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149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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29 juin 2018

Témoignage laissé par le sous-lieutenant Paul Douchez (4e partie) Patrouilles et reconnaissances.

149e_R

Les hommes du sous-lieutenant Douchez s’apprêtent à quitter le secteur de 2e ligne des Vervins pour gagner la ferme le Toty.

 22 juin 1917

Les Vervins à la ferme le Toty (1ère ligne) par P.C. Constantine et Jouy (moulin de Couvailles). Là, l’ennemi utilise de meurtrières torpillettes empennées dites « tourterelles ». Le lieutenant Claudin passe le commandement au sous-lieutenant Berteville avant de partir en permission. Ce dernier tombe malade. Je prends le commandement de la compagnie. Je reçois l’ordre ci-dessous, pour exécution de travaux d’amélioration dans la défense du secteur.

Parcours_approximatif_effectu__par_la_9e_compagnie_du_149e_R

Legende_carte_149e_R

Le général Michel commandant la 43e D.I. au colonel commandant l’infanterie divisionnaire.

Au sous-lieutenant Douchez

La liaison entre les quartiers B et C n’est pas encore suffisamment établie.

En première ligne, la tranchée la Madelon n’est pas reliée à la tranchée Bossue. Il reste 40 m de tranchée à creuser.

Il en résulte que, si les éléments de gauche du 158e R.I. sont relativement bien desservis par le boyau Ugène, la tranchée du Coq, la tranchée du Toty, les éléments de droite du 149e R.I. sont en l’air, uniquement desservis par le boyau Beaudron, trop excentrique, alors qu’ils devraient l’être par la tranchée du Toty.

Secteur_de_la_ferme_Toty_J

Cette dernière tranchée, soutien de la tranchée Bossue (149e R.I.) et cloisonnement à gauche du 158e R.I., n’est pas achevée. Son tracé, à partir de la tranchée du Coq, est à rectifier sur au moins 15 à 20 mètres. Il suit la ligne de plus grande pente et est pris d’enfilade par le blocus.

La réunion des tranchées Bossue et de la Madelon, l’achèvement et la rectification de la tranchée du Toty seront poussés activement dès maintenant. Ces travaux devront être terminés le plus tôt possible.

28 juin 1917

Ferme le Toty à Ciry-Salsogne par la route

2 juillet 1917

Ciry Salsogne à Billy-sur-Aisne

3 juillet 1917

Billy-sur-Aisne (camions-autos jusqu’à Celles) à éperon ouest de Jouy (par moulin Saint-Pierre) où je commande un peloton détaché. Le reste de la compagnie est aux Vervins.

La nuit, ouverture de boyaux, installation d’un P.C., changement d’orientation de nos abris, pris à l’ennemi, pose de réseaux barbelés, le tout sous un bombardement intermittent. La position, sorte de sablière, sous les vues directes de l’adversaire, est canonnée jour et nuit, avec redoublement dès qu’un homme paraît sur le bled pour l’observation ou pour la communication des ordres. Le ravitaillement n’est possible que la nuit.

8 juillet 1917

Éperon ouest de Jouy à la ferme le Toty

149e_R

Ce secteur est, parmi ceux que j’ai vu, l’un des plus durs, des plus fatigants, des plus dangereux. La compagnie a la garde de plusieurs centaines de mètres d’une tranchée de 1ère ligne (tranchée Bossue). Trois sections l’occupent, la 4e est en réserve autour de la grotte, servant de P.C. à la compagnie. Cette tranchée traverse :

 1. dans son tiers gauche : des marais boisés où la circulation est des plus pénibles. Deux petits postes avancés s’en détachent, occupés la nuit seulement.

2. dans son centre : un terrain plat et dénudé où la tranchée est taillée dans le roc dur à une profondeur insuffisante qui oblige à parcourir, à 160 mètres de l’ennemi, des zones où l’on n’est protégé que jusqu’aux genoux ou jusqu’à mi-corps. Rien ne sert de s’y baisser.

3 .dans son tiers de droite (celui dévolu à ma section) : deux routes et un ravin encaissé et boisé qui sont sous le feu continu et nourri de l’artillerie. Certains tronçons en sont si bouleversés qu’on renonce à les entretenir. 

L’officier de « quart », une nuit sur deux (toutes les nuits quand son collègue est absent), a la garde de toute la tranchée et des petits postes. Il est secondé par l’adjudant ou l’aspirant, à tour de rôle. Il doit être en permanence dans ce parcours total depuis avant le coucher du soleil jusqu’après son lever. Un unique boyau étroit, profond d’un mètre, pris d’enfilade, conduit à la partie centrale d’où l’on rayonne à droite et à gauche.

