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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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15 octobre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 6 novembre 1914.

                   Section_de_mitrailleuses_du_3e_bataillon__1909_

Avec le 2e bataillon du 149e R.I. :

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

L’ordre  d’opérations du 16e C.A. pour le 6 novembre porte l’offensive dans les mêmes conditions qu’hier.Le groupement Moussy doit maintenir l’ennemi dans le parc et le château d’Hollebeke pour favoriser la progression du groupement Olleris.

 

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

À minuit, les bataillons reçoivent un contre-ordre. Ils sont arrêtés sur la route de Saint-Eloi à Ypres où ils restent jusqu’à 4 h 00. À cette heure arrive l’ordre pour la journée du 6 novembre.

Le 53e R.I. a pour mission d’attaquer dans la matinée le parc et le château de Hollebeke avec de petits éléments qui s’efforceront d’y pénétrer. Les 5e et 7e compagnies sont chargées de cette opération : la 7ecompagnie sur la moitié nord de la lisière nord-ouest du parc et la 5e compagnie sur la moitié sud de la même lisière.

Le but de l’opération est de reconnaître en détail, les abords de la lisière, les cheminements, les défilés qui y conduisent ; les points faibles de défenses préparées par l’ennemi et les endroits où la pénétration dans le parc semble possible. Le reste du régiment (1er et 3e bataillons) se réorganisera à Voormezelle, lebataillon à Oosthoek, tout en se tenant prêt à marcher au 1er signal.

11 h 30 : L’ordre arrive de se porter immédiatement à l’attaque sur le bois 40 par le nord-ouest. Le Bataillon Dufor et 2 compagnies du bataillon Saisset y prendront part. Les 2 autres resteront en réserve à Voormezelle. Deux compagnies du 2e bataillon, restées à Oosthoek, se porteront : la 5e compagnie dans les tranchées faites par le génie au sud de Voormezelle, sur la rive ouest du ruisseau, et à hauteur de Saint-Eloi ; la 6e compagnie sur la route Ypres-Kemmel, à la bifurcation, 1500 m au nord de Grootvierstrad. Les compagnies en réserve à la disposition du C.A.. 

15 h 15 : Le bataillon Dufor est en liaison avec le 80e R.I., par la compagnie d’Arblade qui a été envoyée dès le matin. Les premiers éléments du bataillon Dufor débouchent sur le bois au nord de la Kapellerie. Feu violent de l’artillerie ennemie.

16 h 20 : La progression continue, mais toujours très lentement, à cause du feu de l’artillerie ennemie, qui exige de minutieuses précautions pour la marche.

18 h 20 : L’attaque a débouché de la Kapellerie, entre les tranchées occupées par le 31e B.C.P. et elle a été arrêtée à environ 400 m des lignes allemandes. Le brouillard est extrêmement épais, il rend les liaisons impossibles et tout le mouvement en avant extrêmement périlleux. Le demi-bataillon Saisset est derrière le bataillon Dufor.

Toute continuation d’attaque dans les conditions atmosphériques présentes semble impossible et le colonel demande des ordres.

19 h 00 : L’ordre est donné de retourner à Voormezelle.

J.M.O. du 90e régiment d’infanterie.

Les 2e et 3e compagnies gardent leurs positions le long du canal. Les 1ère et 4e compagnies passent en seconde ligne.

Vers 7 h 30 la 7e compagnie et un peloton de la 8e compagnie relèvent à la faveur du brouillard les 5e et 6e compagnies qui avaient, la veille, gagné 200 m en avant de la ligne générale.

Vers 15 h 00 ces troupes sont cernées par les Allemands dans les bois situés à 500 m au nord de Klein-Zillebeke.

Le général Moussy appelle tous les éléments disponibles et les réserves de troupes anglaises.

Du côté des Allemands:

 

Historique du I.R. n° 105.

Le I.R. n° 105 est à l’ouest de Zandvoorde, à la disposition de la 39e D.I.. Les 2e et 3e bataillons se regroupent à la lisière sud-est du bois au sud-est de Calvaire, le 1er bataillon et la compagnie de mitrailleuses dans les fermes au sud de Basseville-Beek. L’attaque de la 39e D.I. est fixée pour midi. Elle doit être repoussée à cause du brouillard dense, qui empêche un tir précis de l’artillerie. Lorsque le brouillard se dissipe vers midi, la préparation d’artillerie se déclenche et l’assaut débute à 14 h 00, contre la position anglaise, près de Klein-Zillebecke.

Le I.R. n° 105 suit, en tant que réserve de la division. Dans un premier temps, le régiment est avancé jusqu’au château de Hollebeke (le château est). Puis, il suit l’attaque de progression de la 39e D.I., en direction du grand virage du canal de l’Yser, près de Hollebeke. Au soir, le régiment est engagé à son tour. Le 2e bataillon occupe à la gauche du I.R. n° 132, le talus de la voie ferrée Ypres-Comines. Son aile droite est appuyée au bois au sud de Klein-Zilebeke. Le 3e bataillon à sa gauche, avec son aile gauche poussée jusqu’au-delà du même talus, à hauteur du passage de la route en dessous du grand virage du canal.   

Historique du I.R. n° 126.

La préparation d’artillerie n’a pu débuter qu’à 11 h 00, à cause d’un brouillard dense. Les positions devant nous sont alors bombardées par notre A.C. et par le 2e groupe du 10e R.A.L.. D’autres batteries tirent sur la clairière du bois au nord et au nord-est de Camp. Des obusiers lourds du IIe C.A. bavarois tiennent le grand bois au nord du virage du canal, entre la voie ferrée et la route de Verbranden-Molen, sous un tir très dispersé. Une batterie de 210 tire exclusivement sur Ypres.

Vers 14 h 00, notre infanterie quitte ses tranchées. Le 3e bataillon sort avec 3 compagnies en 1ère ligne, le 2e bataillon avec 2 compagnies. Très rapidement, les positions des Français sont bousculées. Elles sont faiblement occupées au sud de Camp. Celui qui ne veut pas se rendre est achevé à la crosse de fusil ou à la baïonnette. Nous avons fait prisonniers 2 officiers et 15 hommes qui se sont défendus avec acharnement depuis un abri.

Puis l’assaut se ralentit devant les maisons près de Camp. En plus des haies renforcées de fils de fer, des tirailleurs français se succèdent en faible nombre. Le tir de défense principal vient du flanc. Il cause des pertes sévères dans nos rangs. Des fusants explosent dans les airs. Ils forcent nos réserves à se déployer trop tôt. Néanmoins, aux alentours de 16 h 00, les positions françaises de part et d’autre de Camp, sont entre nos mains.

Malgré la mort de notre colonel près de Camp (balle dans la tête), nous poursuivons les fuyants en direction de Klein-Zillebeke. Bientôt nous sommes mélangés avec des éléments de la 82e brigade et du I.R. n° 132. Nous avançons jusqu’à la hauteur de Klein-Zillebeke. Des réserves françaises, dépêchées à la hâte, tentent en vain de nous arrêter. À 17 h 00, les 90e et 268e R.I. français sont bousculés. Ils ont perdu 730 prisonniers ( ?) dont 12 officiers, tombés entre les mains de nos 11e et 12e compagnies. Ces compagnies ont pris également 2 mitrailleuses au talus de la voie ferrée. Nos pertes s’élèvent à 4 officiers tués, 7 blessés. Les pertes de la troupe n’ont pas pu être précisées (très élevées). Malgré la pénurie d’officiers et de sous-officiers, les soldats des 1er et 3e bataillons poursuivent leur progression depuis Klein-Zillebeke, à travers les boqueteaux presque jusqu’à la cote 60 et aux premières maisons de Zwarteleen, où l’attaque s’est définitivement brisée. Quelques groupes du 3e bataillon peuvent encore avancer, presque ensemble avec l’ennemi en fuite, jusqu’aux premières maisons de Zillebeke, 1,5 km plus loin. Là, ils débouchent su un tir de flanc de mitrailleuses anglaises qui les forcent, au terme d’un combat rapproché, à se retirer sur Zwarteleen. Ils sont accueillis par les nôtres, leurs rangs sont fortement éclaircis. Nous n’avons pas réussi à prendre possession le 6 novembre au soir, ni de la cote 60 ni du village de Zwarteleen. L’ennemi qui s’y est fortifié solidement offre une résistance très vive. Les forces de nos troupes trop épuisées n’ont pas été suffisantes pour la briser. En outre, l’artillerie ennemie, avec l’effet dévastateur de ses tirs, a constamment tenu sous son feu, la ligne atteinte par les nôtres. De plus, la 82e brigade est restée très en retard dans le bois nord-est de Klein-Zillebeke.

Le I.R. n° 105 est de nouveau avancé pendant l’assaut de Klein-Zillebeke, depuis Zandvoorde, jusqu’au-delà des lignes de départ d’attaque du I.R. n° 126, dans le bois entre la voie ferrée et la route de Verbranden-Molen. En raison de la nuit tombante, il ne peut obtenir une modification de la situation à l’aile gauche de la division. La ligne de combat la plus avancée qui se trouve alors, près de Zwarteleen, est dans une situation effroyable. L’obscurité, le tir terrible d’artillerie, la pénurie d’officiers rendent impossibles toutes tentatives pour mettre de l’ordre dans les unités. Malgré leur fatigue, les  hommes creusent des abris dans la boue. Leur position de défense creusée au bout de quelques heures est suffisante pour repousser plusieurs contre-attaques anglaises pendant la nuit. Contre-attaques qui partent de Zillebeke et qui sont menées par des réserves acheminées à la hâte. Il est également impossible de ravitailler la troupe, il faut donc se rabattre sur les rations de réserves.

À l’aile droite de la 39e D.I., dans le bois au nord de Groenenburg, les 7e et 8e compagnies n’ont pu gagner que très peu de terrain, le 6 novembre, et il faut les ramener au soir sur leur ligne de départ d’attaque.                           

 Historique du I.R. n° 132. 

                    Carte_6_novembre_1914__IR_n__132_

 

                                        L_gende_carte_IR_132__6_novembre_1914_

  

Les secteurs de la division ont été déplacés dans la nuit du 6 novembre. Le IIe C.A. bavarois est dirigé, avec ses derniers

éléments, au sud du canal d’Ypres. Le XVe C.A., se retrouve seul dans la région comprise entre la route de Menin à Ypres et le canal. La 39e D.I. doit attaquer dans le secteur de gauche, de part et d’autre de la route de Zandvoorde à Zillebeke. La 30e D.I. doit soutenir cette attaque  en s’en prenant à l’adversaire placé face à elle. Nous voulons ainsi faire commencer la percée à la droite de la route, face au front tenu par le 2e bataillon du I.R. n° 126, notre voisin direct à notre gauche (début à 10 h 00). Notre 1er bataillon et la compagnie de mitrailleuses restent dans le secteur de droite. Ils occupent le front entier tenu jusqu’alors par le régiment.

Les 2 autres bataillons sont déplacés dans le secteur de gauche. Selon un ordre reçu ; ils doivent arriver  à 7 h 00 à la ferme qui se trouve à 700 m à l’est du château de Hollebeke. La relève et la marche de route se sont déroulées sans incident. Le secteur du 3e bataillon est en partie aussi celui du 2e. Ils sont pris en charge par la 30e D.I. (I.R. n° 99). Au terme d’une marche de nuit très épuisante, les 2e et 3e bataillons du I.R. n° 132, sur des chemins trempés et en mauvais états, atteignent la ferme à 7 h 00. La progression de la brigade doit se borner au secteur compris entre la route Zillebeke et le virage du canal. Elle est orientée contre la position ennemie, le long du chemin qui va de Klein-Zillebeke à Camp et au virage du canal.

L’attaque est confiée aux 1er et 3e bataillons du I.R. n° 126 qui a sous ses ordres notre 2e bataillon et la 1ère compagnie du 15e pionniers, dotée de lance-mines. Notre 3e bataillon reste à la disposition de la brigade à la ferme à 700 m à l’est du château de Hollebeke. La préparation d’artillerie à laquelle participe aussi l’artillerie lourde et celle du IIe C.A. bavarois, depuis la rive sud du canal, ne débute qu’à midi à cause du brouillard dense.

À 14 h 00, le I.R. n° 126 part à l’attaque. Le 3e bataillon est orienté sur Camp. Le 1er bataillon est à sa gauche. Vers 15 h 00, le 1er objectif sur la position ennemie est atteint au terme d’une course rapide. Vers Camp, il se déroule des combats acharnés qui nous sont favorables. Mais l’attaque nous coûte de lourdes pertes.

Notre 2e bataillon qui doit suivre le 1er bataillon du I.R. n° 126, reçoit l’ordre de partir à l’attaque plus en avant. La 6e compagnie avance contre le fossé allant du château de Hollebeke, dans la direction nord-nord-ouest. Elle est suivie par la 8e compagnie. La 5e compagnie est engagée le long du talus de la voie ferrée. Elle est suivie par la 7e compagnie. Le tir de l’artillerie ennemie est très violent. En franchissant le bois entre la voie ferrée et l’angle du virage du canal et la route Klein-Zillebeke-Zwarteleen, les compagnies de notre 2e bataillon, ont perdu la liaison avec le 1er bataillon du I.R. n° 126. Celui-ci a poursuivi l’ennemi qui bat en retraite, jusque dans le bois au nord-est de la route de Klein-Zillebeke à Zwarteleen. La 6e compagnie s’oriente maintenant contre Zwarteleen. La 5e compagnie longe la voie ferrée jusqu’au bois à l’ouest de Zwarteleen. La 8e compagnie suit  jusqu’aux fermes au nord du bois qui vient d’être franchi, et la 7e compagnie passe la voie ferrée à la même hauteur. Mais l’attaque s’enraye près de Zwarteleen où la ligne des tirailleurs se heurte à des troupes anglaises fraîches. La 8e compagnie et une section de la 7e sont donc engagées.

Au même moment, les 9e et 11e compagnies du 3e bataillon arrivent aux fermes qui se trouvent au sud de Zwarteleen. La 11e compagnie est engagée sur cette localité. La 9e compagnie doit soutenir la 5e compagnie. Mais la nuit est au rendez-vous. Des éléments de la 8e et de la 11e compagnie ont pénétré dans Zwarteleen. Ils occupent plusieurs maisons en combattant. Au nord du chemin de Klein-Zillebeke à Zwarteleen, les I.R. n° 126 et n° 172 (ce dernier est le voisin direct du secteur d’engagement de droite de notre division) se sont fortement mélangés dans les bois entre les deux localités. Ils sont parvenus jusqu’aux abords de Zwarteleen et au chemin qui mène à Popotje. À l’ouest de la voie ferrée, on ne voit rien de ce qui se passe pour nos troupes, et ceci jusqu’au canal. Le I.R. n° 105, qui est à la disposition de la 39e D.I., n’est pas visible. Il a été retardé au virage du canal et il se trouve plus à l’est.

Nos 2e et 3e bataillons (sans la 12e compagnie qui est toujours au château de Hollebeke) se trouvent  très en pointe. Il y a un danger d’être enveloppé sur les deux ailes. Un ordre de la division donné à 17 h 35 et qui préconise de tenir la 1ère ligne, à hauteur de la sortie ouest de Zwarteleen, ne leur est toujours pas parvenu. Jusqu’à 23 h 00, les compagnies se sont donc repliées. Le mélange des unités est complet entre les I.R. n° 132,126 et 172. Les bataillons se sont ensuite enterrés. Ils font front à la cote 60. Pour leur sécurité, nous envoyons des patrouilles vers l’avant. Des détachements anglais tentent de leur côté d’avancer sur notre 1ère ligne, mais ils sont aussitôt repoussés. La nuit reste plutôt calme.

Historique du I.R. N° 171. 

