en automobiles pour revenir dans le secteur de Soyécourt-Ablaincourt. Notre débarquement s’est fait dans la nuit à Harbonnières, que nous commençons à bien connaître.

 

En ces jours d’automne, tout est baigné de tristesse. Le paysage n’a rien d’enchanteur et c’est sans enthousiasme que nous revenons ici. La saison des pluies va commencer et nous la détestons plus que le froid surtout dans ces terrains qui se transforment en 24 heures en océan de boue.

 

Le secteur paraît plus calme, ce qui ne veut pas dire que nous allons y vivre comme des rois. Nous ignorons d’ailleurs si ne nous participerons pas encore à des opérations offensives.

 

Le 14, nous nous portons au bois des Satyres, près du village d’Estrées, dans ce bois, les Boches, alors qu’ils l’occupaient, avaient construit des abris très confortables, en particulier, ceux qui s’enfoncent profondément sous la route de Saint-Quentin, et nous en profitons maintenant.

 

Le 16, dans la nuit, nous relevons la 2e compagnie de mitrailleuses du 17e Régiment d’Infanterie, près de la sucrerie de Génermont, relève assez mouvementée et très pénible.

 

sucrerie de Genermont

 

Pendant la nuit du 16 au 17, le 1er bataillon du 149e R.I., en ligne depuis la veille, effectue dans la direction du bois Bauer, une avance de 400 mètres sans rencontrer de résistance.

 

La journée du 17 est assez calme.

 

Pendant la journée du 18, l’artillerie allemande bombarde assez sérieusement la sucrerie et ses abords.

 

Le 19, il pleut sans arrêt et nos tranchées sont dans un état lamentable. Ce temps épouvantable n’arrête cependant pas l’artillerie ennemie, qui continue son marmitage et il en est ainsi le 20.

 

Le 22, à 4 h 00, je descends chercher la relève de la 2e compagnie de mitrailleuses qui se trouvait au bois des Satyres. La relève s’effectue dans d’assez bonnes conditions malgré le mauvais état des boyaux. Nous descendons en soutien dans les abris de la tranchée du Biniou.

 

Tranchee du Biniou-tranchee Sans-Gene

 

Le 23, pendant la journée, notre artillerie se montre très active. Au cours de la nuit, nous recevons l’ordre de nous tenir prêts à monter en ligne d’un moment à l’autre.

 

Je me rends au poste de commandement du 1er bataillon où je reçois un contre-ordre. Les opérations sont retardées de 24 heures.

 

Le 24, journée calme, il pleut de nouveau. Ce mauvais temps paraît être la cause des multiples ordres et contre-ordres qui nous parviennent à chaque instant. Nous passons notre temps à nous promener à droite et à gauche dans les boyaux.

Je descends reconnaître des emplacements au bois des Satyres où nous nous portons le 25 à 6 h 00.

 

Le 26, j’effectue une reconnaissance à la tranchée Sans-Gêne, où nous devons prendre position en cas d’alerte.

 

Le 27, activité de notre artillerie, nous nous attendons à monter à la tranchée Sans-Gêne pendant la nuit de 27 au 28, mais à 17 h 00, nous recevons un contre-ordre et nous passons réserve de D.I. à Foucaucourt. Toutes ces promenades sont éreintantes et nous aimerions en finir au plus vite.

 

En arrivant à Foucaucourt, nous ne trouvons aucun cantonnement disponible. Nous devons aller chercher asile à un kilomètre, dans des abris du boyau de la Boulangerie.

 

Le 28, à 16 h 00, nous revenons à Foucaucourt où nous cantonnons dans une cave. À la tombée de la nuit, il y a une vive activité des deux artilleries due à une attaque allemande.

 

Le 29, à 2 h 00, réveil en sursaut. Nous allons prendre place dans la tranchée Sans-Gêne. Une attaque de chez nous devant se déclencher dans la journée. Mais à 12 h 30, nous recevons déjà un contre-ordre. L’attaque est retardée de 24 h 00. La pluie persistante gêne sérieusement les opérations.

 

En fin de compte, au début de l’après-midi, nous quittons encore une fois nos emplacements de la tranchée Sans-Gêne pour revenir à la tranchée du Biniou et à 18 h 00, nous sommes à nouveau à Foucaucourt.

 

Le 30, le temps ne s’améliore pas, vent et pluie. Des bruits circulent que nous devons monter le soir en ligne. Activité d’artillerie.

 

Le 31, les Boches envoient quelques obus sur Foucaucourt, au croisement des routes de Saint-Quentin à Amiens et de Vermandovillers ; pas de tués, mais quelques blessés. À 19 h 00, nous montons en ligne, à la tranchée des Germains où nous relevons la 2e compagnie de mitrailleuses. La relève s’effectue à découvert, les boyaux étant impraticables.

 

La journée du 1er novembre est assez calme, mais le 2, le marmitage de nos tranchées devient plus violent.

 

Le 3 novembre, je descends à 4 h 00 reconnaître des cantonnements à Foucaucourt où ma compagnie doit revenir dans la nuit du 3 au 4.