Les tranchées adverses sont admirablement régulières, « confortables » et entièrement en ciment armé.

9 juillet 1917

Le sud du bois du Toty, situé entre les lignes, fait face à notre tranchée, à environ 60 mètres ; sa bordure lui fait angle droit. Chaque soir, on entreprend de renforcer ou de réparer le réseau que les obus ont abîmé. Cette nuit, en dirigeant ce travail, devant la lisière sud du bois, j’ai cru y percevoir un bruit. Nanti de deux grenades, le révolver en main, je me glisse sous le réseau et je m’approche en rampant. Une section de gauche, non avertie de notre travail, lance une fusée-parachute qui me met en pleine lumière durant une minute. Aussitôt, un bruit de branche me révèle que j’ai été vu. La fusée éteinte, je regagne le réseau à reculons, toujours sur le ventre.

Je fais en hâte un rapport demandant quelques coups de 75. Mon commandant de compagnie le transmet avec la mention : « ce renseignement n’a pas été contrôlé » et il reste sans effets.

Dans la journée, mes guetteurs d’extrême droite et le commandant de compagnie, en tournée à ce poste, tirent à trois reprises sur un groupe de trois hommes qui s’aventurent pour observer, hors de la lisière est. Sachant, par les photographies aériennes, que la corne nord-est est traversée par la tranchée du Blocus, on peut conclure que de ce point partent des patrouilles qui viennent, la nuit, surveiller nos travaux.

Cette supposition est renforcée par un court tir de tourterelles et de 88, chaque soir, sur la lisière sud, ayant pour but certain d’en chasser préalablement nos guetteurs éventuels.

Après reconnaissances d’un cheminement par un volontaire, je fais appel à trois autres. Au petit jour, nous allons, à cinq, explorer les abords des sous-bois. Nous y découvrons, moulées par la station prolongée du corps dans le gazon, des niches dont trois, côte à côte, viennent d’être vidées si fraîchement que la rosée n’en a pas encore humecté l’herbe aplatie. De plus, des foulées récentes indiquent le parcours des occupants.

Je fais un nouveau rapport demandant l’autorisation de tendre une embuscade dont je donne le plan.

13 juillet 1917

Comme usage, pour éviter une méprise et suspendre l’emploi des fusées, la consigne est passée aux compagnies voisines, avec les heures de départ et de rentrée probable de notre patrouille.

Dès la nuit venue, nous sortons, l’un après l’autre, de la tranchée, anxieux d’arriver avant eux. Nous cernons les niches et, parfaitement dissimulés, l’œil et l’oreille en éveil, le doigt sur la détente du pistolet, nous attendons.

Mais le tir habituel préparatoire, dont les traces nous entourent et que nous n’attendons pas sans appréhension, ne se produit pas.

Les heures passent. Les moustiques, encouragés par notre immobilité, nous piquent copieusement. Les mille bruits nocturnes d’un bois nous donnent de fausses joies. L’obscurité se fait d’un noir d’encre. Le froid est vif, malgré la saison, mais nous sommes décidés à rester là jusqu’au matin s’il le faut.

Minuit… Brusquement, un furieux tir de barrage s’abat derrière nous, sur notre tranchée. Il s’étend à droite, à gauche, sur 2 ou 3 km. Notre artillerie répond. Les premières lignes s’illuminent d’un rideau de fusées. Nous comprenons alors que l’ennemi avait, pour cette nuit, monté une attaque qui se déclenche sur notre droite. Exécutant des barrages d’interdiction sur les secteurs voisins du point attaqué, il n’y avait naturellement pas envoyé ses patrouilleurs.

Ignorant, à cet instant, si ce n’est pas notre propre position qui va être attaquée, mon devoir est d’y rentrer au plus tôt, coûte que coûte. Ce que nous parvenons à faire.

Au procès-verbal, je joins une demande de récompenses pour mes quatre braves (Poirot, Viant, Lechat et Deleval), qui, en somme, se sont exposés, deux fois, à tous les risques que comporte ce genre d’expéditions.

La présence de l’ennemi dans le bois de Toty (ou du blocus) étant restée, jusque-là, un point à élucider, la division déclare utiles les renseignements rapportés.

En transmettant mes propositions de citation à l’ordre du régiment et en les approuvant, le capitaine adjudant-major Houel, commandant le bataillon en l’absence du commandant, établit pour moi une demande de citation à l’ordre de la division.

Le nouveau colonel (Boigues) qui, peu de jours avant, a octroyé cette distinction à un collègue ayant occupé sans accident un P.C. soumis à un tir d’obus toxiques, reçoit ces propositions le 19, jour de sa rentrée de permission où il est de méchante humeur.

