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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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15 janvier 2013

4 août 1914.

                 Anozel

Le capitaine Altairac de la 4e compagnie doit partir faire une reconnaissance dans la direction de Sarupt à la suite d’un ordre reçu par le général Lanquetot commandant la 43e division. Il est 4 h 50. L’officier emprunte un itinéraire qui passe par la cote 520 située au nord-ouest de la station de Saint-Léonard et par la cote 532. Sa mission consiste à reconnaître le chemin qui mène de Vanémont à Sarupt. Il doit également évaluer les vues et les positions de tirs possibles sur la Meurthe et sur la région de la rive droite. Il rejoint son régiment à 8 h 30.

À 5 h 00, c’est au tour du lieutenant Panchaud de la 8e compagnie de faire une reconnaissance en direction d’Anozel. Il a pour charge d’observer le chemin de Vanémont et la cote 382 qui se trouve au nord de Sarupt et d’Anozel. Il doit surtout mesurer la viabilité des positions pour l’artillerie, et trouver les endroits les mieux situés entre Anozel et Claingoutte. Ces positions permettraient d’avoir une vue d’ensemble sur la Meurthe et la rive droite. Il est de retour à 9 h 30.

                 Carte_journee_du_4_aout_1914

                                      Legende_carte_journee_du_4_aout_1914

Les reconnaissances sont appuyées par deux demi-sections. La première, venant de la 4e compagnie, est poussée sur le mamelon, à 800 m au sud-est de Sarupt. La seconde, composée d’éléments de la 1ere compagnie, se dirige vers la cote 532 qui se trouve à 1000 m au nord de Sarupt. À 8 h 00, le régiment reçoit un nouvel ordre provenant du général de division. Le 1er bataillon quitte Vanémont et la Côte pour se porter sur Anozel avec ses 1ere, 3e et  4e compagnies. Il doit assurer l’organisation défensive du col d’Anozel, cela, dans l’hypothèse d’une attaque par le pont de Saulcy-sur-Meurthe, entre le massif du Kemberg et celui de Hennefête. Le bataillon est accompagné de la 1ère section de mitrailleuses et d’une voiture d’outils renforcée. La 2e voiture d’outils devra le rejoindre aussitôt après l’arrivée du 2e échelon. 

Le travail débute à 11 h 30, sur un front qui est limité, au nord, par la croupe incluse qui se trouve entre le rein des cailloux et les Censes, battant le ravin des Censes,  au sud par la croupe nord-ouest de Claingoutte battant le ravin de Claingoutte. L’ordre est donné au 3e bataillon du commandant Didierjean d’envoyer sa 10e compagnie au village de la Côte. Les 3 autres compagnies du bataillon rejoignent  Vanémont, elles se gardent vers Taintrux et Chastel. Tous ses mouvements se font à partir de 10 h 00.

Un ordre est donné au 2e bataillon, il doit laisser sa 8e compagnie en soutien  d’artillerie vers la Houssière. Les 3 autres compagnies se rendent à la ferme des Echères pour remplacer le 3e bataillon. La mise en œuvre de cette action doit commencer à 9 h 00.

Une demi-heure plus tard, le 2e échelon du régiment composé essentiellement de réservistes, arrive à Vanémont, et amène le 149e R.I. à son effectif de guerre. Il est constitué de 19 officiers, de 72 sous-officiers et de 983 hommes de troupe soit un total de 1074 personnes. 

                         Composition_2e_echelon_

Les 1er et 2e échelons sont maintenant rassemblés en trois bataillons d’environ 1000 hommes, constitués eux-mêmes par quatre compagnies de 250 fantassins. Le reste de l’effectif se composant de la C.H.R., du personnel de l’état-major du régiment, de la garde du drapeau, etc.…Le régiment est maintenant composé de 60 officiers, de 181 sous-officiers et de 3148 hommes de troupe soit un effectif de 3389 personnes. 

Une partie de ce 2e échelon se dirige aussitôt sur Anozel pour rejoindre le 1er bataillon.

La 2e compagnie quitte enfin Docelles à 15 h 30. Elle se  trouvait toujours dans ce secteur depuis son départ de la caserne Courcy. Le capitaine Crépet, qui la commande,  reçoit l’ordre de s’arrêter dans le petit village de la Chapelle. Avec ses hommes, il a pour mission de protéger le débarquement du 2e échelon du 59e R.A.C.. Ce dernier arrivera dans la nuit entre 22 h 00 et 2 h 00. Par la suite, ils devront l’escorter jusqu’à la Houssière en suivant la route qui passe par Biffontaine. Cette compagnie rejoint la gare de la Chapelle à 16 h 30.

Le commandant du 1er bataillon doit maintenir sa 4e compagnie à Anozel pour la nuit. Les 2 compagnies restantes du bataillon se portent à Taintrux où elles s’installent pour cantonner.

Le Ravitaillement pour cette journée se fait à la gare de Corcieux à partir de 9 h 00.

Dans la soirée, cinq jeunes officiers nouvellement promus se présentent au régiment ; les sous-lieutenants Charlois, Cholley et de Longeaux arrivant de la promotion Saint-Cyrienne de Montmirail et les sous-lieutenants Dargent et le Brigant venant de la promotion Saint-Maixentaise de la mobilisation, devront attendre le lendemain pour leurs affectations aux compagnies. 

JLes différents ordres provenant du C.A. ou de la D.I. qui ont été donnés au 149e R.I. peuvent se consulter dans le J.M.O. du régiment. Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l'image à gauche. 

 

 

Pour en savoir plus sur les capitaines Philippe Altairac et Henri Panchaud, il suffit de cliquer une fois sur les deux images suivantes :

                                     Philippe_Altairac

                                    Henri_Panchaud

Sources bibliographiques :

J.M.O. du 149e R.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 696/8.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/9.

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées. 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à G. Gehin, à É. Mansuy, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

8 janvier 2013

3 août 1914.

                 La_Houssiere

Dans la nuit de lundi au dimanche, le régiment reçoit l’ordre de se tenir prêt à quitter ses cantonnements. Le 149e R.I. et les 3e et 4e groupes du 59e R.A.C. qui sont sous l’autorité du plus ancien des deux colonels, doivent se mettre en route pour aller de Bruyères à la Houssière. Ce détachement se rassemblera à l’est de la Houssière, et devra se couvrir face à l’est, de façon à pouvoir marcher soit sur le Plafond par Corcieux, soit sur Anozel, qui se trouve à 1800 m ouest de Saulcy-sur-Meurthe, en fonction des besoins.

Le détachement quitte Bruyères à 7 h 50 dans l’ordre suivant : P.I. passage à niveau 500 m au sud-ouest de la station de Bruyères.

                 Composition__journee_du_3_ao_t_1914

Le régiment suit un itinéraire qui passe par Les Poulières et par Biffontaine.

                 Carte_journee_du_3_aout_1914__1_

                                     legende_carte_matinee_du_3_aout_1914

 À 11 h 45, le 149e R.I. s’établit en rassemblement articulé à l’est de la Houssière. Le 2e bataillon est à la ferme Bertrimoulin à 1500 m au sud-est de la Houssière en se gardant vers l’est et le sud-est. Le 3e bataillon se pause à la ferme des Echères, située à 1500 m à l’est-sud-est de la Houssière). Il se couvre vers l’est en assurant la liaison avec les 1er et 2e bataillons. Le 1er bataillon et un groupe du 59e R.A.C. se positionnent à la sortie nord-est de la Houssière. Ce bataillon pousse sa 1ère compagnie jusqu’à Vanémont. 

Le poste de commandement du colonel Menvielle s’installe également à la ferme des Echères. 

À 16 H 30, le colonel reçoit un ordre télégraphique qui lui a été communiqué par la 43e D.I.. Ce télégramme lui fait savoir que l’interdiction relative à la zone neutre est levée, mais qu’il est toujours interdit de passer la frontière. 

À 17 h 00, le régiment reçoit l’ordre de prendre les cantonnements suivants :

L’E.M., la C.H.R. et les 3e et 4e compagnies partent  à Vanémont. Ces unités se gardent vers le tunnel et Chastel. La 1ère compagnie va à la Côte, se gardant vers Ruxurieux et la forêt de Hennefête. Le 2e bataillon lui, va cantonner à la petite Houssière et la partie sud de la Houssière depuis l’église. Le 3e bataillon se retrouve aux Echères-Bertrimoulin, gardant le carrefour de la route Vanémont- Corcieux. Les batteries du 59e R.A.C. s’installent dans la partie nord de la Houssière. Le T.R. s’arrête à la sortie nord-ouest de la Houssière. 

                 Carte_journee_du_3_aout_1914__2_

                                      Legende_carte_journee_du_3_aout_1914__2_

Les différents ordres provenant du C.A. ou de la D.I. qui ont été donnés au 149e R.I. peuvent se consulter dans le J.M.O. du régiment. Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l'image suivante : 

                                                 J

Sources bibliographiques :

J.M.O. du 149e R.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 696/8.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/9.

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées. 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à É. Mansuy, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

25 décembre 2012

Le grand départ.

À Gilbert Monne,

                 Mobilisation_generale

Je dédie tout le travail qui va suivre sur plusieurs semaines à Gilbert Monne, une des toutes premières personnes à m’avoir fait confiance et à m’avoir encouragé lorsque j’ai commencé ce blog.

Le 149e R.I., qui fait partie des troupes de couverture, doit quitter ses lieux de casernement quelques heures avant l'ordre de la mobilisation générale. La mobilisation générale permet de faire passer la force militaire nationale du temps de paix à celui du temps de guerre. Une fois celle-ci décrétée, le plan XVII est mis en route afin de concentrer les troupes face à l’ennemi et engager les opérations.

Pour éviter toute « attaque brusquée » de l’adversaire pendant la période de concentration, les troupes casernées à la frontière forment un rideau défensif appelé « couverture ».

Le 26 juillet 1914, le 149e R.I. est en manœuvre sur le terrain du camp du Valdahon.

Ce camp se situe dans le département du Doubs à 140 km au sud d Épinal. Les permissions sont supprimées et le régiment doit rentrer d’urgence pour regagner ses quartiers à la caserne Courcy. 

Le 27 juillet 1914, le soldat Armand Henriot raconte dans une lettre destinée à son père, le retour du 149e R.I. dans ses cantonnements spinaliens. La pluie est au rendez-vous et la troupe n’est pas ménagée. Malgré les évènements décrits, Armand se veut rassurant pour l’avenir.