 

Le soir, à 17 h 00, l’artillerie redouble part et d’autre et nos pertes sont assez sérieuses. La relève prévue s’effectue néanmoins sans trop de difficultés.

 

Les journées des 4 et 5 sont relativement calmes.

 

Le 6, pendant la soirée, activité de notre artillerie. Vers 21 h 00, explosion du dépôt de munitions de Bayonvillers.

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. monte en ligne pendant la nuit. Il doit attaquer le 7 avec le 3e bataillon en soutien. Nous demeurons à Foucaucourt, en réserve de C.A.. »

 

Sources :

 

Témoignage inédit de Paul Portier

 

Le fond de carte cartes est extrait du J.M.O. de la 25e brigade.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et à la mairie de Vienne, sans qui l’auteur de ce témoignage n’aurait jamais pu être identifié. 

7 avril 2023

Georges Poncelet (1892-1916)

Georges Poncelet

 

Georges Poncelet naît « au hasard des garnisons » le 18 février 1892 à Vendôme, dans le département du Loir-et-Cher.

 

Son père, Louis Jules, 47 ans, est officier de cavalerie au 7e régiment de Chasseurs. Sa mère, Marie Marguerite Dumont, 35 ans, n’exerce pas d’activité professionnelle.

 

Georges est le neuvième enfant du couple. Paul, le benjamin de la fratrie, voit le jour l’année suivante.

 

Genealogie famille Poncelet

 

Attiré très tôt par les chevaux et probablement initié aux bases de l’équitation, Georges ne rêve que d’une chose, s’engager dans un régiment de cavalerie.

 

Sa fiche matricule indique un degré d’instruction de niveau 3, ce qui est une erreur. En effet, le jeune Poncelet a passé le concours d’entrée de l’école de Saint-Cyr, ce qui implique qu’il a obligatoirement suivi un enseignement secondaire complet avec obtention du baccalauréat.

 

Georges Poncelet est reçu à l’école spéciale militaire, mais il ne fait pas partie des meilleurs admis. Son numéro d’entrée ne lui laisse aucun espoir pour une intégration dans un régiment de cavalerie. Il préfère démissionner plutôt que de se former dans l’infanterie.

 

Toujours dans l’idée de servir dans un régiment de cavalerie, Georges Poncelet se rend à la mairie de Château-Thierry, le 11 octobre 1911, pour y signer un engagement volontaire de trois ans.

 

Trois jours plus tard, il intègre, comme simple cavalier, le 6e régiment de cuirassiers, une unité qui tient garnison à Sainte-Menehould. Son instruction militaire débute le 15 octobre 1911. Elle s’achève le 14 août 1912.

 

Sainte-Menehould - entrée du quartier du 6e Cuirassier

 

Son niveau d’études et son statut d’engagé volontaire lui permettent d’accéder rapidement aux premiers grades de sous-officier. Il est nommé brigadier le 22 février 1912 puis maréchal des Logis le 27 septembre.

 

Deux petits accrocs au règlement en lien avec du matériel militaire lui valent 6 jours d’arrêts simples en décembre 1912.

 

 

Les manquements à la discipline sont un peu plus nombreux l’année suivante.

 

 

Le 5 décembre 1913, le maréchal des logis Poncelet signe un nouveau contrat d’une durée d’un an. Cet engagement prendra effet à compter du 11 octobre 1914,  lorsque le précédent arrivera à échéance.

 

Georges Poncelet occupe les fonctions maréchal des logis fourrier du 1er octobre 1913 au 6 mai 1914. Le jeune homme continue de se former avec tout ce qui lui est proposé au sein de la caserne.

 

Son livret matricule d’homme de troupe indique un brevet de maître de gymnastique et mentionne des épinglettes d’honneur ; celles-ci ont probablement été obtenues grâce à d’excellentes performances au tir.

 

Le maréchal des logis Poncelet prend part aux grandes manœuvres de la 4e D.I. de cavalerie entre le 29 août et le 15 septembre 1913.

 

Le 21 décembre, il obtient son brevet d’aptitude à l’emploi de chef de peloton.

 

Un dernier manquement à la discipline lui vaut 3 jours d’arrêts simples en février 1914.

 

 

Le 7 avril 1914, Georges Poncelet se rend à Verdun pour passer les épreuves écrites du concours d’admission à l’école d’application de cavalerie de Saumur. C’est une nouvelle chance de devenir officier.

 

Reçu, il n’aura malheureusement pas la possibilité de suivre la formation. Cette fois-ci, il est rattrapé par les évènements internationaux. Un conflit armé contre l’Allemagne est sur le point de commencer. Le maréchal des logis Poncelet entre en campagne contre l’Allemagne et l’Autriche dès le 31 juillet 1914.

 

Son régiment est envoyé au sud de Montmédy en tant que troupe de couverture. Il fait partie des unités qui doivent assurer la protection frontalière le temps que la nation termine la mobilisation de ses troupes.