Il les rejette avec emportement : « Si une patrouille est nécessaire, on la commande !, s’il s’offre des volontaires, ils ne font que leur devoir. Si personne n’accepte, on fait fusiller ! » Et il fait insérer au rapport la note ci-dessous :

Colonel à chefs de bataillon et commandants de compagnie.

« Le colonel partage l’admiration des chefs de bataillon et des commandants de compagnie pour tous les braves sous les ordres et est prêt à accueillir en leur faveur toutes les propositions de récompenses dont ils seront l’objet.

Mais la croix de guerre, pour ne pas perdre son prix aux yeux de nos soldats, ne doit être décernée que pour un fait en valant la peine, ayant entraîné un acte d’initiative, de courage ou de dévouement, en un mot, un mérite militaire actif.

C’est ainsi que le chef de corps n’a pas jugé utile d’attribuer cet insigne à des militaires ayant fait des patrouilles volontaires sans rencontrer l’ennemi ou ayant tenu leur poste sous des bombardements journaliers, etc…  Aux armées, le 19 juillet 1917, colonel Boigues ».

Décidément, mes propositions à l’ordre de la division n’ont pas de chance !

14 juillet 1917

Ferme le Toty à Billy-sur-Aisne. Itinéraire : Piste de la D.I. jusqu’au moulin de Couvailles, Celles, Condé-sur-Aisne, Missy-sur-Aisne, rivage de l’Aisne, moulin des Roches, route de Soissons, Billy-sur-Aisne.

De_la_ferme_le_Toty___Billy_sur_Aisne_14_juillet_1917

Legende_carte_149e_R

Mon logement est dans une épicerie avec Berteville. Les hommes sont chez l’habitant.

Je n’ai jamais vu tant de lampyres et de lucioles que dans les bois derrière nos lignes. La piste de la D.I. semble drôlement jalonnée à dessein par des postes de ces petites bestioles.

17 juillet 1917

Sixième permission de sept jours à Calais. Départ en voiture de compagnie de Billy-sur-Aisne à Saint-Christophe (train passé) et à Berzy-le-Sec.

29 juillet 1917

Billy-sur-Aisne à P.C. Cahors (Ouest de Jouy : bois du Coteau).2e ligne

1er août 1917

P.C. Cahors à Billy-sur-Aisne (rivage de l’Aisne de Condé-sur-Aisne à Venizel)

La chambre que j’occupais dans une épicerie, avec Berteville, lors de notre premier cantonnement à Billy, est occupée par un officier du premier bataillon qui s’est dit malade au moment de partir en secteur. Je vais loger avec le lieutenant Claudin. Les sections sont dans des baraques Adrian.

7 août 1917

Billy-sur-Aisne aux Vervins (2e ligne) par le même itinéraire que le précédent.

15 août 1917

Sources :

Fonds Douchez composé de 3 volumes. Déposé au S.H.D. de Vincennes en 1983. Réf : 1 K 338.

Le morceau de carte qui accompagne le texte du sous-lieutenant Douchez provient du J.M.O. du 3e B.C.P. Réf : 26 N 816/4.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

 

22 juin 2018

23 octobre 1917… Rapport du colonel Boigues, responsable du 149e R.I..

Colonel_Boigues

Après les combats de la journée, le colonel Boigues rédige un rapport à son supérieur direct, le colonel Guy, responsable de l’I.D. 43 depuis son P.C. dénommé P.C. le Galloudec.

En quelques lignes, il donne la position exacte de ses compagnies en dessinant un croquis, évalue la situation, évoque certains faits d’armes de son régiment et, pour finir, analyse la liaison et les nouveaux matériels utilisés.

Le colonel Boigues commandant le 149e R.I. à monsieur le colonel commandant l’I.D. 43

« Je vous adresse, ci inclus,un calque résumant la disposition prise par le 149e R.I. au point de vue de l’occupation du terrain conquis.

Je ne modifie rien aux dispositions prises, qui répondent d’ailleurs avec des variantes sans grande importance, à ce que j’avais prescrit dans l’ordre d’engagement.

La position des Vallons était dangereuse par suite de nos barrages. C’est l’unique objet d’un petit recul qu’a effectué le commandant de bataillon par mesure de sécurité.

Tout me paraît bien établi, le moral reste très élevé malgré les pertes sensibles (16 officiers). La résolution de garder notre conquête est ancrée dans l’esprit de chacun.

Mon P.C. est à 2842 dans des conditions acceptables. Il me permet, par sa proximité de la route de Maubeuge d’être à pied d’œuvre des ravitaillements et à portée immédiate de mon bataillon de 3e ligne.