                 Armand_Henriot

Épinal, le 27 juillet 1914 

Cher père, 

Je suis déjà de retour à Épinal. Nous sommes restés guère plus d’un jour là-bas. Arrivés samedi après-midi, nous sommes repartis lundi à 2 heures du matin pour Épinal par le train qui est arrivé à 1 heure de l’après-midi. Nous étions dans des wagons à bestiaux. Il n’y faisait guère bon, il n’y avait pas de place, nous étions 55 dans notre wagon. 

                 Gare_du_Valdahon

 Nous avons eu de la pluie tout le temps du voyage. Au Valdahon, c’était encore pire. Il ne fait pas bon là-bas quand il pleut, c’est plein d’eau et de boue. Il faisait froid, la nuit on était couchés par terre sur une paillasse avec un polochon de paille et une couverture.

Je n’ai pas pu aller vous voir hier soir dimanche, nous avons été au tir jusqu’à midi. On a déjà été rincés comme il faut. Je comptais aller vous voir dimanche prochain, mais il n’y a plus moyen maintenant depuis Épinal. On a été surpris quand on nous a dit qu’il fallait déjà repartir. Le général a reçu une dépêche dans la soirée de réintégrer la brigade de suite dans sa garnison. Ça a fait un beau branle-bas de combat de tout remonter pour partir, surtout qu’il pleuvait à verse. Quand on a été embarqués, nous étions tout trempés.

Le 158e est rentré aussi à Bruyères. C’est une mesure de sécurité en-cas où la situation s’aggrave, mais, jusqu’ici, il n’y encore rien de grave. C’est à cause de l’Autriche et de la Serbie qui, je crois maintenant se sont déclarées la guerre. Si la Russie intervient pour soutenir la Serbie, l’Allemagne soutiendra l’Autriche qui est son alliée et la France sera obligée de s’en mêler aussi pour aider la Russie. Mais je vous le répète,  jusqu’ici, il n’y a encore rien de grave et il faut croire qu’il n’arrivera rien. Ce sont des mesures de précaution qu’il faut prendre. Je vous envoie une carte du Valdahon, je n’ai pas pu vous l’envoyer depuis là-bas. Il pleut ici aussi. 

Je me porte assez bien et je vous embrasse tous.

 Armand  

À cette période, le 149e R.I. est composé de 41 officiers, de 109 sous-officiers et de 2165 caporaux et soldats, soit un total de 2315 hommes. 

                       Tableau_1_premier_echelon

                     Tableau_2_premier_echelon

Ce régiment forme une brigade avec le 158e R.I.. Cette brigade qui porte le numéro 85 est elle-même rattachée à la 43e D.I. qui avec la 13e D.I., forment le 21e C.A..    

                         Carte_frontiere_2

                                      Legende_carte_frontiere_aout_1914

 Une forte partie des troupes de couverture de la frontière de l’est furent concentrées par mesure de précautions dans les tout derniers jours de juillet 1914. Dans l’après-midi du samedi 1er août, la mobilisation est décrétée. Un régiment d’active comme le 149e R.I.est déjà en route. Il s'apprête à rejoindre la ligne virtuelle marquant la zone neutre qui se trouve entre elle et la frontière. La France a adopté une position défensive. Les Allemands franchiront la frontière les premiers. 

                 Caserne_Courcy      

                        Le temps des manœuvres est terminé. Le 149e R.I. à rendez-vous avec son destin.

 Jeudi 30 juillet 1914

Dans la soirée, un ordre est donné à la 2e compagnie. Cette dernière, une fois complètement mobilisée, devra partir par voie de terre. Elle assurera la garde de la voie ferrée qui s’étend du village d’Arches au pied du tunnel de Bruyères.                   

 Vendredi 31 juillet 1914

                  Carte_journee_du_31_juillet_1914_ 

                                       Legende_carte_1__aout_1914

Dans la nuit, à 3 h 00, le 149e R.I. reçoit l’ordre de se mobiliser. Il doit se tenir prêt à quitter le dépôt à 7 h 00.

À 5 h 30, la 2e compagnie, sous l’autorité du capitaine Crepet, se rend par voie de terre sur la commune de Docelles. 

En début de soirée le régiment reçoit communication d’un télégramme qui est ainsi conçu « Faites partir les troupes de couverture. L’heure d’origine de la mobilisation des troupes de couverture est 19 h 00. » 

Samedi 1er août 1914

Tôt dans la nuit, les 1er et 3e bataillons du 149e R.I. quittent la caserne Courcy pour se rendre à la gare. Le jour n’est pas encore levé que les quais sont déjà en pleine activité. Après les adieux aux familles pour les plus chanceux, les derniers éléments du 3e bataillon montent dans le train qui est prêt à partir. Il est 4 h 30, destination gare de Bruyère ou il doit arriver à 6 h 30. La garde de police est effectuée par un officier de la 10e compagnie. Il doit s’assurer du bon déroulement  des opérations. Ce premier train embarque également l’E.M. de la 85e brigade et l’E.M. du régiment. Un peu plus tard, un second train se charge des 1ère, 3e et 4e compagnies. Son départ a lieu à 5 h 50. Il dépose les hommes du 1er bataillon dans la petite gare de Laveline-devant-Bruyères, il est  6 h 30. 

                 Gare_de_Laveline_devant_Bruyeres

En milieu de matinée, un 3e train doit transporter le 2e bataillon. Ce dernier quitte la gare spinalienne à 10 h 10. Il  arrive en gare de Bruyères à 12 h 15.

Une fois arrivé à destination, le régiment se pose dans les cantonnements.

L’E.M., la C.H.R., les 2e et 3e bataillons s’installent dans Bruyères. ; La C.H.R. se retrouve au centre, le 2e bataillon dans la partie sud-est et le 3e bataillon dans la partie nord-ouest de la commune.

La 1ère compagnie et les sections de mitrailleuses vont s’établir dans la partie nord-est de Laveline-devant-Bruyères. À quelques encablures, les 3e et 4e compagnies posent les « l’as de carreaux »  à la Chapelle.

 Il est 17 h 15, le régiment reçoit communication par l’intermédiaire de la 85e brigade d’un télégramme du ministre qui est ainsi libellé : « Ordre de mobilisation générale. Le 1er jour de mobilisation est le 2 août (deux août) » 

                 Carte_journee_du_1er_aout_1914

                                     Legende_carte_2__aout_1914

Dimanche 2 août 1914 

À la mobilisation, l’appel des réservistes est combiné de telle sorte qu’en quelques jours le régiment d’active reçoit un nombre suffisant d’hommes pour compléter son effectif du temps de paix. (2e échelon).  Une fois ce 2e échelon mis sur le pied de guerre, il part pour la zone des opérations, où il rejoint le 1er échelon. Les autres réservistes, en fonction des classes, arriveront au fur et à mesure au dépôt du régiment pour assurer le remplacement des pertes. 

La troupe occupe les mêmes emplacements que la veille. 

Sources bibliographiques :

J.M.O. du 149e R.I.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 696/8.

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/9.

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919.

Guides illustrés Michelin des champs de batailles « l’Alsace et les combats des Vosges, 1914-1918, volume 1, 1920.

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées. 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à É. Mansuy, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

1 février 2012

À tout jamais le grand silence...

Voici maintenant en guise de conclusion quelques remarques sur les pertes du régiment durant son passage dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette en octobre 1914. 

                                   Tableau des tués dans le secteur du bois de Bouvigny

                  Tableau des blessés et des disparus dans le secteur du bois de Bouvigny

Les trois graphiques suivants, accompagnés de quelques observations, ont été réalisés à partir des listes précédentes.

                 Tableau_des_pertes_generales_octobre_1914

Ce premier tableau donne une vue d’ensemble des pertes globales du régiment durant son 1er séjour en Artois. Les tués et les décédés des suites de leurs blessures sont représentés en rouge, les blessés en vert et les disparus en orange. Les journées du 9 et du 19 octobre restent les plus meurtrières pour le 149e R.I..En additionnant tous les chiffres, nous obtenons un total de  80 tués, de 100 blessés et de 14 disparus. 

Les hommes décédés dans les hôpitaux français de l’arrière sont, pour la plupart, comptabilisés dans la colonne « 01/11/14 au 16/12/14 ».

Les deux graphiques suivants nous indiquent l’état des pertes par compagnie. Le premier, concerne les tués et les décédés des suites de leurs blessures dans les hôpitaux, le second concerne les blessés.

                  Tableau_des_tu_s_octobre_1915

                  Tableau_des_bless_s_secteur_Lorette_1914

À la lecture de ces deux tableaux, nous pouvons constater que les 3e, 5e et 11e compagnies sont les plus éprouvées. Seule la 5e compagnie a participé réellement à une attaque partielle en collaboration avec un bataillon de chasseurs le 19 octobre 1914, ce qui explique son nombre élevé de victimes pour cette journée.

 Quelques hommes possèdent une sépulture individuelle dans les Nécropoles nationales françaises et dans les carrés militaires suivants :

                              Tableau des sépultures dans le Pas-de-Calais (année 1914)

Je rappelle que toutes ces données doivent être lues comme des résultats approximatifs.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

18 janvier 2012

Premiers pas en Artois (4e partie).

                 Groupe_149e_R

À partir de cette date, le secteur devient plus calme pour le 149e R.I.. Seule la 5e compagnie sera engagée dans une attaque partielle avec le 3e B.C.P. le 19 octobre 1914. 

12 octobre 1914

Le 1er bataillon du 149e R.I.est relevé de ses emplacements de la veille par le 20e B.C.P. et reçoit l’ordre de rejoindre le reste du régiment dans le bois de Bouvigny. Vivement bombardé à son passage à Aix-Noulette, il est obligé de traverser la localité par petits groupes

Il arrive dans le bois de Bouvigny pour s’installer en réserve à la maison forestière. Le régiment est maintenant reconstitué. L’organisation défensive du plateau de Bouvigny est divisée en 3 secteurs. : le 1er bataillon reste en réserve à la lisière est du bois de Bouvigny. Le 2e bataillon est réparti de la manière suivante : la  5e compagnie est dans les tranchées nord-est de Notre-Dame-de-Lorette, la 6e compagnie dans les tranchées est et sud-ouest de Notre-Dame-de-Lorette et les 7e et 8e compagnies sont en réserve à la lisière nord du bois de Bouvigny.

Le 3e bataillon a pour mission d’organiser et d’occuper le centre du plateau face à Ablain-Saint-Nazaire. 

