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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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24 juin 2022

Frédéric François Gothié (1866-1940)

Frederic François Gothie

 

Enfance et jeunesse

 

Frédéric François Gothié naît le 22 janvier 1866 à Pisdorf (Bischtroff), un petit village situé près de Sarre-Union, dans le département du Bas-Rhin. Son père, Frédéric, âgé de 44 ans, sergent maître d’armes aux armées du Second Empire, est titulaire de la Médaille militaire et de la médaille d'Italie.

 

Sa mère, Christine Bauer, fille d’un charron de Zollingen, est âgée de 28 ans. Elle a déjà donné naissance à une petite fille, prénommée Marie, venue au monde en 1862.

 

Frédéric Gothié et Christine Bauer se sont mariés le 7 mars 1860 à Philippeville (Skikda) en Algérie. Ils ont opté pour la nationalité française après la guerre de 1870-1871. Une fois la carrière militaire du père achevée, les Gothié s’installent à Collonges-au-Mont-d’Or, dans la banlieue nord de Lyon. L’ancien sergent maître d’armes y a obtenu un emploi réservé à l’octroi du pont de la commune.

 

Scolarité 

 

Frédéric fait ses classes primaires à Collonges-au-Mont-d’Or. Il poursuit ses études au collège de Vienne. C’est un très bon élève. Un bulletin de notes datant de cette époque donne les appréciations suivantes : « Excellent élève sous tous les rapports ; travaille avec application et intelligence. Il fait des progrès très marqués dans toutes les parties. Il nous donne pour l’avenir les meilleures espérances. »

 

Sa classe de 3e est composée d’une cinquantaine élèves. Frédéric est alors âgé de 14 ans.

 

Il est second en récitation, 3e en allemand et en latin, 8e en mathématiques et version grecque et 9e en géographie.

 

Le jeune Gothié intègre le lycée de Saint-Rambert après sa sortie du collège. Il rejoint le lycée de Lyon pour suivre les cours des classes de préparation aux grandes écoles.

 

À l’âge de 19 ans, il est noté comme étant un peu trop léger d’esprit en mathématiques spéciales. Il est dit qu’il doit faire des efforts s’il veut y arriver… Dissipé à certaines heures, mais sans plus, il n’en arrive pas moins à décrocher le baccalauréat es sciences.

 

Une fois ses études scolaires achevées, Frédéric Gothié choisit d’embrasser la carrière militaire.

 

Son degré d’instruction de niveau 5 lui permet de tenter le concours d’entrée de l’école spéciale militaire, une épreuve qu’il réussit sans aucune difficulté.

 

Issu d’une famille modeste, le jeune Gothié obtient une bourse pour entreprendre ses études. Son père signe une décharge pour rembourser les frais de formation en cas de non-respect du contrat.

 

Premières années sous l’uniforme

 

Frédéric Gothié est dans l’obligation de contracter un engagement volontaire pour intégrer la 71e promotion saint-cyrienne dite promotion de Châlons. Le 27 octobre 1886, il se rend à la mairie du 1er arrondissement de Lyon pour y signer un contrat de cinq ans.

 

Ce futur Saint-Cyrien a également été inscrit sur la liste de recrutement de la classe de 1886 de la subdivision de Lyon ; il a le n° 123 au tirage au sort du canton de Neuville ; il est enregistré sous le n° 356 au registre matricule de recrutement.

 

Le 23 juin 1887, son adjudant le punit de deux jours de salle de police pour mauvaise tenue dans le rang et pour avoir ri à l’annonce d’une punition de consigne.

 

Frédéric est nommé caporal le 1er octobre 1887.

 

Le 9 août 1888, son capitaine lui inflige deux jours de salle de police pour mollesse au cours d’une séance de tir.

 

Il quitte l’école spéciale militaire le 1er octobre 1888 avec le grade de sous-lieutenant. Classé 101e sur 406 diplômés, il est affecté au 105e R.I. de Riom.

 

Caserne d'Anterroche Riom 105e R

 

Fréderic Gothié entre à l’école normale de gymnastique de Joinville le 1er août 1889 ; il y obtient la médaille d’argent, prix unique d’épée. Classé 10e sur 33 élèves, le jeune sous-lieutenant est jugé comme suit : « Officier sérieux, a travaillé toutes les parties et malgré son peu d’aptitude pour la gymnastique, est parvenu à sortir dans un rang très honorable, à même de diriger les exercices physiques de son bataillon. »

 

Il suit les cours de l’école de tir de la Valbonne du 1er novembre 1890 au 28 février 1891. Le sous-lieutenant Gothié est classé 10e sur 72 élèves avec l’appréciation suivante : « A montré le plus grand zèle, très bon instructeur, sait très bien régler les différents feux, apprécie assez bien les distances à la vue et au télémètre. Très bon tireur, peut-être utilement utilisé à l’instruction théorique et pratique des officiers et sous-officiers. »

 

Progression de carrière

 

Frédéric Gothié obtient les galons de  lieutenant le 15 juillet 1891. Il tente et réussit le concours d’entrée de l’école supérieure de guerre. Une décision ministérielle du 20 avril 1894 l’autorise à suivre les cours à partir du 1er novembre. Il s’installe à Paris le temps de ses études.

 

Le lieutenant Gothié obtient son brevet d’état-major en novembre 1896 avec la mention « bien », classé 51e sur 80 élèves.

 

À partir du 16 novembre 1896, il poursuit sa carrière d’officier à Nîmes en tant que stagiaire à l’état-major de la 59e brigade rattachée à la 30e D.I..

 

Frédéric Gothié fait la connaissance de Louise Guérin qu’il épouse le 14 décembre 1897. Trois enfants naîtront de cette union : Pierre et Marcel qui feront plus tard une belle carrière militaire et Simone, la cadette, qui deviendra médecin.

 

Mariage de Frederic Gothie et de Louise Guerin

 

Le lieutenant Gothié est promu capitaine le 12 juillet 1898. Il occupe les fonctions d’officier d’ordonnance à l’état-major de la 59e brigade depuis plusieurs mois.

