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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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8 septembre 2023

Les décisions prises par le lieutenant-colonel Gothié en janvier 1915 (1ère partie)

Decisions du lieutenant-colonel Gothie (1ere partie)

 

Le lieutenant-colonel Gothié prend officiellement le commandement du 149e R.I. le 7 janvier 1915. Pointilleux sur les questions de gestion, de discipline et de contrôle, il souhaite remettre un peu d’ordre dans son nouveau régiment. Il fait connaître chacune de ses directives par voie écrite,sous forme de bulletins.

 

Il faut rappeler que ces "décisions", très rarement conservées, étaient très fréquentes dans les corps. Celles qui sont proposées ici illustrent les mesures prises par le lieutenant-colonel Gothié dès son arrivée au sein du régiment. Elles ont été associées aux différents ordres du jour, au rappel du règlement et aux punitions. Elles confirment sa vision rigoureuse du règlement militaire.

 

Un de ses subordonnés, le commandant Laure, fait une petite remarque sur son supérieur dans une lettre adressée à son épouse : «  quant au colonel, il n’est que très moyennement sympathique : exigeant, paperassier et trouvant tout mal ce qui a été fait avant lui. Ces longues périodes peu actives sont funestes en ce qu’elles conduisent à des exigences de détails ou d’instruction dont nous étions déshabitués. »

 

Décisions prises le 7 janvier 1915

 

Prise en solde : Les gradés faisant partie du détachement de renforcement arrivé le 5 janvier, sous le commandement du commandant Magagnosc, doivent être pris en solde à compter de ce jour.

 

Matériel : Fait remise à chaque compagnie d’une boussole directrice et d’un rapporteur en cuivre.

 

Mutation : 9e compagnie : le sergent Joannnès permute d’emploi avec le sergent-fourrier Bernheim à la date du 8 janvier 1915.

 

Emploi des cartouches D.A.M. : Il résulte de renseignements parvenus que certains corps de troupe emploient les cartouches D.A.M.  dans les fusils. Ces munitions n’étant confectionnées que dans une proportion déterminée, il importe de ne les utiliser que dans les mitrailleuses. Les compagnies armées sont priées de prendre des mesures en conséquence.

 

Usage de la betterave : Il  est de nouveau recommandé aux corps de troupe de faire usage, à défaut de foin, pour la nourriture des chevaux, de la betterave à sucre (valant de 12 à 15 francs les 1000 kg) à condition de couper les betteraves et de ne pas dépasser 3 à 4 kg par cheval et par jour. Cet aliment qui a une grande valeur nutritive pouvant produire sur certains chevaux de légers troubles digestifs. Il conviendra d’observer les résultats donnés par cette alimentation et de n’atteindre la ration de 4 kg que progressivement.

 

Le général commandant la 10e armée a décidé d’une prime de … par fusil et de 0,25 par baïonnette serait allouée aux hommes pour les armes recueillies en avant des tranchées de 1ère ligne française. Afin de régulariser les versements à effectuer en exécution des prescriptions, il y aura lieu d’adresser simultanément au général de la division : 1°) un état numérique des armes recueillies sur cette partie du front, certifié par le chef de corps (il est inutile d’y mettre un état nominatif des hommes ayant rapporté les armes). 2°) Un récépissé de versement de ces armes au parc d’artillerie, établi et signé par un officier comptable et non par un sous-officier. C’est sur le vu de ces deux pièces que les primes seront versées à l’avenir.

 

Observations des consignes du service du contrôle des voies de communication : Il arrive parfois que des militaires transportés par voitures automobiles militaires, arrêtés par le service de contrôle établi sur les voies de communication, grillent ces postes malgré les signaux d’arrêt, sous prétexte de l’urgence de la mission ou se livrent à des observations ou à des remarques désobligeantes à l’égard des sentinelles chargées de faire exécuter les consignes. Le personnel de contrôle établira un compte-rendu lorsque de tels faits se produiront. On indiquera, dans ce compte-rendu, le numéro des voitures qui auront refusé de s’arrêter, ou en cas d’arrêt, les noms, grades et numéro de l’armée des militaires transportés dans les voitures d’où seraient prononcées des paroles désobligeantes à l’égard des sentinelles (et cela, quel que soit le grade des passagers). Le compte-rendu sera adressé sous pli confidentiel au commandant de l’armée. D’autre part, en vue de ne pas entraver la circulation en automobile, les différents postes de sentinelles devront avoir des instructions très précises pour que l’exécution de la consigne se passe avec toute la diligence et la rapidité possible.