13 octobre 1914

Une compagnie et ½ du 1er bataillon relève le 1er B.C.P. à la lisière sud-est du bois de Bouvigny, face à Ablain-Saint-Nazaire. Le reste du bataillon est en réserve sur les mêmes emplacements que la veille. La situation reste stationnaire pour les deux autres bataillons. Nuit sans incident. 

14 octobre 1914 

Le 1er bataillon du 149e R.I. et la 7e compagnie relèvent le 2e bataillon sur ses positions. Il est disposé de la manière suivante : la 3e compagnie est au nord de Notre-Dame-de-Lorette, la 4e compagnie sur les pentes sud de Notre-Dame-de-Lorette, la 2e compagnie en soutien d’artillerie, la 1ère compagnie en réserve et la 7e compagnie à la lisière est du bois de Bouvigny, cote 102. Ce bataillon est relié à droite par le 1er B.C.P. et à gauche avec un bataillon du 21e R.I. qui occupe le village de Noulette. Le 2e bataillon du 149e R.I. reprend ses bivouacs dans le bois de Bouvigny. Le 3e bataillon garde les mêmes emplacements que la veille. La nuit reste calme.

15 octobre 1914

Le lieutenant-colonel commandant le 149e R.I. doit quitter le secteur du régiment pour recevoir de nouvelles instructions de la part du général de division concernant la prochaine attaque sur Ablain-Saint-Nazaire. 

16 octobre 1914

Le 1er bataillon du régiment reste aux avant-postes de Notre-Dame-de-Lorette. Les 7e et 8e compagnies sont en réserve dans le bois de Bouvigny. Elles doivent appuyer l’attaque du 3e B.C.P.. La 6e compagnie occupe les tranchées à la lisière est du bois de Bouvigny. Elle est en liaison à sa gauche avec le 3e bataillon du 149e R.I., à sa droite avec le 1er B.C.P..

La 5e compagnie est en réserve à la maison forestière. Le 3e bataillon du 149e R.I. continue sa mission dans le 2e secteur du bois de Bouvigny.

Le général Dumézil rentre de Saint-Pol. L’E.M. de la brigade est transféré à Bouvigny (le château).

Le 149e R.I. renforce sa position. Le 158e R.I. est engagé en 1ère ligne à Vermelles. 

                  Chapelle_de_Notre_Dame_de_Lorette_d_tuite

17 et 18 octobre 1914

Situation inchangée.

Pour le dimanche 18 octobre 1914, voici une anecdote extrêmement dramatique qui rappelle que la guerre n'est vraiment pas belle, concernant le 149e R.I.. Elle a été trouvée dans le livre « la gloire divin mensonge» d'Albert Garnier soldat au 144e R.I.T.. Elle n'engage que l'auteur sur l'analyse de la situation.
« À 23 h 00, une note du commandant du régiment m'annonce que ma compagnie est mise dès cette nuit à la disposition du général Dumezil et ordre m'est donné de partir à 11 h 30 pour la Faisanderie sur le plateau de Lorette afin d'aider à améliorer des éléments de tranchées au-dessus du fond de Buval.
Décidément, je ne moisis pas à Bouvigny et on semble avoir à l'état-major du régiment de bien
bonnes dispositions pour moi !

Nous partons, chargés comme des mulets, et cette compagnie que je ne connais pas encore, que je commande depuis quelques heures à peine, grogne un peu. Je vais de section en section, j'explique aux hommes qu'il faut faire contre mauvaise fortune bon coeur; ils le comprennent vite et tout s'arrange rapidement.

En montant la côte très dure qui nous mène à la faisanderie en passant par la forestière, nous rencontrons un tombereau conduit par un soldat du 149e R.I. accompagné d'un infirmier. Dans ce tombereau il y a quelques bottes de paille et sur cette paille, une fillette d'une douzaine d'années qui a été trouvée dans une tranchée que vient de prendre aux Allemands le 149e R.I.. Nous entendons les gémissements de cette malheureuse enfant. L'infirmier m'explique qu'elle est comme folle et qu'elle se trouve dans un état pitoyable ; les brutes allemandes qui l'ont entraînée dans la tranchée l'ont abîmée...
On me dit que nos camarades du 149e R.I. ont fait payer cher leur crime à ceux qu'ils ont pincés, mais

tous les coupables ont-ils été châtiés ?

Ma compagnie émue par ce récit qui circule vite à travers les rangs, continue son ascension vers le plateau de Lorette, cependant que le tombereau avec son pitoyable chargement descende en cahotant sur l'ambulance de Bouvigny...

Là-haut, le tac-tac des mitrailleuses nous avertit que nous allons nous trouver rapidement au milieu du guêpier... » 

19 octobre 1914

La 5e compagnie participe à une attaque partielle sur Ablain-Saint-Nazaire en collaboration avec le 3e B.C.P..
Pas de changement pour le reste du régiment. 

20 octobre 1914

Le 149e R.I. continue de défendre le secteur de la chapelle de Notre-Dame-de-Lorette. 

21 octobre 1914

Situation analogue. Un bataillon du 144e R.I.T. est mis à la disposition pour la défense du P.A. de Bouvigny. 

22 octobre 1914

Le 158e R.I. est retiré de la 1ère ligne et se réorganise. La situation reste calme pour le 149e R.I.. La 2e ligne du secteur de Bouvigny doit être perfectionnée. 

23 octobre 1914

Pas de changement important ni de fait intéressant. 

24 octobre 1914

Situation inchangée. 

25 octobre 1914

Le bataillon du 144e R.I.T. est remplacé par un bataillon du 143e R.I.T. Il est destiné à la relève d’unités de la seconde ligne du 149e R.I., pour leur permettre de se reposer. Rien de particulier à signaler pour le 149e R.I.. Le 158e R.I. relève le 21e R.I. à Aix-Noulette. 

26 octobre 1914

Le 158e R.I. termine sa relève du 21e R.I.. La relève du 149e R.I. par le 143e R.I.T. a lieu à 8 h 00 en seconde ligne.

Ordre prévu pour le lendemain : regroupement de toute la brigade à partir de 6 h 30 dans le secteur route d’Aix-Noulette à Souchez exclue jusqu’au ravin au sud de la cote 102 (lisières du bois de Bouvigny). 

27 octobre 1914

Continuation des travaux dans les secteurs des 149e R.I. et 158e R.I. par les unités de 2e ligne et construction d'abris de torchis et de tranchées de communication par les unités de 1ère ligne. 

28 octobre 1914 

Bombardement allemand de Noulette.

Construction par le 149e R.I. d’une tranchée au dessus d’Ablain-Saint-Nazaire. 

29 octobre 1914

Le 158e R.I. reçoit l’ordre de participer à l’attaque d’Angres de la 13e division. Avance de200 m en avant.

L’artillerie amie tire toute la nuit pour troubler les ravitaillements ennemis. 

30 octobre 1914

L’attaque sur Angres se poursuit sans le 158e  R.I.. L’ordre est donné de procéder à la relève du 149e  R.I. et du 158e R.I. par des unités de la 70e division de réserve et des territoriaux.

Le 149e R.I. doit laisser sur place son 1er bataillon entre la chapelle et la route. Le 158e R.I. doit laisser aussi son 3e  bataillon.

Concernant le 149e R.I. : les unités de 1ère ligne du 2e et du 3e bataillon qui occupaient la pente sud du plateau et la lisière est du bois face à Ablain-Saint-Nazaire, seront relevées par un bataillon du 360e  R.I.. Les unités de 2e ligne par 2 bataillons qui ne sont arrivés que le 31 octobre au matin. 

Sources :

« Journal des marches et opérations de la 85e brigade ». S.H.A.T.. Réf : 26 N 20/10.

« La gloire, divin mensonge ». Albert Garnier, aux éditions Valois – 1931. 

Les archives du Sercive Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

Pour en savoir plus :

« Journal des marches et des opérations du 143e R.I.T.. ». S.H.D. Réf : 26 N 800/25.

 « Journal des marches et des opérations du 3e B.C.P. ». S.H.D. Réf : 26 N 816/1. 

Un grand merci à M. Yassai, à A. Carobbi, à M. Porcher, à l’association « collectif Artois 1914-1915 » et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

22 décembre 2011

Premiers pas en Artois (3e partie).

                  Carte_journee_du_10_octobre_1914

                                       Legende_carte_du_bois_de_Bouvigny

10 octobre 1914

 Une  compagnie du 149e R.I. occupe la tranchée conquise aux Allemands et la partie sud de la haie à environ 200 m face à Notre-Dame-de-Lorette. À Notre-Dame-de-Lorette, et aux abords en face de cette compagnie, il reste encore quelques éléments ennemis devant lesquels elle s’est fortement retranchée dans la nuit. La chapelle et les meules avoisinantes brûlent… 

Extraits de l’ouvrage « les combats de Notre-Dame-de-Lorette » du capitaine J. Joubert aux éditions Payot.

« Dans la nuit du 9 au 10 une attaque allemande devance celle des Français. Sur le plateau de Lorette, ce sont les Français qui prennent l'initiative de l'action. Le 2e bataillon du 149e R.I. du capitaine Pretet qui avait relevé dans la soirée du 9 le 3e bataillon, s'empare pendant la nuit d'une tranchée ennemie, au nord de la chapelle, face au 20e B.C.P.. Par cette avance, nous nous trouvons à peine à 500 m de l'oratoire. Il disparait en partie dans la grisaille du brouillard, mais les lueurs d'incendie de grandes meules de paille qui brûlent à ses côtés accusent parfois les lignes de son contour. Quand la flamme, qui couve, tout à coup est plus vive, on voit non loin de là une pièce de 77 probablement endommagée, seule, sans servants, toute noire et sinistre, qui se cabre. Les hommes retournent les parapets, approfondissent les tranchées et consolident la position. Le lieutenant-colonel Escallon demande que des batteries d’artillerie s’installent sur le plateau et dans le bois de Bouvigny pour battre Carency et Ablain-Saint-Nazaire.

À midi, il peut écrire au colonel Cheminon :

« Nous sommes les maîtres incontestés de la crête de Notre-Dame-de-Lorette. Nos tranchées font le tour du plateau. La plus à l'est est à 200 mà l'ouest de la chapelle. La tranchée ennemie est à 100 m au-delà de la chapelle. Nous organisons avec le capitaine Vautravers du 12e régiment d'artillerie, un système pour la battre, je la ferai attaquer cette nuit... »

Les troupes qui tiennent alors le plateau sont réparties comme suit : le 2e bataillon du 149e R.I. dans les tranchées devant la chapelle, dans l’ordre : 5e et 8e compagnies face à l’est, 6e compagnie face à Ablain-Saint-Nazaire. À gauche, tenant le rebord nord du plateau, en équerre par rapport au 149e R.I., face à la chapelle, quatre compagnies du 2e bataillon du 17e R.I. qui ont relevé celles du 20e B.C.P.