 

Le 6e régiment de cuirassiers prend part à la bataille des Ardennes, du côté de Neufchâteau et d’Étalle en Belgique. Georges Poncelet est nommé aspirant le 10 août 1914. Fin août, son régiment protège la retraite de l’armée française près de Vervins.

 

Descendu jusqu’aux environs de Provins, le régiment de l’aspirant Poncelet participe à la bataille de la Marne. En octobre, il prend la direction de Lens avant de se diriger sur Béthume.

 

Fin 1914, la ligne de front se stabilise. La majorité des régiments de cavalerie abandonne ses chevaux devenus inutiles. Le 6e régiment de cuirassiers met pied à terre pour aller combattre dans les tranchées des Flandres, à Nieuport.

 

Début 1915, le 6e régiment de cuirassiers  est en Artois dans le secteur d’Arras.

 

Le 24 mars 1915, Georges Poncelet est nommé sous-lieutenant à titre temporaire. Il est enfin devenu officier.

 

Ce changement de statut entraîne aussitôt son affectation au 149e R.I.. Ce régiment combat du côté d’Aix-Noulette. Le chef de corps de cette unité lui confie le commandement d’une section de la 6e compagnie.

 

Le 4 mai 1915, le lieutenant-colonel Gothié lui inflige 8 jours d’arrêts simples pour le motif suivant : « Chargé de diriger une corvée de travailleurs au boyau de Saint-Nazaire, a quitté son poste sans motif et n’a pu arrêter une panique momentanée parmi ses hommes qui se sont réfugiés dans les tranchées de 1ère ligne. Le travail a été repris une heure après. Cette punition commencera le 4 mai. ». Ce sera sa dernière punition.

 

Le sous-lieutenant Poncelet participe aux attaques de mai, de juin et de septembre 1915 sur le front d’Artois.

Le 18 octobre, il est cité à l’ordre du 21e C.A. pour avoir assumé le commandement de sa compagnie après la mort de son supérieur, le lieutenant Damideau,  tué au cours d’une attaque menée le 26 septembre.

 

Le 6 janvier 1916, le chef de corps du 149e R.I. rédige la note suivante dans le feuillet individuel de Georges Poncelet : «  Sous-lieutenant à titre temporaire provenant des sous-officiers de cavalerie ancien démissionnaire à Saint-Cyr. Officier très sérieux, admissible à Saumur en 1914, ayant bien commandé une section et même une compagnie. Proposé pour le maintien à titre définitif. »

 

Suite à une décision prise par le général commandant en chef du 8 avril 1916, le sous-lieutenant Poncelet est promu lieutenant à titre temporaire. Cette nomination est ratifiée par une décision ministérielle du 15 avril. Georges Poncelet est en même temps nommé sous-lieutenant à titre définitif dans la cavalerie (J.O. du 17 avril 1916).

 

Le lieutenant Poncelet a été photographié à Somme-Tourbe, le 21 mai 1916. Il partage sa chambre avec le sous-lieutenant Robinet.

 

 

Début septembre 1916, le 149e R.I. est engagé dans le département de la Somme, au sud-est de Péronne. Le 4, il attaque le village de Soyécourt. Le lieutenant Poncelet est cité à l’ordre de la division pour ses actions.

 

Le 149e R.I. occupe ensuite un secteur de 1ère ligne allant de la sucrerie d’Ablaincourt au bois Bauer par roulement de bataillons.

 

Les conditions de vie sont très dures. La zone occupée est sans cesse bombardée par les Allemands et les conditions météorologiques sont particulièrement exécrables.

 

Le 7 novembre, une attaque prévue depuis le 24 octobre est sur le point d’être déclenchée. Les hommes du 2e bataillon du 149e R.I. se préparent à partir à l’assaut. L’artillerie fait rage. Le lieutenant Poncelet est déchiqueté par l’explosion d’un obus sur la parallèle du départ où sa compagnie est installée.

 

Trois heures plus tard la 6e compagnie, sous les ordres du sous-lieutenant Kolb passe à l’attaque. Elle sera citée à l’ordre de l’armée.

 

Pour en savoir plus sur les événements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante. 

 

Carte 1 journée du 7 novembre 1916

 

Georges Poncelet est inhumé dans un premier temps à Harbonnières. Sa tombe portait le numéro 1644.

 

Il n’existe pas de sépulture individuelle militaire portant son  nom. Le corps de cet officier a probablement été restitué à la famille dans les années 20.

 

Décorations obtenues :

 

Croix de guerre avec une palme, une étoile de vermeil et une étoile d’argent

 

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 63 en date du 18 octobre 1915. 