De nouveau un brouillard épais empêche toute observation et toute préparation d’artillerie jusqu’à 12 h 00. Puis soudain, tout se déclenche. Le tir d’artillerie se déchaine sur toute la ligne, et l’ennemi réplique vivement. À 14 h 00, il y a un départ d’attaque sur l’aile gauche. La musique joue « la gloire de la Prusse ». Nous attaquons la lisière du bois d’en face, soutenu par le tir des mitrailleuses. Les Anglais se défendent farouchement dans leurs trous individuels et ils doivent être liquidés un par un.

Soulagée par l’avance de l’aile gauche, l’aile droite du 2e bataillon, avec le 1er bataillon qui lui succède, progressent à leur tour. Ils restent toujours en retard puisque que le I.R. n° 126 n’avance guère dans le bois. Nos 1er et 3e bataillons doivent donc constituer un flanc défensif de plus en plus grand face à ce bois. Notre 2e bataillon franchit le 1er objectif à gauche, la route Popotje-Zwarteleen, en liaison étroite avec Le I.R. N° 172.Tout en poursuivant de près les Anglais, il approche à 15 h 15 de la cote 60 au-delà de la route. Pendant ce mouvement en avant, les unités s’entremêlent, et comme les troupes sur les flancs sont en retard, la ligne de tirailleurs devient de plus en plus clairsemée.

À peine a-t-on placé la 11e compagnie, l’ultime réserve, sous les ordres du 2e bataillon que cette dernière doit être aussitôt mise en mouvement. Il se développe depuis la crête 60 une forte et surprenante contre-attaque anglaise sur le 2e bataillon et sur le I.R. N° 172 à Zwarteleen. Les 2 mitrailleuses attribuées au 2e bataillon viennent d’atteindre la 1ère ligne très étirée, lorsque les Anglais débouchent du brouillard. Malgré les lourdes pertes des Anglais qui sont dues aux tirs des mitrailleuses et des tirailleurs du 2e bataillon, les assaillants poursuivent leur avance. Ils sont protégés par les nombreux boqueteaux. Nous devons nous replier jusqu’à la route et nous défendre. Le mouvement est exécuté sous le tir de protection des mitrailleuses. Nous défendons la position de repli qui a été désignée contre plusieurs contre-attaques résolues anglaises. La dernière a lieu à 19 h 15.

Historique du I.R. n° 172. 

Le brouillard est si dense que toute observation d’artillerie est impossible. Dans la matinée tout est encore enveloppé par ce brouillard impénétrable qui se lève enfin vers midi. Immédiatement après, le tir d’artillerie se déclenche. À 14 h 00 débute l’attaque. Dans une course folle, le 3e bataillon rejette les Français (sans doute du 90e R.I.) du chemin creux situé devant la lisière du bois. Il fait plus de 100 prisonniers et prend 3 mitrailleuses. Nous traversons les parcelles de bois très dense à l’est de Zwarteleen. Nous sommes toujours retardés par de petits détachements ennemis qui arrosent les lignes des tirailleurs de leur feu. La cohésion des lignes se construit dans un terrain difficile à surveiller. Des brèches se forment et il faut engager les réserves qui suivent de près.

Au bout de 1 h ½, les détachements les plus avancés ont atteint la lisière du bois à 200 m au nord-est de Zwarteleen. Près d’un pré dégagé, de petits détachements de Français fuient et disparaissent dans le bois suivant. Brusquement, une ligne de tirailleurs très serrée d’anglais avance sur notre flanc droit. Elle est vite refoulée par notre tir qui est bien ajusté. La résistance ennemie se durcit et les nôtres n’avancent plus. Les petits détachements qui sont trop en pointe doivent être ramenés en arrière. Au soir, le régiment s’enterre sur une position qui suit approximativement le chemin qui conduit obliquement  à travers le bois en direction nord-est. Son l’aile gauche est appuyée sur la route Zandvoord -Zwarteleen, et son aile droite au coin nord-est du bois. La liaison est établie à gauche avec le I.R. n° 132 et à droite avec le I.R. n° 171. Il y a un fort mélange des unités avec de nombreux éléments égarés qui proviennent des régiments voisins parmi les nôtres. Un regroupement est impossible. Pour la nuit, il est ordonné un maximum de vigilance, tant dans les tranchées françaises qui ont été prises que dans le fossé humide du chemin forestier. Les cuisines sont avancées dans la mesure du possible. Mais un ravitaillement dans les règles de l’art est impossible à cause des nombreux tirs de surprise ennemis. À chaque instant, des balles traversent le bois en sifflant. Les Français sont très nerveux et tirent au moindre bruit. À 1 h 00, les Anglais déclenchent une forte attaque sur la position du I.R. n° 172. Elle échoue avec de lourdes pertes pour l’ennemi.

Historique du I.R. n° 17.

Après avoir mis de l’ordre dans les unités, les 1er et 2e bataillons restent en première ligne. Le 3e bataillon est  placé derrière eux en 2e ligne.

Historique du I.R.  n° 18.

Dans la nuit du 6 au 7 novembre 1914, le régiment se déplace vers la droite. Sa première ligne occupe maintenant la digue (chemin du parc), allant de la « villa blanche » (Weisse Villa) jusqu’à 300 m vers la droite. Les 2e et 3e bataillons se trouvent en réserve à quelques centaines de mètres en arrière.

Avec le 3e bataillon du 149e R.I.:

 

                   Carte_journ_e_du_6_novembre_1914__3e_bataillon_

   

                                       L_gende_carte_IR_132__6_novembre_1914_

 

Dans la nuit, la 77e brigade arrive à Kemmel. Elle est dirigée, au matin à cheval sur la ligne Lindenhoëk-Kruisstraat-l’enfer. Elle a pour mission de reprendre les positions perdues et d’attaquer sur la direction de l’enfer. À 9 h 40 l’attaque débouche sur la route de Polka-Lindenhoëk. Elle progresse assez facilement jusqu'à la 1ère crête, puis il s’engage une vive fusillade. Vers 10 h 15, l’artillerie ennemie bombarde le village de Kemmel. Le poste de commandement de la brigade est porté à Lindenhoëk. La progression de la 70e brigade se fait lentement. À la nuit, les tranchées du 80e R.I.qui sont établies à 150 m à l’ouest de la halte de ?, ne sont dépassées que de 50 m. Au centre le 158e R.I. a avancé d’environ 600 m. À droite, la ligne s’est portée d’environ 3 à 400 m en avant.

 

Par suite de pertes sérieuses des éléments du 158e R.I. et du 3e B.C.P. engagés le 5 novembre (la moitié de l’effectif) les 2 compagnies du 158e R.I. sont rappelées pendant la nuit du 4 au 5 de Wulverghem. Elles sont portées sur la 1ère ligne en remplacement des débris du 2e bataillon du 158e R.I. qui se reforme à Lindenhoëk.

Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« Le commandant réunit les officiers et les gradés, et nous explique la façon dont il comprend notre rôle : à l’ouest de la route Kemmel-Wytschaete, le front n’a pas bougé, la 11e compagnie en marque l’extrémité. À l’est, il a été rompu, il a fléchi de mille mètres. Il est en train, grâce à l’inertie des Allemands, de se rétablir tant bien que mal. Si l’ennemi, profitant de cette dernière avance, fait un «  à droite en marchant », il se trouvera aussitôt derrière la 11e compagnie. La panique ne sera pas longue à se mettre dans les troupes de la division ouest, lorsqu’elles se verront ainsi tournées. La meilleure solution serait, en l’occurrence, de reporter toute la droite en avant, par une rigoureuse contre-attaque, mais le commandement n’a pas l’air d’avoir les ressources nécessaires. Il nous appartient donc à  nous, « bataillon de liaison », bien que cette mission ne nous ait pas été notifiée officiellement,  de créer des uns aux autres un « pan coupé » qui rétablisse la continuité du front.

Alors, pendant que le commandant va personnellement chercher la 11e compagnie pour diriger la délicate opération de « décrochage », le capitaine P… prend la direction de nos travaux ou reconnaissances de reconstruction. Nous patrouillons dans tous les sens, recherchant le contact des éléments d’ailes des divisions que nous devons relier. Nous essayons, malgré l’obscurité, de tirer parti d’un terrain complètement inconnu et d’y établir des éléments de tranchées répondant à notre mission. Mais nous sommes cent, là où il faudrait être mille ! La 9e compagnie dont nous étions séparés depuis quelques jours vient cependant nous rejoindre. Ses cadres poussent un soupir de soulagement en retrouvant leur grande famille. On leur a fait, à eux aussi et en d’autres points du champ de bataille «  le coup de l’invité ». Ils espèrent, en nous ralliant obtenir un repos mérité. Amère désillusion…

J…, l’ami personnel du commandant, et que tout le monde au bataillon appelle du même nom d’affection familière « notre Alfred » m’exprime son mécontentement. Il vient d’être roulé brutalement par une explosion de gros obus, quelques minutes avant de nous rejoindre…

Pendant trois jours et trois nuits, nous avons résisté sur la nouvelle ligne sans faiblir. Les Allemands se sont vengés de notre rétablissement inattendu par une recrudescence de feux : pensaient-ils donc que nous allions nous enfuir ? S’ils le croyaient, pourquoi se sont-ils arrêtés ?

Bien mieux, il s’en est fallu de peu que nous reprenions nos positions du 5 novembre. »

Du côté des Allemands : 

Historique du R.I.R. n° 20 .

Repos à Comines (du 6 au 7 novembre 1914).

Jusque tard dans la matinée du 6 novembre, les combattants de notre R.I.R. n° 20 ont pu récupérer un sommeil bien mérité, après les terribles combats de ces derniers jours et nuits. Les piètres restes du régiment se mettent à retrouver un aspect humain leur permettant de se sentir nettement mieux dans leur peau. Nous avons mis de l'ordre dans les compagnies. Les pertes subies ont été relevées. Les égarés et les dispersés sont rentrés pour rejoindre leur corps d'origine. Durant ces cinq journées de combats successifs, le 20e a perdu presque la moitié de ses sous-officiers et hommes de troupe, et presque les trois quarts de son corps d'officiers (morts et blessés). La 4e compagnie qui est entrée dans la bataille avec un effectif de 246 hommes, n'en compte plus que 88 qui sont restés indemnes. Son chef ainsi qu'un Offizierstellvertreter sont blessés, un chef de section est tué. C'est à ce moment-là qu'est arrivé le premier renfort du dépôt. Il est immédiatement  reparti sur les trois bataillons. Nous n’avons plus jamais atteint un effectif de combat aussi complet qu'avant l'assaut de Wytschaete qui était de 250 hommes.

Durant ces jours, il a été procédé à l'attribution des premières croix de fer de 2e classe au régiment. Pour leur conduite et leur énergie, le Hauptmann Friedrich Rentsch ainsi que le Leutnant Rudolph avaient fait preuve à Wytschaete le 3 novembre (tous deux appartenaient à la 2e compagnie), le premier a été décoré par notre général de division, Excellence von Speidel en personne, le second par le Generalmajor Schieler commandant notre brigade. Tous deux ont eu droit à des éloges de la part de leurs supérieurs.

Références bibliographiques :

 

Pour les Allemands :

Historique du I.R.  n° 17. Schick. München 1927.

Historique du I.R.  n° 18. Bayer. Kriegsarchiv. München 1926.

Historique du I.R. n° 105. Baensch-Stiftung. Dresden 1929.

Historique du I.R. n° 132. Berlin 1932.

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

« R.I.R. Bavarois n° 20 ». Écrit en 1964 par l’association des anciens du K.B. R.I.R. n° 20. (306 pages). Ouvrage resté jusqu’à ce jour inédit provenant de la collection Herman Plote.

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

J.M.O. du 90e R.I. : Sous- série 26 N 668/14.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

 

Pour en savoir plus :

« En avant quand même ! Le 53e R.I. de Perpignan dans la tourmente de la 1ère guerre mondiale ». Livre de Renaud Martinez. Publier aux Éditions l’Agence. 2007. 

 

Un très grand merci à M. Bordes, à P. Casanova, à  A. Carobbi, à J. Charraud, à J. Huret, à H. Plote, à M. Porcher ainsi qu’au Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes. 

1 octobre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 5 novembre 1914.

                   Carte_journ_es_4_et_5_novembre_1914

                                         Legende_journee_du_5_novembre_1914__2e_bataillon_

                    Composition_des_unit_s___journ_e_du_5_novembre_1914_PNG

 Avec 2e bataillon du 149e R.I. :

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

L’ordre d’opération pour le 16e C.A., pour le 5 novembre, porte sur la continuation de l’offensive dans les mêmes conditions qu’hier. Mais sous le bombardement terrible, il  est impossible de progresser pendant le jour. Le soir, 2 compagnies du 90e R.I. réussissent à occuper un groupe de maisons abandonnées, à 2 ou 300 m en avant du front.

 

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

Une attaque doit être faite à l’autre bout du secteur. Elle sera donnée par une colonne composée. Les 2 bataillons du 53e R.I. sous les ordres du lieutenant-colonel Michel, bataillon Saisset et Lermigeaux qui ont pour objectif la lisière sud du parc d’Hollebeke.

7 h 30 : Le bataillon Saisset qui est resté à Oosthoek, se porte immédiatement vers Eikhof pour se placer face au château qu’il prendra comme direction de sa gauche. Les 5e et 6e compagnies du bataillon Lermigeaux suivent le bataillon Saisset en renfort, les 2 autres restent en renfort à la disposition du lieutenant-colonel qui installe son poste de commandement à Oosthoek. Le mouvement est bientôt arrêté par le feu d’artillerie, des mitrailleuses et de l’infanterie ennemie. La progression ne se poursuit qu’homme par homme et en construisant des tranchées successives.

15 h 10 : Le commandant de l’armée prescrit pour le soir même, l’enlèvement du château d’Hollebeke.

Le bataillon Saisset sortant des tranchées se portera à l’attaque de la corne ouest, en prenant comme direction de droite le Château. Le bataillon Lermigeaux laissant une compagnie (7e) en réserve à la disposition du lieutenant-colonel, se portera à l’attaque de la même corne en prenant comme direction de droite la corne ouest elle-même.

15 h 30 : Dès les premiers moments, le capitaine Lermigeaux tombe mortellement frappé. Un léger flottement se produit à ce moment.

Le lieutenant Laffiteau prend le commandement du bataillon, mais à la tombée de la nuit une erreur de direction fait passer le 2e bataillon à droite. L’ordre est vite rétabli et les compagnies de 1ère ligne arrivent aux tranchées de 1ère ligne du 10e B.C.P.. Les compagnies de 2e ligne se rapprochent et la charge est donnée. Toutes les compagnies s’élancent. Le bataillon Saisset arrive le premier à la lisière du bois. Il y pénètre rapidement et se trouve en présence d’une tranchée ou les occupants déposent les armes. À ce moment, le sous-lieutenant Raques avec sa section arrive jusqu’au château. Les hommes du bataillon s’arrêtent autour des prisonniers. Un mouvement maladroit d’un prisonnier fait croire à un guet-apens et une fusillade générale s’ensuit, occasionnant un sérieux désordre que les prisonniers mettent à profit pour s’échapper.

Un mouvement de recul du bataillon ramène tous les hommes en dehors du bois.

Un second assaut ne donne pas de meilleurs résultats. Le lieutenant-colonel demande au colonel commandant la brigade de lui donner 2 compagnies du 3e bataillon qui viennent d’arriver en réserve à la disposition du lieutenant-colonel, mais qu’il a arrêtées au passage. Les 2 compagnies ne sont pas accordées et le bataillon est obligé de reculer. Le sous-lieutenant Roques est obligé de revenir en arrière. Le bataillon Laffiteau arrive de son côté, mais il se heurte à des tranchées fortement occupées et ne peut pénétrer.


 21 h 00 : La prise du bois et du château d’Hollebeke est chose manquée. Le colonel allait donner l’ordre de tenter une nouvelle attaque lorsqu’il reçoit lui-même l’ordre de rompre le combat.