À la lisière est du bois de Bouvigny, de gauche à droite, la 3e compagnie du 20e B.C.P. et le 1er bataillon du 149e R.I. ; à l’intérieur du bois, le 5e bataillon du 269e R.I. et le 3e bataillon du 149e R.I.. Deux batteries du groupe Vautravers du 12e R.A.C ont pris position à la lisière est.

Un épais brouillard qui a traîné toute la matinée n’a pas permis au canon de tirer. Mais dès que le temps s’est éclairci, les tranchées allemandes du plateau ont été prises à partie, et, dans la nuit, la compagnie Pétin du 149e R.I. a « sauté d’un coup de main hardi sur la chapelle » qu’elle a occupé avec une section. » 

                  Chapelle_de_Notre_Dame_de_Lorette 

11 octobre 1914

Un bataillon du 149e R.I. occupe les tranchées sur le plateau de Lorette, un autre est sur la lisière est du bois de Bouvigny. Le 1er bataillon du régiment se trouve du coté de Marqueffles. 

Extraits du livre « Lorette une bataille de 12 mois » d'Henri René aux éditions Perrin et cie.

« Aujourd’hui, reconnaissance. Le 2e bataillon a fait ses deux jours de service, il a eu la peine de creuser les premières tranchées dans un terrain très dur. Il avait d’ailleurs hérité de notre situation de fin de combat, ce qui n’est jamais très drôle : c’est à nous de reprendre nos places.

Les camarades ont bien travaillé pendant ces deux jours : au nord, le 1er bataillon a relevé les chasseurs et a commencé à construire des «guitounes» pour ses compagnies de réserve sur les pentes du plateau, vers Marqueffles, car, si on reste sur ce terrain, on en sera réduit à vivre sous terre comme les taupes ! Quant au 2e bataillon, dès 22 h 00, il a sauté d’un coup de main hardi sur la chapelle qu’il occupe maintenant avec une section ; et, la nuit dernière, il a relié ce poste avancé au coin sud de la haie par de petites tranchées de demi-sections, échelonnées en arrière et à droite.

Tout cela ne constitue pas une position très solide, mais il n’entre encore dans l’esprit de personne que nous soyons condamnés à « prendre position» : c’est un temps d’arrêt, nous semble-t-il, nécessité par les circonstances et pour permettre à la 1ère division d’exécuter sa manœuvre, dans la plaine usinière où nous la voyons évoluer à nos pieds, où ses canons tonnent sans arrêt, où ses bataillons doivent être en train de mordre violemment l’ennemi et de le rejeter au-delà des villes de Lens et de Liévin.

Bien des choses nous confirment dans cet espoir, et en particulier l’action de notre artillerie. Les deux batteries se sont en effet, le 10 au matin portées aussi en avant que possible. Celle du grand lieutenant a pris position, dans la pointe nord, sous le couvert des bois. De là, elle s’est mise à tirer très violemment tant sur l’est de la Chapelle, où l’ennemi travaille la terre, que sur les environs d’Ablain, où, à notre avis, les Allemands seraient fous de chercher à se maintenir, puisque nous les dominons complètement !

L’autre, celle du bois de la Haie, est arrivée ce matin et s’est installée à découvert, imparfaitement abritée des vues par la petite crête d’où avait débouché notre attaque. Il est vrai de dire qu’il lui en a coûté cher ! À peine eut-elle tiré quelques salves, que les « grosses marmites » vinrent au-devant d’elle, avec une rapidité, une précision, une sûreté qui resteront longtemps présentes à notre  mémoire : quatre coups courts, quatre coups longs, quatre coups au but …

 Nos pièces disparaissent dans un tourbillon de bruit assourdissant et de lourde fumée noire. Des terres, des débris de matériel et de membres humains sont projetés en l’air à une très grande hauteur… Lorsque ce chaos s’aplanit, on aperçoit, parmi les officiers ou servants qui se retirent étourdis, deux canons désemparés, faussés, gauchis, dont l’un est lamentablement couché sur le flanc, par suite de la pulvérisation d’une des roues, un caisson bouleversé et boiteux, un autre caisson qui « saute » par explosions saccadées et brutales.

Les corps d’une demi-douzaine de servants tués ou grièvement atteints gisent parmi les décombres, et quelques blessés s’éloignent horrifiés vers le poste de secours le plus proche…» 

Sources :

« Journal des marches et des opérations de la 85e brigade ». S.H.D de Vincennes. Réf : 26 N 20/10.

Les archives du S.H.D. de Vincennes ont été consultées.

« Les combats de Notre-Dame-de-Lorette ». Capitaine J. Joubert, aux éditions Payot – 1939.

« Lorette, une bataille de douze mois ». Henri René, aux éditions Paris, Perrin et Cie – 1929. 

Pour en savoir plus :

« Journal des marches et des opérations du 20e B.C.P. ». S.H.D. Réf : 26 N 823/1.

« Journal des marches et des opérations du 17e R.I. ». S.H.D. Réf : 26 N 588/1.

« Journal des marches et des opérations du 269e R.I. ». S.H.D. Réf : 26 N 733/7.

« Journal des marches et des opérations du 12e R.A.C. ». S.H.D. Réf : 26 N 925/1. 

Un grand merci à M. Yassai, à A. Carobbi, à M. Porcher, à l’association « collectif Artois 1914-1915 » et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

8 novembre 2011

Les beaux rêves de vie ne sont plus.

Petite analyse des pertes du 149e R.I. dans le secteur de Souain en septembre 1914.

                                            Tableau des tués dans le secteur de Souain 

            Tableau des blessés et des disparus dans le secteur de Souain en septembre 1914

                                                    Tableau des sépultures (Souain)

Voici maintenant quelques graphiques réalisés à partir des tableaux précédents. Ils donnent une vue d’ensemble des pertes durant les attaques sur le petit village de Souain. Le régiment est particulièrement éprouvé durant les journées du 14 et du 19 septembre. La liste des disparus est très importante et les prisonniers y  sont certainement très nombreux.

                  Tableau_des_pertes_generales_du_149e_R

Le tableau ci-dessus nous montre l’état des pertes générales du 149e R.I. qui s’étalent du 10 septembre au 17 octobre 1914. Les tués sont représentés en rouge, les blessés en vert et les disparus en orange.

Aux 169 tués et décédés des suites de leurs blessures pendant les combats des 3 bataillons, il faut ajouter 1 commandant, 4 soldats de la C.H.R., 1 soldat de la 2e compagnie de mitrailleuses et 23 soldats dont les actes de décès ont été enregistrés par les tribunaux quelques années plus tard.

Il faut aussi grossir le chiffre des blessés de 8 hommes qui appartenaient à la C.H.R.. Cela nous donne un total de 198 tués, 647 blessés et 225 disparus.

Le 149e R.I. quitte la ville d’Épinal en août 1914 avec un effectif de 3330 hommes.

Je n’ai pas connaissance des chiffres exacts des effectifs réels du régiment au début de son engagement dans les combats de la Marne. Je reste  donc sur l’hypothèse que ce dernier est  composé de 3330 hommes pour effectuer mes calculs.

Les hommes sont répartis en 3 bataillons de 1000 hommes, constitués chacun par 4 compagnies de 250 hommes. Le reste de l’effectif se compose de la C.H.R., du personnel de l’État-major du régiment, etc.…

L’effectif théorique correspond au nombre supposé d’officiers, de sous-officiers et d’hommes de troupe qui composent le régiment, les bataillons, ou encore les compagnies au moment de son engagement dans les combats de septembre 1914.

Pour le 1er bataillon, nous obtenons les résultats suivants :

                 Perte_1er_bataillon_du_149e_R

1ère compagnie : 28 % de l’effectif théorique.

2e compagnie : 23,2 % de l’effectif théorique.

3e compagnie : 34,4 % de l’effectif théorique.

4e compagnie : 35,60 % de l’effectif théorique.

En additionnant les pertes des 4 compagnies du 1er bataillon, nous arrivons à un total de 303 hommes soit 30,30 % de l’effectif théorique du bataillon.

Pour le 2e bataillon, nous obtenons les résultats suivants :

                 Perte_2e_bataillon_du_194e_R

5e compagnie : 19,2 % de l’effectif théorique.

6e compagnie : 21,6 % de l’effectif théorique.

7e compagnie : 59,2 % de l’effectif théorique.

8e compagnie : 29,2 % de l’effectif théorique.

En additionnant les pertes des 4 compagnies du 2e bataillon, nous arrivons à un total de 323 hommes soit 32,3 % de l’effectif théorique du bataillon.

Pour le 3e bataillon, nous obtenons les résultats suivants :

                 Perte3e_bataillon_du_149e_R

9e compagnie : 50,4 % de l’effectif théorique.

10e compagnie : 43,6 % de l’effectif théorique.

11e compagnie : 34,8 % de l’effectif théorique.

 12e compagnie : 34 % de l’effectif théorique.

En additionnant les pertes des 4 compagnies du 3e bataillon, nous arrivons à un total de 407 hommes soit 40,7 % de l’effectif théorique du bataillon.

Petite conclusion :

Citation_SouainJe rappelle que toutes ces données doivent être lues comme des résultats approximatifs. Les 7e, 9e et 10e compagnies sont de loin les plus touchées par les combats. Le régiment « laisse sur le terrain », 32,13 % de son effectif. À cette occasion, il recevra sa première citation à l’ordre de l’armée.

De très nombreux blessés réintègreront, après avoir été soignés et envoyés en convalescence, le dépôt du 149e R.I.. Ils retourneront rapidement dans leur régiment d’origine. Plusieurs rencontreront le chemin de « la grande faucheuse » dans les terribles combats qui eurent lieu dans le secteur de Notre-Dame-de-Lorette durant l’année 1915. Certains d’entre eux auront la même destinée dans un autre régiment appartenant au 21e C.A.. Un bon nombre de ces blessés comblera les pertes du 6e R.I.C. pour y subir une fin tout aussi tragique.

Sources :

Les archives du services de la Défense de Vincennes ont été consultées.

Un grand merci à M. Bordes,  à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la défense de Vincennes.