 

« Le 26 septembre devant Angres, a entraîné brillamment sa section à l’attaque des tranchées ennemies sous un bombardement et une fusillade des plus violents, son commandant de compagnie ayant été mortellement frappé, a maintenu sa compagnie sous le feu en donnant l’exemple du plus grand calme. Officier d’une bravoure, d’un entrain, d’un sang-froid remarquables, s’est toujours signalé par sa belle attitude dans toutes les actions auxquelles il a pris part. »

 

Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 155 en date du 10 septembre 1916 :

 

« A commandé sa compagnie avec beaucoup de sang froid et d’énergie pendant les attaques des 4, 5, 6 septembre 1916, tenant des positions de soutien successives sous des tirs de barrage des plus violents et faisant preuve des plus belles qualités de commandement.  »

 

Citation à l’ordre de la Xe Armée  n° 242 en date du 3 décembre 1916 :

 

« Commandant de compagnie de premier ordre, officier brillant, d’une conscience, d’un entrain et d’un courage merveilleux. Calme et réfléchi dans le danger, a donné dans toutes les actions auxquelles il a participé sans interruption d’avril 1915 à novembre 1916, la plus haute mesure de sa valeur et de ses qualités militaires.

 

Mortellement frappé le matin du 7 novembre 1916 alors qu’il parcourait la parallèle du départ où il avait installé sa compagnie en premier élément d’assaut (était titulaire de deux citations). »

 

Légion d’honneur à titre posthume avec le même texte que sa citation à l’ordre de l’Armée (publication dans le J.O. du 25 janvier 1920).

 

Le nom de cet homme est gravé sur le monument aux morts, sur une des plaques commémoratives de l’Hôtel de Ville et sur le tableau commémoratif de l’église Saint-Crépin de la ville de Château-Thierry.

 

Georges Poncelet ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

Fiche matricule lue sur le site des archives départementales de l’Aisne.

 

La photographie présentée dans le montage est légendée : « chambre d’officiers - Poncelet et Rob - Somme-Tourbe – 21 mai 1916. »

 

Un grand merci à M. Bordes, à N. Tricat, à A. Carobbi, à M. Porcher à T. Vallé, au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales de l’Aisne.

31 mars 2023

7 novembre 1916

Dessin Hippolyte Journoud- attaque du 7 novembre 1916

 

L’attaque prévue depuis le 24 octobre, reportée à plusieurs reprises, est sur le point d’être lancée malgré les conditions météorologiques toujours aussi défavorables.

 

Le 6, l’état-major de la 43e D.I. a transmis l’ordre suivant à ses unités : « l’attaque aura lieu le 7 novembre à 9 h 55. L’heure H, 9 h 55, ne sera communiquée aux compagnies de 1ère ligne que demain matin. »

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. quitte Harbonnières dans la nuit du 6 au 7 pour aller occuper le secteur du bois Bauer.

 

Positions occupées par la 85e brigade du 5 au 7 novembre 1916

 

Le bataillon Schalck a ses 3 compagnies en place  à 6 h 00. Le 3e bataillon du régiment qui lui a cédé la 1ère ligne est positionné juste derrière lui. Le 2e bataillon est en liaison à droite avec le 1er B.C.P., à gauche avec le 3e B.C.P..

 

L’attaque doit se réaliser par « corps accolés » dans les conditions imposées par l’ordre d’opérations du 21 octobre 1916. À cette date, le 149e R.I. devait s’emparer des points 921 a, 921 b et 921 c avant de poursuivre sa route, par le sud-est ; ses objectifs étaient de prendre le village de Gomiécourt, la batterie 6283, la chapelle Saint-Georges et la casemate 6484.

 

Les objectifs fixés pour l’offensive du 7 novembre sont bien moins ambitieux. Cette fois-ci, la 85e brigade a reçu l’ordre de s’emparer de la 1ère ligne allemande.

 

Carte 1 journée du 7 novembre 1916

 

 

L’attaque se déclenche comme prévu à 9 h 55. Une pluie aveuglante gêne considérablement l’avancée des hommes. La boue encrasse les mitrailleuses. Les F.M., les V.B. et les fusils sont vite hors d’usage. La progression est difficile, même pour des troupes qui viennent de bénéficier d’une période de repos.

 

Les canons allemands effectuent des  tirs de barrage d’une grande violence sur le terrain occupé au sud-ouest du bois Bauer.

 

Les artilleurs français exécutent les tirs de protection. À la demande de l’infanterie, ils réalisent des tirs de barrage et des tirs de contre-préparation.

 

Les compagnies du commandant Schalck finissent par s’installer dans le boyau Couvert entre les points de 915 c et 916 j. Un petit poste est créé en avant de 916 k.

 

À droite, la liaison avec le 1er B.C.P. se fait vers 916 i.

 

La situation est plus délicate du côté du 3e B.C.P.. Dans un premier temps, il a  réussi à occuper le boyau Couvert, le point 915, une centaine de mètres du boyau Minden et une cinquantaine de mètres du boyau 915 à 915b. Une violente contre-attaque allemande finit par lui reprendre le point 915 et le boyau Minden.

 

La marche en avant du 3e B.C.P. a été fortement gênée par des tirs des pièces de campagne et par les rafales des mitrailleuses ; celles-ci étaient placées à l’extrémité sud-est de la tranchée Minden et des points 7283-7282-6983-7582.

 

Aucun drachen n’a été aperçu dans le ciel.