 

Les notes laissées par son supérieur direct sont élogieuses. Le 31 décembre 1898, le général Flouvat rédige ceci : «  Monsieur Gothié a été promu capitaine au choix en juillet dernier. Toujours la même volonté d’arriver, la même ardeur au travail, le même dévouement à ses devoirs professionnels, ne laissant jamais échapper une occasion de se rendre utile. A été pour moi un auxiliaire précieux pendant les manœuvres d’automne où il a su faire apprécier son intelligence, son instruction technique et sa vigueur physique, nature douce, prévenante qui éveille la sympathie. »

 

Le 1er janvier 1900, le général Flouvat ajoute : « Officier toujours des mieux doués, comme vigueur, intelligence, facilité au travail, souplesse de mémoire et sûreté de jugement. Il dirige aujourd’hui son bureau avec une réelle compétence et connaît à fond les diverses questions concernant le territoire et la mobilisation. A fait preuve, au cours des manœuvres alpines d’une endurance à toute épreuve et achevé de se familiariser avec la topographie du VIIe secteur qu’il connaît maintenant à fond, où il pourrait, au besoin, rendre de bons services. »

 

Le capitaine Gothié reste un sportif assidu. Sur les traces de son père, il obtient un prix d’escrime en 1901.

 

Une décision ministérielle du 25 janvier 1905 l’affecte au 55e R.I. à partir du 2 février.

 

Le général Sabatié, nouveau commandant de la 59e brigade, déplore ce départ. Il laisse une dernière appréciation dans le feuillet du personnel de son subordonné : «  C’est avec un vif regret que je vois le capitaine Gothié quitter l’état-major de la 59e brigade où il a rendu pendant 8 ans les plus précieux services. C’est un officier remarquable sous tous les rapports et qui mérite de faire une brillante carrière. Doué d’une intelligence très ouverte servie par un jugement très sûr et une mémoire très exercée, doué d’une grande puissance de travail et d’une réelle facilité d’assimilation, il recherche toutes les occasions de se rendre utile. Très vigoureux, très endurant à la fatigue, très bon cavalier, il est toujours prêt à tout service extérieur et on peut, en toute sécurité,  lui confier les missions les plus importantes et les plus ardues. Très consciencieux, plein d’entrain et de zèle, il a le sentiment de l’initiative, l’esprit de décision et beaucoup de coups d’œil sur le terrain. Il apprécie vite et bien en manœuvres les différentes situations et se montrera certainement aussi bon officier de troupe qu’il était bon officier d’état-major. Son excellente éducation et son esprit de discipline et de dévouement lui attireront pendant toute sa carrière, l’estime et l’affection de ses chefs, de ses subordonnés, de ses camarades. Parle couramment le russe et l’allemand. »

 

Frédéric Gothié prend le commandement de la 10e compagnie du  55e R.I. en tant que « stagiaire de troupe » durant les deux années suivantes. Une fois de plus, il est très bien noté.

 

Auteur d’une étude sur l’éducation physique et militaire de la jeunesse française, il est cité au bulletin officiel du ministère de la guerre du 27 février 1908.

 

Une nouvelle décision ministérielle entraîne son affectation à l’état-major de la 2e division d’infanterie coloniale à Toulon. Il occupe à nouveau le poste d’officier d’ordonnance. Sa formation d’officier breveté est définitivement terminée.

 

Le 18 mars 1909, le général commandant l’état-major de la 2e division d’infanterie coloniale inscrit le texte suivant : « Le capitaine Gothié a obtenu pendant toute sa carrière les plus brillantes notes et elles sont pleinement justifiées. Très intelligent et très instruit, d’excellente éducation, doué d’une grande force de caractère et d’une puissance de travail, toujours dévoué, plein de zèle et d’entrain, ayant de l’initiative et du coup d’œil sur le terrain, animé du meilleur esprit, traitant les affaires avec une scrupuleuse attention, montant bien à cheval et montant régulièrement. C’est un officier d’état-major du plus complet. Parle l’allemand et le russe, a obtenu une citation au B.O. du ministre de la guerre pour un travail sur l’éducation physique, dont il a encore été récompensé par les palmes académiques, a été désigné pour faire une conférence aux élèves du lycée sur l’organisation de l’armée et l’a faite avec beaucoup de talent. A été parfaitement noté comme commandant de compagnie au 55e R.I..

 

Je regrette profondément que cet excellent officier n’ait pas encore été inscrit au tableau d’avancement et j’espère bien qu’à la fin de l’année, il recevra la juste récompense de son travail et de ses excellents services. »

 

Casernes du 44e R

 

Frédéric Gothié est nommé commandant le 24 décembre 1910. Ce changement de grade l’affecte au 44e R.I à Bruyères-en-Vosges. Une fois sur place, il prend le commandement du 1er bataillon de l’unité. Il conduit ses compagnies de façon énergique et décidée pendant les marches des Vosges, au camp du Valdahon, et pendant les grandes manœuvres.

 

Commandant Gothie-Saint-Cyr

 

Il est nommé professeur de tactique et de morale (éducation morale de l’officier) à l’école spéciale militaire à la fin de l’année 1912. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur le 31 décembre. Frédéric Gothié instruit trois promotions : Les Marie-Louise (1911-1913), la Montmirail (I9I2-I9I4), et la Croix-du-Drapeau (I9I3-I9I4).

 

Les premiers mois de guerre

 

Le commandant Gothié exerce toujours à Saint-Cyr lorsque la mobilisation générale est décrétée en août 1914. Les cadres et les élèves de l’école spéciale militaire sont rapidement répartis dans les différentes unités mobilisées sur le territoire français.

 

Frédéric Gothié est envoyé à l’état-major du IVe groupe de division de réserve.  Il occupe les fonctions de chef du 1er bureau jusqu’à la dissolution de l’unité. Il est ensuite nommé à l’état-major de la Xe armée avec les mêmes fonctions. Le lieutenant-colonel de Vallière, chef d’état-major de cette armée, écrit ceci :

 

« Monsieur le commandant Gothié a été nommé à la mobilisation, chef du bureau à l’état-major du 4e groupe des divisions de réserves. Il a rempli cet emploi jusqu’à la dissolution de cette unité (29 septembre) a été nommé ensuite au même emploi à l’état-major de la Xe armée. Dans ces différents emplois où le commandant Gothié a été sous mes ordres, j’ai pu apprécier toutes les qualités d’intelligence, de dévouement et de commandement. C’est un vigoureux officier, plein d’entrain et d’esprit de discipline qui s’est fait remarquer dans des missions périlleuses sur la ligne de feu par son sang-froid, son initiative et son courage aussi apte à exercer le commandement d’un régiment qu’a remplir les fonctions de chef d’état-major. Était au tableau pour le grade de lieutenant-colonel, mérite à tous points de vue de passer au plus tôt au grade supérieur. »

 

Fin novembre 1914, Frédéric Gothié devient chef d’état-major de la 13e D.I. sous les ordres du général de Cadoudal.