Position_approximative_du_149e_R

Legende_carte_rapport_colonel_Boigues

L’action s’est somme toute déroulée dans des conditions excellentes. Le régiment a obtenu tous les succès qu’il pouvait espérer ; des actions se sont déroulées, très vives et meurtrières, mais dominées très rapidement par suite de l’élan général. Tous les bataillons se sont également distingués. À l’heure présente, nous pouvons donner des chiffres exacts. Je connais au moins quatre pièces prises, deux de 105 et deux obusiers de 150. De nombreuses mitrailleuses, un matériel très important, surtout à l’est.

Les prisonniers que nous avons faits ne sont pas tous passés par mon P.C.. En raison des marmitages, ils ont dû, en grande partie, filer par les pentes du ravin du blocus.

J’en ai néanmoins compté 570 dont 17 officiers. Je suis certain qu’il faudrait exagérer ce chiffre dans une très large proportion pour rendre au 149e R.I. sa part légitime.

Le ravitaillement a très bien marché jusqu’au premier objectif et a été assuré dans de très bonnes conditions par la 7e compagnie du 409e R.I..

Une seule ombre au tableau : les liaisons qui ont été cependant très poussées comme instruction ont fait faillite, sauf pour les coureurs. La T.P.S. n’a rien donné, le téléphone rien non plus. S’il faut considérer le second procédé comme aléatoire, on peut dire que la T.P.S. donnera ce qu’on voudra avec d’autres méthodes moins rigides. Les pigeons et les chiens ont été détruits.

Quant aux engins spéciaux, les Stokes sont sur place et servirent dans les barrages, j’en suis certain. Les tanks ont beaucoup servi à nos voisins de gauche et aussi un peu à nous, sur la lisière de Belle Croix. C’est un instrument qu’il faut savoir manier. »

Sources :

Les archives du Service Historique de la Défense de Vincennes ont été consultées.

La carte dessinée qui peut se voir ici a été faite à partir de la superposition du croquis qui accompagne le rapport du colonel Boigues, sur un fond de carte réalisé à partir du groupe des canevas de tir « Vailly » datant du 26 août 1917. Les limites du 149e R.I. sont celles qui ont été données sur la 2e carte qui peut se consulter dans l’article intitulé « Exécution de la bataille de la Malmaison… 2e objectif. », texte qui peut être lu en cliquant une fois sur le dessin suivant.

Attaque_du_149e_R

En comparant les deux réalisations, nous pouvons aisément remarquer que les positions données pour les compagnies du 149e R.I. sur les deux cartes sont assez semblables. Elles ont tout de même plusieurs différences de détails. À la superposition, le calque qui accompagne le rapport du colonel Boigues ne correspond pas tout à fait aux informations qui ont été recueillies pour la construction des autres cartes.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

15 juin 2018

Fernand Camille Aubry (1896-1917).

Fernand_Camille_Aubry

Originaire du département des Vosges, Fernand Camille Aubry voit le jour le 5 novembre 1896 dans la petite commune de Chavelot.

Ses parents se sont mariés à Bayecourt en 1892. Son père, Alcide Lucien, 33 ans, travaille comme manœuvre. Sa mère, Marie Adeline Houot, ancienne ouvrière âgée de 28 ans, n’exerce plus d'activité professionnelle depuis qu'elle a épousé Alcide. Elle élève déjà un garçon.

Les oncles de Fernand, Augustin et Félicien accompagnent leur frère Alcide à la mairie du village pour y signer l’acte d’état civil.

Fernand est embauché à la blanchisserie et teinturerie de Thaon-les-Vosges,après avoir appris à lire, écrire et compter à l’école communale. L’adolescent rejoint ainsi son père et son frère aîné déjà employés dans cette entreprise. 

 Une courte note biographique accompagne son portrait dans le livre d’or de l’établissement. Elle nous indique qu’il a été ouvrier durant 4 ans et cinq mois. 

Les parents et les deux frères vivent toujours sous le même toit en 1911. La famille Aubry reste implantée à Chavelot jusqu'au déclenchement de la Première Guerre mondiale. 

Fernand Camille Aubry fait toujours partie des membres du personnel de la Blanchisserie et Tannerie de Thaon-les-Vosges lorsque le tocsin de la petite église du village annonce l’heure de la mobilisation générale, au début du mois août 1914. Futur soldat de la classe 1916, cet évènement ne l’implique pas directement. Peut-être même qu'il se dit que la guerre sera probablement terminée avant même qu’il ne soit mobilisable. Il ne sait pas encore que le conflit va s’inscrire dans la durée…

Le 16 juin 1915, son frère est tué en Artois.