5 novembre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 9 novembre 1914.

             Carte_journ_e_du_9_novembre_1914

                                 L_gende_carte_de_la_journ_e_du_9_novembre_1914

 Avec le 2e bataillon du 149e R.I. :

 Le groupement Vidal se trouve dans le secteur depuis la veille. Il est composé pour l’infanterie des unités suivantes :

 

2 bataillons du 32e R.I..

2 bataillons du 160e R.I..

2 bataillons du 81e R.I..

1 bataillon du 122e R.I..

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

L’ordre pour le 9 novembre prescrit de prendre l’offensive dans la direction de Klein-Zillebeke. Mais l’offensive du secteur de droite ne peut repérer les Allemands au-delà du canal. Elle ne réussit pas à rétablir notre liaison face au front d’Hollebeke et dans le bois triangulaire, dans l’angle, entre le canal et la voie ferrée.

La répartition des troupes dans le secteur est faite de la façon suivante.

Secteur de droite :

Commandant du secteur : colonel Aubert du 81e R.I..

Il dispose de :

2 bataillons du 90e R.I. : 850 hommes.

1 bataillon du 149e R.I. : 700 hommes  (2e bataillon).

1 bataillon du 122e R.I. : 800 hommes.

1 bataillon du 81e R.I. : 800 hommes.

Ce secteur s’étend, depuis le long du canal de l’écluse n° 7 bis inclus jusqu’à la voie ferrée incluse en liaison à droite avec le groupement Alexis.

Secteur de gauche :

Commandant du secteur : lieutenant-colonel Michel du 53e R.I.. Il dispose de :

12 compagnies du 53e R.I..

2 bataillons du 68e R.I. : 500 hommes.

1 bataillon du 268e R.I. : 230 hommes.

Ce secteur s’étend de la voie ferrée exclue à la droite anglaise.

Réserve générale : 1 bataillon du 81e R.I..

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

5 h 30 : L’attaque ne progresse pas, mais toutes les positions sont maintenues.

J.M.O. du 81e régiment d’infanterie.

1er et 3e bataillons du 81e R.I. :

 Le secteur de défense affecté au 81e R.I. qui va du canal sur l’Yser à la voie ferrée, est tenu par les 1er et 3e bataillons du 81e R.I., par le 2e bataillon du 122e R.I., par deux bataillons du 90e R.I. et un bataillon du 149e R.I.. Le groupement doit profiter de toutes les occasions pour chercher à  progresser dans la direction de Klein-Zillebeke. Il ne doit pas nuire à la relève de 1ère ligne. Les bataillons doivent travailler à rendre le front inviolable et à améliorer la 2e ligne. Le front est divisé en trois secteurs. Le P.C. du colonel est à la ferme Blauwe-Poort.

Du côté des Allemands :

 

Historique de l’I.R. 105.

Une section de la 3e compagnie est engagée pour couvrir le flanc du 3e bataillon qui est lui-même engagé à l’aile gauche, tandis que le reste de la 1ère compagnie occupe une brèche entre les 2e et 3e bataillons. Les 2/3 restant de la 3e  compagnie s’enterrent comme réserve du régiment au versant est du talus de la voie ferrée, à peu près à hauteur du grand virage du canal. Au soir arrive l’ordre de restituer l’I.R. 105 à la 30e D.I..  Il occupe un secteur dont l’aile droite s’appuie au coin sud du bois au sud de Verbranden-Molen. Son aile gauche au virage du canal. Au début de la nuit, la 2e compagnie, le 2e bataillon et 1/3 de la 1ère compagnie sont relevés par l’I.R.99. L’effectif de combat de l’I.R.105 est encore de 15 officiers, de 15 aspirants et de 1200 hommes de troupe.

Historique de l’I.R. 126.

Après avoir reçu de nouveaux renforts, le corps combiné Plettenberg (XVe C.A., 2e D.I. de la garde et 4e D.I.) constitue le groupe von Linsingen. Le groupe von Fabeck (avec les bavarois)  reçoit l’ordre de poursuivre l’attaque à l’ouest du canal de l’Yser à la Lys. La 30e D.I. est remplacée, à la droite du C.A., par la 4e D.I.. Elle est placée à l’aile gauche du corps où elle doit progresser entre la voie ferrée et le canal, pour soutenir l’attaque de la 39e D.I. contre Zillebeke.

Jusqu’au 12 novembre 1914, la 61e brigade réussit à prendre les ruines du petit village de Zwarteleen. Partout les unités sont fortement mélangées. Au sous-secteur de droite, environ 200 soldats de nos 1er et 3e bataillons sont mélangés avec des hommes de l’I.R.171 et de l’I.R.172. Le nombre de soldats de l’I.R.126 dans le sous-secteur de gauche, maintenant stabilisé ne peut même pas être déterminé. La météo reste mauvaise. La boue monte jusqu’aux genoux sur les chemins et dans les champs. La route de Zandvoorde est parsemée d’entonnoirs d’obus remplis d’eau. Partout, il y a des cadavres d’hommes et de chevaux. Le ravitaillement de la 1ère ligne reste précaire en permanence. Les cuisines roulantes ne peuvent avancer que dans la nuit et seulement jusqu’à Basseville-Cabinet. La route par Calvaire-Zillebeke où toute la circulation derrière le front de 5 régiments doit se dérouler est constamment sous le feu de l’ennemi (infanterie et artillerie). Les pertes y sont nombreuses. La corvée marche alors de 3 à 4 heures dans la boue, à travers champs. La soupe arrive souvent froide.

Historique de l’I.R. 132.

 

L’ordre de la division préconise à la 61e brigade d’occuper fermement le bois à l’ouest de la voie ferrée, au nord du grand virage du canal. À 7 h 00, le brouillard est si dense que nous ne voyons rien à 10 pas. La tranchée de la moitié gauche du 2e bataillon n’a pas été creusée pendant la nuit à la même hauteur que celle de la moitié droite. Elle est à 20 à 30 pas plus loin. Il  faut donc relier les deux. Vers 12 h 00, le brouillard se lève brusquement. Dans le champ de betteraves, devant la section de droite de la tranchée, à peu près à la hauteur de la section de gauche, nous découvrons une patrouille anglaise qui s’est approchée sous couvert du brouillard. Les Anglais sont pris sous notre feu. Deux hommes seulement peuvent s’échapper jusqu’à la première ferme de Zwarteleen. Ils sont retrouvés 2 jours plus tard, grièvement blessés.

Pendant toute la matinée, l’artillerie ennemie maintient un tir très violent, en dépit du brouillard. Nous pouvons réorganiser les unités et leur faire face à l’ouest, contre le bois toujours menaçant dans le flanc gauche. Il n’est pas occupé par l’ennemi, mais seulement visité par des patrouilles. Les maisons sur la lisière ouest sont fortement occupées.

Vers 11 h 00, nous communiquons qu’une attaque de la 61e brigade qui est toujours trop mélangée, venant de l’est et orientée contre le bois, n’est pas possible. Il est proposé d’engager l’I.R.105 qui vient du sud. À 12 h 00,  a été signalée l’apparition de tirailleurs français sur le talus de la voie ferrée. Il faut orienter les compagnies de l’ouest contre celles-ci.

La brigade donne ces propositions à la division ainsi que les difficultés qui peuvent se rencontrer. Celle-ci ordonne alors à 16 h 15, que l’I.R.105 prenne la partie sud du bois, la 61e brigade son tiers nord. La division se réserve encore pour fixer l’heure de l’attaque, mais elle a finalement renoncé à son exécution. Les journées du 6 et du 7 novembre ont apporté à la division 12 officiers et 730 hommes capturés (anglais et français) et la prise de 3 mitrailleuses.

Historique de l’I.R. 171.

 

L’ennemi tente à nouveau d’ébranler notre front par des tirs-surprises de son artillerie. Il essaye ensuite de le percer avec son infanterie. Malgré nos désavantages (mélange des unités, pertes élevées, épuisement total de la troupe), cela ne réussit pas. Le front tient. L’ordre de division distribué dans la soirée préconise la reprise de l’offensive pour le lendemain.

Historique de l’I.R. 172.

L’ennemi s’est tellement renforcé que la poursuite de l’attaque pose de plus en plus de problèmes. Le temps est froid et brumeux. Durant des jours, les soldats n’ont pas pu quitter leurs uniformes mouillés. 11 jours d’attaques, un ravitaillement et un repos insuffisants ont épuisé les forces des fantassins. Il faut toute l’énergie de ses officiers encore présents pour garder les sentinelles éveillées. Le regroupement est achevé le 9 novembre. Une nouvelle attaque est ordonnée pour le 10 novembre.

Avec le 3e bataillon du 149e R.I. :

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

Le 3e bataillon du 149e R.I. et les 2 bataillons du 158e R.I. partent à 10 h 00 pour se rendre à l’ouest de Dickebuch. Ils cantonnent le 9 au soir dans les fermes de Mille-kapelle et de  Millekapelleken. L’E.M. de la brigade cantonne à Millekapelleken. Les unités du 149e R.I. et celles du 158e R.I. se renforcent d’un détachement composé en grande partie de territoriaux.

À 18 h 30 le général Dumezil reçoit avis de sa nomination au commandement de l’artillerie de la 10e armée. Le colonel Trouchand du 162e R.I. est nommé commandant de la brigade. Le commandement provisoire est donné au lieutenant-colonel Escallon du 149e R.I..

Extraits de l’ouvrage « jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« Le 9, arrivée de renforts : des territoriaux de Seine-et-Marne. Ils sont cinq cents, destinés à l’ensemble du régiment. Ils sont à peine suffisants pour nous, après les pertes que nous venons de subir. Le colonel décide de nous les affecter momentanément. Nous les rendrons dans quelques jours aux autres bataillons, s’il en est encore temps. Amalgame. Refonte des effectifs et des cadres. Les capitaines I… et G… sont de retour du dépôt. Ils sont à peine guéris de leurs blessures d’août. Ils se mettent à la tête des 9e et 12e compagnies. » 

 
Du côté des Allemands:

 

Historique de l’I.R. 17e bavarois.

La poursuite de l’attaque est ordonnée. Il faut essayer d’occuper la ligne des collines qui va du canal jusqu’à Saint-Eloi. Il y a quelques succès partiels. Le 3e bataillon a ainsi pu prendre deux tranchées ennemies et faire 72 prisonniers. Le soir, les Français font une contre-attaque. Les deux tranchées sont de nouveau perdues.

Historique de l’I.R. 18e bavarois.