 

Au 149e R.I.

 

Lieutenant-colonel Gothié (1)

 

Nommé dans le grade supérieur le jour de Noël 1914, le général commandant la Xe armée lui confie le commandement du 149e R.I.. Début janvier, le lieutenant-colonel Gothié rejoint sa nouvelle unité tout juste engagée sur le front d’Artois.

 

Frédéric Gothié est toujours très bien noté par ses supérieurs. Le 14 février 1915, le général Guillemot, responsable de la 85e brigade, rédige la note suivante :

 

« Affecté au commandement du 149e R.I. depuis le 5 janvier 1915, le lieutenant-colonel Gothié s’est immédiatement fait remarquer par les brillantes qualités physiques et morales qui lui ont valu ses notes antérieures. Très intelligent, rempli de tact et sachant faire œuvre d’initiative en toutes circonstances, il a su s’attacher bien vite ses subordonnés qu’il commande avec autorité et fermeté.

 

Chargé d’organiser et de tenir avec son régiment un secteur particulièrement sérieux en raison des pertes journalières qui s’y produisent, consacre une inlassable activité à cette mission et cherche à mettre en œuvre les moyens de dominer l’ennemi. Le lieutenant-colonel Gothié est un chef de corps parfait qui saura obtenir le rendement maximum de son beau régiment. »

 

Lieutenant-colonel Gothié 149e R

 

Le 3 mars 1915, le 149e R.I. subit une violente attaque allemande dans le secteur de Lorette. Obligé de reculer, il s’établit sur une nouvelle ligne de front avant de lancer deux contre-attaques. Frédéric Gothié est décoré de la croix de guerre avec une citation à l’ordre de la division pour ses actions menées au cours des combats.

 

Il obtient une nouvelle citation le 13 avril 1915. Cette fois-ci, il est cité à l’ordre du C.A..

 

Le lieutenant-colonel Gothié encadre son régiment durant les combats de mai, de juin et de septembre 1915.

 

Le 8 janvier 1916, il effectue une reconnaissance dans le secteur du bois en Hache, au débouché du bois 9, sur la route d’Arras, à environ 80 m à l’ouest du bois carré. Il est grièvement blessé au cours de cette mission.

 

Touché par une balle allemande dans la région sacro-iliaque gauche, il est sommairement pansé au poste de secours avant d’être évacué à l’ambulance d’Houdain où il subit les premiers soins. Frédéric Gothié est ensuite envoyé à l’hôpital auxiliaire n° 226 de Paris, avant de partir pour Vichy. Il doit également soigner un diabète qui l’accompagne depuis de nombreuses années.

 

Le 20 janvier 1916, il est de nouveau évalué par son supérieur hiérarchique le général Guillemot.

 

« Après un an de commandement, le lieutenant-colonel Gothié s’est affirmé comme un chef de corps de très haute valeur. Sa très belle conduite au cours des multiples opérations auxquelles il a participé avec son régiment lui a valu une citation à l’ordre de la 43e D.I. et une citation à l’ordre du 21e C.A.. Officier supérieur des plus énergiques et des plus instruits, il n’a cessé de faire preuve de ses remarquables qualités de chef en mars et en mai dans le secteur de Lorette et en septembre dans le secteur d’Angres et de donner le plus bel exemple à ses subordonnés sur lesquels il avait pris un très grand ascendant.

 

Il a su à plusieurs reprises réorganiser le 149e R.I. presque constamment en ligne et maintenir à ce beau régiment la brillante réputation qu’il s’était acquise au début de la campagne.

 

D’une activité au dessus de tout éloge, il a su faire face à toutes les situations dans les circonstances les plus critiques. Blessé le 8 janvier au matin, au cours d’une reconnaissance de son secteur, il a donné la mesure de sa grande énergie en revenant à son poste de commandement, malgré la gravité de sa blessure et en ne se laissant évacuer que par ordre, après avoir assuré son service jusqu’au soir et passé les consignes à son remplaçant. Déjà proposé pour le commandement éventuel d’une brigade, le lieutenant-colonel Gothié vient de s’acquérir des titres indiscutables, sa brillante conduite en 1915 à la tête du 149e R.I., ses deux citations et sa blessure, qui le désignent pour le grade de colonel. Ses services antérieurs dans l’état-major et dans la troupe au cours de cette campagne, permettent d’affirmer qu’il sera un très brillant commandant de brigade. »

 

Le 24 janvier 1916, il est fait officier de la Légion d’honneur.

 

En Champagne

 

Le chef de corps Gothié reprend le commandement du 149e R.I. en avril 1916. Le régiment s’installe en Champagne, entre les buttes de Tahure et de Mesnil après un passage à Verdun, particulièrement éprouvant. Comparé avec ce qu’il vécut durant l’année 1915, Frédéric Gothié occupe un secteur plutôt calme.

 

Le 12 août 1916, le 149e R.I. quitte la Champagne pour la Somme.

 

Soyécourt

 

lieutenant-colonel Gothie Soyecourt septembre 1916

 

Début septembre 1916 : le régiment du lieutenant-colonel Gothié occupe la partie nord de Soyécourt. Il a pour mission d’attaquer le village en collaboration avec d’autres unités de la division.

 

Le village de Soyécourt est repris aux Allemands, le 4 septembre. Le 149e R.I. a atteint son 1er objectif qu’il dépasse sur sa droite jusqu’à rejoindre le 2e objectif. Les corps voisins accèdent au 1er objectif sans aller plus loin. Le village de Vermandovillers et le parc de Deniécourt restent aux mains de l’ennemi.

 

Le lieutenant-colonel Gothié pressent une contre-attaque ennemie. Le terrain conquis par son régiment occupe une position en flèche. Cette situation fragilise son emplacement. Pour mieux se rendre compte de la situation, il gagne la 1ère ligne. Pris sous un violent tir de barrage, il s’installe avec sa liaison à la lisière du village. Grièvement blessé au maxillaire inférieur par une balle ennemie, il est fait prisonnier.

