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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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15 février 2019

Pierre Joseph Guilleminot (1888-1918).

Pierre_Guilleminot

Pierre Joseph Auguste Guilleminot naquit au « hasard des garnisons », le 17 décembre 1888 à Besançon. Son père, Claude, est un capitaine âgé de 36 ans qui exerce ses fonctions d’officier au 10e bataillon d’artillerie de forteresse. Sa mère, Marie Eugénie Joséphine Guyotte, vient de donner vie à son premier enfant. Elle est âgée de 32 ans.

Pierre Guilleminot est l'aîné d’une fratrie composée d’une sœur et deux frères.

Genealogie_famille_Guilleminot

Après l’école primaire obligatoire, Pierre a la possibilité de poursuivre des études qui le mèneront jusqu’au baccalauréat « latin, sciences et mathématiques ».

L’année de ses 20 ans, il tente le concours d’entrée de l’école spéciale militaire qu’il réussit. Le 20 juillet 1909, il est reçu sous le numéro 25. Ce succès lui permet de contracter un engagement spécial, réservé aux grandes écoles. Le 8 octobre 1909, il appose sa signature sur ce contrat, promettant ainsi de servir avec « fidélité et honneur » la France pendant une durée de quatre ans.

Le lendemain, il est à Montbéliard, incorporé dans les effectifs d’une compagnie du 21e B.C.P.. Pierre entreprend sa formation de caporal qu’il termine le 10 avril 1910. À cette période, il sert à la 4e compagnie.

Le 15 octobre 1910, le jeune homme entre à l’école spéciale militaire avec le grade d'aspirant, intégrant ainsi la promotion de Fez.

Il fait ses deux années d’études obligatoires avant de quitter Saint-Cyr, obtenant le numéro 99 sur 211 élèves classés.

Son livret matricule nous apprend qu’il a eu, au total, 18 jours d’arrêts simples durant sa formation. Toutes ces punitions sont minimes, mais elles nous montrent la rigueur de la vie militaire.

Le 6 janvier 1910, son capitaine lui inflige 4 jours pour avoir fumé une cigarette en étude pendant le repos qui suit le repas de midi. Le 24 février, ce capitaine lui donne de nouveau 4 jours pour être encore couché dix minutes après le réveil. Le 22 juin, Pierre Guilleminot a un avertissement pour négligence de pliage réglementaire de fournitures de literie. Le 18 octobre 1911, il écope de 2 jours pour avoir laissé traîner sa vareuse sur le pupitre. Le 29 février 1912, l’aspirant prend 4 jours pour avoir présenté, lors de l’inspection par l'officier de semaine, une vareuse à laquelle il manquait un bouton. Le 16 juillet, le capitaine de service lui impose 4 jours pour avoir quitté, en étude, sa vareuse et sa veste.

Le 10 octobre 1912, le général responsable de l’école écrit ceci : « Manque encore un peu d’assurance et d’entrain. Très bien doué, cependant zélé, bon esprit, pourra avec quelques efforts faire un très bon officier. S’est bien présenté »

Affecté au 149e R.I., il rejoint les rangs de ce régiment cantonné à Épinal comme sous-lieutenant.

C’est au tour du colonel Menvielle de l’évaluer. Le 10 avril 1913, cet officier supérieur rédige le texte suivant dans le feuillet individuel de campagne  de son subordonné :

« Jeune officier en période de formation. S’annonce comme devant faire un bon officier. Instruit, intelligent, a beaucoup lu et continue de travailler. A fait l'instruction des élèves caporaux, s’en est occupé avec zèle. Très apte à faire campagne. »

Le 25 septembre 1913, il poursuit : « Officier vigoureux, ayant du calme et du sang-froid, sans beaucoup d’allant. Est animé du désir de bien faire et sert avec zèle, donnant toutes satisfactions à son capitaine. A bien fait les marches-reconnaissances dans les Vosges et les manœuvres d’automne. »

Pierre Guilleminot est nommé dans le grade supérieur le 1er octobre 1913.