 

À 17 h 00, le général Guillemot publie un nouvel ordre général en vue de la prochaine attaque :

 

« La brigade a atteint le boyau 6187-915 entre la tranchée des Germains et les abords ouest du point 915 a. Un poste de grenadiers du 149e R.I. est établi à mi-chemin entre 916 k et 920.

 

À droite, la liaison, existe au point 916 h entre la droite du 149e R.I. et la gauche du  1er B.C.P..

 

La 86e brigade serait dans le boyau de Sébastopol et la tranchée des Germains, mais n’aurait pas atteint le point 920 b.

 

Les 85e et 86e brigades ont mission d’établir leur jonction sur la ligne 920 b et 920 c de façon à tenir la ligne : tranchée de Sébastopol – tranchée des Germains.

 

L’action sera préparée par l’artillerie de campagne et l’artillerie lourde sur Gomiécourt en approchant le tir de 920 c.

 

L’attaque sur 920 b sera conduite par le 1er B.C.P.. Le 149e R.I. conservant la liaison avec le 1er B.C.P. progressera dans la tranchée Pêle-Mêle et s’efforcera d’atteindre le point 916 c. Il se reliera au 1er B.C.P. au point 920 b.

 

Le 149e R.I. disposera de la compagnie Mouren.

 

Le 3e B.C.P. s’efforcera de reprendre le point 915 a et s’y établira solidement.

 

Les deux corps s’organiseront sur le boyau 6187 – 915 et se relieront soigneusement l’un à l’autre.

 

Le 149e R.I. prolongera le boyau des Pionniers jusqu’au boyau 6187 – 915.

 

Le 3e B.C.P. reliera  6590 à 915 en bordure du Chemin Creux.

 

Réserve de brigade :

 

Les deux compagnies et la compagnie de mitrailleuses du 10e B.C.P. et la compagnie 21/2 du Génie, sous le commandement du capitaine Lejosne.

 

Emplacement sans changement

 

La compagnie la plus avancée se tiendra en liaison avec la compagnie Mouren de façon à la remplacer au boyau Valet dès qu’elle se portera en avant.

 

La réserve s’installera alors : 1 compagnie au Valet, une compagnie dans la région du Tremble. La compagnie de mitrailleuses et le Génie dans la tranchée Sans-Gêne.

 

Réserve de division :

 

Le 1er bataillon du 149e R.I., sous les ordres du capitaine De Chomereau, dans la tranchée des Bouleaux. 

 

L’heure de l’attaque sera notifiée ultérieurement. »

 

La fin de la journée est extrêmement agitée. Les fusils et les mitrailleuses allemandes tirent constamment sur la nouvelle ligne française. Les feux des mitrailleuses, des F.M. et des V.B. français arrosent par rafales les points occupés par l’ennemi.

 

L’aviation allemande se manifeste à nouveau dans la soirée. Trois de ses avions survolent les lignes occupées par la 85e brigade.

 

Il faut impérativement approvisionner la 1ère ligne avec le maximum de grenades possibles et acheminer du matériel pour consolider les tranchées.

 

Dans la nuit, le 1er bataillon du 149e R.I., sous les ordres du commandant de Chomereau, s’installe dans la zone de la tranchée des Bouleaux et du boyau du Valet.

 

Plusieurs patrouilles de couverture et de liaison parcourent le nouveau no man’s land.

 

Un officier a été tué (lieutenant Poncelet) et deux officiers blessés (lieutenant Ribaut et sous-lieutenant Blandin) au 149e R.I..

 

Le décompte des blessés du régiment n’est pas connu.

 

Une recherche réalisée sur le fichier « mémoire des Hommes » a permis d’identifier 38 hommes tués au cours des combats.

 

                                Tableau des  tués du 149e R.I. pour la journée du 7 novembre 1916

 

Lieutenant-colonel Pineau (novembre 1916)

 

Trois jours après l’attaque, le lieutenant-colonel Pineau résume les conditions dans lesquelles ses hommes ont combattu, voici ce qu’il a écrit :

 

 « Prise d’Ablaincourt,

 

On nous communique ce récit officiel : la journée du 7 novembre au sud de la Somme a montré sous son jour véritable l’admirable vaillance qui anime nos troupes et le degré élevé de leur moral. C’est non seulement contre l’ennemi que nos braves ont eu à lutter, mais encore contre les éléments déchaînés.

 

Une pluie torrentielle que des rafales de vent chassaient avec violence n’a cessé de tomber pendant l’attaque. Depuis le bois de Chaulnes jusqu’au-delà de la sucrerie d’Ablaincourt où s’est déroulée l’action, le sol n’était plus que cloaque. La pluie persistante de ces derniers jours avait transformé en fondrière ce terrain labouré par l’artillerie.

 

Qu’on se représente l’effort physique qu’il faut à des hommes aux vêtements mouillés et aveuglés par la bourrasque pour se lancer en avant au milieu d’un tel chaos. Et pourtant, à 9 h 55, heure fixée, la ligne tout entière, sous la voûte de l’artillerie qui allongeait son tir, surgit des tranchées.