 

Le chef de corps Gothié témoigne :

 

« Nous sommes le 5 septembre 1916, je suis inquiet sur la situation des 1er et 3e bataillons qui se trouvent en flèche et qui peuvent à tout moment se faire attaquer à la fois de front comme de flanc. Je fais venir à mon P.C. un agent de liaison du capitaine Houel, l’officier qui commande le 3e bataillon. Ce dernier doit me conduire en 1ère ligne pour que je puisse me rendre compte par moi-même de la situation. Il faut que je prenne les mesures nécessaires concernant l’organisation du terrain conquis et je dois également assurer la liaison avec les corps voisins.

 

À 6 h 30, je quitte mon P.C.. Je suis accompagné du sous-lieutenant Claudel, du cycliste Bauvillet et de l’agent de liaison du 3e bataillon. Nous suivons, dans un premier temps, le boyau amorcé au cours de la nuit par le génie à travers le village de Soyécourt. Nous atteignons le boyau de la Reine et nous dépassons la compagnie Coste du 158e R.I. qui forme l’aile extrême de la 86e brigade de ce côté.

 

Je fais remarquer au capitaine Coste qu’il n’était pas à la limite Est de son secteur.

 

Je lui fais savoir également qu’il existe entre lui et le 149e R.I. qui occupe le boyau Dauphin, un trou d’environ 500 m. Je l’engage à détacher un poste de liaison à l’embranchement de ce boyau et du boyau de la Reine.

 

À peine avons-nous dépassé cet embranchement et avancé de 200 m dans le boyau Dauphin que l’agent de liaison qui nous précède revient en courant pour nous annoncer l’arrivée des Allemands. Nous faisons demi-tour et nous essayons de rejoindre le 158e R.I..

 

Hélas, nous trouvons l’embranchement occupé par les Allemands. Nous sortons du boyau en escaladant le parados pour regagner le château de Soyécourt à travers champ. Nous faisons à peine 50 m qu’une fusillade très nourrie retentit derrière nous. En même temps, un barrage se déclenche en avant. Deux hommes sont tués à nos côtés, l’agent de liaison du 3e bataillon et un homme du 366e R.I..

 

Nous essayons alors de rejoindre rapidement la tranchée de la rue sud-ouest qui passe par le château de Soyécourt, mais je suis blessé par une balle qui me fracasse la mâchoire inférieure.

 

Le sous-lieutenant Claudel me prodigue aussitôt ses soins et me fait un pansement qui réussit à arrêter le sang qui coulait en abondance de ma blessure. Pendant ce temps, nous sommes dépassés par deux vagues ennemies sans être faits prisonniers. Nous nous réfugions dans une casemate abandonnée. Nous espérons voir se produire une contre-attaque française et pouvoir regagner nos lignes plus tard à la faveur de l’obscurité.

 

À 16 h 00, un violent tir de barrage français éclate autour de nous, mais la contre-attaque tant espérée ne se produit pas.

 

Dans l’intervalle, nous envoyons le cycliste Bauvillet qui doit essayer de rejoindre nos lignes et ramener du secours. Mais rien n’arrive.

 

La nuit venue, nous sortons de notre abri pour nous diriger vers le bois Trink que nous apercevons à 400 ou 500 m devant nous. Nous traversons sans encombre la 2e ligne. Mais arrivés à la première nous sommes entourés par une section allemande qui nous fait prisonniers.

 

À bout de force et perdant toujours du sang de ma blessure, je suis amené péniblement à un P.C. allemand. Le capitaine Legler qui commande le 2e bataillon du 100e Grenadier me fait coucher jusqu’à l’arrivée des brancardiers qu’il a demandés.

 

 

Dans la nuit du 6 septembre, la fièvre augmente, les brancardiers ne sont toujours pas là. Mon brave Claudel m’offre de me porter s’il le faut, jusqu’au poste de secours d’Ablaincourt. Nous partons avec un sous-officier saxon, à travers un chemin creux rempli de cadavres et battu par notre artillerie.

 

Après de nombreux arrêts, nous arrivons vers 8 h 30 au poste de secours d’Ablaincourt. De nombreux soldats allemands attendent, bien entendu, ils passent avant moi. Une heure plus tard, je suis étendu sur la table d’opération et pansé très sommairement, sans que la plaie énorme de la face ait été lavée. On me fait tout de même une piqûre antitétanique.

 

À 10 h 00, je suis embarqué sur une voiture tirée par des chevaux. Je suis cahoté pendant 12 km à travers des chemins défoncés par les trous d’obus, jusqu’à l’hôpital d’évacuation de Douilly.

 

Là, complètement exténué, je suis étendu sur de la paille souillée, au milieu de blessés allemands dans une écurie. Sur la déclaration de mon petit Claudel qui n’a pas voulu me quitter, on me transporte pourtant dans un estaminet de la localité où sont étendus sur des matelas à terre quelques officiers et sous-officiers allemands.

 

La population française nous manifeste au passage sa commisération et nous offre des friandises. Mais je ne peux plus ouvrir la bouche. Le trismus de la mâchoire est complet et l’enflure gagne ma gorge. On arrive cependant à me faire passer un peu de bouillon par l’ouverture des dents emportées. Le maire de Douilly m’offre un billet de 100 francs et me dit : « Vous me rendrez cela à la fin de la guerre, si vous en réchappez ! »

 

Le 7 septembre, nous sommes évacués sur Ham. Là, on nous conduit à l’hôpital militaire dans un pavillon réservé aux officiers.

 

J’attends toute la journée sans aucun soin avec une seule soupe pour nourriture. Une auto vient nous chercher à 22 h 00 pour nous conduire cette fois à Saint-Quentin. Nous arrivons à minuit. Mon brave Claudel me quitte.

 

À l’hôpital, il n’y a plus de lit de disponible. On me fait mettre une paillasse à terre sur laquelle je m’étends jusqu’au lendemain. J’ai de la fièvre toute la nuit.

 

Le 8 septembre, à 7 h 00, une infirmière allemande, sœur Clara, m’apporte le déjeuner. Elle a recours à un tube de caoutchouc pour m’introduire un peu de lait et d’ersatz de café. Enfin, vers 10 h 00, je suis étendu sur une table d’opération. Une infirmière me défait mon pansement et pour la première fois, ma blessure est lavée et sondée, mais pas de radiographie ! J’ai beaucoup de difficultés à m’alimenter. Sœur Clara essaye de me faire prendre un lait de poule au vin qui me rend un peu de force. »

 

En Captivité

 

En captivite

 

Frédéric Gothié est envoyé par train sanitaire au camp d’Ohrdruf-en-Thuringe après avoir été pris en charge par les soignants allemands de l’hôpital de Saint-Quentin.