 

 

Le 1er bataillon doit se retirer sur Saint-Eloi pour y occuper les emplacements que tenaient les compagnies du bataillon Marullas. Le 2e bataillon devant venir occuper les positions d’Oosthoek, le 3e retourne à Voormezelle.

 

Du côté des Allemands :   

Historique du I.R. n° 171.

Le 5 novembre, toute activité est annulée par un brouillard dense. On attend en vain, la percée du soleil. Cela permet pour le moins de réorganiser les unités et de fortifier la position. Nous ravitaillons la troupe sans être vus de l’ennemi. Nous creusons des boyaux et nous rencontrons l’eau souterraine à faible profondeur. Un fléau qui nous créera encore beaucoup de soucis dans les semaines à venir. À 18 h 00 arrivent les ordres d’attaque. Le 2e bataillon creuse encore rapidement une tranchée spéciale pour y placer la musique régimentaire. Elle doit accompagner l’assaut du lendemain en jouant ses airs.

Historique du I.R. n° 172.

L’attaque prévue pour le 5 novembre est ajournée.

 

Historique du I.R. n° 126.

Jusqu’au soir du 5 novembre, il n’y a rien à signaler sur le front de la division. Tous les régiments ont amélioré les lignes atteintes. Ils poursuivent la reconnaissance des positions ennemies situées en général à la lisière sud des boqueteaux, de part et d’autre de la voie ferrée, à l’ouest de Camp, et se poursuivant dans la direction nord-est, à travers le bois nord de Groenenburg.

Selon l’ordre de la division donné le 5 novembre à 22 h 00, il faut réussir le 6 novembre la percée sur Ypres. Cette dernière est très importante pour la suite des opérations.

La 39e D.I. procède à une nouvelle répartition des secteurs tenus par ses brigades. Le I.R. n° 132 (sans son 1er bataillon) est retiré du secteur du bois au nord de Groenenburg. Ce secteur est occupé maintenant par notre 2e bataillon et le 1er bataillon du I.R. n° 132. Ces bataillons constituent l’aile droite de la 82e brigade. Elle est appuyée sur sa gauche par le I.R. n° 126 placé au nord du château de Hollebeke. Le commandement du secteur de la brigade de gauche comprenant le I.R. n° 126 et le I.R. n° 132 (sans son 1er bataillon) est assuré par le général von Frankenberg commandant la 61e brigade.

À la droite de la 39e D.I., la 30e D.I., poursuit ses attaques entre la chaussée Ypres-Menin et le bois au nord de Groenenburg, comme par le passé. À la gauche de la 39e D.I., la 2e D.C. qui se trouve toujours dans le secteur tenu par le IIe C.A. bavarois, qui s’était approché de Saint-Eloi, doit soutenir l’attaque par son tir. Le 3e bataillon du I.R. n° 172 et le 8e bataillon de chasseurs doivent rester au sud-ouest de Basseville-Cabinet, comme réserve de la division. Le I.R. n° 105, quant à lui est en réserve de corps à Zandvoorde.

Sur ordre du C.A., les musiques régimentaires doivent  jouer derrière la ligne d’attaque. Lorsque la nôtre arrive au château de Hollebeke, elle est renvoyée par le colonel, « pour travailler comme brancardiers auxiliaires ». Et c’est mieux ainsi, car l’assaillant entendait déjà assez de « musique » au front !

 

Historique du I.R. n° 17 bavarois.

Un renouvellement de l’attaque est ordonné. Après la préparation d’artillerie, nous nous sommes élancés à 15 h 00. Le 3e bataillon réussit à gagner 200 m de terrain. Le 2e bataillon, lui a gagné environ 100 m. L’attaque s’est étouffée sous l’effet du tir ennemi. À 18 h 00, elle est renouvelée. Sept  compagnies du I.R. n° 22 viennent s’intercaler dans le secteur de notre régiment. Mais cette attaque se brise un peu devant les tranchées ennemies. En tenant compte des efforts accomplis par la troupe jusqu’à ce jour, nous avons renoncé à attaquer de nouveau le lendemain.

 

Historique du I.R. n° 18 bavarois.

Les 2e et 3e bataillons relèvent le 1er bataillon dans la matinée. À partir de 8 h 00, notre artillerie bombarde assez copieusement les tranchées ennemies. L’assaut de notre infanterie est déclenché. À partir de 10 h 30, des détachements réduits avancent homme après homme jusqu'à Diependarlbeek. Progressivement, ces détachements sont par la suite renforcés. Ils sont soumis à un tir de flanc venant des deux côtés à la fois. Vers 14 h 00, notre 3e bataillon avance à droite, le 2e à gauche vers les tranchées ennemies. Une heure plus tard, après avoir intercalé la 3e compagnie, la position ennemie était conquise. Les assaillants sont soumis à un très violent tir de flanc venant des deux côtés et en particulier de la direction de l’Eikhof. Avec l’arrivée de la nuit, la situation devient de plus en plus précaire. Notre artillerie lourde a dû cesser le tir dès 14 h 30, par pénurie de munitions. Les tirailleurs ennemis peuvent réoccuper les tranchées abandonnées. Ils peuvent même reprendre quelques tronçons de tranchées occupées par nos patrouilles. Le feu venant des tranchées qui flanquent nos lignes s’est fortement réanimé. Environ 200 hommes du I.R. n° 18 sont victimes de ce tir (morts et blessés). Fort heureusement, le 2e bataillon qui est à l’aile gauche a eu plus de chance. L’hauptmann (capitaine) Ritter réunit la 6e compagnie du leutnant (sous-lieutenant) Gain et quelques groupes qui appartiennent à la 5e brigade d’infanterie à notre gauche. Ceux-ci montent alors sur le versant pour approcher la lisière ouest de Saint-Eloi. Ils passent par une succession de tranchées vides. À la nuit tombante, ils atteignent la crête de Saint-Eloi. Ici, les tranchées ennemies sont également désertées sous l’effet des tirs de notre artillerie lourde. Immédiatement, les détachements se tournent vers la droite et progressent jusqu’à la lisière ouest du village. Ils parviennent ainsi à quelques centaines de mètres dans le dos des mitrailleurs ennemis. Là, le détachement s’enterre provisoirement. L’hauptmann (capitaine) Ritter implore alors le régiment à plusieurs reprises. Il demande l’autorisation de reprendre avec le 3e bataillon, l’assaut frontal qui avait échoué dans l’après-midi. Ceci dans le but de prendre Saint-Eloi en collaboration avec son détachement. Mais, la pénurie de munitions de l’artillerie est là et faute de troupe fraiche, cette autorisation n’a pas pu être donnée. Une attaque de nuit, sous de telles conditions, aurait amené le 3e bataillon, déjà trop en pointe et fortement éprouvé, dans une situation extrêmement précaire. L’hauptmann (capitaine) Ritter et le leutnant (sous-lieutenant) Gain décident donc de tenter un coup de main sous leur propre responsabilité. Mais à l’instant même où ils veulent avancer avec leurs détachements contre les mitrailleurs ennemis, des lignes importantes de tirailleurs approchent sur leur flanc gauche. Il y a alors une fusillade généralisée sur de très courtes distances. Finalement, le détachement beaucoup plus faible doit s’estimer heureux de ne pas être coupé de ses arrières. Il faut donc se replier par le même itinéraire suivi pour attaquer, tout en emportant 3 prisonniers.

En attendant, l’aile droite du régiment, donc le 3e bataillon, s’est repliée à son tour, suite aux lourdes pertes subies dans l’après-midi. Seule une ferme reste occupée par les éléments des I.R. n° 17e, 18e et 22e. Ils sont   véritablement coincés. Ils ne peuvent plus ni avancer, ni reculer. Ils s’enterrent, tout en faisant front dans toutes les directions à la fois. Du côté du I.R. n° 18, il y a la section Hofer. Cet officier particulièrement brave réussit à contacter son propre détachement, en faisant des signaux parce qu’il essuyait des tirs venant de celui-ci. Mais sa situation empire constamment. Les Français s’enterrent des deux côtés de sa section et veulent également lui couper la retraite. L’oberleutnant (lieutenant) Hofer prolonge sa position vers la droite comme vers la gauche. Il essaye d’empêcher l’ennemi de venir dans son dos. Mais il ne peut pas empêcher l’ennemi de  flanquer des deux côtés de sa tranchée. Le détachement essuie de lourdes pertes. Le lieutenant Hofer est tué. Au soir seulement, on parvient à libérer le détachement. Une batterie de 150 (obusiers) avait pu démolir les Français rassemblés autour de notre section, de sorte que les survivants peuvent être délivrés d’une captivité imminente. Les hommes qui rentrent ainsi dans la soirée ont alors déclaré qu’ils auraient été contraints de se rendre si les obusiers ne les avaient pas délivrés. Le message de l’oberleutnant (lieutenant) Hofer qu’ils emportent avec eux, confirme la tenue héroïque de ses hommes, mais également leur situation désespérée dans la journée. Après sa grave blessure, il a encore rédigé un deuxième message aux ultimes heures de sa vie, au sujet de l’effet heureux de l’artillerie, tout en demandant à la fin de son texte, que cette batterie soit remerciée pour avoir sauvé ses hommes et pour son aide efficace.

 

Avec le 3e bataillon du 149e R.I. : 

 

                    Journ_e_du_5_novembre_1914__3e_bataillon

      

                                       L_gende_3e_bataillon

   

                    Composition_des_unit_s_journ_e_du_5_novembre_1914__3e_bataillon_

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

La fusillade qui a continué toute la nuit reprend de manière très violente au matin et au jour, la canonnade également. Vers 12 h 00, le tir d’artillerie se rapproche des tranchées qui sont petit à petit démolies. Les mitrailleuses du 158e R.I. sont anéanties. Ce qui reste de la 1ère ligne est obligé de se reporter légèrement en arrière et de creuser, sous la canonnade de nouvelles tranchées.

Un peloton du 3e bataillon de chasseurs est envoyé pour soutenir la ligne. À ce moment, le commandant du 3e B.C.P. signale  également qu’au-devant de lui, l’artillerie ennemie a démoli une partie de ses tranchées. L’infanterie s’est renforcée.

Du côté de la 32e division, le 3e  bataillon du 149e R.I. est engagé en première ligne pour remplacer des unités du 342e R.I.. Il subit également des pertes sérieuses.

À la nuit, la ligne s’est reportée au sud de la route de Wyschaete environ 1000 m plus en arrière. Le 3e bataillon de chasseurs occupe le ruisseau de ? Des éléments du 158e R.I. sont sur le chemin de terre à 100 m à l’est de ce ruisseau qui longe une ferme en flammes.

La ligne allemande occupe la crête du moulin de Spanbrock et toute la nuit la fusillade bat le plateau jusqu'à Lindenhoëk.

Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« L’attaque se déclenche le 5 en fin de journée : on la reçoit de son mieux. Les vagues ennemies déferlent devant nous et gagnent sur notre droite, évidemment elles cherchent à nous déborder sans nous aborder. Après être restés deux jours et demi ensevelis vivants, écrasés sous la menace perpétuelle du coup que nous pensions nous être destiné, nous éprouvons, à cette seconde pourtant critique, comme un immense soulagement … Nos hommes  retrouvent une ardeur dont ils ne se  seraient plus crus capables, ils sautent sur leurs armes et garnissent les parapets comme si le ressort de leur énergie se détendait brusquement après une longue compression…

- Mon commandant, on lâche pied sur la droite, nous allons être cernés, ils sont innombrables…

A ce cri d’alerte, le commandant sort de son poste de combat et, par la route, puisque c’est le chemin le plus court, il se rapproche de la compagnie de réserve. Pas une minute à perdre. Je vois son geste, car je suis trop angoissé pour perdre un seul de ses mouvements : il montre au capitaine P…, à la 10e compagnie, la croupe qui nous domine sur le flanc menacé. C’est l’ordre de contre-attaque. La compagnie part. Ses premiers pas nous donnent confiance, elle se déploie sur la contre-pente défilée aux vues, elle avance. Tout à coup, les mitrailleuses et les obus l’attaquent simultanément. Des groupes culbutent et tombent en lourdes masses. Des hommes sont projetés dans le cratère des explosions ; beaucoup reculent, d’autres accentuent leur marche, mettant leur fusil devant leur corps comme pour se protéger des coups.  Je vois le lieutenant Cauvin, dont le bras pend sanguinolent, qui gesticule de sa main valide pour entraîner les siens, puis qui s’affaisse épuisé par ce trop grand effort. Le capitaine P… reste invulnérable, il se multiplie, touche au but, amène des tireurs dans la tranchée qui venait d’être évacuée et sauve, pour un moment du moins, une situation bien compromise.

Bientôt cependant, vers le moulin de Spanbrock, les mauvaises nouvelles s’accentuent. Nous en subissons le contrecoup et des unités d’attaque, cherchant à étendre le bénéfice de leur succès, se glissent dans des vallonnements, échappant à nos feux… La 12e compagnie s’appuyant à gauche de « la ferme tragique »qui tient bon pivote en arrière et à droite pour se souder le mieux possible aux débris de la 10e compagnie. Je me trouve dans cette partie la plus menacée, presque au milieu de groupes d’Allemands qui grossissent à vue d’œil. La nuit tombe. Le commandant et le capitaine P… se regardent avec angoisse et je comprends à leur hésitation, car ils hésitent généralement peu, que notre cas n’est pas brillant. Les coups de feu et les fantassins ennemis nous débordent de plus en plus. De proche en proche, le craquement redouté se produit, la ligne fléchit. Les isolés que nous avions encadrés tant bien que mal nous entraînent et, sans que personne ne l’ait ordonné, le repli s’effectue. Ce sont des choses incompréhensibles, mais irrésistibles… Nous nous multiplions pour ralentir et régler le recul… Des mitrailleuses nous ont vus et nous saisissent sous leur infernal claquement… On dirait qu’elles se rapprochent… Nous passons un mauvais quart d’heure… Grand désarroi. Obscurité complète. Aucune liaison à droite. Pas de nouvelles de la 11e compagnie ; on espère qu’elle a conservé sa position et que, par sa ténacité, elle garantit ainsi le flanc de notre division d’adoption. Si c’était vrai, notre mission de « liaison » serait remplie, malgré tout, puisque nous aurions « tenu » d’une part avec ceux  qui ont « tenu » et « fléchi » d’autre part avec ceux qui ont « fléchi ». C’est la situation la plus difficile que l’on peut imaginer pour un bataillon. Celle où il doit savoir s’étirer à l’extrême pour rejoindre les éléments dissociés, celle où repose sur lui la fortune des grandes unités. En réalité, il nous reste peu d’illusions: l’ennemi a enfoncé le front entre le moulin de Spanbrock et Wytschaete. S’il le veut et s’il a de l’audace, il exploitera son succès sans tarder. Par une bonne fortune inespérée, le courant de repli m’a amené, avec quelques hommes, dans une ligne de tranchées dont j’ignorais l’existence et qui n’est pas mauvaise du tout. La remontant, je pars en exploration vers ma droite et, au bout de trois ou quatre cents mètres, je tombe sur des fractions qui, comme nous, profitent de cette aubaine pour se réorganiser. Avec les officiers qui les commandent, nous échangeons de rapides impressions : ils ne sont pas encore revenus de leur émotion, tant la partie a été chaude. Ils reviennent encore moins de leur surprise en constatant  qu’ils ne sont pas poursuivis. Au total, on n’a perdu jusqu’ici qu’un millier de mètres de terrain et, si l’on parvient à se rétablir, on en aura été quitte pour la peur. Je dépêche un patrouilleur vers le commandant, pour qu’il prenne les dispositions pour faire occuper les quelques centaines de mètres de tranchée nous séparant de ces voisins…

Le lieutenant T… vient de faire savoir qu’il n’a pas lâché un pouce de terrain, et que sa situation est désespérée si on ne rétablit pas la ligne à sa hauteur. Il est à peu près complètement encerclé, ses munitions s’épuisent.»

 

Du côté des Allemands : 

Les combats à la lisière nord-ouest de Wytschaete.