 

Le combat revêt des aspects différents suivant les secteurs, mais il offrit partout ces mêmes caractéristiques ; ce fut un perpétuel corps à corps ; les fusils bouchés par la boue se refusaient à cracher la mort. L’arme blanche fit largement son office en cette affaire, ainsi que les grenades dont les soldats ont usés avec une habileté incomparable.

 

Les tranchées ennemies bouleversées par la pluie et les obus n’avaient  plus que l’aspect des taupinières où, çà et là, des hommes étaient encore blottis. Malgré l’enchevêtrement des fils de fer, malgré les trous obus transformés en lacs dans lesquels on plongeait à chaque pas. Le nettoyage fut vite fait. Les Allemands surgissaient des tranchées en ruines et fuyaient à toute allure en faisant « Kamarad ». L’objectif  était atteint vers 10 h 15, vingt minutes après le signal d’attaque.

 

Au sud de la sucrerie d’Ablaincourt, les 1er et  3e B.C.P. et le 149e R.I. avaient affaire à forte partie. Le terrain était particulièrement défavorable. Un combattant a  traduit l’état du sol par ces mots pittoresques : «  À notre gauche, ils avaient de l’eau jusqu'aux genoux, mais ici, nous en avions jusqu’au ventre. »

 

Pendant toute la bataille, la violence de l’orage empêcha la liaison par avion de fonctionner. Néanmoins, par les moyens ordinaires, le service de renseignement fonctionna, si bien qu’à 15 h 00, l’état-major de l’armée connaissait de la façon la plus complète le nombre de prisonniers faits par nous et les résultats exacts de la lutte.

 

Un détail caractérise bien la journée. Un pilote qui sortit malgré le mauvais temps, et vola à 300 mètres déclara que nos hommes ressemblaient à des blocs de boue.

 

Un témoin militaire

 

Les blocs de boue, c’est nous !

 

Le lieutenant-colonel du 149e R.I. »

 

Les hommes du 149e R.I. s'apprêtent à passer une nuit en terrain conquis dans l'attente d'une nouvelle action offensive.

 

Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

 

J.M.O. du 1er B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 815/3.

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Le texte rédigé par le lieutenant-colonel Pineau est extrait du livre « Et le temps à nous, est compté. » Lettres de guerre (1914-1919) d’Albert Marquand.  Cet ouvrage est présenté par Francis Barbe, avec une postface du général André Bach. Éditions C’est-à-dire. 2011.

 

Le dessin intitulé « attaque du 7 novembre 1916 – prise d’Ablaincourt -Somme » a été réalisé par Hippolyte Journoud, soldat au 149e R.I.. Il est extrait du fascicule « Hippolyte Journoud, imprimerie de la maison des deux-collines, XXXII phototypies MCMXIX.

 

Un grand merci à M. Bordes, à R. Mioque, à F. Barbe, à A. Carobbi, à M. Porcher, et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

24 mars 2023

Marie Georges Chaxel (1896-1966)

Marie Georges Chaxel

 

Marie Georges Chaxel voit le jour le 28 octobre 1896 à Saulcy-sur-Meurthe, dans le département des Vosges.

 

Né de père inconnu, il est l’unique enfant de Marie Hortense Chaxel. Cette femme, âgée de 23 ans, travaille comme bobineuse dans l’usine de textile N. Géliot et Fils.

 

Saulcy-sur-Meurthe

 

En 1901, Hortense Chaxel vit avec ses deux sœurs, Rosine et Mathilde, son fils et ses neveux André et René.

 

En 1907, Prosper Chaxel, le grand-père de Georges, revient à Chaulcy-sur-Meurthe. Il s’installe au domicile de ses filles Hortense et Mathilde. Son fils, Camille, en plein préparatif de mariage,demeure quelque temps avec eux en attendant de créer son propre foyer. Rosine a quitté le groupe familial.

 

Genealogie famille Chaxel

 

Georges possède un degré d’instruction de niveau 3. Il sait donc lire, écrire et compter lorsqu’il laisse derrière lui l’école communale. Une fois sa scolarité obligatoire terminée, il se fait engager dans l’usine de textile où travaillent sa mère et sa tante Mathilde.

 

En 1915, le jeune Chaxel se présente devant le conseil de révision de Saint-Dié. En bonne forme physique, il est déclaré apte aux obligations militaires. Conscrit de la classe 1916, Georges est appelé par anticipation pour cause de guerre.

 

Il quitte son métier de tisserand pour une incorporation au 149e R.I. à compter du 10 avril 1915. Georges Chaxel rejoint le dépôt du régiment deux jours plus tard. Évacué sur l’hôpital de Gérardmer le 7 septembre, il est envoyé le jour même à l’hôpital temporaire de cette commune qu’il quitte le 3 octobre. La raison de cette hospitalisation n’est pas connue.

 

Le 22 avril 1916, il part avec un groupe de soldats au 9e bataillon pour terminer son instruction.

 

Une fois sur place, il est inscrit dans les effectifs de la 35e compagnie.