 

« Dès mon arrivée à Ohrdruf, le médecin allemand me fait savoir qu’il ne veut pas soigner les Français. Son fils a été tué sur le front Ouest. Les soins me sont donnés par monsieur Deglin, un infirmier français qui, dans le civil, exerce la profession de contremaître d’usine à Longwy. Il fait mes pansements sous la direction d’un jeune médecin auxiliaire français, étudiant en médecine n’ayant que 4 inscriptions. C’est cet infirmier qui entreprend de suturer le bas de ma joue, le haut étant encore en pleine suppuration.

 

L’opération se fait, en cachette des Allemands, un dimanche matin. Elle se pratique avec des moyens très rudimentaires, du fil noir trempé dans de la teinture d’iode, une aiguille ordinaire désinfectée à l’eau bouillie sont utilisés.

 

Les lambeaux de joue qui s’étaient collés sous le menton sont détachés à l’aide d’un canif. Ils sont relevés à leur place primitive où quatre points de suture sont ensuite pratiqués.

 

Le surlendemain, un appareil à air chaud est trouvé. Il est aussitôt mis en service pour hâter la cicatrisation.

 

Au bout d’un mois, ma santé se détériore, j’ai une violente crise de diabète et je suis obligé de prendre le lit. Une plaie à la jambe gauche, provoquée par un choc contre le fer de mon lit, se produit, faute d’antiseptiques elle s’envenime.

 

Je suis dans un triste état. Enfin, le 25 octobre, je reçois les premières nouvelles de ma famille et trois colis ! Je vais pouvoir m’alimenter plus rationnellement pour mon régime de diabétique.

 

Au camp d'Ohrdruf-en-Thuringe

 

Une commission de médecins suisses passe, en me voyant dans cet état, elle me désigne pour aller me faire soigner en Suisse. Malheureusement, l’espoir passé, il n’y aura pas de lendemain…

 

Au bout de 5 mois, le 4 février 1917, je change de camp. Les Allemands m’envoient à la citadelle de Mayence. Ici, mon régime est mieux observé, je vais même passer un examen pour ma mâchoire à l’hôpital.

 

Mayence ! Cet endroit est aussi pour moi un temps d’énergiques réclamations à l’autorité allemande du camp, particulièrement pour les brimades subies par les camarades. Mes camarades m’en ont su gré, en particulier un certain nombre de mes anciens élèves de Saint-Cyr qui se trouvaient là. Un capitaine allemand du nom de Von Tecklenburg me manifeste beaucoup de hargne.

 

La commission suisse qui m’a retrouvé me fait envoyer, sans délai cette fois, au centre d’examens qui se trouve à Constance.

 

Le capitaine Von Tecklenburg, chargé de me fouiller, me demande ma parole d’honneur que je ne transporte pas de choses interdites. Je lui réponds qu’en tant que prisonnier de guerre je n’ai pas à faire cela. Mon attitude l’irrite, il me fait fouiller à fond. J’ai tout de même pu trouver le moyen de cacher 4 pièces d’or de 20 francs que m’avait confié un sergent français prisonnier et que je devais remettre à sa famille.

 

Le 6 mai, je suis enfermé une journée entière dans une chambre d’isolement appelée « le saloir ». Le lendemain matin, je suis amené à la gare pour être transféré au camp d’Heidelberg. Mais un rapport, sans doute écrit par le capitaine Von Tecklenburg, me suit. Je suis désigné pour aller dans un camp de représailles ! J’ai de suite objecté mes soucis de diabète et je réussis enfin à être présenté à la commission médicale germano-suisse de départ. De suite, cette dernière me reconnaît apte à être interné en Suisse. »

 

En juin 1917, il obtient l’autorisation de se présenter devant une commission médicale germano-suisse dans le but de son évacuation vers la Suisse en tant que grand blessé.

 

« Le 19 juin, je monte enfin dans le train de la Croix-Rouge, direction Schaffhouse, Zürich, Berne et Lausanne. De là, je réussis à envoyer un télégramme à ma famille. Les Suisses me soignent avec tout leur dévouement. Ils me trouvent si profondément atteint, qu’ils me désignent pour un rapatriement en France le 27 juillet 1917. »

 

Le retour en France et la fin de carrière

 

Après un bref passage de quelques semaines sur les terres helvétiques, il regagne la France.

 

« Je suis dirigé sur Glion au-dessus de Montreux. Quel changement ! J’en rends grâce à Dieu.

 

Je vais ensuite à l’hôpital du Val de Grâce à Paris où, de nouveau, je suis opéré pour ma mâchoire. Je retrouve une grande partie de ma santé durant ce congé de convalescence. »

 

Son statut de prisonnier rapatrié ne lui donne plus le droit d’occuper un nouveau poste dans la zone des armées. Il lui est donc impossible de retourner en 1ère ligne.

 

« Me sentant enfin rétabli, je vais me présenter au maréchal Foch, mon ancien professeur à l’école de guerre. Je lui fais une demande pour reprendre du service, à l’arrière bien sûr, puisque je n’ai pas le droit de revenir sur le front en tant que prisonnier libéré. Un jour, il me convoque pour me proposer le remplacement du général Weygand qui vient d’être nommé chef d’état-major sur le front. C’est ainsi que je deviens son chef de cabinet à Paris. Promu colonel, j’occupe cette fonction jusqu’à la fin de la guerre. »

 

Etat-major du maréchal Foch

 

Frédéric Gothié est nommé colonel le 24 décembre 1917. Il occupe les fonctions de chef de cabinet du maréchal Foch durant les années 1918 et 1919.

 

L’année suivante il a pour mission de contrôler l’application des traités de Paix signés après la guerre. Il séjourne à  Innsbruck, Salzburg, et Linz en Autriche. Le colonel Gothié rentre en France en février 1921.

 

Il est affecté à la commission militaire de contrôle de  la Hongrie. Détaché de cette commission, il est envoyé à la commission des généraux de Sopron pour maintenir l’ordre en Hongrie occidentale.