La guerre le trouve à la tête d’une des sections de la 7e compagnie, sous les ordres directs du capitaine Coussaud de Massignac.

Le lieutenant Guilleminot prend part à l’affrontement du Renclos des Vaches près de Wisembach et à la retraite d’Abreschviller avant d’assurer le commandement de la 5e compagnie. Ce commandement a été laissé vacant à la suite du décès du capitaine Micard le 23 août 1914 ainsi que de l’absence du lieutenant Petin et du sous-lieutenant Camus ; cette absence faisait suite à leurs blessures du 9 août 1914.

Trois jours plus tard, le lieutenant Guilleminot est engagé du côté de Ménil-sur-Belvitte avec les sections de sa compagnie. Il participe ensuite aux attaques qui se déroulent à l’intérieur et autour du petit village de Souain, dans la Marne.

Le 27 septembre 1914, Le lieutenant Petin est de retour au 149e R.I.. Il prend le commandement de la 5e compagnie. Pierre Guilleminot retourne à la 7e compagnie pour en devenir le chef. Avec ses hommes, il combat en Artois en octobre 1914, puis en Belgique au mois de novembre et, de nouveau en Artois, une région où le régiment restera pratiquement dans le même secteur durant toute l’année 1915.

Au combat, c’est un homme courageux. Le lieutenant-colonel Gothié, chef du 149e R.I. inscrit ceci dans son feuillet de campagne :

« Commandant de compagnie très brillant au feu. (3 citations, décoré sur le champ de bataille) Plein d’allants et d’entrain, mais un peu jeune et manquant quelques fois de pondération. Avec plus d’expérience et de maturité d’esprit, il fera un officier de tout premier ordre. »

Une décision ministérielle du 3 juin 1915, publiée dans le J.O. du 7 juin,  lui permet de porter le titre de capitaine de façon temporaire. Cette nomination prend rang à compter du 22 mai 1915. Pierre Guilleminot est définitivement admis dans ce grade à partir du 3 septembre 1915. Il n’a pas encore fêté ses 27 ans.

Le 6 décembre 1915, il écope de 4 jours d’arrêts simples par ordre du lieutenant-colonel Gothié avec le motif suivant : « Commandant son bataillon en 1ère ligne en l'absence de son chef de bataillon en permission, n’a pas rendu compte à son chef de corps de faits graves intéressant le régiment et qu’il avait signalés au commandant de l’infanterie du secteur. »

Trois jours plus tard, le Journal Officiel annonce qu’il est fait chevalier de la Légion d’honneur.

Le 149e R.I. est  ensuite engagé durant un mois dans la bataille de Verdun durant un mois. Le régiment y perd beaucoup d’hommes.

Lorsqu’il laisse derrière lui le secteur meusien à la mi-avril 1916, Pierre Guilleminot reçoit l’ordre de quitter la 7e compagnie pour prendre le poste de capitaine adjudant-major au 2e bataillon. Il doit seconder le commandant Schalck à partir du18 avril. Il lui est nécessaire de se former.

Le capitaine suit les cours d’informations des adjudants-majors au centre de perfectionnement de Châlons-sur-Marne du 29 mai au 1er juin 1916.

Début septembre 1916, le régiment spinalien combat dans la Somme. Le lieutenant-colonel Gothié est fait prisonnier. Le lieutenant-colonel Pineau  est nommé à la tête du régiment.

Cet officier ne se fait pas une très bonne opinion de son subordonné. Le 23 décembre 1916,  il inscrit noir sur blanc : « Officier un peu jeune, ne montre pas toute l’énergie que l’on serait en droit d’attendre de lui. Un peu nonchalant a besoin d’être stimulé de temps à autre. A pris trop jeune les fonctions d’adjudant-major. Ne semble pas encore apte à prendre le commandement d’un bataillon. A été proposé comme stagiaire d’E.M. pendant l'absence du colonel. Cette proposition n’est pas du tout justifiée et le colonel ne l’aurait pas faite. Il espère qu’elle n’aura pas de suite. A besoin de beaucoup travailler. »

Le 23 mars 1917, Pierre Guilleminot est « rétrogradé ». Il quitte ses fonctions de second de bataillon pour prendre le commandement de la 1ère compagnie du régiment.