L’attaque est renouvelée. Nous sommes enfin parvenus à prendre la position ennemie dont le tir de flanquement nous a infligé tant de pertes. De nouveau 30 Français sont capturés. Le 3e bataillon est également engagé. Dans la soirée, nous avons pris d’assaut « la tuilerie » (Ziegelei), qui est située à environ 400 m au nord de la digue (Dammstrasse). Nous faisons 40 prisonniers. À cette occasion, le caporal Dreyer de la 10e compagnie s’est particulièrement distingué. Il a pénétré latéralement avec 3 hommes, dans la tuilerie. Dès l’instant où ces quelques hommes sont arrivés dans le coin par le devant, ils se sont trouvés brusquement confrontés à une tranchée qui est occupée par une trentaine de Français. Grâce à la décision spontanée du caporal, les occupants français se sont rendus, car ils sont très impressionnés. Le caporal Dreyer a été décoré de la médaille de bravoure en argent. La position de l’I.R.18 est maintenant très en pointe et la troupe n’a pas de liaison. Néanmoins, elle tient, et la ferme est fortifiée de tous les côtés.

L’état de la troupe, sa situation physique et sa valeur au combat s’amenuisent de jour en jour davantage. La discipline se relâche   également par manque de chefs, mais aussi parce que la troupe est épuisée par les éternelles attaques lourdes en pertes. De nombreuses maladies font leur apparition, même parmi les officiers. Le temps est particulièrement défavorable. Les épais brouillards des plaines des Flandres alternent avec les tempêtes de novembre et des journées entières de pluie. Les tranchées mal construites se remplissent d’eau. Les quelques chefs encore indemnes ont bien du mal à tenir en main les unités mélangées qui se désagrègent de plus en plus. Ces dernières  doivent faire preuve de toute leur dernière énergie. Dans ces conditions, il est compréhensible que la disponibilité de la troupe pour continuer à attaquer diminue. Les progrès deviennent de plus en plus minimes, les jours suivants.

Références bibliographiques :

Pour les Allemands :

Historique du I.R.  n° 17. Schick. München 1927.

Historique du I.R.  n° 18. Bayer. Kriegsarchiv. München 1926.

Historique du I.R. n° 105. Baensch-Stiftung. Dresden 1929.

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du I.R. n° 132. Berlin 1932.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 26 N 520/10.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

J.M.O. du 81e R.I. : Sous- série 26 N 664/10.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

Un très grand merci à M. Bordes, à P. Casanova, à  A. Carobbi, à  J. Charraud, à J. Huret, à H. Plote, à M. Porcher ainsi qu’au Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes.

1 novembre 2010

Secteur sud-est d'Ypres. Journée du 8 novembre 1914.

             Carte_journ_e_du_8_novembre_1914__2e_bat

                              L_gende_carte_journ_e_du_8_novembre_1914

 Avec le 2e bataillon du 149e R.I. : 

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

Dans le secteur de droite, le commandant de la Bastide et le capitaine Pretet (2e bataillon du 149e R.I.) viennent rendre compte vers 21 h 00 du fait que les Allemands se sont infiltrés dans le bois au sud du canal et que la ligne de défense a du être reportée en arrière.

Une attaque de nuit ne réussit pas.

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

0 h 25 : L’attaque a continué sa progression et la 1ère ligne arrive à 100 m environ de la lisière nord-ouest du bois de Klein-Zillebeke.

Le groupe de maisons de Zwarteleen est occupé par des fantassins ennemis qui prennent d’écharpe les troupes d’attaques. Une compagnie de renfort est chargée d’enlever ce groupe de maisons.

9 h 30 : Les premières lignes sont arrêtées à 100 m environ, par des tranchées ennemies depuis deux heures environ, sans pouvoir arriver à progresser davantage, par suite de la violence du feu ennemi. Ordre leur est donné de s’installer et de s’organiser, avant de pousser plus loin.

4 h 10 : La situation est la suivante : Le bataillon Saisset tout entier est déployé et est arrivé à 100 m de la lisière nord-ouest du bois de Klein-Zillebeke et il y creuse des tranchées à sa gauche, le reliant aux Anglais. Les deux compagnies du bataillon Dufor (la 9e compagnie est toujours restée à Voormezelle) renforcent la 1ère ligne des tranchées anglaises derrière le bataillon Saisset. Les 2 compagnies du bataillon Laffiteau sont en réserve et creusent des tranchées.

7 h 40 : L’ordre arrive de reprendre à 8 h 30 le mouvement offensif. Le 53e R.I. progresse dans la direction du château d’Hollebeke. Ce mouvement sera soutenu par des fractions du 90e R.I. et du 149e R.I. qui sont placées le long de la voie ferrée.

 

Malgré son extrême fatigue, le régiment, qui n’a pas eu une minute de repos depuis le 30 octobre, reprend le mouvement en avant. La progression est bientôt arrêtée de front par des feux de l’infanterie et des mitrailleuses, et en enfilade par des feux venant du nord-est de Klein-Zillebeke.

Les Anglais ont évacué toutes les tranchées entre le chemin de fer et la route.

10 h 00 : L’attaque n’a pu progresser, les tranchées anglaises ont été améliorées et réunies les unes aux autres. La progression est fortement renforcée par des travaux, mais malgré tous les efforts, il est impossible de pousser plus en avant.

12 h 00 : Les tranchées sont soumises depuis le matin à un violent bombardement, il est impossible de se montrer hors des tranchées.

12 h 00 : Le bombardement devient de plus en plus violent sur les tranchées de 1ère ligne qui sont démolies et les hommes ont les plus grandes peines à s’y maintenir.

Étant donné l’état d’épuisement des hommes, il ne peut plus être question d’attaque, si ce n’est avec des troupes fraîches ;

13 h 00 : Néanmoins, le régiment qui vient de recevoir un nouvel ordre d’attaque essaie encore une fois de se jeter en avant. Les Anglais inquiets font demander si nous tenons alors que le régiment va attaquer. Le colonel leur demande leur appui, mais ils répondent qu’ils ne peuvent attaquer et nous souhaitent « un heureux événement ».

14 h 00 : Un bombardement plus violenta complètement détruit les tranchées de 1ère ligne. Quelques hommes de ces tranchées ont reflué en arrière, par la voie ferrée, mais ils sont bientôt ramenés à leur place et la situation un instant compromise est rétablie. L’attaque est reprise.

15 h 15 : Le bataillon Dufor débouche lentement sur la gauche, en liaison avec les Anglais qui ne bougent toujours pas.

18 h 30 : Le bataillon Dufor gagne du terrain, il progresse dans le bois. Il arrive à une cinquantaine de mètres de mitrailleuses allemandes qu’il se dispose à enlever à la baïonnette, lorsque les Anglais, voyant un mouvement dans le bois, ouvrent sur lui un violent feu de mitrailleuses. Sous ce double feu, le bataillon Dufor est obligé de refluer et perd ainsi la partie du bois qu’il avait conquise.

Il se cramponne au village de Zwarteleen dont il tient les lisières, ayant à sa gauche une fraction, en liaison directe avec la droite anglaise. Sur le reste du front, la situation n’a pas changé, mais les hommes sont de plus en plus fatigués, tant par le bombardement ininterrompu, que par le manque total de sommeil depuis 4 jours.

22 h 30 : Malgré cela, un nouvel ordre d’attaque est reçu pour 23 h 30.

Le 1er bataillon devra se maintenir dans ses tranchées, et soutenir par un feu violent les 3 compagnies du bataillon Dufor, qui reçoivent l’ordre de déboucher de Zwarteleen. À la même heure, une contre-attaque sera tentée sur notre droite, entre la voie ferrée et le canal, pour repousser des infiltrations ennemies qui se sont produites dans les bois.

23 h 30 : L’attaque est tentée, mais elle ne peut pas débouchée.

J.M.O. du 81e régiment d’infanterie.

En exécution d’un ordre du général commandant l’armée, le 3e bataillon dans les tranchées de Strombeck, est mis à la disposition du général Moussy. Il se rend par Wielje, Saint-Jean, Potyze dans la direction nord de Zillebeke. Le 2e bataillon tient seul les tranchées de Stombeck.

Au matin, le 1er bataillon en réserve de division à Saint-Jean se porte également dans la région nord de Zillebeke.

Ces deux bataillons sont au bivouac, en attendant de nouveaux ordres. Le 3e bataillon est remis à la disposition du colonel commandant le 81e R.I. qui reçoit l’ordre de se porter dans la direction de la ferme Blawe-Poort, avec mission d’organiser une ligne de défense entre la voie ferrée et le canal.


Du côté des Allemands :

 

Historique du I.R. n° 105. 

À cette date le groupe d’assaut von Linsingen est constitué. Il est sous les ordres du général commandant le IIe C.A.. Ce groupe est composé du XVe C.A. et du corps combiné Plettenberg ( ?) (Garde prussienne). Le I.R. n° 105 reçoit l’ordre d’attaquer les positions ennemies dans le bois nord du grand virage du canal, à l’ouest de la voie ferrée. Pour cela, 3 compagnies du I.R. n° 132 et 2 compagnies du 15e bataillon de génie sont placées sous ses ordres.

À 13 h 15 arrive l’ordre de  déclencher l’attaque à 14 h 00. Les unités trop mélangées ne peuvent pas être réorganisées si vite. L’attaque est donc ajournée jusqu’à 15 h 00. Le régiment dépasse le talus de la voie ferrée aux roulements de tambours, tandis que sa musique placée derrière la clique joue la « marche d’attaque ». Simultanément, les mitrailleuses, qui sont engagées en position surélevée d’un talus, tirent par-dessus les troupes d’assaut, sur les positions ennemies dans le bois.

Les attaquants essuient déjà de lourdes pertes en franchissant le talus. Celui-ci est sous le feu des mitrailleuses ennemies qui tirent de flanc depuis les cotes 59 et 60. Les compagnies des 2e et 3e bataillons réussissent à pénétrer dans le bois et gagnent 200 m de terrain. Elles prennent plusieurs bouts de tranchées et font quelques prisonniers. L’attaque s’enraye en raison des pertes élevées, notamment à la suite des tirs de flanc depuis les cotes 59 et 60. Au 3e bataillon, ce tir a eu des effets les plus meurtriers. Sa 12e compagnie a réussi  à franchir le talus de la voie ferrée. Les compagnies qui sont à sa droite sont clouées sur place sur les positions de départ, par le tir de flanc ennemi. Elles ne sont pas parvenues à franchir le terrain dégagé devant leur secteur, dominé par le feu des mitrailleuses ennemies.