 

L'ancien responsable du 149e R.I. est remis à la disposition de l’état-major des armées le 31 août 1922 en raison de la fin des opérations du contrôle des effectifs en Hongrie.

 

Proposé plusieurs fois pour le grade de général, il ne sera jamais promu.

 

Le colonel Gothié est nommé à la tête du 31e régiment de tirailleurs le 8 décembre 1923. Ce régiment est envoyé en occupation en Rhénanie, à Landau.

 

Atteint par la limite d’âge, Fréseric Gothié prend sa retraite le 22 janvier 1925. Il est nommé colonel de réserve au 5e R.I..

 

Famille Gothié en 1924

 

Il propose ses services à son église. Frédéric Gothié se retrouve nommé administrateur adjoint à la commission permanente de l'Église réformée évangélique. Fin 1926, la fédération protestante l'envoie à Beyrouth pour remplacer le sénateur Eccard, à la tête de l'organisation des œuvres protestantes française en Syrie.

 

Sa belle carrière militaire prend définitivement fin en 1927.

 

Frédéric Gothié décède le 31 juillet 1940 à Bourg-la-Reine dans le département des Hauts-de-Seine. Enterré dans un premier temps dans le cimetière de cette commune, il sera plus tard transféré au cimetière protestant de Saint-Laurent-la-Vernède dans le Gard.

 

Décorations du colonel Gothié

 

Décorations obtenues

 

Croix de guerre avec deux palmes, une étoile de vermeil et une étoile d’argent

 

Citation à l’ordre de la 43e D.I. en date du 16 mars 1915 :

 

« Chargé avec son régiment de l’occupation du secteur de Noulette du 24 janvier au 8 mars, a fait preuve d’une activité et d’un dévouement au-dessus de tout éloge, pendant toute cette période. Constamment sous le feu, il a donné le plus bel exemple à ses subordonnés par son mépris du danger. Violemment attaqué le 3 mars, il n’a cédé qu’à la dernière extrémité pour s’établir sur un nouveau front d’où il a, par deux fois,vigoureusement contre-attaqué. »

 

Citation à l’ordre du 21e C.A. en date du 13 avril 1915 :

 

« A déployé une activité inlassable pour l’organisation défensive du plateau de Notre-Dame-de-Lorette dans des conditions très difficiles. A pu mener à bien ces travaux dans une période de temps très limitée, grâce au dévouement qu’il a su obtenir des troupes sous ses ordres et en particulier des grenadiers du 149e R.I. »

 

Cité à l’ordre de l’armée n° 14571 du 17 mars 1919 : 

 

« Monsieur Gothié, colonel anciennement commandant du 149R.I.. Le 5 septembre 1916, pressentant une contre-attaque ennemie sur le terrain conquis les jours précédents par son régiment, n’a pas hésité à se porter en première ligne pour se rendre compte par lui-même de la situation, prendre les décisions nécessaires et s’assurer des liaisons avec les corps voisins. Pris dans un violent tir de barrage, s’est porté avec sa liaison à la lisière du village et s’y est installé pour enrayer la contre-attaque ennemie. Grièvement blessé au cours de la résistance, n’a pas pu échapper à l’ennemi, tandis qu’il s’efforçait de regagner les lignes par lui même. »

 

Chevalier de la Légion d’honneur le 31 décembre 1912.

 

Officier de la Légion d’honneur  le 24 janvier 1916 :

 

« Chef de corps d’une grande valeur qui, placé depuis plus d’un an à la tête de son régiment, se dépense sans compter. Donnant à tous le plus bel exemple d’énergie, de sang-froid et de ténacité, a su faire de son régiment une unité de guerre aussi ardente dans l’action que solide dans les tranchées. Joint à une exceptionnelle valeur morale les plus belles qualités de commandement. Blessé le 8 janvier 1916 par balle à la hanche gauche. »

 

Cette décoration comporte également l’attribution de la croix de guerre avec palme.

 

Commandeur de la légion d’honneur le 16 juin 1920. (J.O. du 10 décembre 1920).

 

Grand officier de la Légion d'honneur décoré par le Maréchal Lyautey, dans la cour des Invalides le 4 juin 1932.

 

Autres décorations :

 

Officier d’académie (arrêté du ministre de l’instruction publique du 7 novembre 1908).

 

Officier de l’ordre du sauveur de Grèce du 31 mars 1920.

 

La généalogie de la famille Gothié peut se consulter sur le site « Généanet ». Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

log geneanet

 

Le colonel Gothié possède un dossier dans la base de données « Léonore ».

 

Site base Leonore

 

Sources :

 

Dossier individuel consulté au Service Historique de Vincennes.

 

Informations communiquées par la famille descendante du colonel Gothié.

 

L’intégralité des photographies présentées proviennent de la collection personnelle du petit-fils du colonel Gothié, D. Gothié.

 

Témoignage inédit du lieutenant-colonel Gothié.

 

Le plan de la ville de Nîmes est extrait du site « Gallica »

 

Un grand merci à M. Bordes, à D. Gothié, à M. Lozano, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

17 juin 2022

Germain Marie Durand (1891-1915)

Germain Marie Durand

 

Germain Marie Durand naît le 17 octobre 1891 à Saint-Cergues, une commune de 1330 habitants, située dans le département de la Haute-Savoie.

 

Son père, Jean Louis, cultivateur, est âgé de 33 ans lorsque son fils voit le jour. Sa mère, Adèle Bretallaz, est âgée de 32 ans. Elle travaille comme femme de ménage.

 

Le couple a déjà perdu une fille décédée à l’âge de 19 jours, en mars 1889.

 

Le père étant absent du domicile, le grand-père paternel est chargé de la déclaration de l’enfant. Accompagné de l’instituteur et du garde champêtre du village, il se rend à la mairie pour signer le registre d’état civil.

 

Les Durand donnent encore la vie à une petite fille prénommée Élise en 1893, puis à deux garçons en 1897 et 1898. Ceux-ci, Marius et Basile, ne survivront pas à la petite enfance.

 

Saint-Cergues

 

La sœur de Germain est enregistrée au domicile parental, sur le registre de recensement de la commune de Saint-Cergues pour l’année 1896 ; elle ne figure pas sur celui de l’année 1901. Pourtant, aucun acte de décès n’a été enregistré à son nom dans cette commune entre ces deux années.