Cette situation ne dure pas. En mai 1917, le lieutenant-colonel Pineau est remplacé par le lieutenant-colonel Boigues.

Pierre Guilleminot retrouve ses fonctions de capitaine adjudant-major le 22 août 1917 ; cette fois-ci, il est affecté au 1er bataillon sous les ordres du commandant de Chomereau de Saint-André.

Le_capitaine_Guilleminot_et_son_ordonnance__aout_1917

Le 23 septembre 1917, le colonel Boigues note ceci sur le feuillet de campagne du capitaine : « Je ne partage pas l’avis de mon prédécesseur sur le capitaine Guilleminot, qui, à ce que j’ai cru comprendre, s’est trouvé comme adjudant-major, dans une situation délicate vis-à-vis de son chef de bataillon à raison d’une vieille intimité. Intelligent, courageux, je crois qu’il peut faire un bon adjudant-major. S’est, d’autre part fait noter très élogieusement comme commandant d’unité. »

Deux mois plus tard, le régiment est engagé dans la bataille de la Malmaison.

C’est à la tête de son bataillon, à proximité du commandant de Chomereau de Saint-André, qu’il quitte la tranchée pour se lancer à l’assaut de la 1ère ligne allemande au cours de la 1ère phase de l’attaque.

Pour en savoir plus sur les évènements de la journée du 23 octobre 1917, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

Carte 1 emplacements des 3 bataillons du 149e R

Son attitude au feu lui vaut une citation à l’ordre de l’armée, confortant ainsi l'opinion que s’était fait de lui le colonel Boigues qui écrit ceci en février 1918 : «  Le capitaine Guilleminot fait un très bon adjudant-major. Il est au-dessus de tout éloge comme bravoure individuelle et comme dévouement. Doué d’une très bonne instruction générale, intelligent, il fera un bon chef de bataillon supérieur à la moyenne, s’améliorera encore certainement en face des responsabilités du commandement qui le stimuleront. »

Février 1918, le 149e R.I. occupe un secteur dans les Vosges. Le cliché suivant a été réalisé durant cette période.

La Cude Commandant Gaston de Chomereau de Saint-André

La photographie suivante n’est ni datée ni légendée. Grâce à la palme bien visible sur la croix de guerre du capitaine Guilleminot, nous pouvons affirmer qu'elle a été réalisée entre le 18 novembre 1917 et son départ du 149e R.I..

Capitaine Guilleminot photographie non datee

Début mai 1918, Pierre Guilleminot est muté au 4e B.C.P., il ne reste que quelques semaines dans cette unité. Au début du mois de juillet 1918, il est affecté au 70e R.I. pour y prendre le commandement du 3e bataillon.

Sorti indemne de toute blessure lorsqu’il était au 149e R.I., Pierre trouve la mort dans l’Aisne à la ferme la Grange au nord de la Vesle le 4 août 1918. Le J.M.O de ce régiment nous indique les circonstances de son décès. Les Allemands ont piégé la ferme avant de l’abandonner. La violence de la charge explosive est telle qu’elle ensevelit plusieurs hommes.

Le corps de cet officier n’est retrouvé que bien plus tard. Le capitaine Guilleminot est dans un premier temps enterré dans le cimetière communal de Braine, dans une fosse individuelle qui porte le numéro 156.

Pierre Joseph Guilleminot repose actuellement avec ses parents et l’intégralité de sa fratrie dans un caveau familial placé dans le cimetière des Chaprais à Besançon. Les trois frères et la sœur ne se sont jamais mariés. Il n’y a pas de descendance connue pour l’ensemble de cette fratrie.