Le 5 novembre le I.R. n° 21 bavarois, occupe des cantonnements à Comines pour passer en réserve de l'armée, tandis que son 3e bataillon subit encore de durs combats défensifs à la lisière ouest de Wytschaete.

Références bibliographiques :

 

Pour les Allemands :

Historique du I.R.  n° 17. Schick. München 1927.

Historique du I.R.  n° 18. Bayer. Kriegsarchiv. München 1926.

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

« R.I.R. Bavarois n° 20 ». Écrit en 1964 par l’association des anciens du K.B. R.I.R. n° 20. (306 pages). Ouvrage resté jusqu’à ce jour inédit provenant de la collection Herman Plote.


Tous ces historiques proviennent de la collection Herman Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

 

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 26 N 520/10.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

Pour en savoir plus :

« En avant quand même ! Le 53e R.I. de Perpignan dans la tourmente de la 1ère guerre mondiale ». Livre de Renaud Martinez. Publier aux Éditions l’Agence. 2007.

Un très grand merci à M. Bordes, à  A. Carobbi, à P. Casanova, à J. Charraud, à J. Huret, à H. Plote, à M. Porcher ainsi qu’au Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes.

 

24 septembre 2010

Ne les oublions pas trop vite...

                   Couture_34__115_et_149e

Les pertes dans le secteur d’Ypres (novembre/décembre 1914).

 

Voici un tableau contenant les noms des 260 officiers et hommes de troupe du 149e R.I.qui ont trouvé la mort dans le secteur d’Ypres. Il faut signaler que plus de 90 noms ne figurent pas dans l’état des pertes qui se trouve dans l’historique du régiment. Il doit encore rester quelques manquants…

Derrière chaque nom se cache une histoire individuelle. Combien de familles meurtries par le chagrin ? Combien d’attentes déçues par de vains espoirs de retour ?  Combien de talents gâchés par une mort trop rapide sur un champ de bataille fauchant tant d’hommes dans la fleur de l’âge ?… Avec ici une pensée particulière pour les nombreux « trentenaires » de la territoriale qui sont passés au 149e R.I. et qui figurent sur ce tableau… Ne les oublions pas trop vite…

                                           Tableau des tués dans le secteur d'Ypres 1914

                           Tableau des blessés et des disparus dans le secteur d'Ypres en 1914

                                                       Sépultures des tués en Belgique.

Comme pour beaucoup de Français tombés en Belgique, la proportion des sépultures individuelles est très faible lorsqu’elle est comparée au nombre de tués. Combien de corps ont pu être restitués aux familles après la guerre ? Le nombre reste encore inconnu.

 Quelques graphiques et brefs commentaires…

 

 

                   R_partition_par_date_de_d_c_s

 

La première quinzaine de novembre est de loin la plus meurtrière. Les pertes sont les plus élevées pour les journées du 5 et du 18 novembre 1914. Janvier 1915, des hommes décèdent encore des suites de leurs blessures dans les hôpitaux français après avoir été évacués de Belgique.

 

 

                   R_partition_par_bataillons_et_compagnies

 

Le 3e bataillon souffre le plus avec ces 10e, 11e et 12e compagnies … Du côté de Wytschaete où ces trois compagnies sont engagées, les combats sont particulièrement virulents. La 9e compagnie plus « ménagée » est restée en réserve quelque temps.

 

 

                   R_partition_par_classes

 

 

À la lecture de ce dernier tableau, nous constatons une très forte représentation des classes anciennes venues combler les pertes des semaines précédentes. La classe 1899 est de loin  celle qui paye le plus lourd tribut. Quelque temps auparavant, un nombre conséquent de territoriaux du 34e R.I.T. de Fontainebleau et du 115e R.I.T. de Marseille ont dû découdre les numéros des képis et les pattes de collets des vareuses pour les remplacer par ceux du 149e R.I.. Bon nombre d’entre eux ne les ont pas portés bien longtemps…

 

Sources :

Historique du régiment. Épinal. Imprimeries Klein. 1919.

Fichier des « morts pour la France » visible sur le site S.G.A./Mémoire des hommes.

Une liste des pertes provenant du S.H.A.T. a été consultée.

 

Un très grand merci  à  M. Bordes, à A. Carobbi, à J. Huret, à M. Porcher, au S.H.A.T. de Vincennes et à l’association Bretagne 14-18.

 

17 septembre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 4 novembre 1914.

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Avec le 2e bataillon du 149e R.I.:

 

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

Le 90e R.I. et le 2e bataillon du 149e R.I., tiennent le canal en liaison avec le 10e B.C.P.(détachement Olleris) qui est arrêté à 150 m de la lisière ouest du parc du château d’Hollebeke.

 

J.M.O. du 90e régiment d’infanterie.

Le 4 novembre à l’ouest du canal, à hauteur du pont détruit, les chasseurs du 10e B.C.P.et le 53e R.I. qui sont soutenus par le 2e bataillon du 149e R.I. se portent à 19 h 00 à l’attaque du château de Hollebeke.

La 1ère section de mitrailleuses du 90e R.I.(sous-lieutenant Oudet) prend l’ennemi de flanc à travers le canal. Elle ouvre un feu meurtrier. La 4e section de la 4e compagnie (adjudant Biet) participe à l’assaut. Elle parvient à entrer, avec un bataillon du 53e R.I. jusqu’aux abords du château. Contre attaquées sur leur droite, nos troupes sont obligées de regagner leurs tranchées.

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

7 h 20 : Les 2 bataillons du 53e R.I. (1er et 2e bataillons) et un bataillon du 80e R.I., reçoivent la mission de reprendre l’attaque sur le parc d’Hollebeke par le nord-ouest. Ils sont appuyés par le 10e B.C.P. dont les premiers éléments sont à une centaine de mètres. Le bataillon Saisset vient se placer en formation préparatoire d’attaque dans les bois qui sont à l’ouest de la cote 50, laquelle est à l’est d’Oosthoek.

Le bataillon du 80e R.I. (bataillon Marullas) se place entre le précédent et le bataillon Lermigeaux qui est à Oosthoek.

Le lieutenant-colonel installe son poste de commandement à Oosthoek.

9 h 25 : Le bataillon Marullas est repris au lieutenant-colonel qui ne dispose plus que de deux bataillons. L’opération doit surtout être une reconnaissance offensive plutôt qu’une attaque proprement dite.

13 h 00 : Une nouvelle organisation de la défense de Saint-Eloi est faite par le commandement, et le 3e bataillon reçoit l’ordre de venir se placer à la lisière nord de Saint-Eloi avec le 1er bataillon en réserve des 2 bataillons de chasseurs.

13 h 30 : L’ordre est donné au 1er bataillon de reprendre sa reconnaissance et d’attaquer si l’occasion se présente.

14 h 00 : La droite du secteur est violemment attaquée. Le 1er bataillon reçoit l’ordre de suspendre son mouvement de façon à rester disponible.

14 h 45 : Le groupe dont fait partie le 53e R.I. reçoit l’ordre de faire une contre-attaque dans la direction de la Kapellerie, de manière à arrêter l’offensive de l’ennemi. Ce dernier  réussit à se glisser entre la droite du secteur et la gauche du secteur voisin.

Le bataillon Dufor se porte par l’ouest de Saint-Eloi et appuiera ensuite sa gauche à la route Saint-Eloi-Wytschaete, direction générale Kapellerie. Deux compagnies du 80e R.I. suivront le bataillon Dufor en renfort.

Le bataillon Lermigeaux qui est à Oosthoek, se portera immédiatement à l’ouest de la route Saint-Eloi à l’écluse n° 8. Il prendra une formation préparatoire de combat face à la Kapellerie, puis passant à l’ouest de Saint-Eloi, il marchera dans les traces du bataillon Dufor. Le lieutenant-colonel marchera avec le bataillon Lermigeaux. Le bataillon Saisset viendra à Oosthoek.

Le mouvement se poursuit lentement sous le feu de l’artillerie, mais sans pertes sérieuses.

16 h 40 : Les 2 compagnies du 80e R.I. sont arrivées à hauteur des tranchées des B.C.P.. Elles les dépassent un peu pour se rendre compte des mouvements de l’attaque allemande qui semble céder devant le feu des mitrailleuses.

Le bataillon Dufor est derrière le 80e R.I.. Le bataillon Lermigeaux en arrière et à droite.

17 h 00 : La nuit arrive. L’attaque allemande est enrayée. Le bataillon Dufor reçoit l’ordre de rentrer à Voormezelle. Le bataillon Lermigeaux bivouaque sur place ainsi que le lieutenant- colonel.

 Casque_prussien__calque_Du côté des Allemands:

  

Historique du I.R. n° 171.

Le 4 novembre au soir, l’offensive est provisoirement suspendue. Son ordre est venu du haut, et ne sera repris qu’après avoir soumis, le 5 novembre, toute la position ennemie à un tir extrêmement violent d’artillerie.

 

Historique du l’I.R. n° 172.

Le régiment n’a pas participé aux tentatives d’attaque du 3 et du 4 novembre, car il faut attendre au sud de Klein-Zillebeke, l’arrivée à sa hauteur du voisin de droite. Au beau temps d’automne avait succédé la pluie, et souvent un brouillard très dense couvre le paysage. Les tranchées peu profondes se remplissent d’eau et de boue. L’hiver des Flandres s’annonçait. Nous tentons d’approfondir les tranchées, mais très vite la nappe souterraine est atteinte, et il n’y avait pas encore de sacs de sable.

 

Historique du I.R. n° 126.

?

 

Historique du I.R. n° 132.

Le régiment est toujours dans le bois d'Herenthage.

 

Casque_bavarois_mod_le_3__calque_Historique du I.R.  n° 17 bavarois. 

L’attaque sur Saint-Eloi se poursuit. Les trois bataillons sont en 1ère ligne le long de la route-digue. Le 3e bataillon avec son aile gauche sur la route Wambeke-Saint-Eloi. Les 2e et 1er bataillons sont à sa droite. En raison du brouillard, notre artillerie n’a pu tirer qu’à partir de midi. L’attaque est donc repoussée dans l’après-midi. Les lignes de tirailleurs, qui débouchent  à découvert, essuient, sous le tir violent d’obus légers ennemis des pertes si lourdes, qu’elles sont forcées de se replier sur leur ligne de départ.

Historique du I.R. n° 18 bavarois.

Après avoir mis à profit le 3 novembre 1914 le renforcement de la position, l’Hauptmann (capitaine) Kohlmüller a fait avancer le 4 novembre son 1er bataillon en 1ère ligne, jusqu’à Diependarlbeek, à la faveur du brouillard matinal. Les 2e et 3e bataillons ont suivi derrière le centre.

 

Avec le 3e bataillon du 149e R.I. :

.

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

À 2 h 30 une compagnie du génie du 16e C.A. arrive pour exécuter des travaux de défense. Elle ne peut rien faire étant donné le peu de temps qui reste avant le lever du jour et le manque de piquets pour placer le réseau de fil de fer.

                     De_la_Polka___la_ferme_Lagache

 

L’ordre  donné de reprendre l’attaque à 4 h du matin est différé par suite de brouillard épais. À 4 h 45, une vive fusillade engagée à gauche, du côté de la 32e division (80e R.I.) allume le feu d’infanterie sur toute la ligne jusqu’au jour. Les travaux cessent.

À 6 h 10 une violente canonnade commence. La crête du moulin de Spanbrock en arrière des tranchées et sur la position des unités de 2e ligne, et tout le plateau à l’ouest jusqu’à la route de Lindenhoëk à la Polka, est sans arrêt arrosée de projectiles. Les unités de la 2e ligne du 158e R.I. (2 compagnies) qui n’avaient pas eu le temps de se retrancher subissent des pertes sérieuses. Vers 10 h 00, l’ordre est donné au 3e bataillon du 149e R.I. qui est resté en réserve vers Kemmel, de  diriger 3 compagnies dans la direction de la ferme Lagache.

À la tombée de la nuit, une demande de renfort adressée par la 32e division qui se trouve à l’est de Wytschaete et dont les éléments se plient, est satisfaite par l’envoi de  2 puis 3 compagnies du 3e bataillon du 149e R.I..  À 22 h 00, une compagnie du 158e R.I. est encore  envoyée vers la halte de ? À 23 h 00 le colonel Hussement qui revenait de diriger cette dernière compagnie et qui était passé par les tranchées de son régiment, est blessé mortellement. L’E.M. cantonne  à Kemmel.

 

Du côté des Allemands:
 

Les combats à la lisière nord-ouest de Wytschaete.


 

Le 4 novembre, le R.I.R. n° 17 bavarois a pu repousser une contre-attaque française lancée sur les deux côtés de la route de Grootre Vierstraat. Celle-ci est précédée d’un violent bombardement de Wytschaete effectué par l'artillerie ennemie. La 4e D.I. bavaroise qui se bat plus à droite, lance de son côté une attaque en direction d'Ypres à 14 h 00. Le 8e de réserve doit s'y joindre en deuxième ligne, avec un échelonnement vers la gauche.

À 15 h 15, l'attaque se trouve enrayée devant le boqueteau situé au nord de Wytschaete. En ce même jour, le 2e bataillon du R.I.R. n° 17 tente par deux fois un assaut visant le bois au nord-ouest de Wytschaete, mais sans succès. Il y a subi de très lourdes pertes. Le 3e bataillon du R.I.R. n° 21 bavarois est également associé à ces affrontements sanglants. Vers le soir, on a attribué au 17e de réserve ainsi qu'au 3e bataillon du  R.I.R. n° 21 placé sous ses ordres, tout le glacis à l'ouest et au nord de Wytschaete. Ils doivent désormais le défendre. Le régiment a placé en première ligne ses 1er et 3e bataillons ainsi que le 3e bataillon du 21e de réserve. Le I.R. n° 22 bavarois est relevé par le 17e de réserve. Il se rend alors à Oosttaverne  et devient réserve du corps. Il faut absolument se maintenir dans Wytschaete conquis au terme de lourds sacrifices. Wytschaete est maintenant devenu un point d'appui indispensable au sein du dispositif allemand.

Le R.I.R. n° 21 (sans son 3e bataillon) s’est rendu, le 4 novembre au soir, à Oosttaverne, conformément à son rôle de réserve du IIe C.A. bavarois.

Au cours de l'attaque menée le 4 novembre par la 4e D.I. bavaroise au nord-est de Wytschaete, seuls des éléments du 2e B.C.P. bavarois qui se sont intercalés dans le front du R.I. n° 23 bavarois entre 300 et 400 mètres à l'est du "B 2-Wald", ont réussi à prendre le tiers septentrional de ce bois situé au N.N.E de Wytschaete. Ils ont pu progresser encore et atteindre la ferme isolée située plus en avant. Cela a permis d'avancer le front allemand jusqu'au fossé est de la grande route qui relie Messines à Ypres. Mais les assaillants ne peuvent pas remporter un franc succès. Ils sont contraints de franchir le plateau dénudé et en pente descendante vers le "B 2 -Wald". Leurs cinq ou six vagues successives, quoique bien étirées, ainsi que les réserves (y comprise celle du corps) suivent au battement des tambours. Elles deviennent immédiatement la cible privilégiée des mitrailleuses et des tirailleurs qui sont placés sur la lisière est du bois, ainsi que de l'artillerie ennemie positionnée à l'ouest de St. Eloi. Les assaillants doivent ainsi subir un tir de face comme de flanc.

 

Références bibliographiques :

Pour les Allemands :

Historique du I.R.  n° 17. Schick. München 1927.

Historique du I.R.  n° 18. Bayer. Kriegsarchiv. München 1926.

Historique du I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

« R.I.R. Bavarois n° 20 ». Écrit en 1964 par l’association des anciens du K.B. R.I.R. n° 20. (306 pages). Ouvrage resté jusqu’à ce jour inédit provenant de la collection Herman Plote.