 

Le 23 septembre 1902, Adèle Durand accouche d’un enfant mort-né. Elle décède le 12 octobre, probablement des suites de ce nouveau drame familial. Cinq jours plus tard, Germain fête son 11e anniversaire sans sa mère.

 

La fiche matricule de Germain Durand indique un degré d’instruction de niveau 3. Il sait donc lire, écrire et compter lorsqu’il rejoint le monde du travail à la fin de sa scolarité.

 

Jean Louis et Germain Durand vivent toujours à Saint-Cergues. En 1911, le père travaille comme domestique dans le département de l’Ain. Il s’est installé à Cessy. Le fils est employé comme cultivateur à Grilly, une commune avoisinante.

 

Le jeune Durand est reconnu « bon pour le service armé » par le conseil de révision du canton de Gex en 1912. Le 9 octobre, il intègre la 2e compagnie du 149e R.I., un régiment qui tient garnison à Épinal.

 

Eté 1914 : les menaces de guerre contre l’Allemagne se concrétisent. Le soldat Durand est toujours sous les drapeaux, il attend sa libération prévue pour octobre 1914. Son régiment fait partie des troupes de couverture. Il est un des tout premiers à être envoyé à proximité de la frontière. Sa compagnie, sous les ordres du capitaine Crepet, quitte la caserne Courcy dès le 31 juillet 1914.

 

Le 9 août 1914, le soldat Durand subit le baptême du feu à proximité du village de Wisembach.

 

Il participe ensuite à tous les combats menés par son régiment jusqu’à la date de son hospitalisation pour une sévère contusion du genou droit. Le 12 avril 1915, il est pris en charge par les soignants de l’ambulance du 21e C.A. installée à Hersin-Coupigny. 

 

Le 14 avril, il est envoyé à l’hôpital auxiliaire n° 22bis à Berck-sur-Mer, puis transféré à l’hôpital complémentaire n° 49, avenue de la gare à partir du 15 mai. Guéri, il rejoint l’hôpital dépôt des convalescents n° 9, le 24 mai.

 

La date de son retour dans le régiment actif n’est pas connue. Sans cette donnée, il est impossible de valider sa participation aux terribles attaques du mois de juin 1915. Nous savons simplement qu’il a réintégré son ancienne compagnie après son retour de convalescence.

 

Le 25 septembre 1915, Germain Durand est grièvement blessé au cours d’une attaque menée par son régiment dans le secteur du bois en Hache, à proximité de la commune d’Angres, dans le Pas-de-Calais. Rapidement évacué à l’ambulance 4/13, installée à Barlin, son état est jugé critique. Les médecins ne parviennent pas à le sauver. Le soldat Durand meurt le 30 septembre 1915.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

journee du 25 septembre 1915

 

Germain Durand repose actuellement dans la nécropole nationale mixte de Barlin. Sa sépulture porte le n° 23.

 

 

Les décorations obtenues par ce soldat n’ont pas été retrouvées.

 

Son nom a été gravé sur les monuments aux morts des communes de Cessy et de Saint-Cergues.

 

Germain Durand ne s’est pas marié et n’a pas eu de descendance.

 

La généalogie de la famille Durand est consultable sur le site « Généanet ». Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Sources :

 

La fiche matricule du soldat Durand a été lue sur le site des archives départementales de l’Ain.

 

Livre d’or des enfants du pays de Gex morts glorieusement pour la France 1914-1919 publié en 1920.

 

Contrôle nominatif du 2e trimestre 1915 du 149e R.I. des malades et des blessés traités dans les formations sanitaires, détenu par les archives médicales hospitalières des armées de Limoges.

 

Les registres de recensement des années 1896, 1901 et 1906 de la commune de Saint-Cergues ont été consultés sur le site des archives départementales de la Haute-Savoie, ceux des communes de Cessy et de Grilly, pour l’année 1911, sur le site des archives départementales de l’Ain.

 

La photographie de la sépulture de Germain Durand a été réalisée par J.M. Laurent.

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à J.M. Laurent, aux archives départementales du département de l’Ain et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

10 juin 2022

Lazare Jacquet (1896-1951)

Lazare Jacquet

 

Lazare Jacquet voit le jour le 26 juin 1896 à Saint-Forgeot, dans le département de la Saône-et-Loire.

 

À sa naissance, son père, Jean, est âgé de 38 ans. Sa mère, Anne Largy, a 32 ans. Les parents du nouveau-né travaillent tous les deux comme fermiers.

 

La famille Jacquet, déjà composée de trois filles et d’un garçon, s’enrichira encore de trois enfants après Lazare.

 

La fiche signalétique et des services de Lazare Jacquet nous indique qu’il a un degré d’instruction de niveau 3. Il sait lire, écrire et compter lorsqu’il quitte l’école communale.

 

Soldat de la classe 1916, le jeune Lazare n’est pas concerné par l’ordre de mobilisation générale affiché au début du mois d’août 1914.

 

Déclaré « bon pour le service armé » par le conseil de révision du canton d’Autun, il est incorporé à compter du 11 avril 1915 au 149e R.I.. Ce régiment tient garnison à Épinal.

 

Le conscrit Jacquet arrive à la caserne Courcy le 12 avril 1915. Sa formation militaire s’achève à la fin du mois de mars 1916. Nous sommes loin de l'instruction de la classe 1914 qui ne durait que quelques semaines. Lazare Jacquet entre dans la zone des armées le 28. La date de son arrivée au sein du régiment actif reste inconnue. Il en est de même pour le numéro de sa compagnie. Il est impossible, compte tenu des sources disponibles, de dire si le soldat Jacquet a participé ou non à la bataille de la Somme à la fin de l’année 1916.

 

Lazare Jacquet est blessé le 23 octobre 1917 au cours de la bataille de la Malmaison. Plusieurs éclats d’obus entraînent de multiples plaies à la jambe droite, à la cuisse et au médius gauches.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés le 23 octobre 1917, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

La Malmaison

 

Sérieusement blessé, il est, dans un premier temps, soigné à proximité du front avant d’être évacué vers un hôpital de l’intérieur le 27 octobre 1917. Une fois rétabli, il réintègre le dépôt du 149e R.I. avant de rejoindre la zone des armées la semaine suivante.

 

Très diminué par ses blessures, la commission de réforme d’Épinal du 11 mai 1918 le déclare inapte pour les deux mois suivants.