La fiche matricule de Fernand Camille Aubry nous fait savoir qu’il a été inscrit sous le numéro 11 du canton de Chatel. Son nom  a été enregistré dans la 1ère partie de la liste en 1915, ce qui veut dire qu’il a été déclaré « bon pour le service » par les médecins du conseil de révision.

La classe 1916 aurait dû être théoriquement appelée en octobre 1916. Elle rejoint les casernes aux alentours du mois d’avril 1915.

Fernand Camille Aubry doit se rendre au dépôt du 149e R.I. à Épinal. Il est formé comme clairon, probablement à l’école des clairons et des tambours de la préfecture vosgienne.

En l’état des connaissances, il  est impossible de connaître la date exacte de son arrivée au régiment et encore moins celle à laquelle il a rejoint la zone des armées.

L’absence totale d’informations sur son parcours militaire de sa fiche signalétique et des services ne permet pas d’en dire davantage, ce qui laisse un vide magistral pour tenter d'étoffer sa biographie.

Tout ce que nous savons de manière sûre c’est qu’il servait à la 3e compagnie du 149e R.I. lorsqu’il a trouvé la mort le 23 octobre 1917.

C’est au cours de la première phase de la bataille de la Malmaison que ce soldat a été tué, touché à la tête par plusieurs éclats d’obus.

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

1er_objectif_secteur_d_attaque_du_149e_R

Fernand Aubry est enterré dans un premier temps par les soins des brancardiers de la 43e D.I. dans le cimetière militaire de Billy-sur-Aisne, dans une tombe numérotée 258.

Le soldat Paul Leval et le clairon Camille Bolot témoignent de son décès. Le lieutenant Auguste Fourneret, l’officier d’état civil du régiment, valide administrativement la mort de cet homme. L’acte est transcrit à la mairie de Chavelot le 8 mars 1918.

Le clairon Aubry repose actuellement dans la nécropole nationale de Vauxbuin. Sa sépulture, située dans le carré D, porte le numéro 959.

Sepulture_Fernand_Camille_Aubry

Le nom de cet homme et celui de son frère sont gravés sur le monument aux morts de la commune de Chavelot.

Les_freres_Aubry

Tout comme son frère, Fernand ne s’est pas marié. Alcide et Marie Adeline ne sont jamais devenus grands-parents.

La généalogie de la famille Aubry peut se consulter en cliquant une fois sur l’image suivante.

Geneanet

Sources :

Le portrait de Fernand Camille Aubry est extrait du livre d’or des membres du personnel de la blanchisserie et teinturerie de Thaon, morts pour la France au cours de la guerre 1914-1918.

Le cliché de la sépulture du soldat Aubry a été réalisée par J. Baptiste.

La photographie du monument aux morts de la commune de Chavelot a été trouvée sur le site « monuments aux morts France-Belgique ».

Les registres de recensement des années 1896, 1901, 1906 et 1911 de la commune de Chavelot et la fiche signalétique et des services de du clairon Aubry ont été lus sur le site des archives départementales des Vosges.

Les sites « Mémoire des hommes » et « Généanet » ont également été consultés pour construire cette courte notice biographique.

Un grand merci à M. Bordes, à J. Baptiste, à A. Carrobi, à la mairie de Chavelot,  au Service Historique de la Défense de Vincennes et aux archives départementales des Vosges. 

8 juin 2018

Stanislas François Marie Galloudec (1875-1917)

Stanislas_Fran_ois_Marie_Galloudec

 

Stanislas François Marie Galloudec est né le 13 février 1875, dans la petite commune bretonne de Lanrivain située dans le département des Côtes-d’Armor anciennement appelé Côte-du-Nord.

 

Stanislas est le fils de Guillaume et de Marie Anne Le Pennec. Son père est propriétaire de ses terres qu’il exploite en tant que cultivateur. Sa mère Marie Anne travaille comme ménagère. Stanislas est le second d’une fratrie de sept enfants.

 

Après avoir fait le « petit séminaire », il commence ses études de prêtre. Le jeune Galloudec contracte ensuite un engagement volontaire de trois ans avec libération possible au bout d’un an.

 

Le 24 octobre 1894, il revêt l’uniforme de fantassin à la caserne de la Tour d’Auvergne de Guingamp. Il interrompt son contrat un an plus tard, en toute légalité. Stanislas est envoyé en congé en attendant son passage dans la réserve avec l’obtention de son certificat de bonne conduite. L’ancien soldat est inscrit dans les effectifs de la réserve de la 10e section d’infirmiers militaires de Rennes.

 

Stanislas Galloudec poursuit sa formation de séminariste, avant d’accomplir une 1ère période d’exercice à la 10e section d’infirmiers du 24 août au 20 septembre 1896.