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

 

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 26 N 520/10.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

J.M.O. du 90e R.I. : Sous-série 26 N 668/14.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».

 

Pour en savoir plus :

« En avant quand même ! Le 53e R.I. de Perpignan dans la tourmente de la 1ère guerre mondiale ». Livre de Renaud Martinez. Publier aux Éditions l’Agence. 2007.

Un très grand merci à M. Bordes, à  A. Carobbi, à J. Huret, à H. Plote, à M. Porcher ainsi qu’au Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes.

7 septembre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 3 novembre 1914.

                   Section_de_mitrailleuses_du_2e_bataillon__ann_e_1909_  

  

Avec le 2e bataillon du 149e R.I.:
 

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

 

Le 3 novembre au matin le 2e bataillon du 149e R.I. part vers Dickebusch à la disposition du général commandant le 16e C.A..

 

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

 

Le  bataillon du 149e R.I. (capitaine Pretet, détachement Lanquetot) est mis à la disposition de la brigade. Il vient prendre position sur le canal en liaison avec le bataillon Lanes du 90e R.I..

 

Du côté des Allemands :

 
 

                    3_novembre_1914_2e_bataillon_du_149e_R

 

 

                                    Legende_1                  

 

Casque_prussien__calque_

 

 

 

Historique du I.R. n° 132.

 

Le régiment combat jusqu’au 5 novembre 1914 au soir, dans le bois d’Herenthage près de la route de Menin à Ypres. 

 

 

Historique du I.R. n° 126.

 

Casque_IAu soir du 3 novembre, les 1er et  3e bataillons partent de Zandvoorde. Ils sont conduits, par des guides du I.R. n° 5 bavarois, jusqu’aux positions tenues par ce régiment au nord du château de Hollebeke (Hollebeke est). Un renfort de 3 officiers, 2 aspirants, 20 sous-officiers et 300 hommes venu du dépôt est exclusivement dans le 1er bataillon. Il retrouve ses 4 compagnies, avec un effectif total de 8 officiers et environ 700 hommes. 

 

Historique du I.R. n° 99. 

 

?

 

Historique du I.R. n° 143. 

 

Le régiment se bat contre les Anglais dans le bois d’ Herenthage, sur la route Ypres-Menin, jusqu’au soir du 9 novembre (relève).

 

Historique du I.R. n° 171. 

 

Les 3 et 4 novembre 1914, les tentatives d’attaques se poursuivent sans aucun gain de terrain. Ce qui a été pris à l’aile gauche et au centre ne peut pas être conservé à cause d’un tir de flanc de la droite, de plus en plus meurtrier.

 

Historique du I.R. n° 172.

 

Le régiment n’a pas participé aux tentatives d’attaque du 3 et du 4 novembre. Il doit attendre au sud de Klein-Zillebeke l’arrivée à sa hauteur du voisin de droite. La pluie succède au beau temps d’automne. Un brouillard très dense couvre souvent le paysage. Les tranchées qui sont peu profondes se remplissent d’eau et de boue. L’hiver des Flandres s’annonçait. Nous tentons d’approfondir les tranchées. Très vite, la nappe souterraine est atteinte et il n’y avait pas encore de sacs de sable.

 

Historique du I.R. n° 105.

 

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Historique du I.R. n° 136.

 

?

 

Les quatre régiments de la 4e D.I.

 

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Avec le 3e bataillon du 149e R.I.:

 

Le 3e bataillon est en réserve à La Polka.

 

Pendant ce temps-là que se passe t-il dans le secteur ? 

 

À 12 h 00,  2 compagnies du 158e R.I. sous les ordres du capitaine Berger sont envoyées sur Kemmel à la disposition du général Mazelles commandant la 1ère division de cavalerie.

 

Le reste de la brigade (6 compagnies du 158e R.I., le 3e  bataillon du 149e R.I., plus le 3e B.C.P. (5 compagnies)) se met en mouvement sur Kemmel. Elle a pour mission d’attaquer dans la direction l’Enfer, la Garde-de-Dieu sans se laisser accrocher par les points d’appui de Messine et de Wytschaete.

 

L’attaque débouche à 14 h 00 de Kemmel, le 3e B.C.P. en tête et au sud de la route de Kemmel à Wytschaete. Le 158e R.I. à la gauche au nord de la route, le 3e bataillon du 149e R.I. en réserve à la Polka.

 

Dès la 1ère crête à 100 m à l’est de la Polka la ligne reçoit une violente canonade, elle progresse très lentement sur le plateau découvert et battu par l’artillerie ennemie. Elle ne peut atteindre qu’à la nuit la ligne de tranchées amies occupées par la cavalerie à pied.

 

Cette ligne s’étend à peu près du nord au sud en passant par le carrefour de Kruistraat. 3 compagnies du 3e B.C.P. et 2 compagnies du 158e R.I. s’installent dans ces tranchées après les avoir débarrassées des cadavres et blessés qui les encombrent. Les autres unités se placent en 2e ligne, sur la crête du moulin de Spanbrock. La nuit est employée à approfondir les tranchées et à commencer les boyaux de communication.

  

 

                   Journ_e_du_3_novembre_1914__3e_bataillon

                                                                     

                                      legende_2

 Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« Le bataillon se rapproche de la ligne de feu le 3 dans l’après-midi. Nous restons quelques heures en soutien derrière l’avant-garde, dispersés, pour diminuer notre vulnérabilité. Nous sommes dans les champs, où les balles perdues arrivent innombrables et où le bombardement le plus violent laboure partout le sol autour de nous. Les renseignements du combat sont médiocres : nos lignes tiennent à grand-peine devant des attaques obstinées et, sur notre gauche, des troupes harassées, déployées depuis une semaine, donnent les signes de lassitude les plus inquiétants.

 

Les compartimentages  de ce champ de bataille sont mal délimités. Il est d’ailleurs préférable qu’il en soit ainsi, car l’idée de cloisonnement nuirait à celle de liaison ; aux confins de deux divisions, nous sommes ballottés de l’une à l’autre…

 

Nous échouons, à la nuit, près de la ferme Lagache, qui résiste miraculeusement aux explosions et sert de poste de commandement au colonel d’un régiment inconnu.

 

- Vous arrivez à point nommé, dit-il au commandant ; nous sommes à bout de résistance : vous pouvez être notre salut.

 

- Je ne demande, mon colonel qu’a employer mon bataillon, mais je n’ai pas reçu d’ordre aussi catégorique. Je suis en réserve, derrière le point de jonction des deux divisions, sans être retiré au commandement de mes chefs directs…

 

À ce moment, sur la crête qui nous masque, tintamarre d’une attaque de nuit : fusillade et crépitement de mitrailleuses. Une fois de plus, selon toute vraisemblance, beaucoup de bruit pour rien. Il n’en est pas moins vrai que c’est terriblement impressionnant. Il semble que le bruit se rapproche. La valse des fusées a l’air de se précipiter sur nous. Les obus labourent le ciel de grandes balafres lumineuses. Je vois comme si j’y étais, la forme de ce combat de nuit, toujours semblable à lui-même.

 

On s’énerve, on tire au hasard, on approvisionne les armes, on met la baïonnette au canon. On flotte de droite et de gauche, on ne fait rien de bon, on est à la merci d’un coup de main vigoureusement mené. Pourquoi, dans ces conditions, de telles opérations sont-elles généralement stériles ? Parce que l’assaillant est encore plus en méfiance que son adversaire : il craint tout, le fil de fer, les trous d’obus, les mitrailleuses qui se déclenchent à bout portant, les baïonnettes qui hérissent les parapets, les embuscades où l’on se prend comme au piège…

 

Survient un chef de bataillon, extraordinairement excité :

 

- Nous n’y tenons plus, la limite est atteinte… Si vous ne nous renforcez pas immédiatement, c’est la catastrophe…

 

- Vous entendez, commandant ? Je vous prends sous mes ordres. Allez vous installer avec votre bataillon, à cheval sur la route de Wytschaete, pour la tenir quoiqu’il arrive. Prenez le commandement du débris de mes troupes que vous trouverez encore. Votre mission est de toute première importance. Je rends compte à vos chefs que je dispose de vous. Je compte sur vos compagnies…

 

- Compris, répond le commandant Laure.

 

On s’enfonce aussitôt dans les ténèbres, et l’on gagne la crête réputée si meurtrière. Réorganiser des unités qui ont atteint la limite de leurs forces. Assumer la responsabilité d’un secteur de combat tourmenté. Sauvegarder la liaison de deux divisions qui s’ignorent et dont les missions ne semblent nullement concordantes, tout cela en pleine nuit, c’est plus facile à dire qu’à faire. Que d’émotions en perspective…

 

La compagnie du lieutenant T…, la 11e, prend les devants. Son objectif est à l’extrême saillant de la ligne, dans une ferme en ruine, où la terreur règne, nous dit-on, depuis huit jours. D’effroyables combats l’ont faite  baptiser la « ferme tragique », c’est tout  à fait encourageant pour nos camarades qui vont s’y enfermer ! Je me trouve à leur droite, avec le fidèle entourage du commandant : nous sommes tapis au coin d’une haie, dans un fossé de la route grossièrement aménagé en tranchées. Quelques survivants de nos prédécesseurs s’y trouvent, parmi beaucoup de blessés et  quelques cadavres. Ils me préviennent que la position est atroce, car, le jour, on est vu du clocher de Wytschaete. Les artilleurs ennemis y appliquent un tir d’une impitoyable et meurtrière précision. Toutes les unités du bataillon sont ainsi réparties aux endroits les plus mauvais et il n’y a rien à dire puisque notre mission est de boucher les trous. Je plains le commandant encore plus que nous, tant sa responsabilité est lourde.

 

Aussitôt placé, je vais « en liaison » à la « ferme tragique ». Je commence à être endurci, mais vraiment, je pense défaillir tant l’horreur y est grande ! Le guide qui me précède traverse au pas de course les vingt mètres de terrain découvert nous séparant des premiers murs…

 

Nous pénétrons dans les ruines, le lieutenant T… cherche à se reconnaître au milieu de son domaine. Il rassemble toute son énergie…

 

Vraiment, il en faut ici une trop haute dose ! Ce ne serait rien s’il n’y avait que des morts. C’est le spectacle des mourants qui est le plus atroce quand on ne dispose d’aucune ressource pour leur venir en aide.

 

La compagnie s’organise dans son enfer. Les débris lui servent de barricades. Les guetteurs fouillent l’obscurité, se demandant avec angoisse quel tableau le soleil leur montrera demain. A quelques mètres, les patrouilles ennemies vont et viennent, et des blessés qu’on ne peut ramasser gémissent entre elles et nous.Les prévisions pessimistes qui nous avaient accueillis, n’étaient qu’une faible image de la réalité, et nous pouvons en juger dès le lendemain matin.

 

Notre saillant est vu et battu de partout. L’ennemi nous terrorise avec du « 150 percutant » dont l’effet moral nous ébranle jusqu’à l’affolement pendant deux jours. Les « 105 fusants »nous accablent et plongent jusqu’au fond de nos trous leurs horribles éclats. En demi-cercle, des mitrailleuses sont braquées et cherchent à nous coucher dans des tombes où nous sommes descendus comme pour y attendre le coup fatal. La « ferme tragique »est littéralement écrasée, nul ne peut plus se permettre d’en approcher…

 

Sous la rafale, je vais porter au commandant un compte rendu de la situation ; à côté de son poste, vers le coin de la haie qui sert de repère au tir, un factionnaire est affaissé sur son arme, adossé contre un tronc d’arbre qui le retient en équilibre…J’ouvre la bouche pour l’invectiver et lui faire observer vertement que ce n’est pas l’heure de dormir… J’aperçois ses yeux vitreux où filtre un dernier rayon de vie, un mince filet de sang qui coule de son cou sur sa capote… Je retourne à mon trou, ramenant un infirmier pour soigner mes blessés… »

 

Du côté des Allemands: 

 

Casque_bavarois_de_r_serve__calque_Historique du R.I.R. n° 20 bavarois. 

 

La défense des R.I.R. n° 17, 21 et 22 bavarois contre les assauts ennemis dirigés sur Wytschaete: 

 

Le 3 novembre, la brigade Kiefhaber s'est décidée à ordonner une nouvelle attaque. Pour cela du R.I.R. n° 22 bavarois doit déboucher par surprise, dès 7 h 45 du matin, de Wytschaete et gagner le bois situé un peu à l'ouest du village. En raison de l'importance des forces ennemies qui sont en présence  et qui sont parfaitement soutenues par leur artillerie, les éléments bavarois engagés n'ont pas pu progresser.

 

Ils ont simplement réussi à repousser  les contre-attaques ennemies venant de ce côté-là. Au matin du 3, le R.I.R. n° 17 bavarois se rend de la Toreken-Ferme à Wytschaete. Il y a pour mission de prendre (il est en collaboration avec le R.I.R. n° 22 bavarois qui lui est engagé à sa droite), les boqueteaux situés de part et d'autre de la route à Groote Vierstraat.

 

À sa gauche, la liaison est assurée avec le 9e grenadiers de la 3e D.I prussienne. À 7 h 45 le 1er bataillon du 17e de réserve bavarois pénètre dans le bois. Il se heurte à une résistance solide et voit bientôt son élan se briser. En effet, la troupe engagée à sa droite s'est trouvée rapidement dans une situation très précaire. Elle n'a pas pu suivre. Il faut alors mettre le 2e bataillon du 17e de réserve bavarois à la disposition du 8e de réserve qui lui se bat au nord de Wytschaete.

 

Plusieurs compagnies du 3e bataillon du R.I.R. n° 17 qui sont tenues en réserve vont  renforcer le 1er bataillon qui est violemment pris à partie à l'intérieur du bois. En début de soirée, tout le régiment s'est trouvé engagé dans les affrontements. Le 17e de réserve est alors replié sur Wytschaete où il lui est attribué la partie ouest de la localité qu'il doit mettre en état de défense. Pour cela une compagnie du 9e grenadiers  fut placée sous ses ordres.


 

Dès 10 heures du matin, l'ennemi lance d’importants contingents  contre la lisière nord de Wytschaete. Cette attaque venant du nord a pu être repoussée par les 8e et 21e de réserve bavarois. Dès 6 heures du matin, du R.I.R. n° 21 (sans son 3e bataillon), est cédé pendant la nuit à la 5e brigade d'infanterie bavaroise qui a beaucoup de mal à se maintenir face aux attaques ennemies constamment renouvelées.

 

Ces dernières visent la lisière ouest de Wytschaete qui se trouve alors à la bordure opposée (est) de la localité. Vers 10 heures, le 2e bataillon du même 21e, accompagné par la section de mitrailleuses du régiment, a pu s'intercaler dans le front du 8e de réserve près du moulin à vent. Il se défend contre les attaques vigoureuses venant du nord-ouest. 
 

Le 1er  bataillon du 21e chargé de mettre en état de défense la lisière nord de Wytschaete, arrive à son tour pour contribuer à faire échouer les attaques ennemies. Il prolonge l'aile droite du front allemand avec deux de ses compagnies. Une brèche ouverte à droite en direction de du R.I.R. n° 5 bavarois, a pu être colmatée tant bien que mal dès 11 heures du matin, par le 2e bataillon du R.I.R. n° 17. Ce bataillon doit par ailleurs parvenir à atteindre les maisons les plus septentrionales de Wytschaete. Mais là il doit  s'immobiliser à cause d'un tir très vif d'armes légères en provenance du bois. Au soir, le R.I.R. n° 21 est retiré du front pour bivouaquer à l'est de Wytschaete.

L'engagement du R.I.R. n° 20 dans la journée du 3 novembre 1914:

À l'aube du 3 novembre, les trois bataillons de notre régiment ont été rassemblés près de L'Enfer. L'Oberstleutnant Götz, jusque-là commandant du 2e bataillon, vient de prendre le commandement du régiment. Son ancien bataillon est désormais sous les ordres de l'Oberst-leutnant Jägerhuber. Le régiment a pour mission d'empêcher une poussée française planifiée à partir de la lisière nord de Wytschaete et plus au nord-ouest. Mais dans le courant de la matinée, les unités de la brigade Kiefhaber engagées devant nous ont déjà réussi à rétablir la situation au moyen d'une contre-attaque. Notre régiment est donc dispensé et n’intervient pas à son tour. Le ciel ne nous est pas favorable, il pleut des cordes.