 

Soldbuch : Un extrait du « Soldbuch » de chaque prisonnier capturé doit être établi par le corps qui a fait la capture et certifié par lui. Cet extrait est destiné à accompagner le prisonnier jusqu’à sa destination définitive, alors que le « Soldbuch » doit être joint aux interrogatoires envoyés à l’état-major de l’armée (2e bureau).

 

Rapport à fournir après chaque combat : À la suite de tout combat, le rapport réglementaire doit être établi sans retard par le corps engagé et transmis immédiatement au général commandant le C.A., in extenso avec les observations, les avis et les demandes des différentes autorités hiérarchiques, en particulier, aucune demande de récompenses ne sera prise en considération tant que le rapport sur le combat ne sera pas parvenu.

 

Commandement du régiment : À la date du 7 janvier, le colonel Boyer quitte le régiment pour prendre le commandement de la 73e brigade.

 

Par décision du général en chef du 3 janvier, le lieutenant-colonel Gothié, chef d’état-major de la 13e D.I., est affecté au 149e R.I.. Cet officier supérieur prend le commandement du régiment le 7 janvier 1915.

 

Prise de commandement : En prenant le commandement du régiment, le lieutenant-colonel tient à exprimer à tous, officiers, sous-officiers et soldats, sa satisfaction la plus complète, d’avoir sous ses ordres, un beau régiment comme le 149e, qui s’est distingué, depuis le commencement de la campagne, au col de Sainte-Marie, à Abreschviller, à Mesnil-sur-Belvitte, à Souain, à Notre-Dame-de-Lorette, à Kemmel et à Hollebeke. Il demande à chacun de lui témoigner la même confiance affectueuse qu’à ses prédécesseurs, confiance réciproque si nécessaire en campagne. Il compte sur le dévouement de tous pour mener à bien la belle tâche commencée et conduire jusqu’au bout le drapeau du 149e à la victoire. 

 

Décisions prises le 9 janvier 1915

 

Conférence : Les commandants de bataillon se joindront au colonel pour assister à une conférence sur les quatre premiers mois de guerre, conférence qui aura lieu demain 10 à L’ E.M. de la 77e D.I. à Acq. Rendez-vous à cheval au cantonnement de Villers-Brulin à 7 h 30.

 

Propositions : Les commandants de bataillon adresseront pour le 12 janvier leurs propositions en vue des nominations à faire pour combler les vacances de sous-officiers et de caporaux existant actuellement au régiment.

 

Commission des réquisitions : Le commandant du 3e bataillon fera connaître ce qu’est devenue la jument « Mika » ayant appartenu au capitaine Cadeau, blessé et disparu le 25 août dernier au combat de Ménil-Bazien. La dite monture qui appartient en propre à cet officier, doit être réquisitionnée régulièrement si elle a été affectée à un officier monté du corps. L’estimation en sera faite aussitôt que possible par une commission composée du commandant Laure, président, de l’officier d’approvisionnement et du vétérinaire auxiliaire.

 

Absence illégale : Le capitaine commandant la 3e compagnie fera connaître aujourd’hui même au colonel les raisons pour lesquelles l’absence illégale du soldat territorial Roux n’a pas été signalée le 2 janvier au chef de corps en vue des recherches à faire effectuer. La retranscription d’une absence sur les situations administratives qui ne sont que des pièces comptables ne saurait tenir lieu du compte-rendu indiquant les circonstances dans lesquelles s’est produite cette absence illégale. Ce compte-rendu qui aurait dû être adressé le 2 janvier sera établi sans retard.

 

Comptabilité : L’attention des chefs de bataillon et commandants de compagnie est attirée sur la nécessité d’avoir une comptabilité bien tenue. Les livrets matricules tout particulièrement doivent être constamment tenus à jour par l’inscription des nominations, mutations, citations, décorations, punitions, etc… Un compte-rendu des chefs de bataillon sera adressé à ce sujet le 20 janvier. Le colonel prescrit que lorsque les compagnies seront en 1ère ligne, un comptable (fourrier ou sergent-major) de chaque unité sera détaché à la réserve du régiment (ou T.C.) pour y travailler à la comptabilité de sa compagnie et assurer une liaison entre les services (bureau du colonel,  officier de détails, officier d’approvisionnement) et son commandant de compagnie. Les comptables vivront avec la réserve de régiment.