 

Après ses études, il renonce à sa dispense afin de terminer ses années de service. Nous sommes le 16 octobre 1897. Cette fois-ci, c’est au 41e R.I. de Rennes qu’il va poursuivre sa formation militaire.

 

Le 28 avril 1899, il est nommé caporal. Le 20 septembre 1899, il est, une nouvelle fois, envoyé en congé en attendant son passage dans la réserve de l’armée d’active avec un second certificat de bonne conduite accordé.

 

En octobre 1899, Stanislas Galloudec vit à Hennebont. Les pères eudistes y possèdent un lieu de formation pour leurs prêtres.

 

Il fait sa seconde période d’exercices au 62e R.I. de Lorient du 27 août au 23 septembre 1900. 

 

Deux mois plus tard, il quitte sa Bretagne natale pour aller enseigner à Saint-Jean de Béthune, un établissement catholique versaillais. De retour au pays en septembre 1901. Stanislas s’installe au séminaire de la Roche du Theil à Bain-sur-Oust. Il enseigne ensuite au collège Saint-Martin de Rennes.

 

En février 1904, il est de retour à Versailles pour reprendre ses anciennes fonctions de formateur. Stanislas Galloudec reste résident en Bretagne, ce qui explique son rattachement au 73e R.I.T. de Guingamp à partir du 1er octobre 1907, au moment de son passage dans l'armée territoriale.

 

Il finit par faire modifier sa domiciliation. Le 5 octobre 1912, Stanislas Galloudec est intégré à la subdivision de Versailles, inscrit à la liste matricule avec le n° 924.

 

Lorsque le conflit contre l’Allemagne débute, il est rappelé à l’activité par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914. Le caporal aumônier Galloudec arrive au corps 5 jours plus tard, affecté au 17e R.I.T., au profit de la 24e section d’infirmiers du 21e C.A..

 

En février 1915, il exerce son ministère à l’ambulance 3/21 placée à Sains-en-Goyelle. Stanislas Galloudec porte une assistance religieuse aux blessés et donne l'extrême-onction aux mourants. Il fait une demande pour passer au 149e R.I..

 

Début septembre 1916, ce régiment participe à la bataille de la Somme pour tenter de reprendre aux Allemands le village de Soyécourt. L’opération est une réussite totale. L’aumônier Galloudec y gagne sa première citation à l’ordre de l’armée.

 

Le général Baucheron de Boissoudy épingle cette décoration sur sa soutane à Beauvais en octobre 1916.

 

Beauvais_octobre_1916

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés durant cette période, il suffit de cliquer une fois sur l’image suivante.

 

Secteur_du_149e_R

 

Le 149e R.I. occupe ensuite plusieurs secteurs à proximité du chemin des Dames. Pendant plus de dix mois, il ne sera jamais sollicité pour mener à terme une grande offensive et encore moins attaqué par les Allemands. Ce n’est que le 23 octobre que ses bataillons seront amenés à participer à la bataille de la Malmaison.

 

L’aumônier Galloudec trouve la mort au cours cette offensive, tué par plusieurs éclats d’obus.

 

Pour en savoir plus sur les évènements qui se sont déroulés au cours de cette journée, il suffit de cliquer une fois sur la carte suivante.

 

 

L’adjudant-chef Théodore Dubois et le caporal Adrien Claudel confirment le décès de l’aumônier Galloudec. Il est enterré dans un premier temps dans le petit cimetière militaire de Condé-sur-Aisne dans une tombe qui porte le numéro 274.

 

Il repose actuellement dans le carré C de la Nécropole Nationale Française de Vauxbuin dans une sépulture individuelle numérotée 344.

 

 

Le nom de cet homme est inscrit sur la plaque commémorative de l’école Saint-Jean de Béthume et sur le mémorial breton 1914-1918 de Sainte-Anne-d’Auray

 

Stanislas Galloudec a obtenu les citations suivantes :

 

Citation à l’ordre de l’armée du 29 septembre 1916 (J.O. du 27 février 1917) :

 

« A l’attaque du 4 septembre 1916, est parti avec les premiers éléments d’assaut, malgré la fusillade et le bombardement, pour donner les secours nécessaires aux mourants et aux blessés, et s’est porté ainsi jusqu’aux lignes les plus avancées avec un courage et un dévouement au-dessus de tout éloge. »

 

Citation à l’ordre de l’armée du 11 décembre 1917 (J.O. du 17 janvier 1918) :

 

