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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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25 août 2023

Du 1er au 22 Janvier 1915

Les officiers superieurs du 149e R

 

Les derniers combats menés en Belgique remontent à plusieurs semaines.

 

Après sa période de marche et d’instruction, le 149e R.I. est de nouveau opérationnel pour repartir en 1ère ligne.

 

Le régiment cantonne à Villers-Brûlin et à Bethonsart depuis le 31 décembre.

1er janvier 1915

 

La 85e brigade, sous les ordres du général commandant le 33e C.A., est placée sous l’autorité du général responsable de la 77e D.I.. Dans la soirée, un bataillon du 149e R.I. relève le 14e B.C.P. dans le secteur nord-ouest du bois de Berthonval, entre le point F et le point K.

 

Le trajet reliant Béthonsart à Mont-Saint-Éloi est particulièrement long pour une montée en 1ère ligne. Les hommes arrivent épuisés dans la zone des combats.

2 janvier 1915

 

Des équipes de pionniers sont formées par le Génie à Écoivres. Un officier de la compagnie 10/1 vient dans les cantonnements pour instruire les fantassins sur le lancement des grenades.

 

3 janvier 1915

 

Le capitaine Genevoix, commandant la 2e compagnie, est tué pendant l’exécution des travaux de défense réalisés par ses hommes.

 

Dans la soirée, deux bataillons du 149e R.I. occupent le secteur allant du point C au point K, au nord du bois de Berthonval.

 

Positions approximatives occupées par 2 bataillons du 149e R

Legende de carte journee du 3 janvier 1915

 

Du 4 au 6 janvier 1915

Le commandement du secteur est exercé par le responsable de la 85e brigade, le colonel Guillemot. Une attaque est en cours de préparation dans la zone occupée par ses régiments. Une reconnaissance de la ligne allemande est exécutée.

 

Le 5 janvier, deux bataillons du 158e  R.I. viennent relever les deux bataillons du 149e R.I. en 1ère ligne. Ce sont eux qui devront mener l’attaque.

 

Du 7 au 9 janvier 1915

 

Le mauvais temps stoppe tous les préparatifs d’offensive. Les boyaux de communications sont rendus impraticables par la boue. De nombreuses vies humaines ont sans aucun doute été préservées grâce à ces intempéries.

 

Les mouvements de rotation des relèves sont devenus si difficiles qu’à partir du 9 au soir, elles ne s’effectuent plus que par un bataillon. Les bataillons des 158e R.I. et du 149e R.I. se relèvent mutuellement dans la partie droite du secteur.

 

De retour de convalescence, le commandant Magagnosc prend le commandement du 2e bataillon du 149e R.I..

 

Le bois de Berthonval

 

Le capitaine Laure relate un mouvement de relève effectué par ses compagnies, dans une de ses lettres rédigée le 8 janvier :

 

« Le bataillon se met en route pour aller en relever un autre. Il marche d’abord assez tranquillement sur la route jusqu’à 21 h 00. Quand il atteint la proximité de la zone dangereuse, il prend ses dispositions préparatoires : distribution des outils, des cartouches, des vivres (les cuisiniers restant au dernier gîte possible pour le fonctionnement de leurs fourneaux improvisés). Quand les balles commencent à siffler, le bataillon entre en file indienne dans un boyau, c'est-à-dire, une sorte de tranchée en zigzag de 2 m de profondeur et 1 à 1,5 m de largeur où il chemine à couvert. On a maintenant creusé, derrière les lignes ; des kilomètres de ces boyaux, œuvre de géants qui est généralement confiée aux territoriaux ; mais à cause des pluies, ces labyrinthes deviennent impraticables. On s’y enfonce jusqu’aux genoux et on n’avance qu’à une lenteur de tortue.

 

À 3 ou 400 m de la première ligne, on trouve des guides envoyés par le bataillon à relever : sur la ligne, les sections partantes se collent contre le parapet arrière, laissant la place du parapet avant aux sections montantes. Les chefs de section se passent les consignes. Les anciens tâchent de faire apercevoir aux nouveaux la crête des tranchées ennemies…

 

… Les capitaines circulent, s’assurent que chacun est à son poste et, devant cet horizon mystérieux que l’obscurité ne permet pas de scruter, ils font commencer la veillée des armes. En principe, la nuit, il ne devrait pas y avoir de dormeurs, mais il y en a toujours, que les officiers et les gradés sont obligés de secouer, parfois un peu rudement.