Sepulture famille Guilleminot

Cet officier a obtenu les citations suivantes :

Citation à l’ordre du régiment  n° 46 du 22 avril 1915 :

« Chargé d’une reconnaissance délicate dans la nuit du 5 au 6 mars en avant de Noulette, s’en est acquitté parfaitement. A contribué dans une large mesure à la réussite de l’attaque du 6 mars par la précision et l’à propos de ses ordres. »

Citation à l’ordre de la 43e D.I. n° 61 du 8 juin 1915 :

« Commandant de compagnie remarquable par son entrain, son mépris du danger, son calme sous le feu. En dernier lieu dans l’attaque du 29 mai, étant en 1ère ligne, a entraîné sa compagnie hors des tranchées ennemies dont il a conquis une cinquantaine de mètres »

Citation à l’ordre du 21e C.A. n° 11 en date du 23 septembre 1916 :

« Officier brillant, sur le front depuis le début de la campagne, s’est distingué dans tous les nombreux combats livrés par le régiment par son énergie, son sang-froid, son esprit de décision, ses remarquables qualités de commandement dans la part prise par le 2e bataillon, aux succès remportés par le 149e Régiment d’Infanterie, les 4, 5 et 6 septembre 1916 et le 17 septembre 1916, a secondé son chef de bataillon avec le dévouement le plus absolu. »

Citation à l’ordre de l’armée n° 539  en date du 18 novembre 1917 :

« Officier d’une haute valeur morale. Le 23 octobre 1917 a chargé en première vague, avec la même bravoure insouciante qu’à Sainte-Marie, Souain, Ypres, Lorette, Verdun et Soyécourt. A été là comme ailleurs le bras droit de son chef de bataillon »

Citation à l’ordre de la 11e D.I.  n° 229 du 18 juin 1918 :

« Officier de premier ordre d’un grand sang-froid, d’une belle bravoure, s’est dépensé sans compter au cours des combats du 10 et 11 juin 1918 pour assurer la liaison entre les différentes unités engagées et le chef de bataillon, auxiliaire le plus précieux pour son chef de corps. »

Sa croix de guerre est constituée d’une palme, d’une étoile de vermeil, de deux étoiles d’argent et d’une étoile de bronze.

Chevalier de la légion ordre n° 1743 en date du 9 octobre 1915. 

« Commandant de compagnie d’un calme, d’un entrain et d’un courage remarquables, le 26 septembre 1915 a maintenu sa compagnie sous un bombardement des plus violents.

A entraîné sa première vague d’attaque, a réussi à prendre pied avec elle dans la tranchée allemande » 

Sources :

Dossier individuel consulté au Service Historique de la Défense de Vincennes.

Les fiches signalétiques et des services des frères Guilleminot et la plupart des actes de naissance, de mariage et de décès de la famille  ont été trouvés sur les sites des archives départementales du Doubs.

La photographie de la plaque mortuaire de Bernard et de Pierre Guilleminot a été trouvée sur le site « Généanet ».

Un grand merci à M. Bauer, à M. Bordes, à A. Carobbi, à J. Huret, à M. Porcher, au Service Historique de la Défense de Vincennes, aux archives départementales du Doubs et aux mairies de Besançon et de Bainville-sur-Madon. 

Commentaires
V
Pour savoir comment est mort le capitaine GUILLEMINOT, il faut lire le livre de Pierre Marie LAHORGUE dont le titre est : La Bretagne au feu.<br /> <br /> Il est disparu le dimanche 4 août 1918 dans l'explosion de la ferme de la Grange, les caves de celle-ci avaient été minées par les allemands.<br /> <br /> Son corps est retrouvé dans les ruines de la ferme le 17 septembre 1918.<br /> <br /> Avec lui y a eu le commandant BOREL de BRETIZEL, le capitaine PIGAL, le soldat DROUIN du 70e R.I. et 26 soldats du 48e R.I. dont six officiers, qui ont été tués dans l'explosion de la ferme de la Grange située sur le territoire de la commune de Braine.
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