« Aumônier titulaire d’un héroïsme légendaire au régiment. S’est bravement porté avec les vagues d’assaut, se dépensant sans compter auprès des blessés et des mourants. A été tué à 15 mètres d’un fortin ennemi, dans l’exercice de ses fonctions auprès d’un officier grièvement blessé. Déjà cité à l’ordre de l’armée. »

 

Il n'a pas été possible d'identifier de manière formelle le nom de l'officier aux côtés duquel il se trouvait lorsqu'il fut touché. Cependant, quelques lignes extraites du témoignage consacré à la bataille de la Malmaison laissé par Albert Marquand, dans le livre « Et le temps, à nous, est compté » permettent d’en savoir un peu plus. Voici ce qu’il écrit : « … Morand me rend compte de l’odyssée de la compagnie depuis mon départ, à la route de Maubeuge. Tout a bien marché jusqu’au bois. Les vides étaient peu nombreux. La marche en avant dans les fourrés, s’effectuait régulièrement lorsque nos 155 ont brusquement raccourci leurs tirs, malgré les fusées à six feux. Et l’inévitable catastrophe est arrivée… Les deux lieutenants, l’aumônier divisionnaire, Ferruit, le caporal fourrier Roux y ont laissé la vie… »

 

Les 2 officiers de la 10e compagnie  tués à ce moment-là sont le lieutenant Monnoury et le sous-lieutenant Dupuy-Gardel.

 

Les différents textes des citations à l’ordre de l’armée que ces trois hommes ont obtenu à titre posthume évoquent tous les trois un fortin. Il est donc impossible de départager entre l’un ou l’autre des deux officiers.

 

Il est fait chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume le 27 avril 1920 (J.O. du 22 juin 1920).

 

La généalogie de la famille Galloudec peut se consulter en cliquant une fois sur l’image suivante.

 

Geneanet

 

Sources :

 

La fiche signalétique et des services de Stanislas Galloudec a été consultée sur le site des archives départementales des Côtes-d'Armor.

 

« La preuve du sang, livre d’or du clergé et des congrégations, 1914-1922 » paru aux Éditions de la Bonne Presse en 1925.

 

Acte de décès de Stanislas Galloudec, copie envoyée par la mairie de Versailles.

 

La photographie de la sépulture de l’aumônier Galloudec a été réalisée par  J. Baptiste.

 

Le cliché représentant Stanislas Galloudec sur le montage et celle de la remise de décorations proviennent de ma collection personnelle.

 

Un grand merci à M. Bordes, à C. Coton, à S. Agosto, à A. Carobbi, à J.Baptiste, à J. Huret, aux archives départementales des Côtes d’Armor et à la mairie de Versailles. 

1 juin 2018

Témoignage laissé par le sous-lieutenant Paul Douchez. (3e partie) En 1ère ligne du côté de la ferme le Toty.

Sabliere_du_bois_Marcon

Le sous-lieutenant Douchez est arrivé à proximité de la 1ère ligne le 1er juin 1917, après plusieurs jours de marche. Sa section, qui fait partie des effectifs de la 9e compagnie, est installée à la grande sablière située au sud des villages d’Aizy et de Jouy, près du chemin des Dames.

Replongeons-nous dans les écrits de Paul Douchez…

2 juin 1917 

« Grande sablière à Aizy, les Grands Riez et retour. Conduite d’une corvée de travailleurs. Le génie, qui doit diriger le travail, n’ayant pas eu le courage ou l’intelligence de me fournir le guide prescrit, les hommes passent la nuit à faire la marche de l’aller et du retour et à attendre. Aucun travail n’est fait.

Les_Grands_Riez__les_sabli_res_et_la_ferme_Hameret

De la grande sablière vient l’obus intact que j’ai rapporté à Jeanne.

Des dépôts considérables de munitions allemandes achèvent de s’y détériorer : obus de divers calibres, grenades, gargousses, douilles de cuivre, etc… nul ne voulant prendre l’initiative de provoquer leur enlèvement.

4 juin 1917

Grande sablière à parages de la ferme Toty (1ère ligne) par Jouy.

De_la_grande_sabli_re___la_ferme_le_Toty

C’est ici que se trouve la limite de la progression réalisée par la récente offensive. Le régiment a pour mission de stabiliser cette limite par le creusement de tranchées.

Je couche au P.C. de la compagnie. C’est une simple excavation dans le sable, à flanc de coteau. Nos équipements y prennent la moisissure. Par contre, dehors, la chaleur est torride. Le moindre déplacement met en transpiration.

Ma section est au bas de la côte, vers la ferme du Toty, dans des « trous de renards ». Le P.C. de la compagnie se trouve à côté de celui du bataillon.

Nous avons un nouveau chef de bataillon, le commandant Dessanti. Là, je vois, pour la première fois, tomber tout près un avion en flamme.