 

Le 11 septembre 1916, Georges Chaxel est affecté à la 33e compagnie. Le 25, il rejoint la 8e compagnie du 149e R.I. du dépôt divisionnaire 43.

 

Le 10 novembre 1916, le soldat Chaxel intègre la 5e compagnie du 149e R.I.. Ce régiment combat dans le département de la Somme depuis le début du mois de septembre. Les conditions de vie y sont épouvantables. La dernière attaque datant du 7 novembre a été un échec total. Le gain de terrain fut dérisoire par rapport aux pertes.

 

Georges Chaxel devient rapidement agent de liaison.

 

 

Les photographies suivantes représentent la liaison de la 5e compagnie. Elles ont été réalisées aux Vervins en 1917.

 

La liaison de la 5e compagnie aux Vervins

 

 

Les clichés présentés ci-dessus proviennent tous d’un album ayant appartenu à un officier non identifié de la 5e compagnie.

 

Le 23 octobre 1917, Georges Chaxel prend part à la bataille de la Malmaison.

 

Il est cité à l’ordre du régiment, pour avoir mené à bien sa mission et pour avoir participé à une attaque contre un nid de mitrailleuses. Il peut désormais porter la croix de guerre avec une étoile de bronze.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant la bataille de la Malmaison, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

Carte 1 journee du 23 octobre 1917 1er objectif

 

Le 149e R.I. s’oppose à des offensives allemandes à deux occasions : la première fois dans le secteur d’Arcy-Sainte-Restitue, la seconde fois dans le secteur du trou Bricot en Champagne.

 

Georges Chaxel obtient une seconde citation à l’ordre du régiment pour son dévouement durant cette période.

 

L’agent de liaison Chaxel participe ensuite à la bataille de Champagne et d’Argonne qui s’est déroulée du 25 septembre au 4 octobre 1918.

 

Le 3 octobre 1918, il est touché par des éclats d’obus devant le village d’Orfeuil. Blessé à la main gauche et au talon gauche, Georges Chaxel est envoyé à l’arrière pour être soigné à l’hospice civil S.M. (ancien couvent du Sacré-Cœur) de Chambéry du 8 au 29 octobre 1918.

 

Cette fois-ci, il est cité à l’ordre de la Division.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur la photographie suivante.

 

Orfeuil depuis le bois la Croix

 

Complètement rétabli de ses blessures, il rejoint la 4e compagnie du C.I.D. le 1er décembre 1918. Le 3, il part avec un groupe de renfort retrouver ses anciens camarades de la 5e compagnie du 149e R.I..

 

Démobilisé le 1er septembre 1919, Georges Chaxel retourne vivre à Chaulcy-sur-Meurthe. Le 26 avril 1924,  il épouse Lucie Georgette Marguerite Gaxatte, une tisserande originaire de Sainte-Marguerite.

 

À cette époque de sa vie, Georges Chaxel est employé à la compagnie des chemins de fer de l’Est. Le couple s’installe à Sainte-Maguerite. Il sera cheminot jusqu’à la fin de sa carrière professionnelle.

 

Durant le second conflit mondial, l’ancien soldat du 149e R.I. est « affecté spécial » à la S.N.C.F. à compter du 2 septembre 1939. Il sera rendu à la vie civile le 20 juin 1943, complètement libéré de toutes obligations militaires.

 

Georges Chaxel est décédé le 9 février 1966, rue Ernest Charlier, à Sainte-Marguerite.

 

Il repose dans le cimetière de cette commune.

 

Decorations Georges Chaxel

 

Décorations obtenues :

 

Citation à l’ordre du régiment n° 76 en date du 6 novembre 1917 :

 

« A assuré parfaitement son service d’agent de liaison pendant les combats du 23 octobre 1917 au Chemin des Dames. S’est ensuite distingué dans l’attaque d’un nid de mitrailleuses ennemies. »

 

Citation à l’ordre du régiment n° 37 en date du 8 juillet 1918 :

 

« Agent de liaison d’un grand dévouement, s’est toujours présenté pour accomplir des missions de liaison les plus périlleuses. »

 

Citation à l’ordre de la division n° 385 en date du 26 novembre 1918 :

 

« Agent de liaison plein de courage, d’initiative et de dévouement. S’est acquitté de sa mission dans les circonstances les plus délicates et les plus périlleuses pendant les combats du 26 septembre au 30 octobre 1918. Blessé dans l’accomplissement de sa mission. »

 

Décoré de la Médaille militaire par décret du 7 juin 1928.

 

Autres décorations :

 

Médaille interalliée de la victoire

 

Médaille commémorative française de la Grande Guerre

 

Le registre de recensement de la commune de Sainte-Marguerite de l’année 1936 n’indique pas de descendance pour le couple Chaxel.

 

Sources :

 

La fiche signalétique et des services de Marie Georges Chaxel, le registre de recensement d’Anould de l’année 1896, les registres de recensement de Saulcy-sur-Meurthe des années 1901, 1906 et 1911, les registres de recensement de Sainte-Marguerite des années 1931 et 1936 ont été consultés sur le site des  archives départementales des Vosges.