 

Tremblant de froid, les hommes du 20e sont accroupis dans leurs trous individuels et ils se posent des questions sur l'effet des obus qui explosent dans les alentours. Lorsque les nuages porteurs de pluie et le brouillard ont finalement disparu dans le courant de la matinée, le panorama du champ de bataille apparait dans toute sa réalité. Il n’y a que des prés, des haies, des champs de betteraves et des maisons étirées jusqu'à l'infini. Voilà les environs de cette localité qui s'appelait Wytschaete ! L'activité de l'artillerie des deux belligérants reprend et devient de plus en plus vive.

 

Le tir de shrapnels effectué par les Français s’avère particulièrement désagréable.

 

Suite à un ordre du régiment qui arrive à midi, notre 1er bataillon s'est placé le long de la route de Messines à Wytschaete. Derrière lui, les 2e et 3e bataillons sont prêts à s'élancer dans une attaque sur Wytschaete-est. On y soupçonnait alors l'ennemi d'avoir réussi une pénétration profonde dans la localité par le nord-est, en venant de la route d'Ypres. Nos 2e et 3e bataillons doivent se placer pour cela à l'est de la route de Wytschaete.

 

Ils sont proches d'une ferme isolée située au sud de la Torreken- Ferme dans laquelle s'était installé l'état- major de notre régiment.

 

Nos bataillons subissent un bombardement violent effectué par les pièces les plus modernes de l'artillerie française en ce temps (obusiers Rimailho de 155). Ils doivent entreprendre leur mouvement depuis L'Enfer vers le nord-est, donc vers la droite. Ils se trouvent sur un terrain entièrement sous contrôle de l'ennemi. Terrain sur lequel ils offrent en plus leur flanc. Cela s’avère très coûteux en vies humaines, dès l'instant où les hommes débouchent les uns après les autres de la tranchée qui jusque-là, leur avait permis de se couvrir.

 

Depuis bien longtemps déjà, un feu roulant ennemi est venu s'abattre sur le lieu de rassemblement de notre régiment. L'abondance des munitions pour artillerie dont dispose notre adversaire est alors confirmée. Tout simplement par le fait qu'en cet après-midi, un officier artilleur, parti seul en reconnaissance, est poursuivi longtemps par des obus ennemis lorsqu'il courait à travers champ, sur un terrain dégagé. Jamais notre artillerie n'aurait pu se permettre un tel gâchis !

 

Pendant que nos 2e et 3e bataillons restent en réserve. L'attaque du 1er est lancée dès 13 heures. Elle gagne du terrain de façon substantielle. Nous avançons par bonds successifs qui sont plutôt longs. Nous pénétrons dans la localité pour ensuite atteindre la colline située un peu plus à l'est. Les batteries du Res. F.A.R. n° 6 sont en position de tir sur un terrain plat à l'est de la route principale qui relie Messines à Wytschaete. Elles envoient des salves de six obus à la fois sur les lisières sud-est et est de Wytschaete.

 

Nous sommes soutenus par notre excellente artillerie de campagne qui a réussi à placer  plusieurs pièces directement derrière les rangs de nos fantassins. Il a été possible de combattre avec efficacité les nids de mitrailleuses établis dans les paquets de maisons. Mais nos pertes sont inévitables. Une grêle de balles s'abat sur les assaillants. Elles proviennent des rangées de maisons de la lisière est du village. Quelques heures seulement après le déclenchement de l'attaque, son objectif est déjà atteint. Mais à ce moment-là s'abat sur nous le feu d'une artillerie ennemie ultra lourde. Il s'agit de pièces de marine anglaise qui sont placées au Kemmel.

 

Elles envoient leurs marmites sur Wytschaete. Avec un hurlement terrible, celles-ci s'abattent sur la localité et projettent des pierres, du feu et du soufre un peu partout. Les tirs sont bien ajustés. Dans les rues nettoyées par  l'occupant ennemi nos réserves se bousculent derrière la troupe combattante, tout comme les fourgons et les autres voitures. Il s'y propage alors un chaos généralisé. Tandis que les obus éclatent toujours, la confusion devient omniprésente. De nombreux hommes perdent la tête et s'enfuient. Des chefs courageux, comme l’ Hauptmann de Landwehr Rentsch et le Leutnant de réserve Rudolph, parviennent finalement à endiguer ce mouvement de fuite qui a déjà pris des proportions inquiétantes en certains endroits.

 

Soudain, le bruit se propage que le drapeau de notre 1er bataillon a disparu. Son porte-drapeau, l'Unteroffizier Mundel de la 3e compagnie qui est sur le point de se soulager a transmis l'emblème pour quelques minutes à l'un des hommes qui l'accompagnent. À ce moment-là, il a seulement remarqué qu'un obus lourd vient d'éclater parmi son groupe. Le soldat qui avait la garde momentanée du drapeau gît mortellement blessé en bordure de la route d'Oosttaverne. Le drapeau lui-même reste introuvable. L'Unteroffizier Mundel court alors dans toutes les directions à sa recherche, en dépit de la canonnade qui est toujours vive.

 

Visiblement, cet ancien de l'active cherche la mort pour se laver de l'affront subi. Finalement, au bout d'une heure de vaines recherches, un blessé couché en bordure de route, lui indique la présence d'un tissu bleu-blanc ayant atterri dans un entonnoir d'obus. Tout en pleurant de joie, Mundel prend dans ses mains le drapeau perforé par de nombreux éclats et il jure en son for intérieur de ne plus jamais s'en séparer. Une fois sa respiration retrouvée, il se présente devant son chef de bataillon, le Major von Loefen, pour lui annoncer ceci: Porte-drapeau présent avec drapeau blessé ! - le Major von Loefen, adoré par ses volontaires de guerre, vient alors d'être blessé à son tour et il doit faire ses adieux à l'Unteroffizier avec ses mots: Porte-drapeau! Jusqu'à ce jour vous avez parfaitement pris soin de mon drapeau. Continuez à le faire encore pendant toute votre vie. Je reviens bientôt! 
 

En attendant, tout ordre de bataille avait été perdu. L'Offizierstellvertreter Walter a pris le commandement de la 4e compagnie à la place du Hauptmann Wex, lui aussi blessé. Là où il y a encore un gradé, les hommes des compagnies d'assaut se rassemblent autour de lui. Chacun doit maintenant mener sa guerre personnelle dans Wytschaete où chaque maison l’une après l'autre devient la proie des flammes.

 

La veille, elles étaient encore intactes et dans les pièces on avait pu trouver des repas fraichement préparés. Il y avait même du café encore chaud sur les tables. Signe que les habitants étaient partis dans la précipitation. Des soldats français et anglais toujours présents refusent de se rendre. Ils sont tout simplement enfumés dans ce brasier.

 

L'église et le moulin à vent de Wytschaete brûlent comme des torches. Ce dernier a joué un rôle prépondérant dans la défense de la localité. Des civils sont encore présents dans les caves où ils se cachent. Ils ont alors fait tourner maintes fois les ailes du moulin - toujours dans la direction où les troupes allemandes se rassemblent pour lancer une attaque, là où se trouvent nos réserves.  D’où le bon ajustement du tir de l'artillerie ennemie qui nous a infligé tant de pertes sévères. C’était alors facile à comprendre ! Dès l'instant où le moulin est immobilisé, cette situation change totalement.

 

Les hommes de notre 20e de réserve se fraient  un chemin à la baïonnette entre les maisons en feu qui s'écroulent les unes après les autres. Ils atteignent finalement la lisière est du village tout en se battant toujours, malgré les lourdes pertes subies. La troupe sans chefs est occupée à faire main basse sur une réserve de vin trouvée dans la cave d'une ferme. Soudain il lui parvient le message alarmant que « Franzmann » lance ses réserves dans une contre-attaque. Rendus fous par la soif, les hommes s’attaquent à des fûts bien remplis avec la hache-pique pour remplir rapidement leur bidon de ce liquide tant apprécié. Ils partent par paquets entiers en direction de l'ennemi dont les têtes faisaient déjà leur apparition sur le terrain. Très rapidement les premières maisons grouillent de soldats anglais et français, et le glacis en est parsemé à son tour.

 

Le tir de destruction qui est déclenché juste à temps par notre artillerie épargne aux défenseurs la mort ou la captivité.

 

Plus tard dans l'après-midi, des éléments d'un régiment de grenadiers de la 3e D.I. prussienne viennent à leur secours, la baïonnette au canon. L'issue de ce combat doit finalement pencher en notre faveur. L'ennemi a alors cherché son salut dans une fuite rapide.

 

Ainsi finit cette journée si agitée. À 18 h 00, nos 1er et 2e bataillons se rassemblent à l'est et à l'ouest de la petite route qui mène à la Torreken-Ferme. Nous nous attendons en effet, pour le lendemain matin à une reprise du tir dévastateur de l'artillerie ennemie.

 

Bien plus tard, nos combattants ont pu être ravitaillés par les cuisines roulantes d'une unité prussienne. Les nôtres restent toujours introuvables. Notre 3e bataillon a été désigné un peu plus tôt, pour constituer la réserve de l'armée à Oosttaverne. Après une nuit relativement calme, les deux autres bataillons partent à leur tour pour Oosttaverne le 4 novembre dès 7 h 45. Ils profitent alors du brouillard matinal et arrivent à destination à 8 h 45.

 

Ils doivent attendre d'autres instructions sur place. Les deux bataillons s’enterrent sur le lieu de leur rassemblement derrière la position déjà occupée par notre 3e bataillon. La position du 3e bataillon se trouve à l'est d'Oosttaverne et au nord-est de la route qui relie cette localité à Hollebeke.

 

Il fait alors front vers le nord-ouest. Le 2e bataillon se trouve à sa droite, échelonné en arrière, derrière les 3e et 1er bataillons, et il est tenu en deuxième ligne derrière le 3e.

 

Les quelques tranchées et trous d'avant-postes déjà présents sont alors renforcés afin d'être à peu près sécurisés contre les tirs de balles ennemies. En effet, on tire constamment sur nous depuis un boqueteau situé au nord de cette position. Ces tirs nous infligent des pertes. Nos patrouilles ont pu identifier des tireurs français. Il s'agissait sans doute d'hommes qui avaient perdu leur unité.

 

Ainsi est venue la quatrième nuit qu'il faut passer à l'air libre. Le temps de novembre est exécrable et il faut rester dans des tranchées bien provisoires et dans des trous individuels.

 

Le 5 novembre, notre régiment a de nouveau passé toute la journée en ce même lieu, toujours dans ses tranchées qu'on continuait de renforcer et d’approfondir.

 

Il se trouve, en effet, toujours en disponibilité, au service de la 25e D.I. prussienne qui faisait partie du "corps Gerock". Le tir d'armes légères en provenance du boqueteau précité devenait de plus en plus fréquent sans qu'on puisse y repérer l'ennemi avec une précision quelconque. Nos pertes étaient donc en constante augmentation. Une  balle trouvée sur le terrain se révélait être un projectile doum-doum, et certaines de nos patrouilles prétendaient même y avoir reconnu la présence de civils.

 

Au soir, notre 20e de réserve (sans son 2e bataillon) quitte les lieux pour prendre du repos en cantonnant à Comines. Fatigués à l’extrême par les énormes efforts accomplis, les hommes se sont alors écroulés sur place dès leur arrivée aux quartiers. La faim est oubliée, il faut seulement dormir, dormir et encore dormir !

 

Le 2e bataillon est désigné, suite à un ordre du colonel du R.I.R. n° 21 bavarois, pour accomplir la mission spéciale suivante :

 

« Le boqueteau au nord-est de Wytschaete se trouve toujours occupé par l'ennemi. Le bataillon prendra cette nuit possession de ce bois.» Cette désignation d'un objectif certainement très difficile à prendre a été accueillie par l'état-major du bataillon avec des sentiments plus que mitigés. En effet, la troupe est  insuffisamment instruite. Comment peut-elle attaquer et occuper au cinquième jour de son engagement au front, ce bois qui lui est totalement inconnu. Personne ne connait sa position exacte et sa constitution. Le terrain d'attaque est également inconnu en tous points. Et l'opération doit se faire sans préparation d'artillerie ni reconnaissance préalable !

 

Dès 19 heures, le bataillon s'est mis en mouvement en direction de Wytschaete pour s’approcher de son objectif. Il faut tout d'abord se mettre en contact avec le général commandant  la 5e brigade d'infanterie bavaroise.

 

Jusqu'à 22 heures, les recherches sont effectuées dans ce but, à l'intérieur de Wytschaete qui est entièrement démoli et incendié. Elles devaient rester vaines. Cela commence bien  pour nos hommes !

 

L'Oberstleutnant Jägerhuber qui commande notre 2e bataillon, déplace son unité qui attend la suite des évènements à la sortie est de Wytschaete, jusqu'au bois de Rondell au nord-ouest d'Oost-taverne. En effet, ce bois ne lui est pas inconnu. Il essaye de contacter au moins le chef du R.I.R. n° 5 bavarois. Avant de partir, chaque homme a reçu un fagot fabriqué par les pionniers. Ces fagots doivent servir à incendier le bois qu'il faut prendre d'assaut.

 

À l'arrivée du bataillon qui a trouvé son chemin à travers champs  grâce à la lueur des incendies, le 5e de réserve est sur le point d'être relevé par des troupes prussiennes. Dans leur largeur d'esprit, ces dernières ont alors hautainement repoussé l'aide offerte par notre bataillon. Ce dernier - bien soulagé par l'issue de l'affaire - est donc reparti pour Oosttaverne, Wambeke, puis Warneton, avec Comines pour destination. Il arrive le 6 novembre à 3 h 15 du matin. Immédiatement on lui a désigné des cantonnements sur place. Puis chacun suit l'exemple des camarades de nos deux autres bataillons. Il n’y a plus rien d'autre à faire que de dormir !

 

Références bibliographiques :

 

Pour les Allemands :

Historiques des régiments allemands suivants :

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du I.R. n° 132. Berlin 1931.

Historique du  I.R. n° 143. Bernard & Graefe. Berlin 1935/1938.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

 

« R.I.R. Bavarois n° 20 ». Écrit en 1964 par l’association des anciens du K.B. R.I.R. n° 20. (306 pages). Ouvrage resté jusqu’à ce jour inédit provenant de la collection Herman Plote.

 

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman. Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

 

Pour les Français :

J.M.O. du 16e C.A. : Série 26 N 158/1.

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 26 N 520/10.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le « S.G.A./Mémoire des hommes».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

 

Un très grand merci à H. Plote pour les traductions des historiques allemands, ainsi qu’à M. Bordes, à  A. Carobbi, à J. Huret,, et à M. Porcher. De nouveau je viens remercier le Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes. 

1 septembre 2010

1914, secteur sud-est d'Ypres, sur les traces du 149e R.I....

                    149e_Groupe

30 octobre 1914

Les 2e et 3e bataillons du 149e R.I. se préparent à quitter l’Artois. 

 

 L’attaque sur Angres  continue sans le 158e R.I.. L’ordre est donné de procéder à la relève du149e R.I. et du 158e R.I. par des unités de la 70e division de réserve et des territoriaux.

 

 Le 149e R.I. doit laisser sur place un bataillon (le 1er) entre la chapelle et la route. Le 158e R.I. laisse aussi un bataillon (le 3e).

 

 Concernant le 149e R.I. : les unités de 1ère ligne des 2e et 3e bataillons qui occupaient la pente sud du plateau et la lisière est du bois face à Ablain-Saint-Nazaire, seront relevées par un bataillon du 360e R.I.. Les unités de 2e ligne par 2 bataillons qui ne sont arrivés que le 31 octobre au matin.