Pour protéger le flanc ouvert du 2e bataillon, la 2e compagnie avance et nous nous replions un peu sur cette aile. Une section de la 1ère compagnie relance l’attaque enrayée du 2e bataillon. Nous parvenons ainsi à prendre la tranchée la plus avancée de la nouvelle ligne de défense ennemie. Nous faisons des prisonniers. Puis l’attaque prend définitivement fin, suite aux pertes importantes.

Dans l’après-midi, nous engageons encore toutes les mitrailleuses du régiment en 1ère ligne ainsi qu’un canon de 77 du F.A.R. 66 à hauteur du virage du canal, sur la route reliant le château de Hollebeke à Verbranden-Molen. Il faut porter l’attaque plus loin. Mais cela reste irréalisable pour l’instant, à cause du tir ennemi très violent.

Historique du I.R. n° 126. 

Le I.R. n° 105 a pris d’assaut plusieurs tranchées françaises dans le bois entre la voie ferrée et la route de Verbranden-Molen. La 30e D.I. qui est à la droite de la 39e D.I., repousse une attaque anglaise avec de lourdes pertes pour l’assaillant.


Historique du I.R. n° 132. 

Il faut tenir la position, mettre de l’ordre dans les unités et retirer les réserves. Dans la nuit du 8 novembre, les Anglais et les Français fortifient leurs positions, surtout  sur la cote 60 à l’ouest de Zwarteleen, dans le quartier nord du village et sur son glacis. À 11 h 40, la division ordonne au I.R. n° 105 de prendre le bois à l’ouest de la voie ferrée. Elle place pour cela sous ses ordres, 3 compagnies de notre 3e bataillon (10e, 11e et 12e compagnies) près de son aile droite.

Au terme d’une préparation d’artillerie de 2 heures, l’attaque débute à 15 h 15. Elle n’a que quelques succès à l’aile gauche du I.R. n° 105. À l’aile opposée, le 3e bataillon essuie un tir frontal et de flanc. Ce tir venant du nord-ouest est si violent, qu’en dépit des réclamations permanentes du I.R. n° 105, et des instances de commandement supérieures, l’attaque s’enraye. Notre bataillon a de lourdes pertes. Le chef de bataillon est tué, les compagnies n’ont plus d’officiers. Il avait déjà été très difficile de faire sortir les hommes de la tranchée pour les faire attaquer.

Historique du I.R. n° 171.

Pour le 8 novembre, il est ordonné de tenir la ligne atteinte et d’effectuer des reconnaissances des positions ennemies. En plusieurs endroits, il tente aussi des attaques, mais sans succès. Une patrouille de reconnaissance de la 9e compagnie est capturée en totalité par les Anglais.

Historique du  I.R. n° 172.

Dans la nuit du 8 novembre, vers 1 h 00, les Anglais essayent à nouveau une attaque par surprise. Elle est repoussée aisément.

Les 8 et 9 novembre, le tir d’artillerie se poursuit.


Avec le 3e bataillon du 149e R.I. :

 

Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

«  Le 8 au matin, nous arrivons au repos à la Clytte. Voici des toits, peut-être de la paille… Hélas ! Il faut rester dehors, au bivouac dans la boue, tout est bondé. Malgré ce désenchantement, on apprécie à sa juste valeur, à défaut de confortable, le calme de l’atmosphère, la pensée que le bruit du canon restera distant de quelques kilomètres. »

Extraits de l’ouvrage « Souvenirs d’un médecin major 1914-1917.», d’Édouard Laval aux éditions Payot ((1932). 

 Souvenirs_d_un_m_decin_major« … Le 149e R.I. est au repos dans le village (La Clytte). Il l’a bien mérité, après cinq jours de tranchées.Beaucoup d’hommes ont les mains qui tremblent. Effet physique dû à l’ébranlement prolongé des centres nerveux par l’explosion des obus de fort calibre. Ces pauvres diables sont des héros. Ils circulent tranquillement, la capote toute jaune de terre, les mains gonflant les poches, la pipe au coin de la bouche. Or, en les regardant de près, on s’aperçoit que chez beaucoup d’entre eux, la capote est trouée comme des drapeaux glorieux des Invalides, que chez d’autres, c’est le képi qui est traversé, ou encore le soulier. Vestiges émouvants de la bataille dont ils ne songent guère à tirer vanité, sans doute parce qu’ils sont tous ainsi… » 

Références bibliographiques :

Pour les Allemands :

Historique du I.R. n° 105. Baensch-Stiftung. Dresden 1929.

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du I.R. n° 132. Berlin 1932.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

 

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman. Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

J.M.O. du 81e R.I. : Sous- série 26 N 664/10.

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

« Souvenirs d’un médecin-major 1914-1917. », d’Édouard Laval aux éditions Payot ((1932). 

Un très grand merci à M. Bordes, à  A. Carobbi, à J. Huret, à H. Plote, et à M. Porcher. De nouveau je viens remercier le Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes. 

22 octobre 2010

Secteur sud-est d'Ypres, journée du 7 novembre 1914.

                   Carte_journ_e_du_7_novembre_1914

 

                                     L_gende_carte_7_novembre_1914

 

Avec le 2e bataillon du 149e R.I. :

J.M.O. de la 33e brigade d’infanterie.

Pendant la nuit, les Anglais gardent le secteur de Zwarteleen jusqu’à la voie ferrée. Le  90e R.I. et le 2e bataillon du 149e R.I. sont dans  le secteur ouest de la voie ferrée.

Dans la nuit, la 6e division de cavalerie et 10 compagnies du 53e R.I. sont mises à la disposition du général Moussy.

Sur les ordres du 16e C.A., le 53e R.I. qui devait rester à droite, relève les Anglais dans leur secteur.

Le 90e R.I., le 2e bataillon du 149e R.I. et les derniers éléments du 68e R.I. restent dans le secteur de droite. Le général Moussy reçoit l’ordre de reprendre l’offensive le plus tôt possible dans la direction de Hollebeke-Klein Zillebeke. Le général Vidal qui était disponible vient prendre le commandement de l’ensemble de tous les éléments.

J.M.O. du 53e régiment d’infanterie.

Le régiment tout entier est à la disposition du général Moussy. Il doit appuyer l’attaque de la brigade Moussy vers  l’est dans le secteur nord du canal. Il est envoyé en position d’attente  à l’écluse n° 8.

8 h 25 : Le bataillon (Saisset) se porte immédiatement à Verbranden-Molen en réserve à la disposition du général Moussy. Il doit se placer sur le chemin qui, de Verbranden-Molen, se dirige vers le sud-ouest et il s’arrêtera près du village et à l’ouest du bois.

Le bataillon Dufor viendra immédiatement par l’écluse n° 8, le long du canal et au nord de celui-ci, se placer en réserve par l’est, et les compagnies de tête à hauteur du coude que fait le canal à l’est de l’écluse n° 7, ses derniers éléments vers l’écluse n° 7.

Le bataillon Laffiteau laissant en place les compagnies établies le long du canal se place derrière le bataillon Dufor, entre les écluses n° 7 et n° 8. Le lieutenant-colonel se porte à l’est de l’écluse n° 7, le long du canal.

12 h 30 : La brigade Moussy a atteint, au nord du canal, les bois qui sont dans l’angle, entre le canal et la voie ferrée. Le régiment doit attaquer. Les 5e et 7e compagnies sont chargées de cette opération : la 7e compagnie sur la moitié nord de la lisière nord-ouest du parc, la 5e compagnie sur la moitié sud de la même lisière.

Le but de l’opération est de reconnaître en détail les abords de la lisière, les cheminements, les défilés qui y conduisent, les points faibles des défenses préparées par l’ennemi, les endroits où la pénétration dans le parc est possible.

Le reste du régiment se réorganisera à Voormezelle : les 1er et 3e bataillons et le 2e bataillon à Oostoek tout en se tenant prêt à la marche au 1er signal.

11 h 30 : L’ordre arrive. Il faut se porter immédiatement à l’attaque sur le bois 40 par le nord-ouest. Le bataillon Dufor et 2 compagnies du bataillon Saisset y prendront part. Les 2 autres resteront en réserve à Voormezelle. Les 2 autres compagnies restées à Oostoek se porteront (la 5e) dans les tranchées faites par le génie au sud de Voormezelle, sur la rive ouest du ruisseau et à hauteur de Saint-Eloi (la 6e), sur la route Ypres-Kemmel à la bifurcation 1500 m nord de Groote-Vierstrad. Les compagnies resteront en réserve à la disposition du C.A..

15 h 15 : Le bataillon Dufor est en liaison avec le 80e R.I.. Le chemin du pont de la cote 60 dans la direction de Klein-Zillebeke est sous le feu ennemi. L’ordre est envoyé au bataillon Dufor de se porter sur Zillekeke, au lieu de marcher sur Verbranden-Molen, qu’il n’est possible de déboucher que sous le feu.

17 h 15 : Les Anglais ont leur gauche malmenée par les Allemands et demandent du renfort. Le bataillon Dufor est  envoyé aussitôt.

Le bataillon Saisset reste vers la cote 60. Les compagnies du bataillon Laffiteau reçoivent l’ordre de se tenir en réserve, au passage à niveau de Zillebeke.

17 h 25 : L’ordre arrive d’attaquer immédiatement pour dégager les troupes qui sont à droite de la voie ferrée. Le 53e R.I. se portera en avant en dépassant la ligne anglaise et en prenant pour objectif les bois de Klein-Zillebeke, la droite appuyée à la voie ferrée.

L’attaque sera exécutée de la façon suivante : le bataillon Saisset en première ligne franchira les lignes anglaises, et se portera sur l’objectif le plus rapidement possible.

Le bataillon Dufor, suivant en soutien, se tiendra prêt à organiser le terrain conquis. Le bataillon Laffiteau en réserve au nord de la cote 60, près de la voie ferrée, restera à la disposition du colonel.

Le lieutenant-colonel se tiendra au début de la cote 60.

19 h 00 : Les dispositions pour l’attaque sont prises, le colonel donne l’ordre d’attaquer.

23 h 15 : L’attaque a été déclenchée et faite avec vigueur. Les compagnies de 1ère ligne ont franchi les tranchées anglaises et progressent vers les bois. Elles sont à environ 200 m en avant des tranchées anglaises et continuent le mouvement en avant.

J.M.O. du 90e régiment d’infanterie.

