Une sépulture qui pourrait bientôt disparaître
Un projet de restructuration du cimetière du Pailly où repose l'abbé Henry pourrait mettre en danger la préservation de la sépulture de ce dernier.
Des tombes de soldats tués durant le 1er conflit mondial du XXe siècle sont également concernées par cette situation. Le souvenir français se mobilise pour les soldats, et la famille, elle, pour sauver la tombe de l’ancien aumônier du 149e R.I..
Un homme digne de considération
L’abbé Henry a fait ses études au petit et grand séminaire de Langres. Il accède à la prêtrise en 1895. Il est nommé professeur de morale au grand séminaire de Langres en 1912.
Lorsque les hostilités contre l’Allemagne débutent en août 1914, l’abbé Henry est rapidement nommé aumônier titulaire du G.B.D. de la 43e D.I.. Il occupe ce poste jusqu’à son arrivée au sein du 149e R.I. en février 1918. C’est un travailleur infatigable. Outre ses missions de religieux et de soignant qui accaparent une grande partie de son quotidien, il trouve le temps de rédiger 24 carnets qui couvrent l’intégralité de la guerre. L'ensemble de ses écrits occupe environ 1500 pages. C’est une œuvre considérable et une source monumentale ! Ses carnets relatent tout ce qu'il a vu et entendu au contact des différentes formations de la 43e D.I. puis du régiment spinalien.
En 1940, il réside dans la ville de Langres. Il fut désigné comme otage à l’arrivée des Allemands. Très vite, il refuse de se soumettre à l'injonction de se présenter chaque jour à la Kommandantur. L’abbé Henry dit aux autorités allemandes : "Si vous voulez me voir, vous savez où me trouver !". Il s'attendait à être fusillé, mais aucune mesure de rétorsion ne fut prise contre lui, sans doute en raison de son âge et de son état de santé.
À la fin de sa vie, l’abbé Henry apporte une importante contribution à l'histoire locale. Il épluche l’intégralité des registres paroissiaux et les actes d'état civil du Pailly qui débutent en 1610 et se terminent en 1940. Il rassemble les arbres généalogiques de toutes les familles du village dans un registre de plus de 500 pages.
Une tombe qui mériterait une réhabilitation
L’abbé Henry est enterré dans le cimetière du Pailly depuis 1941. La croix de sa tombe est scellée dans un socle ayant la forme d’un quadrilatère pyramidal inversé. Ce socle a été réalisé en pierre issue d'une carrière de la région. Son caractère massif et austère est atténué par une draperie ornementale, d'inspiration antique, sculptée en partie haute. La croix est en fonte, finement ciselée et dentelée. Elle donne, par contraste, une impression de grande légèreté malgré sa dimension imposante pour une sépulture individuelle.
Ce monument, qui associe de manière équilibrée pierre locale et fonte moulée, illustre parfaitement l'impact créatif et qualitatif qu'a eu sur l'art funéraire traditionnel la production des fonderies de la Haute-Marne.
Moulée en une seule pièce, cette croix de fonte illustre l'excellence atteinte par ces fonderies. Par ailleurs, on en déduit, en l'absence d'une pierre tombale adjointe au monument, qu'il s'agit d'une croix de dévotion bien plus ancienne qui a été « détournée » de sa vocation initiale pour servir de croix funéraire ; ceci en augmente son originalité.
Ce monument n'a pas d'équivalent dans le cimetière communal. Outre la personnalité mémorable de celui qui y est inhumé, il mériterait d'être conservé comme témoignage de l’architecture funéraire locale de la 1ère moitié du XXe siècle.
Il s'agit tout de même de la sépulture d'un homme d’Église, natif du pays, qui a eu une vie particulièrement remarquable.
Pour en savoir plus sur la vie de l’abbé Henry, il suffit de cliquer une fois sur la photographie suivante.
Cet article a été effectué avec J.L. Poisot.
Sources :
Les photographies de la sépulture de l’abbé Henry ont été réalisées par son petit-neveu.
La prise de vue représentant l’aumônier Henry priant devant les ruines de la chapelle de Notre-Dame-de-Lorette est la propriété de J.L. Poisot. Un cliché similaire, réalisé sous un autre angle, fut publié dans la célèbre revue illustration.
Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et à J.L. Poisot.