 

31 octobre 1914

 

Avec les 2e et 3e bataillons du 149e R.I.:                                     

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

La relève est effectuée sans incident pendant la nuit. Le 158e R.I. est groupé à Aix-Noulette et le 149e R.I. à Bouvigny.

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Pendant ce temps là en Belgique…

 

J.M.O. du 90e régiment d’infanterie.

 

Avec les 1er et 2e bataillons du 90e  R.I. :

 

Les troupes du 9e C.A. sont mises à la disposition du général Douglas Haig, commandant le 1er corps anglais. Elles reçoivent l’ordre de tenir à tout prix le front depuis Klein-Zillebeke inclus jusqu’au passage du canal (600 m à l’est de la route d’Ypres à Messine) ce passage inclus. Cette mission répond à la volonté du général Foch qui est d’arrêter coûte que coûte, la progression de l’ennemi dans la direction d’Ypres.

Les 1er et 2e bataillons qui étaient en réserve dans la région de Fortuin sont appelés à 4 h 00 du matin pour renforcer les lignes anglaises violemment bousculées devant Hollebeke.

Au moment d’aller gagner les tranchées, les officiers du 1er bataillon groupés vers 8 h 00 à l’entrée du village de Zillebeke pour y recevoir les ordres sont atteints par un obus percutant qui frappe mortellement le commandant Dodinot, commandant provisoirement le bataillon.

Le capitaine Gratteau (3e compagnie), le lieutenant Grosjean (4e compagnie) et le lieutenant Dorgain de Lavau ( ?) (1ère compagnie) sont aussi grièvement blessés ainsi que le lieutenant Léonard.Le commandant Lanes prend le commandement du 1er bataillon du 90e R.I. qui va prendre position à hauteur de Verbranden-Molen pendant que le 2e bataillon s’avance dans les bois à l’est de l’écluse n° 7 du canal d’Ypres. Le 90e R.I. à droite du 68e R.I. subit une terrible canonnade des Allemands.

1er novembre 1914

 

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

 

Le158e R.I. part d’Aix-Noulette pour venir à Bouvigny prêt à être embarqué ; il arrive à 16 h 00.


 

J.M.O. du 90e régiment d’infanterie.

 

Conformément à l’ordre le 1er bataillon, 4e compagnie en tête se porte dans la direction du pont de Hollebeke, écluse n° 6. Mais il doit  entre ce point et le pont détruit à l’ouest, relever les éléments de hussards anglais installés face au canal dans les tranchées. Le 2e bataillon établit de solides positions à cheval sur la voie ferrée d’Ypres à Commines.

 

2 novembre 1914

 

Avec les 2e et 3e bataillons du 149e R.I.:

 

En route pour la Belgique.

 

                     Carte_arriv_e_des_deux_bataillons___Reninghelst

 

 

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie :

 

Pont_de_PoperingheÀ 1 h 00 arrive l’ordre d’embarquer à la Bussière à partir de 2 h 30. L’embarquement ne commence que vers 15 h 00 en trois fractions de 1000 hommes qui sont transportés par l’itinéraire : Béthune, Saint-Venant, Hazebrouck, Steenvoorde, Poperinghe, Reninghelst, où par suite du mauvais état des routes et de l’embourbement, le débarquement ne s’opère qu’après 12 h 00.

 

Les T.C. et les T.R. sont dirigés sur Bailleul. Dès l’arrivée la brigade est dirigée sur Hallebast  en réserve d’armée. La brigade est au cantonnement, bivouac autour du carrefour de la route de Dickebusch.

Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« Le 2 novembre, dans la soirée, nous nous acheminons vers le combat. La division a reçu l’ordre de former coin entre Messines et Wytschaete : ce ne sera pas chose aisée, car en ces deux points, les Anglais et les Français, respectivement, viennent de perdre du terrain et cette contre-attaque dans la tenaille ne laisse pas nos chefs sans inquiétude. Le régiment d’avant-garde s’engage aussitôt et, loin dans sa direction, la fusillade éclate. Nous nous établissons aux abords de Kemmel, en évitant les maisons trop violemment bombardées. Ces explosions sont effrayantes.»

 

  

                   L_gende_carte_Ypres___2_et_3_novembre_1914_

  

                   Parcours_des_2_bataillons_du_2_au_3_novembre_1914

 

 Références bibliographiques :

J.M.O. du 16e C.A. : Série 26 N 158/1.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 520/10.

J.M.O. du 90e R.I. : Sous-série 26 N 668/14.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes ».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

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La photographie de groupe du 149e R.I. est antérieure à août 1914.

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Un très grand merci à M. Bordes et à  A. Carobbi. Je remercie également le Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes. 

27 août 2010

Ypres 1914. Un aller simple pour l'enfer...

                   Section_de_mitrailleuses_du_2_e_bataillon

Avant de commencer, je viens remercier très chaleureusement Herman Plote pour son aide et sa contribution au  travail qui va suivre. Je le remercie tout particulièrement pour bien avoir voulu prendre de son temps et partager un peu de son érudition. Après avoir effectué les recherches préalables  dans de nombreux historiques allemands, il en a traduit  les passages les plus marquants concernant le secteur « élargi » où se trouvaient les deux bataillons du 149e R.I..

 

Dans le secteur qui nous intéresse ici, le front franco-anglais, est constitué essentiellement des 1ère et 7e D.I. pour les Anglais (elles se trouvent entre Hooge et Wulverghen), des 9e et 16e C.A. avec les groupements Bouchez et Ollery et du détachement Moussy pour les Français.

 

Ces troupes ont en face d’elles le 15e C.A. alsacien (avec principalement ses 30e et 39e divisions) commandé par le général von Deimling et le 2e C.A. bavarois (avec ses  3e, 4e  et 26e divisions) commandé par le général Riter von Martini.

 

Sur ce terrain, les combats sont terribles et la mort fauche en tout sens aussi bien du côté franco-anglais que du côté allemand. Les pertes sont impressionnantes. Mêmes misères, mêmes souffrances pour le fantassin. L’agonie des hommes est la même pour tous ! Pas de nationalité, pas de frontière pour la douleur.

 

Malgré les nombreuses lacunes dues au manque de certains historiques et au regard des informations trouvées, la lecture de ce qui va suivre donnera, je l’espère, une idée somme toute assez « globale » des évènements situés au sud-est de la ville d’Ypres. La partie la plus développée  de cette recherche concernera les faits qui se sont produits entre le 3 et le 13 novembre 1914, date de décès de mon grand-oncle Camille Foignant.

 

 

Il est bien évident que les comparaisons qui pourront être faites à partir des différentes indications trouvées dans les J.M.O. français et les historiques  des régiments allemands resteront très imparfaites et très difficiles à réaliser. Les attaques et les contre-attaques sont fort nombreuses dans ce secteur et elles se déroulent sur des laps de temps très courts.

 

Vu la rapidité des déplacements de troupes, ils  ne permettent pas de situer de manière extrêmement précise les lieux et la chronologie des évènements qui permettraient d’identifier exactement quel bataillon d’un régiment français se trouvait  en face de quel bataillon d’un régiment allemand. De plus très peu, voir aucune indication n’est fournie sur les numéros des régiments ennemis qui se trouvaient en « face » dans les différents ouvrages consultés.

 

Pour complexifier la situation, ce secteur est marqué par un mélange d’unités de plusieurs corps d’armées français et par des interférences considérables entre les unités françaises et anglaises. Les déplacements, les mélanges de troupes, les envois de soutien vers la droite ou vers la gauche, ou carrément ailleurs, nous donnent un aperçu de  l’ampleur  de cette bataille. Bataille qui est  aggravée par une météo absolument exécrable, l’hiver 1914-1915 ayant été exceptionnellement pluvieux.

 

Deux bataillons du 149e R.I. affaiblis par les premiers mois de combats (effectifs inférieurs à ceux du début de la guerre) se retrouvent au milieu de cette tourmente. Les positions occupées par les 3 bataillons du régiment pour cette période sont les suivantes :

 

Le  1er bataillon resté en France, dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette jretrouvera les deux autres bataillons en Belgique à la fin du mois de novembre.

 

Après un voyage en camions de la Bussière  à  Reninghelst (Belgique) les 2e  et 3e  bataillons du régiment se séparent dès le 3 novembre 1914.

 

Le 2e bataillon se rend dans le secteur de Verbranden-Molen. Il va être associé à deux bataillons du 90e R.I. qui appartiennent  au groupement  Moussy (ils sont eux-mêmes détachés du 9e  C.A.). Le 3e bataillon quant à lui, est engagé avec des éléments du 158e R.I. et le 3e B.C.P. du côté de Wyschäete avec le groupement Lanquetot.

 

La localisation exacte des compagnies des deux bataillons du 149e R.I. reste encore une tâche ardue à réaliser.

 

Malgré les longues « théories » des unités sur le front et les incessants « chassés-croisés » des différents régiments, j’ai essayé d’approcher au plus près les derniers instants de vie de Camille Foignant et de ses proches compagnons d’infortune dans cette grande marée humaine. Les évènements évoqués nous rappellent une fois de plus l’appétit de la « Grande Faucheuse » pendant l’année 1914. Des milliers d’anonymes, de « sans-grades », de simples « biffins », les oubliés de la grande histoire, ont perdu la vie très jeune pour la pire des aventures de l’homme qui porte le nom de « guerre » sur la terre belge.

 

Avec toutes mes excuses pour les inévitables erreurs qui pourraient s’être glissées dans ce travail, en particulier pour l’orthographe des noms des  lieux et des personnes, ainsi que celles qui pourraient se trouver dans les cartes construites de manière «artisanale »…

 

Une petite explication des évènements qui précédent l’arrivée des éléments de la 43e D.I. avec les deux bataillons du 149e R.I. permettra de mieux comprendre  la situation sur cette partie du front belge.

 

Carte_Ypres_1914Du côté des Français :

 

La VIIIe armée d’Urbal est créée le 20 octobre 1914. Dénommée dans un premier temps «détachement d’armée de Belgique », elle est destinée  à agir de concert avec l’armée belge qui s’était retirée sur la ligne de l’Yser. Elle comprend la 42e D.I., la brigade des fusiliers marins Ronarc’h, les 87e et 89e divisions territoriales et le 2e corps de cavalerie de Mitry. Le 9e C.A. est rattaché à cette VIIIe armée qui n’en est encore qu’à son stade embryonnaire.

 

 

Deux secteurs et deux périodes sur le front belge sont à distinguer. Tout d’abord le secteur de l’Yser (bataille de l’Yser du 23 au 30 octobre 1914 en collaboration avec l’armée belge et britannique) qui ne sera pas évoqué ici puisque le 149e R.I. n’y a pas combattu, puis le secteur d’Ypres (bataille d’Ypres du 30 octobre au 15 novembre 1914 en collaboration avec l’armée britannique).

 

 

Au fil du temps de nombreuses unités viendront grossir cette armée avec entre autres les 16e C.A, 32e C.A. et 20e C.A. et le 1er corps de cavalerie Conneau. Le 16e C.A., qui recevra  dans ses rangs les éléments de la 43e D.I. à la date du 3 novembre, arrive en Belgique dans les derniers jours d’octobre.

La 31e D.I. combat du côté de Langemarck et la 32e D.I. du côté de Wytschaete. De nombreux groupements sont également créés dans ce secteur. Il y a parfois des mouvements d’unités entre ces différents groupes en fonction des nécessités des attaques et des contre-attaques. Voici  la composition (pour l’infanterie), certainement incomplète de quelques-uns d’entre eux  autour de la date du 3 novembre 1914 :

 

Groupement Moussy :

2 bataillons du 68e R.I. (1er et 3e bataillons).

1 bataillon du 268e R.I. (6e bataillon).

2 bataillons du 90e R.I. (1er et 2e bataillons).

1 bataillon du 149e R.I. (2e bataillon).

 

Groupement Olleris :

10e B.C.P..

31e B.C.P..

1 bataillon de Zouave. (5e bataillon du 4e Régiment de Zouaves de Marche).

1 bataillon de coloniaux. (7e bataillon colonial du Maroc).

53e R.I..

1 bataillon du 80e R.I. (3e bataillon).

 

Groupement Boucher :

1er et 54e B.C.P..

143e R.I..

2 bataillons du 342e R.I..

2 bataillons du 15e R.I. (1er et 3e bataillons).

1 bataillon du 80e R.I. (1er bataillon).

 

Groupement Lanquetot :

3e B.C.P..

1 bataillon du 149e R.I. (3e bataillon).

1 bataillon du 80e R.I. (2e bataillon).

2 bataillons du 158e R.I. (1er et 2e bataillons).

 

Du côté des Allemands:

 

Le 10 octobre 1914, le général von Beseler annonce la chute de la forteresse belge d'Anvers. Le gros de l'armée belge parvient à s'échapper vers l'ouest.  Lille capitule le 12 octobre. La nouvelle 4e armée commandée par le duc Albrecht de Wurttemberg est composée des XXIIe, XXIIIe, XXVIe et XXVIIIe C.R..

Elle est débarquée à l'ouest de Bruxelles, à partir du 12 octobre. Cette armée a également à sa disposition  le VIIe C.R. et la 4e division d'ersatz (le tout sous les ordres du général von Beseler). Elle attaque  la position fortifiée des Alliés (Anglais, Français et Belges) sur le canal de l'Yser et à Ypres. Au terme de combats acharnés et  très sanglants, qui sont  livrés  entre le 20 et le 24 octobre 1914, les Allemands gagnent une ligne partant du sud de Nieuport, qui passe devant Dixmude et Merckem, puis devant Bixschoote et Langemarck. Des éléments du corps Beseler et du XXIIe C.R. ont  pris pied sur la rive occidentale de l'Yser.

 

En attendant, il s’est formé au sein de la 6e armée, le "groupe von Fabeck". Ce dernier est composé du XVe C.A., du IIe C.A. bavarois, de la 6e D.R. bavaroise, des 3e et 26e D.I. prussiennes et de la 11e brigade de Landwehr. Ce groupe est doté de 32 batteries d'artillerie lourde. Il se trouve alors derrière la Lys, sur une ligne reliant Menin à Deulemont. De là, il doit s'élancer à l'attaque de la position ennemie entre Gheluvelt et Messines.

 

Le déclenchement de cette offensive est fixé pour le 30 octobre 1914. Simultanément, la 4e armée doit attaquer plus au nord et la division de la garde plus au sud, avec le soutien de la 4e D.C. et de la 6e armée.

 

Les Allemands comptent alors sur une percée décisive de la part du "groupe von Fabeck". Lorsque les Belges se sont trouvés sous la menace d'être contournés par l'aile droite des armées allemandes, ils décidèrent d’ouvrir  les écluses du canal de l'Yser dans la nuit du 29 au 30 octobre. L'arrivée massive d'eau de mer provoque alors une telle inondation que les éléments de la 4e armée allemande qui avaient déjà gagné la rive occidentale de l'Yser doivent être ramenés (les 31 octobre et 1er novembre). Désormais, les Allemands ne disposent  plus d'assez d'espace pour effectuer de nouveaux mouvements enveloppants d'envergure. 
 

Anticipons ici sur les évènements à venir en précisant que suite à l'épuisement général des belligérants, la tentative de percée allemande échoue. Il en est de même pour celle qui a été préparée par le général Foch, commandant en chef des forces alliées présentes depuis le 4 octobre. 

 

Cette dernière ayant pour objectif d'enfoncer la ligne Thourout - Roulers – Courtrai, fut mise à exécution dès le 1er novembre 1914. Mais très vite, le flanc nord du front occidental se fige et c’est une guerre de positions qui va prendre le dessus. Le IIe C.A. bavarois est désigné pour participer à ce grand affrontement en première ligne. Il avait été avancé depuis Péronne afin de s'élancer en partant de la région de Comines, en direction des deux châteaux de Hollebeke.