 

Lazare Jacquet tombe malade le 6 août 1918. Il est de nouveau évacué vers l’arrière. Rapidement remis sur pied, il rejoint son dépôt le 23 août. Le 5 septembre, il est muté au 2e régiment d’infanterie. Il y a de fortes probabilités pour qu’il ait terminé la guerre au dépôt de ce régiment.

 

Le dépôt démobilisateur du 29e R.I. l’envoie en congé de démobilisation le 26 août 1919. Lazare Jacquet se retire à Saint Forgeot.

 

L’ancien soldat du 149e R.I. est classé dans l’affectation spéciale. Il est rattaché, en qualité d’homme d’équipe, à la 2e section des chemins de fer de campagne, au titre de la compagnie P.L.M..

 

Lazare Jacquet épouse Germaine Louise Baboux à La Petite-Verrière le 4 mai 1922. Une fille et un garçon naîtront de cette union. Les Jacquet s’installent à Étang-sur- Arroux.

 

 

Le 9 août 1929, l’administration militaire lui accorde un certificat provisoire de combattant validé à la date du 18 décembre 1935.

 

Il passe pour changement de domicile à la subdivision de Dijon le 18 mars 1930. Lazare Jacquet réintègre sa subdivision d’origine le 3 août 1931.

 

L’affecté spécial Jacquet est rattaché d’office au recrutement du bureau central de la Seine le 20 mars 1936.

 

Il décède le 12 mai 1951 à Étang-sur- Arroux.

 

La généalogie de Lazare Jacquet peut se consulter sur le site « Généanet ». Pour y avoir accès, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Lazare et Germaine Jacquet reposent avec leur fils Edmond dans le cimetière communal d’Étang-sur-Arroux.

 

Sepulture famille Jacquet

 

Sources :

 

La fiche signalétique et des services de Lazare Jacquet a été consultée sur le site des archives départementales de la Saône-et-Loire.

 

Les photographies de la sépulture de la famille Jacquet ont été trouvées sur le site « Généanet ».

 

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi et aux archives départementales de la Saône-et-Loire. 

3 juin 2022

5 septembre 1916

Les ruines de l'eglise de Soyecourt (septembre 1916)

 

La veille, le 149e R.I. a effectué une avancée spectaculaire dans son secteur d’attaque.

 

La ligne de front de la 85e brigade s’est stabilisée autour du second objectif qui n’a pas été atteint dans sa globalité. Une nouvelle offensive est prévue dans l’après-midi du 5 septembre pour faire la jonction avec la 86e brigade.

 

5 Septembre 1916

 

La nuit du 4 au 5 septembre reste relativement calme jusqu’à 1 h 00. À partir de cet instant, les Allemands, avec leurs canons de 77, de 105 et de 150, déclenchent un violent tir d’artillerie sur la lisière sud du bois de Soyécourt, sur la tranchée du Chariot et sur le calvaire .

 

Cimetière de Soyecourt

 

Au début de la journée, la 85e brigade occupe une ligne de front délimitée par la corne sud-ouest du bois de Soyécourt, par la tranchée allant du boyau Kreuz à 3809 (sur la route Soyécourt-Estrées), par la ligne des batteries 3605-3504-3403 (boyau du Dauphin), par le chemin 3403-651 et par la maison au nord de 658.

 

À sa droite, la  86brigade est installée dans le boyau du Prunier. À sa gauche, la 61e D.I. est reliée vers 3414 au 10e B.C.P..

 

Objectifs et troupes engagées

 

Les éléments de la 85e brigade devront atteindre les parties du 2e objectif non conquises la veille (3896-batterie 4200-616 c-90), ceci en progressant le long de la lisière sud-ouest du parc de Deniécourt jusqu’à 90. Un tir d’artillerie précédera l’attaque.

 

Les 3e et 10e B.C.P., les 1er et 3e bataillons du 149e R.I. accompagnés de 2 sections de la compagnie de génie 21/2 participeront à l’engagement.

 

Le 2e bataillon du 149e R.I. et les deux dernières sections de la compagnie de génie 21/2 constitueront la réserve de brigade.

 

La 86e brigade consolidera les positions conquises le 4 septembre.

 

Attaque de la 85e brigade

 

Le lieutenant-colonel Gothié, responsable du 149e R.I., parti en reconnaissance avec son officier adjoint à 7 h 30, n’est toujours pas rentré à 12 h 00.

 

Le commandant Schack, responsable de la réserve de la 85e brigade, prend provisoirement le commandement du 149e R.I. pour donner les ordres d’attaque. L’offensive est prévue pour 15 h 00.

 

La progression des troupes engagées est dans un premier temps gênée par des feux de mitrailleuses et d’artillerie provenant de 4403 (au nord du bois Vasset) et de ses environs. Les Allemands ne parviennent pas à stopper l’avancée des troupes françaises malgré la violence de leurs tirs.

 

La 85e brigade occupe les positions suivantes en fin de journée :

 

Le 149e R.I. a atteint l’ancien ouvrage 3801à la droite de la ferme sans Nom.

 

Le 3e B.C.P. qui a dû exécuter une attaque préparatoire (V.B. et grenadiers) une heure avant l’offensive de la brigade pour établir sa base de départ dans le boyau du Dauphin, s’installe sur une ligne passant au sud du bois Siegfried à 150 m du chemin du bois Déniécourt.

 

Le 10e B.C.P. a conquis la tranchée Siegfried et la lisière sud-ouest du parc de Déniécourt jusqu’à 616 t. Il se relie au 219e R.I. au point 3514.

 

Carte journee du 5 septembre 1916

 

 

La réserve de la brigade réduite à 1 compagnie occupe le village de Soyécourt à l’est et au nord-est.

 

                                Tableau des tués du 149e R.I. pour la journée du 5 septembre 1916

 

Sources :

 

J.M.O. de la 85e brigade. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 520/12

 

J.M.O. du 3e B.C.P.. S.H.D. de Vincennes. Réf : 26 N 816/3

 

Historique du 149e  Régiment d’Infanterie. Épinal. Imprimerie Klein, 1919

 

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

 

Rapport rédigé par le lieutenant-colonel Gothié, provenant de la collection privée de la famille.

 

Un grand merci à M. Bordes, à B. Étévé, à A. Carobbi, à D. Gothié, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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