7 juin 1917 

Au milieu de la nuit, une contre-attaque ennemie paraît imminente (communiqué du 6 et 7 juin 1917). Je me porte, avec ma section, dans une tranchée que nous avons creusée les deux nuits précédentes et qui défend l’accès du ravin du Toty. Là, je reçois l’ordre ci-dessous, m’enjoignant de ne garder avec moi qu’une demi-section et d’envoyer l’autre en soutien. Grâce aux prélèvements, absents, évacués, etc…, cette demi-section, qui a pour mission d’enrayer derrière moi, une première progression éventuelle de l’ennemi est composée d’un sergent et de 2 hommes. La tranchée dont elle a la garde est de plus de 100 m !!!

Ravin_ouest_Toty_1ere_ligne

Ordre de mission rédigé par le lieutenant Claudin le 7 juin 1917 :

Note pour le sous-lieutenant Douchez

1) Vous devez occuper rapidement et défensivement avec une ½ section, la tranchée faite hier. Avec l’autre section, l’emplacement de renfort de la  10e compagnie.

2) Vous devez résister éventuellement sur ces emplacements. Il faut se renseigner sur ce qui se passe dans la région de la ferme du Toty. Se ménager 2 coureurs capables de rendre compte au P.C. très rapidement.

3) Vous recevrez 12 V.B. et 12 O.F.

4) Rendre compte dès que vous serez en place.

Je me conforme à cet ordre et me rends compte de la situation pour toute la défense ; je reçois 12 grenades V.B. et 12 grenades O.F. !!! Notre ravin est effroyablement arrosé par de gros obus. Je me félicite d’avoir, en raison de son importance, soigné tout particulièrement l’exécution de cette tranchée, dont le tracé m’a été confié, et d’avoir exigé une bonne profondeur et une largeur suffisante. Ces précautions me valent de n’avoir aucune perte, bien que des 150 soient tombés à moins de 5 mètres du parapet. Cet ouvrage est en lisière d’un couvert d’arbres et le tir nous prend à revers. Ma seule crainte est que des projectiles, heurtant un arbre, en cours de trajectoire, éclatent au-dessus de nous.

8 juin 1917 

Alerte similaire

Ordre de mission 149e R.I. à la 9e compagnie.

Du lieutenant commandant la compagnie au sous-lieutenant Douchez.

« Prendre dispositions pour éventuellement résister sur la ligne que nous avons jalonnée, avec le concours des mitrailleuses de manière à assurer le cas échéant le repli de la 10e compagnie et empêcher le débouché de l’ennemi de la ferme du Toty et des Vallons, à droite et à gauche. Signé Claudin »

10 juin 1917 

Après la relève, je reste une nuit près du bataillon comme officier de renseignement.

Le Toty à Ciry-Salsogne (route) par Jouy, Aisy, (Vailly à Condé-sur-Aisne en auto d’ambulance) avec mon ordonnance.

16 juin 1917 

P

Ciry-Salsogne aux Vervins (2e ligne) par la route. Le P.C. de la compagnie et la liaison sont installés au sommet du coteau, près de la route vers la ferme Hameret. Le mien, au fond du ravin, est fait de branchages, couvert d’une tôle ondulée, que je charge d’une épaisseur de sacs et adossé à un petit remblai. Une toile de tente constitue le mur de face. Pour couchette nous posons des feuilles fraîches sur le sol.

La position est un ravin de 50 mètres, découvert, encaissé entre deux coteaux parallèles boisés, à pentes très raides. Sur l’un sont échelonnés les P.C. des compagnies et des abris de section. Au pied, les huttes de ma section et la mienne. Sur le coteau, en vis-à-vis, il y a des batteries dissimulées attirant un bombardement fréquent par 150 et 210. La consigne est, en ce cas, de remonter vers les P.C. où un angle mort donne une protection relative.

Je suis descendu m’assurer que tout le monde avait quitté les huttes. Je retrouve la mienne encadrée à 3, 5 et 12 mètres par 3 entonnoirs. Des éclats ont traversé mon réduit, coupé des branches, troué l’équipement de Magnien, mon ordonnance. J’y reste ½ heure en assez mauvaise posture. Le tir ne cesse pas. Je risque avec bonheur la montée à découvert d’une centaine de mètres… »

Sources :

Fonds Douchez composé de 3 volumes. Déposé au S.H.D. de Vincennes en 1983. Réf : 1 K 338.

Un grand merci à M. Bordes, à A. Carobbi, à M. Porcher et au Service Historique de la Défense de Vincennes.

149e R.I., un régiment spinalien dans la Grande Guerre.
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