 

Mutations : Les hommes ci-après passent à la C.H.R. à la date du 10 janvier, comme conducteurs de chevaux de bât de mitrailleuses : 1ère compagnie Joly Georges – 2e compagnie Podo - 2e compagnie Clerc Georges Louis, 11e compagnie Huck Georges.

 

Punitions : 12e compagnie – numéro matricule 6606 – Bénaben, caporal, 8 jours de prison, ordre du capitaine Gruneïssen commandant la compagnie : «  A quitté les rangs sous un prétexte futile au 5 km, le jour où sa compagnie se rendait aux tranchées et n’est reparu que le surlendemain, quelques heures avant la relève, ayant ainsi manqué à toute la période d’occupation des tranchées. » En prison jusqu’à décision à intervenir, ordres du lieutenant-colonel commandant le régiment. Une plainte en conseil de guerre pour abandon de poste sera établie contre le caporal Bénaben par son commandant de compagnie. 

 

7e compagnie : Hertz – 4 jours de consigne – ordre du sergent Barthélémy, chef du poste de police. « Étant détenu pour ivresse, a brisé la lanterne du poste. » Punition portée à 4 jours de prison, ordre du lieutenant-colonel commandant le régiment (cette punition a été rayée sur le bulletin).

 

Chevaux de bât de mitrailleuses : Le lieutenant-colonel autorise provisoirement et pendant la période de stationnement, l’officier d’approvisionnement à employer comme chevaux de trait, 6 chevaux de bât de mitrailleuses à raison de deux par section.

 

Chargement des voitures : Les commandants de compagnie vérifieront le chargement de leurs voitures à vivres et à bagages et feront disparaître le matériel non réglementaire qui y serait chargé. Il est rappelé que ces voitures ne doivent pas porter plus de 900 kg de bagages. Les chefs de bataillon s’assureront de l’exécution des prescriptions ci-dessus. Tout objet dont le chargement n’est pas autorisé serait déchargé en cours de contrôle.

 

Service postal : Afin d’accélérer la distribution des lettres, les mesures suivantes sont prises à partir du 9 janvier : les chefs de bataillon désigneront un homme par compagnie pour aider le vaguemestre à faire le tri de la correspondance journalière de façon que la distribution doit en être faite le matin avant 9 h 00. Le planton actuellement à la disposition de chaque vaguemestre sera compris dans les hommes à désigner.

 

Cartouches : Les hommes au cantonnement ne devront pas avoir en leur possession plus de 120 cartouches réglementaires. Des distributions supplémentaires, pour porter ce nombre à 200 seront faites chaque fois qu’ils prendront le service de 1ère ligne ou en prévision d’un combat.

 

Blanchissage du linge : En principe, les hommes sont responsables de la propreté de leur linge personnel.  Chaque fois que le régiment sera au cantonnement, les commandants de compagnie organiseront autant que possible le lavage du linge par fractions constituées (escouade, demi-section, section). L’officier d’approvisionnement prendra ses dispositions pour distribuer régulièrement le savon et autres ingrédients nécessaires. Tous les ustensiles pourront être mis à leur disposition par les habitants (lessiveuses, chaudrons, ustensiles quelconques) permettant d’obtenir de l’eau bouillante, seront utilisés dans ce but.

 

Sources :

 

Le portrait du lieutenant-colonel Gothié et les bulletins concernant ses décisions proviennent de la collection personnelle de son petit-fils D. Gothié.

 

Deux guerres en un siècle : la Grande Guerre (lettres d’Émile Laure à son épouse) Éditions de Sauvebonne.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à D. Gothié et à la famille du commandant Laure.

Commentaires
P
D'après la date indiquée et sauf erreur de ma part, le 149ème devait se trouver en Artois lors de la prise de commandement du Lt-Col Gothié. Sachant les combats à suivre dans ce secteur j'ai hâte de connaître les suites de ce dossier. Très intéressant à lire et à savoir.
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