 

Album photographique ayant appartenu à un officier du 149e R.I. (collection personnelle).

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Pierre, à A. Carrobi, à T. Vallé, aux archives départementales du Vaucluse et à la mairie de Sainte-Marguerite. 

17 mars 2023

6 novembre 1916

Le ravin des cuisines (6 novembre 1916)

 

Tout comme les jours précédents, le secteur occupé par le 149e R.I. demeure très actif et peu sûr. Les conditions météorologiques sont toujours aussi mauvaises. Personne n’est à l’abri d’être atteint par un obus « ami ou ennemi » en se déplaçant dans la boue. L’attaque prévue pour le 7 novembre semble se confirmer.

 

Durant la nuit du 5 au 6, l’ennemi lance plusieurs grenades à fusil dans la région du bois Bauer.

 

Trois patrouilles françaises, composées d’un gradé et de deux hommes, sont envoyées en avant de la ligne de front entre 23 h 00 et 1 H 00. Il faut absolument savoir dans quel état se trouve la 1ère ligne allemande.

 

Les renseignements recueillis sont précieux pour l’organisation de la future attaque.

 

Parcours effectués par les patrouilles du 149e R

 

 

Les informations fournies au retour des patrouilles sont les suivantes :

 

- le boyau 6187-915 c a souffert des bombardements, mais n’a pas été complètement détruit. Les Allemands n’ont pas installé de réseau de fils de fer sur toute la longueur de ce boyau. 

 

- l’ennemi a aménagé trois sapes : une à 916 j (intacte et bien protégée) une à 6187 (également protégée) et une à 915 c (6 à 7 m de fils de fer).  

 

Le lieutenant-colonel Pineau informe le général Guillemot de la situation depuis le P.C. 5008.

 

L’artillerie française commence ses tirs de préparation d’attaque avant le lever du jour. Vers 7 h 00, les Allemands ripostent violemment en tirant des obus de tous calibres sur l’ensemble de la 1ère ligne française. Le village d’Ablaincourt est particulièrement visé.

 

Les nombreuses averses matinales limitent l’action de l’aviation. Malgré la pluie, quelques drachens  apparaissent dans le ciel.

 

De gros travaux de réfection des boyaux et des tranchées sont toujours en cours de réalisation. Les hommes créent plusieurs puisards et posent des caillebotis à de nombreux endroits.

 

L’aviation allemande est plus active dans l’après-midi.

 

Le général Guillemot ajoute un additif à son ordre général d’opération rédigé la veille.

 

- La réserve de division pour le jour J sera constituée par deux compagnies et une compagnie de mitrailleuses du 10e B.C.P. sous les ordres du capitaine adjudant-major de ce bataillon.

 

- Les 3 compagnies et la compagnie de mitrailleuses du 10e B.C.P. et un bataillon du 149e R.I., actuellement stationnés à Harbonnières, se porteront à Foucaucourt, en réserve de corps d’armée, et seront groupés sous les ordres du chef de bataillon commandant le 10e B.C.P.. Le mouvement devra être terminé pour 6 h 00.

 

- Le lieutenant-colonel commandant le 149e R.I. fera connaître le 6 novembre, avant 16 h 00, la répartition de ses bataillons entre les différentes missions :

 

- attaque de 1ère ligne

 

- soutien

 

- compagnie de réserve de brigade

 

- réserve de C.A.

 

 Une nouvelle patrouille est envoyée dans la nuit du 6 au 7 novembre dans la zone du point 916j.

 

Dès son retour, le caporal Pierre Mourer, de la 11e compagnie, fait le rapport suivant :

 

« Parti avec deux grenadiers Aubertin et Mausic à 22 h 30, nous nous sommes portés à environ 35 ou 40 mètres de la sape occupée par la 3e section de la compagnie où nous avons été arrêtés par la présence d’un groupe de travailleurs dans le boyau qui relie le point 916 j avec leur sape qui se trouve en face de la 3e section.

 

Quand nous sommes partis de la tranchée, le 75 nous a tiré dessus par derrière. La 1ère ligne a demandé l’allongement du tir.

 

Un peu avant l’heure de la patrouille, 2 fusées éclairantes sont parties de la tranchée couverte.

 

Les fils de fer de la sape existent toujours et ne paraissent pas avoir souffert du tir d’artillerie. »

 

Positions occupées par la 85e brigade le 6 novembre 1916

 

Il n’y a pas de nouveau contre-ordre donné durant la nuit. Le 2e bataillon du 149e R.I. se prépare à gagner la 1ère ligne. Ses compagnies seront chargées de mener l’attaque du 7.

 

                                 Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 6 novembre 1916

 

Le décompte des pertes du 149e R.I. pour cette journée  révèle 3 tués et 5 blessés.

 

 Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

La photographie provient du fonds Robinet.

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/5.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12.

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3.

 

J.M.O. du 10e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 819/5.

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher, et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

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