 

La règle est de ne pas tirer, pour ne pas s’exciter à une consommation de munitions hors de proportion avec les résultats à en attendre ; en fait, surtout avec les jeunes soldats, on tiraille tout le temps sur des ombres qu’on croit voir ramper, sur les étoiles, sur la lune, s’il y en a une au ciel, jusqu’au moment où l’ennemi se met à riposter, et alors, la fusillade crépite furieusement pendant quelques minutes, se tait, puis reprend de plus belle…

 

Quand le jour arrive, les fusils se taisent, mais les gros canons s’y mettent : boum, boum ! marmites de ci, marmites de là… Les artilleries se cherchent sans toujours se trouver et quelques-uns de leurs projectiles tombent sur les malheureux fantassins qui, sauf les guetteurs, commencent à s’assoupir.

 

Le chef de bataillon se met en branle pour visiter son secteur, patauge dans la boue, enjambe des cadavres et d’infâmes détritus, risque un regard par-dessus le parapet ou à travers un « créneau » : « Attention mon commandant, ça siffle par ici… » « Oui, mais il faut bien voir puisqu’on est venu pour ça ».

 

Si le secteur est muni d’un matériel semi-professionnel, on profite d’un « périscope » pour cette nécessaire inspection : « Qu’est-ce c’est donc que cette ligne de silhouettes noires là tout près ? »

 

« Mon commandant, ce sont les cadavres des chasseurs qui ont attaqué il y a quelques jours… On a essayé d’aller les chercher cette nuit, en rampant, mais sans succès, car ils sont comme entortillés dans les barbelés… Ils sont si proches des Allemands qu’on en a vu aller les fouiller… » Quel lugubre spectacle…»

 

Le 8, le colonel Boyer, nommé au commandement d’une brigade, est remplacé par le lieutenant-colonel Gothié à la tête du 149e R.I..

 

Du 10 au 22 janvier 1915

 

L’instruction active reprend dans tous les cantonnements. Des équipes de sections de mitrailleuses récemment créées, complètement inexpérimentées, sont formées au maniement de leur nouvelle arme. L’instruction du tir se réalise dans un champ de tir de circonstance construit près de Villers-Brulin. Les mouvements de relèves se poursuivent.

 

Le 15 janvier, l'adjudant Lemailloux est tué d'une balle dans la tête dans le secteur des 1ère lignes.

 

Ce jour-là, le capitaine Laure écrit ceci :

 

« Le terrain est dans un état si épouvantable que les difficultés de la relève et de l’occupation sont considérables. On ne peut plus utiliser les boyaux, car plusieurs hommes s’y sont enlisés et quelques-uns ont été étouffés dans la vase ! Il faut s’avancer la nuit à terrain découvert et franchir les boyaux qui deviennent un obstacle plutôt qu’une aide, par des ponts de planches branlantes. Comme on n’y voit rien, les pieds se posent plus souvent à côté que dessus et on chute… Il y a peu de combats, car l’ennemi est aussi abruti que nous par le mauvais temps. Les pertes sont minimes. »

 

Le commandant Bichat remplace le capitaine Crépet à la tête du 1er bataillon du 149e R.I.. Le capitaine Crepet reprend le commandement de la 2e compagnie du régiment.

 

Le 22 janvier, le 149e R.I. reçoit l’ordre de quitter ses positions. Il doit venir s’installer dans un nouveau secteur près du bois de Bouvigny, au nord-ouest d’Ablain-Saint-Nazaire.

 

                                 Tableau des tués pour la période allant du 1er au 22 janvier 1915

 

                   Tableau des blessés et des disparus pour la période allant du 1er au 22 janvier 1915

 

              Tableau des décédés dans les ambulances et dans les hôpitaux (du 1er au 22 janvier 1915)

 

Sources :

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

La carte  provient du J.M.O. du 33e C.A..

 

J.M.O. du 33e C.A.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 214/1.

 

J.M.O. de la 43e D.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 344/1.

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/10.

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

 

Deux guerres en un siècle : la grande guerre (lettres d’Émile Laure à son épouse) Editions de Sauvebonne.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à T. Cornet, à M. Porcher, à Y. Thomas, à la famille descendant du commandant Laure et au Service Historique de la Défense de Vincennes. 

Commentaires
P
Voilà un beau récit des combats et de la vie de nos pauvres poilus sur le secteur du plateau de Lorette à Ablain-Saint-Nazaire. On parle souvent de Verdun pour ses mémorables combats, Lorette a également été le théâtre de rudes combats avec des pertes énormes mais pourtant est si peu connue. Ce récit met enfin cette zone là où elle doit être dans la chronologie de cette effroyable guerre et que dire de cette unité qui après cette rude période connaîtra également Verdun ?
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