Les nouvelles positions ayant laissé dans nos lignes une brèche, le groupe de Vaugelas en liaison avec le 53e R.I. à gauche assure l’inviolabilité de la ligne, à  hauteur du pont de chemin de fer.

Entre ce pont et le canal de Hollebeke au sud, la compagnie Nivet (4e) reçoit l’ordre d’occuper , dès l’aube, le bois de la Faisanderie où elle s’installe face à la voie ferrée.
Le 2e bataillon du 149e R.I. défend la lisière sud au K 28. Nos sections remarquent, à partir de 10 h 00, le glissement d’unités allemandes qui sautent la voie ferrée et s’infiltrent par un ravin entre le 2e bataillon du 149e R.I. et la 4e compagnie du 90e R.I. Un peloton de la 1ère compagnie vient renforcer notre ligne, mais le mouvement tournant de l’ennemi, bien que très meurtrier pour lui, ne s’en poursuit pas moins. Une compagnie du 149e R.I. (capitaine Jeske) est appelée à son tour pour s’opposer à cet enveloppement. Nous tenons les positions jusqu'à la nuit, mais l’ennemi est en force si considérable qu’un bataillon du 122e R.I. doit participer aussi à la défense.

Les compagnies de notre régiment brûlent 400 cartouches par homme sans parvenir à bloquer l’ennemi qui charge par 3 fois nos tranchées entre 18 h 00 et 24 h 00.

La 4e compagnie contre-attaque à la baïonnette et parvient à garder nos positions à la suite de cette offensive.

Du côté des Allemands :

Historique du I.R. n° 105.

Le 1er bataillon et la compagnie de mitrailleuses sont avancés jusqu’au bois de Camp, à 500 m au sud-est de Klein-Zillebeke, ou ils s’enterrent. Ils tirent profit des couverts locaux. Le tir violent de l’artillerie et de l’infanterie ennemie vise toute la position du I.R. n° 105.


Historique du I.R. n° 126.

Les éléments de la 82e brigade qui sont engagés à la gauche de notre 2e bataillon peuvent gagner du terrain. Les compagnies  occupent une position qui est tenue jusqu’au 16 novembre. (Relève).


Historique du I.R. n° 132.

L’ordre de la division préconise à la 61e brigade d’occuper fermement le bois à l’ouest de la voie ferrée, au nord du grand virage du canal. A 7 h 00, le brouillard est si dense que nous ne voyons rien à dix pas. La tranchée de la moitié gauche du 2e bataillon n’a pas été creusée pendant la nuit à la même hauteur que celle de la moitié droite.  Elle est vingt à trente pas plus loin. Il  faut donc relier les deux. Vers 12 h 00, le brouillard se lève brusquement. Dans le champ de betteraves, devant la section de droite de la tranchée, qui se trouve à peu près à la hauteur de la section de gauche, nous découvrons une patrouille anglaise qui s’est approchée sous couvert du brouillard. Les anglais sont pris sous notre feu. Deux hommes seulement peuvent s’échapper jusqu’à la première ferme de Zwarteleen. Ils ont été trouvés 2 jours plus tard grièvement blessés.

Pendant toute la matinée, en dépit du brouillard, l’artillerie ennemie maintient un tir très violent. Nous pouvons tout de même réorganiser les unités et  faire face à l’ouest, contre le bois toujours menaçant sur le flanc gauche. Il n’est pas occupé par l’ennemi, mais seulement visité par des patrouilles. Sur la lisière ouest, les maisons sont fortement occupées.

Vers 11 h 00, nous faisons savoir qu’une attaque de la 61e brigade,  aux unités très mélangées, venant de l’est et orientée contre le bois, est impossible. Il est proposé d’engager le I.R. n°105 qui vient du sud. A 12 h 00, il est signalé l’apparition de tirailleurs français sur le talus de la voie ferrée. Il faut orienter les compagnies qui sont à l’ouest  contre celles-ci.

La brigade donne ces propositions à la division avec les difficultés qui peuvent se rencontrer. Celle-ci ordonne alors à 16 h 15, que le I.R. N°105 doit prendre la partie Sud du bois. La 61e brigade son tiers nord. La division se réserve encore  le droit de fixer l’heure de l’attaque. Finalement, elle renonce à son exécution. Les journées du 6 et du 7 novembre ont permis à la division de capturer 12 officiers et 730 hommes (anglais et français) e de prendre 3 mitrailleuses.

Historique du I.R. n ° 171.

Au cours de la nuit du 7 novembre, un transport de nombreux volontaires de guerre arrive. Ils renforcent la 12e compagnie pour ensuite rester à la disposition de l’E.M. du régiment. Pendant la nuit, nous regroupons les unités. Des munitions et du ravitaillement sont apportés. Ces mesures sont fréquemment perturbées par des tirs de surprise ennemis.

Le brouillard dense qui est encore présent le 7 au matin est mis à profit par l’ennemi pour effectuer une attaque-surprise à 7 h 00. Elle est dirigée sur l’aile gauche du I.R. n° 171. Elle échoue et les Anglais retournent sur leur ligne de départ après avoir essuyé des pertes. La 12e compagnie cède alors 2 sections au 1er bataillon et la 3e compagnie au 2e bataillon. Il faut parer aux nouvelles surprises. Vers 12 h 00, arrive l’ordre de la division de poursuivre l’attaque. Le I.R. n° 171 reçoit 2 compagnies du 8e B.C.P.et la 7e compagnie du I.R. n° 172. Le 1er bataillon doit poursuivre ses assauts contre les positions ennemies qui se trouvent dans la forêt.

À 14 h 00, lorsque le brouillard s’est enfin levé, et que la préparation d’artillerie a pu être effectuée, le 1er bataillon s’élance. Il parvient à pénétrer dans le bois et gagne 200 à 300 m de terrain. Mais bientôt, son attaque s’enraye.  Le 1er bataillon reste alors totalement isolé en pointe dans le bois avec son aile droite qui est fortement repliée. En effet, ni le I.R. n° 126, ni les compagnies de chasseurs engagées entre ce régiment et l’aile droite de notre 1er bataillon, ne sont parvenus à progresser. À la gauche de ce 1er bataillon, le 3e bataillon  qui a pu gagner du terrain ne peut pas résister à une contre-attaque ennemie qui se déclenche à 17 h 00. Après des tentatives de résistance très coûteuses en vies humaines, les 1er et 3e bataillons doivent se replier sur leurs positions de départ. Pour la nuit, les restes du 8e B.C.P. sont également placés sous les ordres du I.R. n° 171, tandis que ses  2 compagnies engagées restent en 1ère ligne. Les 2 autres compagnies sont placées dans le petit bois près de Groenenburg pour protéger le flanc droit. Pendant la nuit, les Anglais renouvellent leurs tentatives d’attaque sur les 1er et 3e bataillons. Ils tentent d’enfoncer ainsi notre flanc droit, mais sans résultat. Notre ravitaillement en vivres et en munitions s’en est trouvé perturbé et souvent on a dû entamer les rations de réserve.

Historique du I.R. n° 172.

Au  matin, de nombreux cadavres anglais gisent à quelques pas seulement devant notre position. Pendant les premières heures de la journée, il se déclenche un vif tir d’artillerie et d’infanterie qui doit se poursuivre toute la journée. L’attaque attendue ne vient pas.

Avec le 3e bataillon du 149e R.I. :

 

                   Journ_e_du_7_novembre_1914__3e_bataillon_

 

J.M.O. de la 85e brigade d’infanterie.

Pendant la nuit du 6 au 7, les compagnies du 158e R.I. engagées avec le 3e B.C.P. et la 77e brigade progressent jusqu’à la hauteur d’une ligne nord-sud passant par la côte 74 (500 m à l’ouest du moulin de Spanbrock ) où les Allemands s’installaient.

Dans la journée la fusillade recommence des 2 côtés sans qu’on puisse avancer ni d’un côté ni de l’autre.

Le 3e  bataillon du 149e R.I. engagé en face de Wyschaete est retiré de la ligne et porté à la Clytte.

Extraits de l’ouvrage « Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon » de Henri René aux éditions Perrin et Cie. 1917.

« Le 7 au soir, on nous a lancés à l’attaque, et en dépit de notre prodigieux éreintement, nous sommes allés jusqu’aux abords de la « ferme tragique ». Des mitrailleuses postées sur la hauteur de Spanbrock nous ont pris de flanc : il a fallu se coucher et attendre l’obscurité pour rallier nos tranchées. Après ce dernier effort, le commandant a osé ce qu’il n’avait jamais osé : il a demandé notre relève ! Nous laisser un jour de plus eût été une imprudence, car la limite des forces humaines était franchie. »

Du côté des Allemands :

Historique de l’I.R. 17e bavarois.

Deux tentatives d’attaques contre l’Eikhof ont échoué dans la journée. Des éléments du 1er et du 2e bataillon avaient progressé sur 100 m et s’y sont enterrés.

 

Références bibliographiques :

Pour les Allemands :  

Historique du I.R.  n° 17. Schick. München 1927.

Historique du I.R. n° 105. Baensch-Stiftung. Dresden 1929.

Historique du I.R. n° 126. Belser. Stuttgart 1929.

Historique du I.R. n° 132. Berlin 1932.

Historique du  I.R. n° 171. Stalling. Oldenburg 1927.

Historique du I.R. n° 172. Sporn. Zeulenroda 1934.

Tous ces historiques proviennent de la collection Herman Plote. Les traductions en français ont été réalisées par Herman Plote.

Pour les Français :

J.M.O. de la 33e brigade : Série 26 N 505/3.

J.M.O. de la 85e brigade : Série 26 N 26 N 520/10.

J.M.O. du 53e R.I. : Sous-série 26 N 644/5.

J.M.O. du 90e R.I. : Sous- série 26 N 668/1.

 

Tous ces J.M.O. sont consultables sur le site « S.G.A./Mémoire des hommes».  

 

« Jours de gloire, jours de misère. Histoire d’un bataillon. », d’Henri René aux éditions Perrin (1917).

 

Pour en savoir plus : 

«En avant quand même ! Le 53e R.I. de Perpignan dans la tourmente de la 1ère guerre mondiale ». Livre de Renaud Martinez. Publier aux Éditions l’Agence. 2007.

 

Un très grand merci à M. Bordes, à P. Casanova, à  A. Carobbi, à  J. Charraud, à J. Huret, à H. Plote, à M. Porcher, à A. Sauvaget ainsi qu’au Service Historique de l’Armée de Terre de Vincennes.

 

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