 

Le 30 octobre, premier jour de l'offensive allemande, la 4e D.I. bavaroise comprenant les I.R. n° 5 et n° 9 et les  R.I.R. n° 5 et n° 8 (tous bavarois), parvient à occuper les hauteurs à l'ouest de Zandvoorde ainsi que le château oriental de Hollebeke. La 3e D.I. avec ses I.R. bavarois n° 17, 18, 22 et 23s'est emparée du château occidental de Hollebeke et de son vaste parc ; cela grâce à un assaut nocturne mené par la brigade d'infanterie du Generalmajor Clauss qui a engagé ses deux régiments d'infanterie (les n° 17 et 18). À la droite du IIe C.A. bavarois, la 39e D.I. du XVe C.A. qui a également sous ses ordres le 1er B.C.P. bavarois, prend Zandvoorde avant midi.

 

Par contre, l'occupation de Gheluvelt où se bat le R.I.R. n°16 bavarois au sein du XXVIIe C.R., échoue. À  la gauche du même IIe C.A. bavarois, l'aile droite de la 26e D.I. occupe Wambeke. Mais là aussi, son aile droite extérieure a dû se contenter de gagner les hauteurs au nord-est du village face à Messines résolument défendu.

 

Les combats du 30 octobre ont également démontré l'importance jouée par la chaîne de collines entre Wytschaete et Messines. Sans leur occupation préalable, aucun nouveau progrès ne parait encore possible. C'est pourquoi le "groupe Fabeck" oriente l'essentiel de sa poussée du 31 octobre sur la partie sud du terrain d'opérations du IIe C.A. bavarois. Ce corps doit étendre son aile gauche vers le sud pour prendre la localité de Wytschaete.

 

Cette opération doit ensuite permettre à la 26e D.I. qui se trouve à sa gauche, d'occuper la majeure partie du village de Messines  qui s’est transformé en véritable forteresse, ceci au terme d'un violent combat de rue et de barricades mené par son I.R. n° 125. Mais ses voisins de droite et de gauche se sont trouvés contraints d'infléchir leurs ailes extérieures sous un  feu de flanc dévastateur qui provient de Wytschaete et du bois de Ploegsteert.

 

Les 30 et 31 octobre, les Allemands arrivent  à repousser  le front ennemi vers Ypres, en particulier près de Hollebeke. La résistance ennemie va alors s’intensifier, grâce aux nombreux boqueteaux grands et petits, aux fossés remplis d'eau, aux haies très denses et qui sont pleines de fil de fer, mais aussi à cause des localités et des fermes qui sont très étendues et éparpillées. Cette terre de Flandres s'avère extrêmement défavorable pour mener à bien les attaques. Mais Wytschaete doit absolument tomber, car il est impossible de conserver Messines…

 

Sources

 

« R.I.R. Bavarois n° 20 ». Écrit en 1964 par l’association des anciens du  K.B. R.I.R. n° 20. (306 pages). Ouvrage resté jusqu’à ce jour inédit provenant de la collection Herman Plote.

 

« Deux ans de commandement sur le front de France » Tome II. Général A. Dubois. Paris Henri Lavauzelle. (290 pages) 1921.

 

 

J.M.O. du 16e C.A. : Série 26 N 158/1. Consultable sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes ».

 

Un très grand merci à M. Bordes, à  A. Carobbi, à J. Huret et à H. Plote. Je remercie également le Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes et l’association « Bretagne 14-18 ».

6 août 2010

Témoignage de Louis Cretin : un "jus" bien désagréable !!!

                  Caf__Louis_Cretin  

 De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet. Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « Entre Suippes et Souain." 

Le 17 septembre, après une nuit mouvementée, passée dans les feuillées… Je quitte Suippes le soir avec un camarade (Arthur Gigant qui décèdera en 1923 suite aux gaz), pour aller faire la liaison avec les postes de secours des bataillons installés à Souain. Le marmitage était particulièrement violent ce jour-là sur la route. Nous décidons de faire un détour par les bois, mais dans la nuit, nous nous égarons. Nous sommes abrutis par le bombardement qui sévit partout avec une grande intensité. C’est seulement au petit jour que nous retrouvons notre chemin. Nous gagnons le village en rasant le talus de la route. Nous trouvons notre lieutenant-colonel dans son P.C. Il se reposait sur un tas de cailloux. Il nous ordonne d’activer, car dans quelques instants, ce sera impossible une fois le grand jour venu… Arrivés aux premières maisons, nous respirons un bon coup. Mon camarade ayant dans sa musette une tablette de café et du sucre, nous nous faisons un « jus » pendant que les balles et les obus font rage autour de nous. Une marmite démolit la cloison voisine où nous nous trouvions. Le coin devenait malsain. Nous trouvons le temps de  passer notre café au travers d’un mouchoir pas très propre. Une petite bouteille de vinaigre provenant du magasin d’alimentation de Suippes, et qui voisinait dans le sac à dos avec le mouchoir s’était cassée dans l’une de  nos chutes successives. Le « jus » avait un drôle de goût. Nous l’avons tout de même bu en faisant de sérieuses grimaces. Ensuite nous partons visiter les postes de secours des bataillons. En passant près de l’église, plusieurs fusants éclatent dans les marronniers de la place. Nous nous crûmes touchés. Les fruits détachés par l’éclatement des obus nous tombaient dessus. Mais rien que des marrons, pas d’éclats. Nous trouvons deux blessés au poste du 2e bataillon. Notre mission étant terminée, nous cherchons à rentrer. Ce ne fut pas facile. Nos blessés que nous nous portions sur le dos ralentissaient notre marche. À tout moment, il fallait se plaquer au sol pour se préserver des éclats quand éclataient les obus. Pour sortir de la zone dangereuse d’environ 200 m, nous avons mis au moins une demi- heure. Nous regagnions Suippes ensuite assez vite. Nous avons fait monter nos blessés sur des caissons d’artillerie venus ravitailler une batterie avancée. Le 19 septembre, une attaque allemande cerne nos troupes qui se trouvent dans Souain. C’était mal connaître nos hommes. Au lieu de se rendre, ils firent tant et si bien que le soir, les Allemands avaient évacué la place avec des pertes énormes ne laissant entre nos mains que 160 prisonniers. Le soir, ignorant que la situation était rétablie, nous partons de Suippes le brancard sur l’épaule avec en plus des musettes remplies de cartouches. Nous trouvons sur la route, le cycliste du major qui nous fait savoir que nous pouvons y aller sans crainte. Les Allemands étaient rejetés au-delà de leurs tranchées de départ. Le régiment fut enfin relevé le 1eroctobre. Ceux qui restaient, à peine la moitié de l’effectif avaient néanmoins une flamme d’orgueil dans le regard. Si nous n’avions pas rejeté l’allemand à la frontière, nous avions tout de même contribué à gagner une grande bataille. À sauver Paris et la France de l’invasion. Le régiment en entier fut cité à l’ordre de l’armée.

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à T. Cornet et à C. Fombaron.

24 juillet 2010

Témoignage de Louis Cretin : entre Suippes et Souain.

                 Groupe_149e_R

De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet. Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « Indicibles souffrances ».

 

Que dire également des fatigues de la marche ! Faire 30 à 40 kilomètres, parfois davantage par 24 heures, sans manger, sans boire pendant 8 jours et nuits. De plus, nous étions chargés comme des mulets. Cela parait impossible et pourtant nous l’avons fait. Les pieds gonflés, remplis d’ampoules, ensanglantés, nous marchions, nous marchions… Dès que nous nous arrêtions quelques instants et que nous repartions, il semblait que nous marchions sur des aiguilles. Lorsqu’il pleuvait, nos pieds étaient transformés en éponges. Au soleil, le cuir des chaussures durcissait. Un soir, nous avions fait un feu de fagots. Nos chaussures mouillées se rétrécissaient au point que le matin en repartant, plusieurs soldats furent obligés de se déchausser et de marcher pieds nus ou  entourés dans des manches de chemises. Les jambes étaient raides comme des barres de fer. Les mollets douloureux. Les cuisses paraissaient détachées des os. Les reins brisés par le poids du sac, les flancs meurtris par l’équipement et les musettes… Les épaules sciées par les courroies. La tête en feu, nous marchions, nous marchions sans trêve. Quand la pluie tombait dans la nuque, elle mouillait la chemise. Au retour du soleil, l’étoffe mouillée de nouveau par la transpiration ressemblait à de la toile émeri. Ajoutez à cela ; le souci de se garer des balles et des obus, vous aurez une petite idée du martyr que nous avons subi. J’étais un gars de l’active. Deux années de service militaire m’avaient entraîné. Mais que dire des hommes de 35 à 43 ans reçus en renfort aux environs de Wassy, à Pont-Varin et Attancourt le jour où commençait pour nous cette course d’endurance. Et pourtant, ils tinrent le Carte_Suippes_Souaincoup, comme nous. Il n’y eut pas de trainards. Voilà les poilus de la Marne pris dans notre régiment. Après quelques instants de repos à Suippe, le régiment part en avant-garde. A Souain, il se trouve arrêté par une résistance inattendue et sérieusement organisée. La fusillade crépite, les mitrailleuses allemandes tirent sans discontinuer sur nos colonnes engagées dans le village et sur la route. Heureusement qu’elles tiraient un peu haut, sans cela nos pertes déjà élevées auraient été plus lourdes encore. Surpris, nos poilus se déploient en tirailleurs en attendant le jour pour pouvoir juger de la situation. Notre poursuite est suspendue (nous le pensions du moins, croyant la reprendre le lendemain matin). La musique descend avec le médecin-chef à Suippes pour installer le poste de secours régimentaire. Le pays continue à brûler. Un des nôtres découvre dans un magasin d’alimentation presque entièrement détruit, des vivres. Passant par le soupirail de la cave intact, il rapporte deux bidons de vin, un litre d’huile et de la farine. Il n’eût pas fait bon y être pris ! Le bruit courut par la suite que des hommes surpris à ramasser (je ne dis pas piller) des marchandises vouées à la destruction furent sérieusement punis. Ils passèrent en conseil de guerre. On ajoutait qu’il y eut des blessés par balles de révolver tirées par  un de nos officiers. Toujours pas de pain. Avec la farine nous confectionnons des « beignets » cuits dans l’huile. Nous mangeons et nous faisons la distribution de pinard. Un quart fut suffisant. Nous n’en aurions pas supporté davantage tellement nous étions affaiblis.  Nous nous endormîmes complètement ivre. Le matin, nous nous occupons des soins donnés aux blessés et de leur relève. Il y avait beaucoup de travail, car ils étaient très nombreux. Il nous fut impossible de rentrer dans le village de Souain tant le tir était intense. Les Allemands nous dominaient et chaque homme qui se montrait, servait immédiatement de cible. En visitant les boqueteaux  environnants. Nous assistions à l’installation de plusieurs de nos batteries de 75. Les chevaux étaient dans un état lamentable. Étant à la « corde », ils dormaient debout, appuyés les uns contre les autres. Ils étaient couverts de plaies, remplis de mouches, de vrais squelettes. Ils n’avaient pas été à la noce non plus ! Ce jour-là, nous avons été ravitaillés en abondance. Nous avons touché de tout. À la nuit nous pénétrons dans Souain et nous évacuons les blessés jusqu’au matin. Dorénavant, il en sera de même chaque nuit jusqu’à la relève. À présent, nous mangeons à notre faim et buvons à notre soif. Mais les fatigues persistent. Cet excès de nourriture survenant après tant de privations eut un effet déplorable. Le 16 septembre, c’est un repas complet pour nous !!! Des brancardiers divisionnaires nous remplacent dans notre travail. On boit ! On mange ! On dort. Nous nous réveillons et nous recommençons. On boit ! On mange ! Et ainsi de suite toute la journée. Nos cuisiniers n’arrêtent pas. Ils furent tout le temps dans leurs marmites. (A suivre...)

 

La photographie de groupe du 149e R.I. est antérieure à août 1914.

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à T. Cornet et à C. Fombaron.

7 juillet 2010

Témoignage de Louis Cretin : indicibles souffrances.

Carte_photo_2

De nouveau tous mes remerciements à D. Browarsky et à T. Cornet. Suite du témoignage de Louis Cretin intitulé « Une Gorgone Sarrysienne ».

 

 La semaine qui vient de s’écouler du 7 au 14 septembre inclus fut pour mon compte personnel, la plus pénible. Ce fut la plus dure de toute la campagne. Nous avons terriblement souffert de la faim, de la soif, du manque de repos, de la chaleur, de la pluie et d’un épuisement physique complet. Même à présent, je me demande comment nous avons pu supporter tout cela. Vraiment, la résistance humaine a des ressources insoupçonnées. Il est vrai que le facteur moral a dû jouer un rôle primordial. Il est probable que si au lieu d’être les poursuivants nous avions été  les poursuivis, avec toutes ces misères nous serions tombés aux mains de l’ennemi. D’abord la faim, et cela pendant 7 jours. Nous avons simplement touché une boule de pain au moment de partir de Carte_Cuperly__La_CheppeWassy… Le 10 septembre, nous recevons un peu de  café et une ration de légumes. C’est tout !!! Pendant les opérations mouvementées du début de la campagne, et par la suite, à chacun de nos déplacements dans un secteur nouveau éloigné du précédent, nous avons été souvent plusieurs jours sans ravitaillement. Cela tient  à nos changements journaliers et rapides. La plupart du temps, notre train régimentaire ne pouvait pas nous atteindre. De plus, en tant que brancardiers, nous sommes souvent répartis par équipe de 4 hommes dans des compagnies souvent éloignées les unes des autres. Nous ne pouvons pas, dans ces conditions toucher nos distributions. Pendant la bataille de la Marne, nos convois de vivres ne nous trouvèrent qu’une seule fois, près de Dampierre. Cela, juste avant la poursuite des Allemands. Ce que nous avons reçu fut plutôt maigre … Du café, du sucre et une ration de légumes, lesquels ne furent jamais cuits. Nous avons connu la faim… Pour chercher à la tromper, nous mâchions des feuilles d’arbres le plus souvent… Très heureux quand nous trouvions une plante de rhubarbe dans un jardin. (Mais le camp de Mailly n’est pas, à proprement parler un potager.) Ce régime pouvait être efficace pour une personne obèse, mais il n’est pas recommandé pour les troupes en campagne. La soif, ah la soif ! Ça, c’est le plus terrible. Marcher sous un soleil ardent et n’avoir rien à boire… La gorge est sèche, plus de salive. Les puits que nous rencontrions étaient souillés. Défense était faite d’y puiser de l’eau. La souffrance était d’autant plus atroce que tout le long du trajet, des bouteilles de champagne vides jalonnaient notre route. Nous étions heureux quand il pleuvait. Nous sucions nos pans de capote, ou l’extrémité des toiles de tente. Nous essayions de recueillir quelques gouttes dans nos bidons en formant une gouttière. Après, nous n’en avions que plus soif. Nous aurions bien aimé plonger la tête dans de l’eau fraîche et boire goulument, longuement, très longuement. Pour apaiser la soif, nous utilisions un truc qui était assez efficace, qui consistait à mettre un petit caillou dans la bouche, cela maintenait un peu de salive. C’est tout ce que nous pouvions faire. Le manque de sommeil et de repos est pénible également. Marcher de jour cela passait encore, mais de nuit c’était plus dur. Machinalement nous fermions les yeux. Quand un arrêt se produisait, nous allions buter la face dans le sac ou l’ustensile de campement de celui qui nous précédait. Sitôt arrêtés, nous nous couchions par terre et le sac comme oreiller, sans même le déboucler. Nous ronflions immédiatement comme dans un lit bien moelleux. En fait de lit, ce n’était souvent qu’un tas de cailloux. (À suivre …)

La photographie de groupe a été réalisée avant le début du conflit.

Un grand merci à M. Bordes, à D. Browarsky, à T. Cornet et à C. Fombaron.

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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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